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WEISS Louise

Journaliste, militante européenne et pour le droit de vote des femmes, (PI) (★ Arras 1893 † Paris 26.5.1983). Fille de Paul Weiss, ingénieur des Mines, issu d’une famille de la Petite-Pierre qui avait opté pour la France après 1870, et de Jeanne Javal, appartenant à une famille juive d’origine sundgauvienne. Études secondaires au lycée Molière à Paris, entrecoupées de séjours dans des collèges allemands, puis études supérieures au collège Sevigné. Agrégée de lettres en 1911, trilingue (français, anglais, allemand), elle choisit de devenir journaliste. Pendant la guerre de 1914-1918, infirmière, elle créa un hôpital militaire, participa au journal Le radical, sous un pseudonyme (Louis Lefranc) et, en 1919, assista à la signature du traité de Versailles (exemplaire au musée de Saverne). Sa rencontre avec un patriote slovaque, Milan Stéfanik, engagé dans l’armée française, mort accidentellement en mai 1919, l’orientera vers la défense de la cause tchèque aux côtés des présidents Masaryk, puis Bénès. Elle fonda un journal L’Europe nouvelle et réalisa pour Le Petit Parisien d’Élie-Joseph Bois un reportage de Cinq semaines à Moscou qui fonda sa réputation de journaliste-reporter. Elle devint la collaboratrice, traductrice interprète d’Aristide Briand lors des différentes négociations qu’il a conduit comme ministre des Affaires étrangères, notamment dans le cadre de la Société des Nations ; après une tournée de conférences aux USA, elle fonda, en 1930, une « école de la paix » pour soutenir l’action de la SDN dont le secrétaire général adjoint fut alors Jean Monnet ©. Son appartement parisien du boulevard Wilson devint un salon littéraire, artistique et politique et son action de mécène sera une constante de sa vie. Le réarmement de l’Allemagne et la montée du nazisme brisèrent son élan et, le 6 février 1934, elle démissionna de la rédaction de L’Europe Nouvelle. C’est seulement à ce moment qu’elle s’engagea dans le combat pour le droit de vote des françaises et en 1936, elle dut essuyer le refus humiliant du gouvernement de Léon Blum de le faire adopter. Dès 1939, elle participa à la création d’un Service auxilaire féminin, à la création d’un Comité des réfugiés, dont elle fut la secrétaire, organisant le sauvetage des 1000 passagers du « Saint-Louis » fuyant les persécutions nazies. Tout naturellement, elle entra dans la Résistance, devint l’agent de liaison du réseau Patriam Recuperare sous le nom de Valentine, rédactrice du journal clandestin de ce réseau, la Nouvelle République dont elle signa les articles sous de faux noms et vécut de cache en cache en envoyant des articles au New York Times sur l’état de la France. Sa bibliothèque fut pillée, ses archives brûlées, dont la correspondance avec Aristide Briand ; elle réussit néanmoins à déjouer les recherches actives de la Gestapo. En 1945, le droit de vote fut accordé aux femmes, mais son sens politique et sa compétence indéniable en matière de politique étrangère et de construction européenne ne furent pas reconnus par les responsables de l’époque ; elle fut toutefois chargée d’un rapport sur les crimes de guerre commis par les nazis dans les Ardennes qui sera présenté au Tribunal de Nuremberg. Elle s’engagea dans une série de voyages dont elle rapportera de nombreux films et reportages ; entre autre, elle découvrit la communauté des Fallachas, juifs d’Éthiopie. Elle poursuivit son combat pour l’unité européenne et la paix en créant, avec Gaston Bouthoul, l’Institut de Polémologie.

Élue en 1979 au Parlement européen, elle y prononça le discours inaugural à titre de doyenne d’âge. Après une donation au musée d’Arras, elle choisit la ville de Saverne comme légataire universelle et y fit une donation de ses collections qui est à l’origine du Musée Louise Weiss. La Fondation Louise Weiss, créée en 1971, a pour mission de poursuivre son combat pour la paix et le rapprochement des peuples, à commencer par ceux de l’Europe.

Historiens-Géographes n° 340, 1993, p. 37 et s.

Françoise Crouzet (2002)