Marchands strasbourgeois de la deuxième moitié du XVIe siècle (PI) qui mériteraient une étude approfondie vu leur rôle politique et surtout économique. Leur origine familiale est incertaine. Selon les notes généalogiques d’E. Luck © (Archives du Chapitre de Saint-Thomas, déposées aux Archives municipales de Strasbourg 176, f° 182), les Weicker viendraient de Brumath (voir aussi Lehr, L’Alsace noble, 1870, III, p. 470) et seraient en parenté avec les Gambs, ce qui expliquerait le surnom Hansmann (ou Gensmann d’après une autre source), donné au père de l’Ammeister Weicker En revanche, selon un acte de la Chambre des contrats (Archives municipales de Strasbourg, KS 461 f° 129 r°-136 v°) du 22 juin 1542, les frères Isaac et Mathias sont en réalité fils d’Anton Weicker († fin mai 1541), regrattier de Barr, et d’Odilia Knaebel. Selon le même acte, ils avaient encore deux sœurs, Odilia, épouse de l’imprimeur Craft Muller ©, et Catharina, épouse du marchand Jacob Behem. Anton Weicker avait épousé dans un mariage antérieur Margaretha (Archives municipales de Strasbourg, KS 461 f° 129-136), fille de Martin Herlin ©, plusieurs fois Ammeister entre 1522 et 1546. Cette origine barroise est encore confirmée par une note figurant dans les procès-verbaux de la corporation de la Mauresse, t. 5 (1548-1552), signalant que Mathias Weicker, originaire de Barr, est échevin de la dite corporation et une autre note de 1548 (Archives municipales de Strasbourg, KS 552 f° 114v°) affirmant qu’Isaac est fils de feu Anton Weicker. Mathias Weicker avait épousé Aurelia († 1589), fille de Johann Stoesser, membre des Quinze, tandis qu’Isaac avait épousé Catharina († avant 1577), fille de Peter Arg, marchand (Archives municipales de Strasbourg, Saint-Nicolas M 50 f° 31). Les parents des deux frères étaient entre autres propriétaires de trois maisons situées au coin de la rue Mercière et de la rue du Vieux-Marché-aux-Poissons, et donnant par derrière sur l’Albergrün, c’est-à-dire le Ulmergraben, fossé qui longeait jadis la rue du Vieil Hôpital. Ils louaient les rez-de-chaussées à des marchands étrangers pour y faire du commerce, notamment pendant les foires. En outre, les Weicker avaient acquis le vieux Gürtelerhof près de la cathédrale. Mathias y mourut en 1591 (Archives du Chapitre de Saint-Thomas, déposées aux Archives municipales de Strasbourg 176 f° 186 r°). Mathias Weicker fut membre du Conseil des Quinze de 1572 à 1588 et de celui des Treize de 1588 à 1591. A trois reprises, en 1576, 1582 et 1588, il remplit les fonctions d’Ammeister. Participant régulièrement aux concours de tir à l’arbalète, Mathias remporta le premier prix – un bœuf ] en 1565. Les Weicker, associés à Balthasar Marstaller © (Archives municipales de Strasbourg, KS 551 f° 226 v°), s’adonnaient au grand commerce, notamment à celui des épices (Archives municipales de Strasbourg, VII, 1436 f° 37 v°) par le biais du port d’Anvers (Archives municipales de Strasbourg, KS 89 f° 234 v° – 236 r°). Ils en revendirent deux tonneaux au duc Wolfgang en décembre 1563 (Archives municipales de Strasbourg, XXI, 1563, f° 530 v°). En 1587, ils exportèrent en France trois tonneaux d’équipements militaires (Kriegsrüstung) via La Wantzenau (Archives municipales de Strasbourg, XV 1587 f° 111 r°). Ils étaient également en relations commerciales avec les frères Andreas et Willibald Imhof à Nuremberg (Archives municipales de Strasbourg, AA 2029) et bancaires avec Israel Minckel © et Georg Obrecht © à Lyon (Archives municipales de Strasbourg, Série V 60/10 n° 37). À l’instar de ces derniers et peut-être à cause d’eux (voir J.-P. Kintz, p. 379), les Weicker furent acculés à la faillite (PV XV, 1574, f° 83-86 et 1577 f° 29 r°). Quelques renseignements à ce sujet sont fournis par un rapport de 1635 (Archives municipales de Strasbourg, III 85/15). Les fondations de l’Œuvre Notre Dame, de l’Orphelinat, de l’Église rouge et de la Haute école en étaient créancières pour 7000 livres. Les créances des autres créanciers s’élevaient à 29312 livres. En 1622, il ne restait de la fortune des Weicker que 3028 livres, et encore précise-t-on « in eythel schlechtem gesteygertem geldt », c’est-à-dire en argent fortement dévalué.
A. Seyboth, Le vieux Strasbourg (édition française), p. 541, 560 et p. 130, 150, 252 (édition allemande) ; R. Reuss, Kleine Strassburger Chronik, p. 16 ; J. Hatt, Liste des membres du Grand Sénat de Strasbourg…, Strasbourg, 1963, p. 626, 675 ; J.-P. Kintz, La société strasbourgeoise du milieu du XVIe à la fin de la Guerre de Trente Ans 1560-1650…, Paris, 1984, p. 533 (passim) ; fichier personnel de F.-J. Fuchs.
† François-Joseph Fuchs (2002)