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RATHSAMHAUSEN (von, de)

Famille noble d’origine ministérielle dont on connaît, à partir du XIVe siècle, plusieurs branches: zum Stein, von Kintzheim, von Ehnwihr, von Triberg. Originaire de Rathsamhausen, hameau situé à trois kilomètres à l’Est de Sélestat, où se trouvait un château sur motte qui était vraisemblablement la première résidence de ce lignage.

Le premier Rathsamhausen connu est Rudolf (1215-1220), qui apparaît comme témoin dans des chartes de l’empereur Frédéric II (J.-F. Böhmer et alii (ed.), Regesta imperii, IV/1 (index); Rappoltst. Urkb. I (index); F. Hefele (ed.), Urkb. Freiburg, I, n° 151-152). En 1227 est attesté un Hartmann von Rathsamhausen (1227-1231), advocatus (bailli impérial) de Sélestat, fils de X von Rathsamhausen et de Gertrud [von Lützelburg?] qui épousa en secondes noces Eberhard von Andlau © (Archives départementales du Bas-Rhin, H 3070, 2; J. Trouillat (ed.), Monuments de l’évêché de Bâle, I, 340; Urkb. Basel, I, 111; Urkb. Str.I n° 495). Un autre Hartmann (1262 † ap. 1276) possédait une part du Haut-Koenigsbourg avec ses cousins (?) Friedrich (1256-1267) et Philipp (1246 † v. 1272) (Archives départementales du Bas-Rhin, C 306, 5). Ce dernier eut 4 fils dont Philipp © 2 et Hartmann qui donna le terrain pour la fondation du couvent des Franciscains de Sélestat. On peut également citer Egenolf (1393†1435), bailli à Sainte-Croix-en-Plaine (1416-1428), fils de Hans © 4; Conrad Dietrich (1437†1481), conseiller des Habsburg; Heinrich (1468†1500), bailli de Kaysersberg (1473-1497) dont la fille, Dorothea, fut abbesse de Saint-Étienne à Strasbourg (1486†1511); Mente (1406-1460), sœur de Bernhard © 6, occupa la même fonction de 1437 à 1455 au moins, ainsi qu’Agnes (1460-1463). Les Rathsamhausen comptèrent également des abbesses à Silo, à Eschau ou encore à Niedermunster (Susanna, 1411-1421; Ursula, 1535-1541). Mentionnons enfin Conrad von Rathsamhausen zum Stein (1458 † 1487), frère de Jerotheus © 7, copossesseur du château de Fénétrange (E. Des Robert, Catalogues des sceaux des Archives départementales de Meurthe-et-Moselle, Nancy, 1985, III, n° 4735), dont le fils Ulrich (1487 † 8.3.1543), ∞ Maria von Andlau († 22.10.1534), était seigneur de Fénétrange où il fut inhumé avec sa femme (pierre tombale dans l’église). Durant la période médiévale, les Rathsamhausen ont donc participé à la vie politique et religieuse de l’époque. Leur fortune se fonde sur des possessions dispersées à travers toute l’Alsace, comme par exemple à Saverne, Wasselonne, Westhoffen, Adelshoffen (village disparu près de Schiltigheim), Strasbourg- Robertsau, Hattisheim (village disparu près de Geispolsheim), Benfeld, Epfig, Baldenheim, Kintzheim, Ribeauvillé, Ostheim, Herrlisheim, Guebwiller, Wittenheim, Cernay, Spechbach, avec deux régions privilégiées : autour de Sélestat et autour du Mont Sainte-Odile. S’y ajoute la région de Saverne quand Albrecht © 8 et ses frères reçurent de l’évêque de Strasbourg, en 1497, de nombreux fiefs dont une partie des biens des Greifenstein © (Archives départementales du Bas-Rhin, E 1180; renouvelés aux Rathsamhausen en 1665, Schoepflin, Alsatia diplomatica, II, 503, n° 1534). On leur connait un ou plusieurs mariages avec diverses familles dont les Ochsenstein ©, les Andlau ©, les Landsberg ©, les Fleckenstein ©, les Wangen © ou encore les Müllenheim © et, dans le Haut-Rhin, les Hattstatt ©, les Haus ©, les Münch ©, les Jungholtz © ou les Moersperg/Morimont ©. Pour les époques modernes, on peut encore citer Jacob (1565 † 1601) et Hans Kaspar (1573 † 7.4.1625) qui, en 1576, rejoignirent la Réforme. Marie-Anne Suzanne (★ 1771 † 1824), baronne de Gérando ©, fut une épistolière célèbre. Une de ses sœurs, Frédérique Françoise Marie Anne († 16.4.1854), et une de ses cousines, Augustine († Würzburg 19.3.1890), sont les dernières représentantes du lignage.

Archives des Rathsamhausen: fragments au Staatsarchiv Marburg (von der Tann-Rathsamhausen) et au Schlossarchiv Ebnet, Fribourg/Br.; J. Gyss, Histoire de la ville d’Obernai…, 2 vol., Strasbourg, 1866 (table analytique); Lehr, L’Alsace noble, 1870(index); Kindler von Knobloch, p. 255-258; Th. Walter, Die Grabschriften des Bezirkes Oberelsass, Guebwiller, 1904 (index); J. M. B. Clauss (ed.), « Das Nekrolog der Cisterzienser-Abtei Pairis », Bulletin de la Société pour la conservation des monuments historiques d’Alsace, n° 22, 1908, p. 55-104; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 2, 1910, p. 495-500; Zeitschrift für die Geschichte des Oberrheins, n° 71, 1917, p. m 20 n° 434, p. m 21 n° 442, 444, p. m 38 n° 586, p. m 47 n° 663, p. m 49 n° 677, p. m 56 n° 751, p. m 57 n° 756; J. Kindler von Knobloch, O. Freiherr von Stotzingen, Oberbadisches Geschlechterbuch, III, 1919, p. 348-359 (arbre généalogique); W. Möller, Stammtafeln westdeutscher Adelsgeschlechter im Mittelalter, Darmstadt, 1933, p. 182-186 (arbre généalogique); X. Ohresser, L’église Saint-Étienne de Strasbourg, Strasbourg, 1938; P. Adam, Histoire des hospices et hôpitaux de Sélestat, Sélestat, 1960 (index); idem, Histoire religieuse de Sélestat, I, 1967 (index);. Ohresser, Les tapisseries de l’église Saint-Étienne de Strasbourg, Lyon, 1968; F. Rapp, Réformes et réformations à Strasbourg… (1450-1525), Paris, 1974 (index); M. Schwartz, Les Rathsamhausen, une famille de la noblesse rurale alsacienne, 1215-1450, mémoire de maîtrise, Strasbourg, 1978; V. Rödel, Reichsiehenwesen, Ministerialität, Burgmannschaft und Niederadel…, Darmstadt, Marburg, 1979 (index); M. Fave-Schwartz, « Les Rathsamhausen…, » Revue d’Alsace, n° 109, 1983, p. 31-48, Encyclopédie de l’Alsace, X, 1985, 6268-6269; P. Müller, Die Herren von Fleckenstein im
späten Mittelalter,
Stuttgart, 1990 (index); D. A. Christ, Das Familienbuch der Herren von Eptingen. Kommentar und Transkription, Liestal, 1992, p. 104, 108, 156, 199, 333, 363, 370, 415; P. Brunel, G. Leser, B. Schnitzler, « Les monuments funéraires de la vallée de Munster du XIVe au XVIIIe siècle », Annuaire de la Société d’histoire du Val et de la Ville de Munster, 1996, p. 51-73; G. Bischoff, Noblesse, pouvoirs et société…, thèse de doctorat, 4 vol., Strasbourg, 1997 (index); M.-H. David, « Monuments funéraires du monastère d’Obersteigen », Cahier de la Société d’histoire et d’archéologie de Saverne et environs, n° 180, III, 1997, p. 53-56.

  1. Heinrich,

(1242 † 1280). Filiation inconnue. Frère de Hug dit von Krummgasse (1235-1255) et de Jacob (1242 † 1289/1290), fondateur de l’hôpital de Rouffach en 1270 (Urkb. Reg. Ruffach,I, n° 70); 4 enfants connus: Hug, Rudolf, Heinrich dit der Arme et Elligenda, nonne à Sélestat (1280). Le 11 janvier 1256, Rudolf von Rathsamhausen (1246 † 1311) — vraisemblablement son fils — et sa femme Anna von Tunsel vendirent au comte Conrad von Freiburg leur château de Tunsel et ses dépendances. Parmi les témoins figure Heinrich dit der Vrie (Zeitschrift für die Geschichte des Oberrheins, n° 9, 1858, p. 333). Cette mention der Vrie n’est en fait pas à attribuer à Heinrich mais au chevalier Cuno (der) Vrie (Urkb. Freiburg, I, n° 151, n. 151/1 ; Urkb. Str. I n° 566, 615).

2. Philipp,

(1256 † Eichstätt 25.2.1322). Fils de Philipp von Rathsamhausen (1246 † v. 1272) et de N von Laubgassen ©. Philipp aurait été, dès 1260, moine de Pairis, près d’Orbey, et prêtre vers 1270. Maître en théologie à Paris, il acquit une réputation de prédicateur dont la mystique se place dans la ligne de celles des Dominicains. Il a écrit un commentaire du Magnificat : Expositio super Magnificat (1285/1300). Abbé de Pairis (1301-1306), il était le confesseur du roi Albrecht. Au cours de l’hiver 1306, il fut élu évêque d’Eichstätt. Il œuvra notamment pour le développement du culte de saint Willibald et de sainte Walpurge, deux saints de cet évêché. Il fut aussi le conseiller de Heinrich VII et de Ludwig von Bayern.

M. Barth, « Philipp von Rathsamhausen… », Archives de l’Église d’Alsace, 1975, p. 79-129 (iconographie et bibliographie); Verfasserlexikon VII, co. 605-610 (bibliographie); J.-L. Eichenlaub et alii, L’abbaye de Pairis dans la haute vallée de la Weiss,1995 (index).

3. Dietrich,

chevalier (1304 † 1325). Filiation incertaine : fils de Hartmann von R. (1267-1292 ?) ou, d’après W. Möller, d’Ulrich von Rathsamhausen (1267-1303), frère dudit Hartmann ; 4 enfants connus : Hartmann, Richard, Diebold et Ulrich. En 1314, il était vassal des Pfirt/Ferrette © pour des biens à Cernay, Guebwiller, lllfurth et pour une moitié du château de Spechbach (Archives départementales du Bas-Rhin, 12j n° 168). Il était également possessionné au Ban-de-la-Roche. Son père, Hartmann, l’était dès 1284
(Archives départementales du Bas-Rhin, 39j n° 3) et, même s’il n’était pas appelé Rathsamhausen zum Stein, il possédait vraisemblablement le château de La Roche à cette date ; c’est certain en 1307 (Archives départementales du Bas-Rhin, 39j n° 17). Son fils, Hartmann (1325 † 1387), fut, semble-t-il, le premier à ajouter « zum Stein » à son nom.

Archives départementales du Bas-Rhin, 12 J 110 ; 5 J 5 ; N. Mengus, « Le château fort de la Roche (Steinschloss) », L’Essor n° 175, juin 1997, p. 4-7, idem, « Un repaire de seigneurs-brigands : le château de La Roche », Châteaux forts d’Alsace (à paraître).

  1. Hans,

(1361 † 1391). Fils de Johann von Rathsamhausen von Triberg (1324-1356). Lucie von Hohenstein (1387-1433); 3 enfants connus: Egenoif, Johann et Hartmann. En 1361, Hans est le premier attesté de sa famille comme possédant le fief impérial de la royauté des Chaudronniers qui consiste en droits à charge de protection et juridiction sur les artisans demeurant entre la forêt de Haguenau et le Hauenstein: obligation pour les chaudronniers de le servir pendant un mois, de lui fournir les chaudrons nécessaires à sa maison, etc. Ce fief resta aux mains des Rathsamhausen durant tout le XVe siècle (Archives départementales du Bas-Rhin, C 297,11 ; C 299, 1-92; Archives municipales de Colmar, HH 88/3 et 89/1); Hans Caspar von Rathsamhausen en était encore le possesseur en 1611 (Schwartz, p. 41).

  1. Egenoif,

(1337 † 1363). Filiation inconnue. Peut-être de la branche des Rathsamhausen-Ehnwihr. Étudiant à Bologne à partir de 1348. Le 26 août 1350, il était dit Conservator Nationis Theutonicae. En 1352, il portait le titre de procurator (administrateur) et était cité dans une bulle de Clément VI (22 mai 1352). Il était encore à Bologne l’année suivante. Vers 1363, il était docteur en décret et professeur à Padoue.

G. C. Knod, Deutsche Studenten in Bologna (1289-1562), Berlin, 1899, p. 431- 432, 691.

  1. Bernhard,

(1417 † 1450). Fils de Jerotheus von Rathsamhausen zum Stein (1383 † 1427) et — d’après Kindler von Knobloch — d’Adelheid von Eptingen. Immatriculé à l’Université de Heidelberg en 1406. Il fut Domherr à Bâle dès 1426 et prévôt de Saint-Florent à Niederhaslach dès 1430, où il était chargé de percevoir les revenus des domaines et de les répartir entre les chanoines (Archives départementales du Haut-Rhin, G 5225, 2). Bernhard brigua, en vain, l’évêché de Bâle; en 1441, il était custos du chapitre de cette ville (Schwartz, p. 103, 104). Sa sœur, Barbara († 1486/1487), était l’épouse du célèbre chevalier-brigand Heinrich Mey von Lambsheim (1453 † 1487) (Archives municipales de Strasbourg, AA 228, 18; Zeitschrift für die Geschichte des Oberrheins, n° 71, 1917, p. m 49 n° 678).

Archives municipales de Strasbourg, AA 179 ; Archives départementales du Bas-Rhin, G 5225, 4-5 (1441), 6 (1444), 6a-7a (1446), 9-10 (1448); Archives départementales du Bas-Rhin, G 5226, 2a (1451); Helvetia Sacra I/1, 1972, p. 196.

  1. Jerotheus, dit le Jeune,

(1465 † 1491, inhumé à Fouday). Fils d’Ulrich von Rathsamhausen zum Stein (1425 † 1459). Il hérita de son père le Ban-de-la-Roche et le château de La Roche qu’il habitait et dont une moitié appartenait à son oncle, le chevalier Jerotheus von Rathsamhausen zum Stein le Vieux (1460 † 1498). Avec Wecker von Leiningen/Linange ©, il se fit une réputation de chevalier brigand qui, en 1469, amena l’évêque de Strasbourg et le duc de Lorraine à assiéger et à démanteler la Burg. Couvert de dettes, Jerotheus était toujours possesseur de la moitié du château en 1480 ; il semble qu’il ait pu rembourser ses créanciers en 1489. Après la destruction de La Roche, l’écuyer Jerotheus et Wecker von Leiningen s’engagèrent sous la bannière ducale.

Archives municipales de Strasbourg, Fonds Oberlin, Ms 197 : dessin de la dalle funéraire; F. Rapp, « Un haut fait d’armes : le siège du château de La Roche », L’Essor n° 153, 1991, p. 11-15 ; G. Fischer, Les chevaliers-brigands dans les Vosges à la fin du Moyen Age, mémoire de maîtrise, Nancy, 1992 ; G. Oswald, Molsheim à la fin du Moyen Âge (1308-1525), Strasbourg, 1994 (index); N. Mengus, « Le château fort de la Roche (Steinschloss) », L’Essor n° 175, juin 1997, p. 4-7 ; idem, « Un repaire de seigneurs-brigands ; le château de La Roche », Châteaux-forts d’Alsace (à paraître).

  1. Albrecht,

(1497 † 1542). Fils de Jerotheus von Rathsamhausen zum Stein le Vieux (1460 † 1498) et de Clara von Andlau (1495-1513). ∞ I Elisabeth von Müllenheim (1514). ∞ II Apollonia Reich von Reichenstein (1542); 1 fils connu: Wolff Dietrich (1542 11573). Études à Mayence, puis en Italie. Il se trouvait à Bologne en 1498, à Sienne en juin 1502. Vers 1505, il passa quelque temps dans l’armée impériale. En 1507, il fit partie du cortège qui escorta le nouvel évêque de Strasbourg, Wilhelm von Honstein. Jacob Wimpheling lui dédia, ainsi qu’à ses frères Samson (1497 † 1537/1540), bailli épiscopal de Molsheim et Georg (1466 † 1530), son Oratio vulgi ad Deum et Hieronymus Gebwiler © ­ il fut leur précepteur son S. Odilien fürstl. Herkommens, heiligen Lebens und Wandels Histor. (Strasbourg, 1501). Enfin, Th. Wolff — avec qui Albrecht avait visité Mantoue — lui dédia son édition de I’Apologia pro republica christiana de Wimpheling. En 1522, les trois frères firent construire près du bas-côté Nord de l’église des Franciscains de Sélestat, à côté de la porte latérale, une petite chapelle consacrée à saint Antoine de Padoue. C’est là qu’étaient conservés leurs gisants qui, aujourd’hui mutilés, se trouvent à la Bibliothèque humaniste. Il n’est plus possible de dire auquel attribuer les fragments.

G. C. Knod, Deutsche Studenten in Bologna (1289-1562), Berlin, 1899, p. 431 ; R Adam, « Le couvent et l’église des Franciscains- Récollets de Sélestat », Martin Bucer et la paroisse protestante de Sélestat, plaquette édité à l’occasion de la Journée Martin Bucer, 4.12.1966, non paginée; idem, Histoire religieuse de Sélestat, I, 1967, p. 246.

Nicolas Mengus (1997)

 

9. Casimir Frédéric, en religion Dom Léger,
prince-abbé de Murbach et de Lure, (C) (★ Muttersholtz 17.1.1698 † Guebwiller 1.1.1786). Fils de Wolfgang Dietrich, baron de Rathsamhausen de la branche de Wibolsheim, et de Frédérique Dorothée de Schauenburg. Après des études au collège des jésuites de Molsheim, puis au Grand Séminaire de Strasbourg, Casimmir fut reçu novice à l’abbaye bénédictine de Murbach le 28 mars 1717. Profès le 24 avril 1718, il prit le nom de Léger, celui du patron de l’abbatiale. Ordonné prêtre le 8 mars 1721, le jeune Léger fut remarqué pour son intelligence et fit rapidement figure d’« éminence grise du prince-abbé Célestin de Beroldingen ©, qu’il accompagnait dans ses tâches protocolaires aussi bien que dans ses visites pastorales et ses démarches seigneuriales. Ayant obtenu le titre de maître des novices, il renforça son ascendant sur les futurs capitulaires nobles de l’abbaye. En 1732, il fut nommé grand-prieur de Lure, l’abbaye franc-comtoise étant réunie avec ses domaines seigneuriaux à celle de Murbach depuis le XVIe siècle. Le 17 juin 1736, après que le cardinal de Fleury, ministre d’État, eut incité Célestin de Beroldingen à résigner sa charge, dom Léger fut désigné comme administrateur provisoire des abbayes unies. Les titres abbatiaux revinrent cependant à François Armand de Rohan-Soubise ©, qui prit possession des sièges de Murbach et de Lure le 1er juin 1737. Mais dès le 26 juin 1737, Léger fut élu coadjuteur et se vit reconnaître la réalité du pouvoir dans des territoires où le prince-abbé en titre, plus tard également évêque de Strasbourg, ne séjourna que rarement. Le début de l’administration de dom Léger fut marqué notamment par des projets de transformation de l’abbaye de Murbach en complexe baroque (1738), ce qui entraîna le démantèlement de la toiture de la nef du magnifique édifice roman, dont il ne subsiste aujourd’hui que le transept et les deux tours. Le coadjuteur encouragea également la prospection minière, les entreprises sidérurgiques et l’exploitation forestière dans la vallée de la Thur, c’est-à-dire le bailliage de Saint-Amarin relevant de Murbach (1739). Par ailleurs il introduisit divers assouplissements à la règle bénédictine, ce que stigmatisa le chroniqueur Bernard de Ferrette ©, et préférait les commodités de la ville aux bâtiments austères de l’abbaye: il résida ainsi essentiellement au château de la Neuenburg, à Guebwiller, et ne dédaignait pas de fréquenter les salons aristocratiques, y compris, plus tard, celui du prince protestant de Wurtemberg-Montbéliard, ainsi que le rapporte la baronne d’Oberkirch ©. La mort prématurée du jeune cardinal François Armand de Rohan-Soubise, survenue le 28 juin 1756, permit au coadjuteur de prendre solennellement possession du titre abbatial, ce qu’il tint à faire dès le surlendemain du décès de son prédécesseur. De nouvelles concessions minières furent aussitôt accordées dans les territoires abbatiaux, où Léger développa de façon générale les ressources liées à l’industrie. Cette politique de mobilisation des revenus, également illustrée par l’exploitation intensive des forêts, l’accaparement de terrains communaux par la remise en vigueur d’anciens droits, l’augmentation et la multiplication des amendes pour délits forestiers, le « gel » des prébendes liées aux sièges vacants dans le chapitre, donna à Léger les moyens pour d’ambitieuses réalisations architecturales dans ses territoires. Ainsi fit-il ériger la nouvelle église paroissiale de Bergholtz, reconstruire partiellement celle de Lautenbach-Zell, remania-t-il celles de Buhl, de Saint-Amarin et d’Oderen, embellit-t-il le chœur de l’église Saint-Léger de Guebwiller, etc. Mais aussi et surtout, il chargea, en mars 1758, l’ingénieur bourguignon Quéret d’étudier la construction d’une nouvelle abbaye près de la Neuenburg à Guebwiller, où de vastes terrains furent acquis à cet effet au nord du parc du château. Les plans de la nouvelle église, conçue comme une véritable cathédrale néo-classique entourée des hôtels particuliers des dignitaires du chapitre noble, furent d’abord confiés à l’architecte bisontin Beuque, puis à Gabriel Ignace Ritter ©. Le prince-abbé sollicita parallèlement du pape la confirmation du transfert de Murbach à Guebwiller de la résidence des capitulaires, puis, par une bulle du 11 août 1764, il obtint la sécularisation des abbayes de Murbach et de Lure, ainsi que de leur transformation en chapitres collégiaux séculiers. Fossoyeur de Murbach en tant qu’abbaye bénédictine comme en tant qu’édifice roman, Léger obtint cependant de conserver son titre de prince-abbé avec l’intégralité des droits seigneuriaux, et reprit dès 1764 ses prénoms de baptême.
Installé définitivement au château de Guebwiller, le prince Casimir-Frédéric consacra essentiellement les 20 dernières années de sa vie à suivre la construction de l’imposante église collégiale Saint-Léger et Saint-Louis, aujourd’hui église Notre-Dame de Guebwiller, et à accentuer encore pour cela la mobilisation des ressources abbatiales et la pression fiscale. cette politique fut ressentie très durement dans la vallée de Saint-Amarin, où les communautés villageoises allèrent jusqu’à intenter à leur seigneur un procès en Conseil d’État. À Guebwiller même, Casimir-Frédéric renforça son contrôle sur les rouages de la vie publique et dut faire face à des manifestations de mécontentement (1764, 1767) qui n’aboutirent pas, mais qui attirèrent l’attention de l’intendant sur les problèmes de gestion de la petite principauté ecclésiastique. Le prince-abbé s’éteignit, octogénaire, à Guebwiller, après avoir régné cinquante ans (dont trente en titre) sur cette partie de la Haute Alsace ; il fut inhumé dans le caveau abbatial de la nouvelle église du chapitre. La réaction seigneuriale avait transformé le bailliage de Saint-Amarin en poudrière, tandis qu’à Guebwiller la dégradation du « climat » urbain ouvrait une pré-révolution précoce et violente. Il convient cependant de souligner que les premiers biographes — tous ecclésiastiques — de Casimir-Frédéric ont réhabilité la mémoire du prince, grand bâtisseur d’édifices religieux, en évacuant pratiquement toute référence à l’homme politique, à l’administrateur séculier, retraçant ainsi une « vie » hagiographique formée d’une succession d’anecdotes pieuses. Sitzmann reprit cette version, qui finit par devenir la seule et valut même à Casimir-Frédéric une rue de Guebwiller à son nom.

Archives départementales du Haut-Rhin, 9 G (Fonds Murbach); F.J. Ettlin, Vita Casimiri ex liberis baronibus de Rathsamhausen, abbatis ac principis Murbacensis et Ludrensis, Strasbourg, 1787 ; J. Axinger, Leben Casimir’s von Rathsamhausen, Fürst-Abt der vereinten Ritterstifte Murbach und Luders, Strasbourg, 1836 ; J.-B. Durosoy, Vie de feu M. de Rathsamhausen, abbé-prince de Murbach et de Lure, Colmar, 1859 (et Revue d’Alsace 1859, p. 347-359, 411-416, 459-469) ; L. Winterer, « Un abbé de Murbach », Revue catholique d’Alsace, 1867, p. 461-471 ; B. de Ferrette, Diarium de Murbach (1671-1746), Colmar-Paris, 1894; A. Gatrio, Die Abtei Murbach im Elsass, t. II, Strasbourg, 1895, p. 601-682 ; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 2, 1910, p. 499-500 (erreurs) ; J. Gava, Kasimir Friedrich von Rathsamhausen, 1698-1786, der letzte Ordensabt der fürstlichen Benediktinerabtei Murbach, Colmar, 1920; F. Birgy, « Casimir de Rathsamhausen, prince-abbé de Murbach », Dernières Nouvelles d’Alsace (éd. de Guebwiller) du 24-25.1.1963 ; J.-M. Schmitt, Guebwiller à la fin de l’Ancien Régime (1764-1790), Université de Strasbourg II, 1975 (2 vol. multigr.) ; idem, « Sur les traces de Casimir de Rathsamhausen », L’Alsace (éd. de Guebwiller) du 17.7.1977; idem, « Antoine Richard Brunck (1671-1753), chancelier de la principauté de Murbach », Annuaire de la Société d’histoire des régions de Thann-Guebwiller, t. XI, 1975-1976, p. 7-26; idem. « L’abbaye et la principauté de Murbach dans l’Alsace française (1680-1790) », Saisons d’Alsace, n° 82, 1983, p. 37-53 ; idem, Aux origines de la Révolution industrielle en Alsace, Strasbourg, 1980, passim.
Portraits au Musée du Florival (huile sur toile, 1782) et au Musée d’Unterlinden (médaillon ovale polychrome en plâtre, 1782).

Jean-Marie Schmitt (1997)

 

10. Christophe Philippe, baron de, maréchal de camp, (Pl) (★ Ribeauvillé 1.1.1736 † Nonnweiler, Sarre, 7.1. ou 2.2.1820). Fils du baron Wolfgang Christophe de Rathsamhausen, chambellan de la maison palatine de Deux-Ponts, et de Christine Dorothée de Hérange (Heringen). Entré au service comme enseigne au régiment Alsace-infanterie en 1749 avec lequel, comme capitaine, il participa à la guerre de Sept Ans et se trouva aux batailles de Hastenbeck, Sonderhausen, Minden, Corbach et Philingshausen. Major en 1768, il était alors ainsi noté: « Est d’une ancienne noblesse alsacienne propre à faire un bon colonel des troupes allemandes ». Colonel au régiment royal Deux-Ponts le 4 juillet 1777, il se retira du service avec une pension de 2 000 livres le 22 janvier 1779. Élu député du bailliage de Haguenau en 1789, il émigra en septembre 1791, il fit campagne dans les armées des princes de Condé, fut employé dans l’armée autrichienne jusqu’en 1797. Revenu en France à la Restauration, il se fixa à Strasbourg, obtint le grade de maréchal de camp honoraire et la retraite de colonel par ordonnance du 11 novembre 1816.

Archives historiques de l’armée, Ière série, dossier 2254, Yb 346; Lehr, L’Alsace noble, 1870, III; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 2, 1910, p. 498.

11. Jean-Baptiste Léopold, baron de, officier, (C) (★ Muttersholtz 10.12.1754 † Strasbourg 15.11.1828). Fils de Léopold Evrard de Rathsamhausen et de Marie Suzanne Frédérique Malsen de Tilborch. Célibataire. Entra avec rang de sous-lieutenant au régiment royal Deux-Ponts en 1776; lieutenant en 1779, il fit en cette qualité la campagne d’Amérique avec le corps de Rochambeau (1779-1783). À son retour en France, il servit en Hollande dans la légion de Maillebois (1784). Capitaine le 4 septembre 1787, il renonça à son activité militaire et obtint l’assurance de recevoir la croix de Saint-Louis. Émigré en 1791 (il ne figure pas sur la liste générale des émigrés de toute la République en 1793), il servit dans la légion de Mirabeau, dans le régiment de Rohan en 1792-1793 et passa avec ce corps au service de l’Autriche. Il revint à l’armée de Condé le 15 avril 1796 et resta au dépôt, ayant eu un poignet estropié, jusqu’au licenciement de cette armée en 1801. Il résida à Fribourg-en-
Brisgau jusqu’à la première Restauration et revint en France pour se fixer à Strasbourg.

Archives historiques de l’Armée, dossier individuel 1791-1847; Pinasseau 1K 45 carton 23; Lehr, L’Alsace noble, 1870, III; G. Bobinier, Dictionnaire des officiers de l’Armée royale qui ont combattu aux États-Unis pendant la guerre d’indépendance, Château de Vincennes, 1983.

† Alphonse Halter (1997)