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SCHWENCKFELD Kaspar von

Théologien, noble silésien (★ Ossig, Silésie, (près de Liegnitz/Legnica) 1489 † Ulm, Allemagne, 1561). Sch. fut un des plus importants théologiens du XVIe siècle, dont la doctrine, connue sous le nom du spiritualisme, veut se situer entre le catholicisme et le luthéranisme. Étudiant à l’Université de Cologne, puis à celle de Franckfort s/Oder, il devint entre 1510 et 1523 courtisan à la cour des princes de Brieg/Brzeg et de Liegnitz en Silésie. Il quitta ce service à cause de ses problèmes auditifs. Il se consacra dès lors à la propagation de ses idées religieuses dont l’impulsion initiale était due, sans doute, à la prise de position de Luther. Cependant, influencé par son ami, le chanoine Valentin Krautwald, théologien d’orientation humaniste et fin connaisseur des Pères de l’Église, Schwenckfeld envisageait de corriger ce qu’il considérait comme les imprécisions du luthéranisme, qui étaient, selon lui, la cause de dégradation même du sens moral du peuple. Il essaya en vain d’en convaincre le Réformateur, qui commença alors de se méfier de lui. La dispute entre Luther et Erasme à propos du libre arbitre en 1525 l’avait rendu conscient des différences entre sa conception religieuse et celle de Luther ainsi que de ses affinités avec la vision humaniste. Il s’agissait surtout des différences rendues évidentes par sa conception christologique, qui laissait ouverte la possibilité de changement du corps naturel de l’homme en celui du Christ. Son spiritualisme minimisait le rôle de l’Église comme l’institution dispensatrice de la grâce, celui des sacrements et des cérémonies et enfin celui des ministres. La défense du catholicisme en Silésie par le roi Ferdinand força Schwenckfeld à quitter son pays. Il s’établit en 1529 à Strasbourg et y resta cinq ans. Il fut, pendant les deux premières années, hôte de W. Capiton, qui avait de lui une très haute opinion, partagée d’ailleurs par les autres ministres de la ville, avec Martin Bucer à leur tête, qui voyaient en lui un partisan de Zwingli. La sympathie initiale se changea cependant en haine quand les opinions de Schwenckfeld, surtout celles concernant l’Église, la Bible et le rôle des pasteurs, furent connues. Le nombre de ses partisans fut néanmoins assez élevé, même parmi le clergé protestant, comme le témoigne son amitié avec Matthieu Zell, dont la femme, Katherina, devint une schwenckfeldienne inconditionnelle. Les adeptes des idées de Schwenckfeld se recrutaient surtout dans les classes supérieures de la bourgeoisie strasbourgeoise. Les raisons étaient en partie doctrinales, puisque Schwenckfeld plaçait au premier plan l’activité propre de l’homme, mais aussi politiques, car le patriciat se méfiait des ambitions du clergé protestant qui voulait subordonner la politique de la ville à l’intérêt de l’Église. Le comportement très réservé de Schwenckfeld, sa piété unanimement reconnue, et certainement aussi sa position sociale assez élevée, ne permirent pas de l’attaquer de face, mais Bucer réussit cependant à obtenir du Conseil une demande adressée à Schwenckfeld le priant de quitter la ville. Toutefois, même après son départ définitif en 1535, Schwenckfeld resta en contact épistolaire avec ses partisans strasbourgeois et garda des relations privilégiées avec le patriciat de la ville, comme en témoigne une demande de conseil du Stettmeister Jacques Sturm © quant à l’attitude que la ville devrait adopter au moment de la guerre de Smalkalde et de l’Intérim. Cependant les ministres, et Bucer en particulier, le considèrent, non sans raison, comme très dangereux pour la nouvelle et jeune Église protestante et, associés avec Martin Frecht, prédicateur d’Ulm et Ambrosius Blauer de Konstanz, le poursuivirent de leur méfiance. Un accord mutuel entre Schwenckfeld et les ministres de s’abstenir des critiques, signé lors d’une réunion à Tübingen le 28 mai 1535, ne fut jamais respecté par les prédicateurs. Finalement la doctrine de Schwenckfeld et celle de Sebastian Franck furent solennellement condamnées par les ministres à Smalkalde en 1540. Après le départ forcé de Bucer de Strasbourg en 1549, ce furent ses jeunes successeurs, Marbach © et Rabus ©, qui essayèrent très énergiquement d’endiguer l’influence de la doctrine schwenckfeldienne. Après avoir quitté Strasbourg, Schwenckfeld fut forcé à changer souvent son lieu de séjour. Il resta pendant quatre ans (1535-1539) à Ulm, où, comme à Strasbourg son influence fut très grande, surtout, là encore, parmi les patriciens. Après Augsburg, il trouva l’asile dans les demeures de la noblesse de la région, mais aussi chez les franciscains à Esslingen (1547-1550). Menacé d’arrestation (ordonnée par Christophe de Wurtemberg en 1554), il se cacha chez ses amis en Palatinat et à Augsburg. Il mourut à Ulm, laissant une œuvre considérable. Sa doctrine a trouvé nombreux partisans en Europe, notamment en Hollande, en Angleterre, mais aussi en France, où ses livres furent très lus.

1) Œuvres de C. Schwenckfeld: Corpus Schwenckfeldianorum, 19 vol., Leipzig/Pennsburg, 1907-1961. 2) Bibliographie (éléments), in: A. Sciegienny (Séguenny), Homme charnel, homme spirituel, Wiesbaden, 1975, p. 96-100; R. Emmet Mc Laughlin, The freedom of spirit, Social Privilege, and Religieus Dissent, Baden-Baden, 1966, p. 255-271. 3) Séjour à Strasbourg: documents in: Quellen zur Geschichte der Täufer, Elsass, Stadt Strassburg, vol. 7 (1959), 8 (1960), 15 (1986), 16 (1986); D. Husser, Liberté spiritualiste et structure socio-religieuse. Caspar Schwenckfeld et les Schwenckfeldiens… à Strasbourg (1529-1631), thèse doct. dact., Strasbourg, 1980. 4) Biographie: Selina Gerhard Schultz, Caspar Schwenckfels von Ossig (1489-1561), Pennsburg, 1977; R. Emmet McLaughlin, op. cit. p. 37-52. 5)

Doctrine: A. Sciegienny, op. cit., Schwenckfeld and Early Schwenckfeldianism. Papers Presented at the Colloquium on Schwenckfeld and the Schwenckfelders (Pennsburg, Pennsylvania, September 17-22, 1984), éd. par Peter C. Erb, Pennsburg, 1986; A. Séguenny, « La christologie de Caspar von Schwenckfeld, 1489-1561: non aluid sed aliter », Revue d’histoire et de philosophie religieuses, 74, 1994/2, p. 129-151; R. Emmet McLaughlin, op. cit., N. Blough, « Le Christ humilié: le débat christologique entre Pilgram Marpeck et Caspar Schwenckfeld », N. Blough (éd), Jésus-Christ aux marges de la Réforme, Paris, 1992, p. 141-162.

André Seguenny (1999)