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LEOPOLD III dit le Preux

Duc d’Autriche (★ 1351 † 9.7.1383, Sempach, inhumé à Koenigsfelden, Argovie).

Fils d’Albert II © et de Jeanne de Ferrette, frère de Rodolphe IV © et Albert III ©. ∞ 1365 Viridis Visconti ; 4 fils, Guillaume († 1406), Léopold IV © 2, Ernest dit de Fer (der Eiserne, † 1424) et Frédéric IV © et 3 filles. Dernier fils de Jeanne de Ferrette, confié à son aîné Rodolphe IV, L. fut reconnu majeur en 1365, après la mort de ce dernier, mais demeura dans le sillage de son frère Albert III. Tous deux reçurent le serment du Tyrol (1370), après plusieurs années d’incertitudes, mais ce n’est que le 25.7.1373 qu’il obtint le gouvernement personnel du comté alpin, de la Carniole et des possessions originelles des Habsbourg, au retour d’une croisade en Prusse (1372). D’autres accords eurent lieu en 1375, 1376, 1385 et surtout en 1379 (7.7.1379 puis 25.9.1379) : l’ensemble autrichien fut divisé en deux blocs, Albert III reçut la partie danubienne, avec Vienne, tandis qu’Albert conservait la Carinthie, la Styrie, la Carniole, le Tyrol et les pays situés à l’ouest de l’Arlberg – les futurs pays antérieurs. En Alsace et dans les régions voisines, le règne de L. fut marqué par une vigoureuse politique de présence, avec l’acquisition de nouveaux territoires comme une partie du Vorarlberg, autour de Feldkirch (1375), des droits d’Empire en Souabe (1379), la seigneurie de Hohenberg dans la vallée du Neckar (1381), et, plus près du noyau sundgovien, dans la région de Bâle. L’aide apportée à l’évêque Jean de Vienne en conflit contre les Bâlois (dont il était pourtant l’allié) se traduisit par des représailles en pays autrichien – une attaque contre Belfort en août 1374, des coups de mains sur les châteaux ou les propriétés des nobles – et par le blocus de la ville. En novembre 1375, l’évêque avait engagé le Petit-Bâle à L. pour 30 000 florins, mais, comme ce faubourg de la rive droite du Rhin était encore aux mains des Bâlois, il lui avait provisoirement cédé Liestal et d’autres terres. Par le traité conclu à Rheinfelden le 18.6.1375, la ville acceptait de faire la paix, cédant aux exigences de l’évêque et du duc ; ce dernier apparaissait donc comme le vainqueur, détenteur de l’impôt sur les juifs bâlois (25.11.1374) et, surtout, la « Reichsvogtei » que le roi Wenceslas lui avait remise le 21.1.1376. Le protectorat autrichien se prolongea jusqu’en 1382. A la suite des troubles contre la noblesse ralliée à L. (26.2.1376, « Böse Fasnacht » au cours duquel plusieurs gentilshommes furent tués), ce dernier tenta de briser les institutions démocratiques de la ville et de l’intégrer dans ses territoires (notamment du point de vue monétaire). La venue des Anglais d’Enguerrand de Coucy ©, qui revendiquait une partie de l’héritage des Habsbourg (sa mère était la fille de Léopold 1er) mit un terme à l’alliance avec Jean de Vienne, à partir de l’automne 1375 et ne lui permit guère de poursuivre cette politique, contrariée par la désignation de trois évêques rivaux. Elle se solda par un accord avec Coucy, qui reçut les seigneuries de Nidau et de Büren (1384). En Alsace même, L. semble avoir cherché à consolider ses positions dans les secteurs les plus fragiles, notamment dans la Porte de Bourgogne (Florimont engagée à Hans von Walbach en 1368, confirmation des franchises d’Héricourt en 1378), ou au nord du landgraviat, avec les privilèges judiciaires et monétaires de Bergheim (1375) puis en janvier 1386, la reconnaissance des droits des cousins Werlin et Friedrich von Hattstatt sur le château du Reichenberg, en échange d’un certain nombre de droits sur cette même ville. A l’égard des possessions les plus anciennes, on peut signaler un appui renouvelé aux villes, comme Masevaux (qui se voit accorder Pumgeld, 1368, 1379), Ensisheim (notamment une foire, 1382), et, inversement, un appui demandé à celles-ci, pour rembourser des sommes empruntées au comte Egon von Freiburg, 1379, 1385). Son adhésion à la Papauté d’Avignon (1380) semble s’être inscrite dans un rapprochement avec la Bourgogne (projets matrimoniaux à propos de Léopold IV © 2). Elle fut le prétexte d’une coalition de villes de Haute-Allemagne, la Ligue de Constance, notamment Zurich et Berne et, au- delà, avec Lucerne. Les hostilités commencèrent fin 1385 par des attaques contre les terres des Habsbourg, notamment Rapperswil. On assista dès lors à d’intenses préparatifs de guerre, principalement en Alsace, notamment lors d’une trêve de février à juin 1386. Le 9.7.1386, l’armée féodale rassemblée par le duc, aux côtés duquel s’étaient engagée la fine fleur de l’aristocratie rhénane, rencontra les milices de Lucerne et des anciens cantons suisses : la bataille eut lieu non loin de la petite ville de Sempach, sur une surface qui ne permettait pas à la chevalerie de manœuvrer; elle se traduisit par une victoire éclatante pour les Confédérés: outre L., ce sont plusieurs centaines de chevaliers et d’écuyers qui laissèrent leur vie dans ce combat (J. von Koenigshoven parle de 400 tués, chiffre très probable), notamment Johann von Ochsenstein, Landvogt de Haute-Alsace. Cultivé par la noblesse alsacienne, le souvenir de Sempach et de L. le Preux alimenta les conflits contre les Suisses jusqu’à la Guerre souabe de 1499.

B. Hertzog, Chronicon Alsatiae, Strasbourg, 1592 (iconographie) ; M. Herrgott, Monumenta…aug. domus Austriacae, St- Blaise, 1737 (iconographie) ; Th. von Liebenau, Die Schtacht bei Sempach, Lucerne, 1886 (complété par des Urkunden) ; P. Ristelhuber, L’Alsace à Sempach. Etude historique, Paris, 1886, 48 p. ; E. Sitzmann, La noblesse de la Haute-Alsace à la bataille de Sempach, RCA, 1886, p. 420-431 ; NBD, t. 14, p. 287-289 ; O. Stolz, Geschichte des Landes Tirol, Innsbruck, 1955 ; G. Boesch, « Die Gefallenen der Schlacht bei Sempach aus dem Adel des deutschen Südwestens », Alemannisches Jahrbuch, 1958, p. 233-278 ; K. Schadelbauer, Das Raitregister des Elsässer Landvogtes Graf Rudolf von Habsburg (1375), innsbrucker Archivnotizen zur Geschichte der österreichischen Vorlanden, Innsbruck, 1965, p. 3-8; B. Lang, Der Guglerkrieg. Ein Kapitel Dynastengeschichte im Vorfeld des Sempacherkrieges, 1982 ; M. de Reinach- Hirtzbach, « 600e anniversaire de la bataille de Sempach», ASHS, 1985, p. 125-140 ; B. Hamann, Die Habsburger. Ein biographisches Lexikon, Vienne, 1988.

Georges Bischoff (1995)