Secrétaire de la Chambre des tutelles, (PI) (★ Strasbourg 26.3.1722 † Strasbourg 20.8.1812). Souvent confondu avec son cousin Frédéric Rodolphe Salzmann ©. Fils de Jean Salzmann († 18.12.1729), banquier, et d’Anne-Barbe Miville († 1728). Célibataire. Salzmann fréquenta le Gymnase, puis l’Université protestante où il fit sa licence en droit. Goethe ©, souligne que Jean Daniel « s’exprimait en français avec une grande facilité, voire avec élégance » (Dichtung und Wahrheit 11, Hamb. Ausg. IX, p. 482). Salzmann devint secrétaire à la Chambre des tutelles. Cela lui valut un cercle d’amis très étendu à Strasbourg dont profita aussi le jeune Goethe (ibidem, p. 367 sq.). Salzmann manifesta son goût pour la littérature en fondant, au début des années 60, une société littéraire : la Gelehrte Übungsgesellschaft. Il avait pris pension chez les demoiselles Lauth, rue de l’Ail, où il fit la connaissance du groupe que l’on a convenu d’appeler le « Sturm und Drang » de Strasbourg : Herder, Jung-Stilling et surtout Goethe. Il faut leur adjoindre non seulement J. M. R. Lenz ©, mais aussi le Strasbourgeois H. L. Wagner. Salzmann, tout en comprenant les aspirations de ces jeunes « génies », ne partagea pas leurs enthousiasmes. Goethe et Jung évoquent Salzmann avec respect, voire avec vénération dans leurs Autobiographies. Goethe en particulier en fit son ami, son mentor auquel il soumit ses affaires de cœur (cf. les cinq lettres écrites à Sessenheim en mai 1771 et publiées par A. Stoeber), mais aussi ses premiers essais littéraires. Salzmann fut par la suite également le confident de Lenz, épris lui aussi de Frédérique Brion. Goethe dira son admiration et son attachement à ce « pédagogue universel » pour « son bon sens, son esprit conciliant, sa dignité ». Jung-Stilling résume sa considération respectueuse pour Salzmann par cette formule : « La première place (dans notre société) lui revenait et dût-il se trouver derrière la porte » (Wanderschaft, Reclam, p. 275). Les deux jeunes gens font état de la profondeur de l’esprit philosophique allié à une religiosité sincère. C’est Salzmann qui mit Goethe en rapport avec deux éminents professeurs de l’Université : G. Koch et J.-J. Oberlin, tous deux élèves de Schoepflin. Même après avoir quitté Strasbourg, Goethe continua à correspondre avec Salzmann.
A. Stoeber dit s’être servi pour ses deux écrits (cf. bibliographie) du fonds J. D. Salzmann, déposé en son temps à la Bibliothèque municipale de Strasbourg. Il fut détruit lors du bombardement de la ville en 1870. Il comprenait un lot de documents de la plus haute valeur littéraire, en premier lieu la correspondance et tout particulièrement 12 lettres de Goethe à Salzmann que Stoeber publia dans Alsatia en 1853. S’y trouvait aussi un exemplaire de la thèse en latin de Goethe et son Iphigénie en prose. Enfin les écrits de Salzmann proprement dits, tous marqués au coin du rationalisme moralisant de l’époque : Kurze Abhandlung über einige wichtige Gegenstände aus Religion und Sittenlehre, publié sans nom d’auteur par Goethe à Francfort en 1776. Un traité sur la législation du mariage : Über die Ehe, paru dans Bürgerfreund II., p. 479 sq.
Goethe, Dichtung und Wahrheit, 2. Teil, Buch 9-11, Hamburger Ausgabe, Bd. 9 ; Jung-Stilling rend également hommage à Salzmann dans son autobiographie : Wanderschaft, Reclam Urkunden Buch, n° 662, p. 275 ; M. Engelhardt, Nekrolog Morgenblatt, août 1812 ; A. Stoeber, Der Dichter Lenz und Fredeike von Sessenheim, Bâle, 1842 ; idem, Strassburg. Eine Lebenskizze, Frankfurt a. Main, 1855 ; J. Matter, « Monsieur de Saint-Martin, Madame de Boecklin, les deux Salzmann et Goethe », Revue d’Alsace, 2e série, 1e année, 1860, p. 520 sq. ; A. Stoeber, « Protokoll der vom Aktuar Salzmann präsidirten literarischen Gesellschaft in Strassburg », Alsatia, 1862-1867 ; J. Froitzheim, Lenz, Goethe und Cleophe Fibich von Strassburg, Beiträge…, IV, 1888 ; idem, « Goethe und Lenz in Strassburg, » Strassburger Post, 1888, n° 313 (10 Nov.) ; idem, « Zu Strassburgs Sturm und Drangperiode 1770-1776) », Beiträge zur Landes und Volkskunde von Elsa?- Lothringen, VII., Strasbourg, 1889 ; Allgemeine deutsche Biographie, 30, 1890, p. 300 ; A. Düntzer, « Der Aktuarius Salzmann, Goethes Strassburger Mentor »,Zft. f.d. Deutsch-Unterricht VIII, 1894 ; F. Dollinger, « Jean-Daniel Salzmann, ami de Goethe », L’Alsace française, XXIII, 1932 ; J. Keller, Le théosophe alsacien F. R. Salzmann et les milieux spirituels de son temps, Berne, 1985.
Jules Keller (1998)