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NETTER, NETTRE, NÖDER

Nom d’une des plus anciennes familles juives d’Alsace dont il existe trois branches principales, celle de Rosheim, celle de Bergheim et celle de Bouxwiller. Le lien entre ces différentes branches est difficile à déterminer, car les Stadtschreiber avant la guerre de Trente Ans, lorsqu’il s’agissait de juifs, négligeaient de porter le nom patronymique dans les actes. Le chaînon entre les branches de Rosheim et de Bergheim pourrait être Isaac, fils d’EliezerLippmann Netter vivant dans l’éphémère Ville de Paille (Strohstadt) ou Saint-Louis-lès-Brisach durant la seconde moitié du XVIIe siècle.

Netter de Rosheim

1. Leïma
Fournisseur des armées royales (★ Duppigheim ? vers 1645 d. Rosheim). ∞ Fromed Braunschweig; 2 enfants dont Itzig © 2. Devant l’hostilité montrée par la population alsacienne et son refus de ravitailler la troupe, Leïma obtint la charge de fournisseur des armées royales. Faisant droit à sa demande, en 1687, le baron de Montclar ©, lieutenant général et commandant en chef, lui délivra une lettre pour le Magistrat de Rosheim, lui intimant l’ordre de lui accorder le droit d’habitation. En 1691, ce même Magistrat ordonna aux gardes des portes de refouler les juifs qui se présenteraient, et principalement les pauvres. Accompagné de son fils Itzig, Leïma se rendit à l’intendance d’Alsace à Strasbourg et obtint de La Grange © la révocation de cet interdit.
2. Itzig
Préposé des juifs de (★ Duppigheim vers 1670 d. Rosheim 1733). Fils de Leïma 1. ∞ 1687 Marion Heimendinger (d. Rosheim 1759); 2 fils, Lippmann © 3 et Lehmann © 4, plusieurs filles. Il fut le véritable fondateur de la communauté juive de Rosheim, construisant la première synagogue en 1720; la maison familiale de la rue Netter fut achevée par ses fils en 1737.
3.Lippmann
Préposé des juifs de Rosheim (★ Rosheim 1698 d. Rosheim 19.5.1772). Fils de Itzig 2. ∞ 1733 Frumat Jacob Hertz de Mannheim; 3 enfants dont Heyle (d. 1755) épouse de David Hirsch, caissier général de la Nation juive en Alsace. Il poursuivit l’action de son père, développant la communauté juive de Rosheim et la défendant contre les agressions multiples dont elle fut l’objet, et dont lui-même, dans la maison même du bourgmestre Lamarque, ne fut pas épargné. Il rappela que l’ordonnance du roi du 15 juin 1751 plaçait les juifs sous la protection du roi auquel il menaça de se plaindre. Sa protestation fut suivie d’effet et la population assemblée sur la place de l’hôtel de ville fut informée que toute atteinte à la personne ou aux biens des juifs serait sévèrement punie. Lippmann accueillit de nombreux émigrés juifs, créa des institutions charitables et des écoles.
4.Lehmann
Préposé général de la Nation juive en Alsace (★ Rosheim 1709 d. Rosheim 4.1.1792). Frère de Lippmann 3. ∞ I 1729 Beyle Oppenheimer, fille de Moyse David Oppenheimer, juif de cour à Mannheim. ∞ II 1770 Fraidel Elias, de Bingen. De son premier mariage, 3 enfants dont Mayer © 5. Associé dans leurs fournitures aux armées aux préposés généraux Moïse Blien ©, Jacob BaruchWeyl © et Aron Meyer Mutzig ©, il traitait souvent directement avec le ministre de la Guerre. Grâce à leurs relations avec les hommes au pouvoir, et principalement avec le comte d’Argenson et le duc de Choiseul, les préposés généraux auxquels s’étaient joint Cerf Berr de Medelsheim © avaient réussi à améliorer la condition politique et sociale de leurs coreligionnaires et à leur assurer une relative sécurité. L’action la plus spectaculaire de Lehmann fut son voyage à Versailles pour obtenir que le jugement du Conseil souverain d’Alsace condamnant Hirtzel Lévy © et ses prétendus complices à la peine de mort fût cassé et l’affaire renvoyée devant le Parlement de Metz qui acquitta les accusés. Entre 1743 et 1746, les préposés généraux avaient réussi à faire fléchir le Magistrat de Strasbourg qui les autorisa à installer leurs bureaux dans l’Hôtel Weldentz, l’ancien Bergherrenhof devenu l’hôtel des Linange-Dabo (rue des Mineurs).
5.Mayer
Rabbin, administrateur du cimetière de Rosenwiller, négociant (★ Rosheim vers 1730 d. Rosheim 1.12.1805). Fils de 4. ∞ Hindele Meyer, fille d’Aron Meyer © de Mutzig, préposé général. Il connut la tourmente révolutionnaire, la ruine matérielle de la famille, mais réussit à maintenir la cohésion d’une communauté désorientée face aux idées nouvelles, à remettre en ordre le cimetière de Rosenwiller, dévasté parles Jacobins le 24 novembre 1793.
6. Seligmann Simon
Directeur d’école rabbinique à Mannheim, (★ Rosheim vers 1740 d. Mannheim 2.8.1809). Fils de Goetschel Netter. Petit-fils de 1. Il est l’auteur de la Haqqada de Rosheim de 1779 conservée à la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg.

Robert Weyl (1996)

Netter de Bergheim

7.Charles
Philanthrope, (I) (★ Strasbourg 14.9.1826 d. Jaffa 2.10.1882). Fils de Moyse Netter, tanneur à Saverne, propriétaire, et de Marie Wormser. Études à Strasbourg et à Belfort. Il possédait un commerce à Paris avec une importante succursale à Londres. Il réunit à son domicile le17 mai 1860 un groupe de jeunes juifs, qui fonda l’Alliance israélite universelle, destinée à «travailler partout à l’émancipation et aux progrès moraux des Israélites» au nom des principes de 1789. Il fut trésorier et membre du comité central de l’AIU, qu’il représenta en 1876 à la conférence de Constantinople et en 1878 dans les couloirs du Congrès de Berlin, pour obtenir des droits politiques pour les juifs dans les nouveaux États des Balkans. En 1880, il intervint auprès de la Conférence de Madrid pour obtenir que les puissances européennes protègent les juifs du Maroc. En 1881, il passa plusieurs mois à Brody en Ukraine, pour organiser les secours aux juifs persécutés dans l’Empire russe et préparer leur émigration vers l’Amérique. De retour à Paris, il fut secrétaire d’un comité d’accueil des réfugiés russes. Au cours d’un voyage en Palestine en 1868, il avait décidé de se vouer à l’amélioration du sort des juifs de Terre sainte par l’agriculture. Après son retour à Paris, fut décidée à cette fin en 1869 la création de la ferme-école de Mikveh Israël (Espoir d’Israël), près de Jaffa. En 1870, Netter obtint un firman du sultan ottoman Abdülaziz autorisant cette fondation et concédant à cette fin un terrain étendu. Il se retira des affaires et resta jusqu’en 1873 sur place pour mettre en place l’institution, à qui il rendit visite à plusieurs reprises, et où il mourut. Il rendait visite chaque année à sa famille strasbourgeoise. Sa sœur, Mélanie, est l’arrière-grand-mère de Simone Veil (★ Nice 1927), ministre de la Santé, ministre des Affaires sociales, présidente du Parlement européen.
Journal d’Alsace du 14.10.1882; The Jewish Encyclopedia, 9, New York-Londres, 1905, p.233-234; N. Leven, L’Alliance Israélite universelle, 2 vol., Paris, 1911-1920; S. Halff, La fidélité française des Israélistes d’Alsace et de Lorraine, Paris, 1921; J. Jaari-Poljeskin, Charles Netter. Sa vie et son œuvre (en hébreu), Tel Aviv, 1926; Jüdisches Lexikon, IV/1, Berlin, 1930, p.462; A. Kaspi, La fondation de l’Alliance israélite universelle, DES d’histoire, Paris, 1959; A. Chouraqui, L’Alliance israélite universelle et la renaissance juive contemporaine,1860-1960; cent ans d’histoire, Paris, 1965; G. Weill, «Charles Netter ou les oranges de Jaffa», Les Nouveaux Cahiers, n°21, 1970; S. Schwarzfuchs, Les juifs de France, Paris, 1975; P.Cohen Albert, The Modernization of French Jewry: Consistoryand Community in the Nineteenth Century, Hanover, New Hampshire, 1977; D. Cohen, «Une souscription des juifs de France en faveur des chrétiens d’Orient en 1860», Revue d’histoire moderne et contemporaine, 1977, p.439-454; F. Delpech, Sur les juifs. Études d’histoire contemporaine, Lyon, 1983; F. Malino, B. Wasserstein, The Jews in Modem France, Hanover (N.H.), 1985; Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine, L’Alsace, sous la dir. de B. Vogler, Paris, 1987, p.335; M. Graetz, Les juifs de France au XIXe siècle: de la Révolution française à l’Alliance israélite universelle, Paris, 1989; A. Rodrigue, De l’instruction à l’émancipation: les enseignants de l’Alliance israélite universelle et les juifs d’Orient, 1860-1939, Paris, 1989; J.-C.Kuperminc, «Nouveaux documents sur l’appel d’Adolphe Crémieux en faveur des chrétiens du Liban (1860)», Archives juives. Revue d’histoire des juifs de France, 28/2, 1995, p.95-98.

Léon Strauss (1996)

8.Juste Arnold
Professeur à la faculté de Médecine, membre de l’Académie de Médecine, (I) (★ Strasbourg 20.9.1855 d. Paris 1.3.1936). Fils de Léon Netter, docteur en médecine, et de Mathilde Seligmann, de Karlsruhe ∞ Jeanne Lang. Études de médecine à Paris, interne, puis chef de clinique (1885), médecin des hôpitaux (1888), chef de service à l’Hôpital Trousseau (1896-1922). Entré à l’Académie de Médecine en 1904, il exerça parallèlement une intense activité dans l’Alliance israélite universelle dont il fut le vice-président (1905), puis le président. Membre du bureau de la Jewish Colonisation Association. Il fut un des premiers, selon Robert Debré, à appliquer la bactériologie à la clinique médicale, notamment dans le pneumococcie, la méningite cérébrale, la poliomyélite, l’encéphalite et, toujours selon Robert Debré, Le zona. Mais, lorsque Netter mourut, la médecine moderne était encore à ses balbutiements. On utilisait l’argent colloïdal dans les états infectieux, la sérothérapie dans la méningite, l’abcèsde fixation dans l’encéphalite, le sérum de convalescent dans la poliomyélite. Netter compta parmi les grands de son époque. Commandeur de la Légion d’honneur.
Nouveau traité de médecine et de thérapeutique. 1911; La méningite cérébro-spinale, la bactériologie des otites moyennes suppurées; La peste et son microbe; Nouveau traité de médecine…, Paris, 1920; (avec R. Debré) La méningite cérébrospinale, Paris, 1911.
Bulletin de l’Académie nationale de médecine, séance du 10 mars 1936, Allocution prononcée au nom de l’Académie de médecine aux obsèques de M. Arnold Netter, par M.R. Debré.

Robert Weyl (1996)

Netter de Bouxwiller

9. Hirtzel,
Hoffagertt, banquier, munitionnaire, fermier du sel et du fer (★ Bouxwiller vers 1700 d. Bouxwiller 1776). ∞ Edel Lippmann, fille de Raphaël Lippmann, banquier à Bouxwiller; 5 enfants, dont Raphaël © 13, Isaac © 14. ∞ II Kendel Ochs. Importante activité au service du Landgraf de Hess-Darmstadt, des comtes de Linange-Dabo, Hohenlohe et du duc de Deux-Ponts; ferme du fer à Tieffenbach et Frohmühl; associé dans diverses affaires avec Moïse Blien©. La position marginale adoptée par les juifs du comté de Hanau-Lichtenberg par rapport aux autres juifs de la province explique l’absence de Hirtzel parmi les préposés généraux de la Nation juive.

Robert Weyl et André-Marc Haarscher (1996)

 

10.Raphaël
Banquier, fermier du sel du comte de La Petite Pierre et du fer à Tieffenbach et Frohmühl (★ Bouxwiller vers 1725 d. Bouxwiller 1759). Fils de 9. ∞ I Merle Aron, fille d’Isaac Aron, banquier à Phalsbourg. ∞ II Léa Lévy, fille de Simon Lévy. Associé dans les affaires de son père, puis indépendant.
Archives départementales du Bas-Rhin, 6 E 7, 425 et Inventaire général des monuments histor., cimetière Ettendorf, 93. 67. 1299 X.

Robert Weyl et André-Marc Haarscher (1996)

11.Itzig Isaac
Rabbin (★ Bouxwiller vers 1725 d. Metz ?). Fils de 9. ∞ Nennel (Nanette) Blien (★ 12.4.1745), fille du préposé général Moyse Blien ©; 1 fille. Études à l’école rabbinique de Ribeauvillé, enseignant à l’école rabbinique de Metz, ami derabbi Uri Phoebus ben Liebermann ha-Cohen (v. Yam Issakhar).
Carmoly, Revue Orientale II, p.345; M. Ginsburger, «Les mémoriaux alsaciens», Revue des études juives, 40, 1900, p.242; R.-A. Meyer, Les Tables d’état civil de la communauté juive de Metz, 1987, p.74.

Robert Weyl et André-Marc Haarscher (1996)