Maire de Strasbourg, député du Bas-Rhin, professeur d’Université, (PI) (★ Strasbourg 8.4.1799 (19 germinal an VII) † Strasbourg 24.1.1859). Fils de Georges Frédéric Schutzenberger, brasseur à La Patrie, et de Marie Madeleine Laemermann. ∞ 14.3.1826 à Strasbourg Frédérique Fischer (★ 17.11.1801 [26 brumaire an X]), fille de Jean-Jacques Fischer, brasseur, et de Madeleine Sophie Bader ; 3 fils dont Paul ©. Les études qu’il poursuivit au Gymnase protestant depuis son entrée dans l’établissement le 15 septembre 1806, développèrent en lui à côté de dons musicaux, une veine littéraire et poétique. C’est ainsi qu’en 1817, à l’occasion des fêtes du tricentenaire de la Réforme, il composa une tragédie Religion und Liebe accueillie avec intérêt. Il commença des études de théologie, mais se consacra en définitive au droit. Il s’inscrivit au barreau de sa ville natale en 1824. Il utilisa également toutes ces années, à des voyages en Suisse en particulier, où il lia des relations suivies avec divers écrivains et personnalités. La fougue de la jeunesse et sa formation, l’amenèrent en politique à briller en tête des milieux libéraux strasbourgeois aux côtés de son collègue Liechtenberger. C’est ainsi qu’il participa en bonne place au banquet offert le 10 octobre 1829 à Benjamin Constant et, le 28 juillet 1830, parcourut la ville à cheval annonçant à la population la révolution parisienne. Après la révolution de 1830, il prit place, comme beau- coup de ses pairs, dans l’opposition au sein du parti du Mouvement qui désirait la poursuite de l’évolution démocratique. Il publia alors ses deux Lettres d’un voltigeur de la Garde nationale de Strasbourg à un grenadier de la Garde nationale de Mulhouse qui assurèrent sa renommée politique. Membre de la Commission municipale, il participa à la réorganisation de la Garde nationale et, comme l’écrit Pfister, « il côtoya le parti républicain ». Anticlérical virulent, il fut en même temps comme, la plupart de ses concitoyens, un adversaire convaincu de la centralisation. Il porta un toast vibrant au banquet anniversaire de la Révolution de Juillet et participa au cortège funèbre en l’honneur de Lafayette le 27 mai 1834. Mais très vite, à la fois l’expérience et son caractère pragmatique l’amenèrent à des vues beaucoup plus modérées, qui lui firent rejoindre les rangs de la majorité constitutionnelle. Dès le 15 juillet 1835, une ordonnance royale le plaçait au nombre des adjoints du maire Lacombe et le chargeait du service des travaux publics. De ce jour, sa voie était trouvée. D’emblée, il se révéla un merveilleux administrateur, habité par une passion dévorante pour l’action en faveur d’un progrès bien compris. Il fut véritablement le magicien d’un nouveau Strasbourg et, dès 1836, il donna son empreinte à la ville, en se lançant dans l’aménagement des parcs et jardins extérieurs, Orangerie, Contades, Wacken, travaux qui lui valurent le surnom de «Baimele Maire». Il poursuivit en transformant l’immémorial et putride fossé des Tanneurs en égout couvert, en décrétant la fin des Petites Boucheries et en multipliant les quais sur les rives de l’III. Ce n’était là que le début d’une œuvre considérable que sa nomination au poste de maire, par ordonnance royale du 1er avril 1837, allait lui permettre de poursuivre avec vigueur. Mais ce n’est pas seulement la transformation et la modernisation de sa cité qui occupa tous ces efforts, en particulier par l’installation de l’éclairage au gaz et l’entrée des chemins de fer dans la ville; mais également la sauvegarde de son patrimoine. En effet, la victoire définitive en 1837, de la ville de Strasbourg dans son procès contre la ville de Barr, lui assura définitivement la propriété de la forêt du Hohwald. Parallèlement, il mena une audacieuse politique sociale illustrée, en 1841, par la fondation de la colonie agricole d’Ostwald. Le moindre de ses mérites ne fut pas, afin de mener à bien son vaste programme d’action, d’apprendre à ses concitoyens et à ses collègues du conseil municipal, à mettre en pratique des vues financières larges, fondées sur un emploi raisonnable du crédit et une politique d’investissement hardie, en totale contradiction avec leur méfiante parcimonie coutumière. Il n’est pas jusqu’aux lauriers universitaires qui ne vinrent le couronner, puisqu’en 1838 le ministre de l’Instruction publique Salvandy le nomma à la chaire de droit administratif à la faculté de Droit, tandis que le roi Louis-Philippe le faisait, en 1840, chevalier de la Légion d’honneur. Peu après, alors qu’il avait été élu le 12 octobre 1841, membre du Conseil général du Bas-Rhin, ses concitoyens l’élurent député le 10 février 1842, par 212 voix contre 184 au radical Martin, après que Schutzenberger eut fait une définitive profession de foi ministérielle. Il profita de son passage à la Chambre, pour défendre vigoureusement les intérêts protestants attaqués et pour faire triompher le projet de la ligne directe de chemin de fer Paris-Strasbourg. Mais en 1845, il résigna son mandat pour pouvoir se consacrer à sa ville natale. Il fut remplacé par Renouard de Bussière ©. Entre-temps, il avait également prouvé combien l’histoire et la gloire de Strasbourg avaient trouvé en lui un fervent défenseur, à travers l’organisation des somptueuses fêtes du 4e centenaire de l’invention de l’imprimerie par Gutenberg, en juin 1840, et surtout, par l’entreprise et la publication en 1843, du recueil en deux volumes, de vieilles chroniques strasbourgeoises intitulé Code historique et diplomatique de la ville de Strasbourg.
Enfin, il se révéla également un agronome averti dans l’exploitation de sa vaste propriété du Waldhof, près de la Wantzenau. Il fallut la révolution de 1848 pour lui faire abandonner, le 2 mars, l’administration de la ville à laquelle il avait consacré tant d’efforts et de travaux et pour lui faire prendre une studieuse retraite. Il consacra celle-ci à la rédaction de son grand ouvrage sur Les lois de l’ordre social, paru en 1850, et à diverses études poursuivies jusqu’à sa mort. Chevalier de la Légion d’honneur.
Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 2, 1910, 740; F. Ponteil, L’opposition politique à Strasbourg sous la Monarchie de juillet (1830-1848), Colmar, 1932; P. Leuilliot, L’Alsace au début du XIXe siècle (1815-1830), 3 volumes, Paris, 1959; Histoire de Strasbourg des origines à nos jours, sous la dir. de G. Livet et F. Rapp, Strasbourg, IV, passim; C. Strule, Assainir et embellir Strasbourg au XIXe siècle. Étude sur la municipalité de Georges Frédéric Schutzenberger (1837-1848), publication de la Société académique du Bas-Rhin, t. C XVII-CXVIII, 1997-1998, p. 308.
† Georges Foessel (1999)