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WELSCHINGER Lucienne

Résistante, (C) (★ Belfort 18.10.1911 † Brumath 23.1.2001). Fille de Charles Welschinger, cafetier, et d’Eugénie Irma Augustine Vernelle. L’aventure de la Résistance commença dès le mois d’août 1940, dans les premières semaines de l’annexion de fait, par des contacts avec les prisonniers de guerre en transit à Strasbourg, pour acheminer le courrier à leurs familles. Le groupe de Lucienne Welschinger, avec quatre autres cheftaines des Guides de France: Marie-Laure et Alice Daul, Emmy Weisheimer et Lucie Welcker, intitulé « Pur sang », se rendit aux casernes et fortifications pour ramener les lettres jetées par les prisonniers. Une nouvelle étape fut franchie le 12 septembre 1940, jour de l’incendie criminel de la synagogue située près du restaurant tenu par le frère de Lucienne Welschinger, avec la prise en charge de deux prisonniers polonais, dont un israélite, réfugiés dans un confessionnal de l’église Saint-Jean. Lucienne Welschinger les cacha dans la mansarde du restaurant avant d’organiser leur évasion par le Donon. Après avoir assuré de nombreuses évasions, cette première filière fut découverte par le courrier d’un prisonnier évadé, ce qui valut à Lucienne Welschinger un premier interrogatoire et l’incita à chercher d’autres passages avec son groupe qui s’était renforcé et était devenu le réseau « France 99 ». Ce fut, en grande partie, par le Tanet que plus de 400 prisonniers de guerre français et alliés et de jeunes Alsaciens échappant au RAD (Service de travail obligatoire) réussirent leur évasion malgré les rigueurs de l’hiver 1941-1942. L’arrestation d’un membre du réseau en possession de renseignements concernant la filière et de Lucienne Welschinger, et d’un bûcheron-passeur avec le courrier de prisonniers, le 12 mars 1942, entraîna l’arrestation des membres du groupe. Peu avant ce coup fatal, Lucienne Welschinger avait réussi à se rendre par Clermont-Ferrand à Vichy où, par l’entremise du chanoine Eugène Muller ©, sénateur du Bas-Rhin, elle put remettre au chef du cabinet militaire de Pétain un rapport sur la situation en Alsace. Mise au secret pendant six mois à la prison de Kehl, elle fut condamnée à mort le 27 janvier 1943, avec quatre autres membres du réseau ; six autres se virent infliger par le Volksgerichtshof (Tribunal du peuple), présidé par Roland Freisler, de 6 à 15 ans de travaux forcés, dont le frère de Lucienne Welschinger, André. Le compte-rendu du procès, publié en première page des Strassburger Neueste Nachrichten sous le titre « Schonungslose Ausrottung des Verrats im Elsass » (Impitoyable éradication de la trahison en Alsace), souligne que « Lucienne Welschinger était à l’origine d’un plan d’évasion, particulièrement raffiné, de prisonniers de guerre et d’Alsaciens mobilisables ». Ayant appris le verdict, début février, le sénateur Muller alerta le cabinet de Pétain, qui intervint auprès des autorités allemandes, en faisant valoir que « les Français condamnés n’ont fait qu’aider d’autres Français à regagner leur pays et que l’accusation d’aide à l’ennemi était sans fondement ». L’exécution des peines capitale fut suspendue. Après 261 jours d’attente à la prison de Stuttgart, Lucienne Welschinger fut libérée par les troupes françaises. À son retour en Alsace, elle
s’installa discrètement, comme libraire à Strasbourg tout en poursuivant son engagement dans le scoutisme en tant que commissaire régionale des Guides de France. En 1977, elle se retira à Brumath. Chevalier de la Légion d’honneur (1946), puis officier (1999) ; croix de Guerre avec palmes ; médaille de la Résistance.

Strasburger Neueste Nachrichten du 29.1.1943 ; J.-M. Bopp, L’Alsace sous l’occupation allemande 1940-1944, p. 279 ; Ch. Béné, L’Alsace sous les griffes nazies, t. l, p. 145-150 ; E. Mey, Le drame de l’Alsace, p. 116-123 ; L. Kettenacker, « La politique de nazification en Alsace », Saisons d’Alsace, n° 65, p. 128, n° 68, p. 121 ; Histoire de Strasbourg des origines à nos jours, sous la dir. de G. Livet et F. Rapp, Strasbourg, t. IV, p. 485, 486 et 495 ; A. Irjud, Saisons d’Alsace, n° 121, p. 26 ; Brumath contact, décembre 1994; (A. Gillig-Daul), Les « Pur-sang » 1940-1945 », sl, 1996; Dernières Nouvelles d’Alsace des 26 et 27.1.2001.

Alphonse Irjud (2002)