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LEOPOLD d’AUTRICHE

Archiduc, prince-évêque de Strasbourg (1608-1625), prince-abbé de Murbach et de Lure, (c) (★ Graz, Styrie, Autriche, 9.10.1586 † Schwaz, Tyrol, Autriche, 13.9.1632, inhumé à la Hofkirche d’Innsbruck, Tyrol). Après avoir résigné ses évêchés en 1625, ∞ 19.4.1626 Claude de Médicis ; 3 enfants: Ferdinand Charles, prince territorial du Tyrol; Sigismond François, évêque d’Augsbourg, de Gurk (Carinthie) et de Trente, cardinal ; Marie Léopoldine qui épousa l’empereur Ferdinand III.

Fils de Charles II d’Autriche, duc de Styrie, et de Marie de Bavière ; frère du futur empereur Ferdinand II. Selon la coutume, il fut pourvu de bénéfices ecclésiastiques dès son plus jeune âge et, en 1598, de l’Evêché de Passau et de la coadjutorerie à Strasbourg. Elève des Jésuites à Graz, il resta toute sa vie étroitement attaché à la Société de Jésus. De fait, à peine avait-il été mis en possession de l’Evêché de Strasbourg par les chanoines catholiques du Grand Chapitre (janvier 1608), qu’il s’employa à poursuivre l’œuvre de son prédécesseur, le cardinal Charles de Lorraine ©. Celui-ci avait décidé d’élever un gymnase près du collège des Jésuites de Molsheim. L. le construisit, en grande partie de ses deniers. En fait, cet établissement achevé en 1614 et confié à la direction des Jésuites devint, sous le nom de Leopoldianum, un véritable séminaire épiscopal. Pour compléter son œuvre, l’archiduc fonda 12 places destinées à des jeunes gens pauvres originaires de l’Evêché qui se destinaient au sacerdoce et qui furent reçus gratuitement. Les abbés bénédictins, de leur côté, furent invités à envoyer des jeunes religieux au séminaire. Ainsi, tout en assurant une meilleure préparation à la prêtrise, L. engageait-il un processus qui devait conduire à harmoniser la formation du clergé régulier et séculier du diocèse. Il entreprit aussi, en complément de ces bâtiments destinés à l’enseignement, une magnifique et très spacieuse église, achevée en 1617. Enfin L. couronna son œuvre en intervenant tant auprès du pape Paul V (bulle du 1.2.1617) que de l’empereur Mathias (diplôme du 1.9.1617) pour obtenir l’érection des classes supérieures en Académie habilitée à conférer des grades universitaires pour les arts libéraux et la théologie. Toute cette activité ainsi que les bâtiments nouvellement construits allaient conduire à faire de Molsheim le centre du diocèse, au sens spirituel. L’institution d’un conseil ecclésiastique siégeant à Molsheim (1613), présidé par le vicaire général également official, fut une innovation de grande conséquence pour le diocèse de Strasbourg. L’une des premières tâches qu’eut à accomplir la jeune institution, sur l’ordre de L., fut la visite du diocèse (1614-1617). Des dispositions furent alors prises par L. (1617) sous la forme de créations d’écoles de village et de l’organisation de l’enseignement (Schulordnung). Une grande préoccupation de L. fut, en conformité avec les décrets du Concile de Trente, d’amener les abbés (soucieux de préserver le privilège de l’exemption) à reconnaître l’autorité de l’évêque tant en ce qui concerne les élections à l’intérieur des monastères que pour l’administration des cures régulières à l’extérieur. Titulaire lui-même, depuis 1614, des abbayes de Murbach et de Lure, il disposait ainsi d’un moyen de montrer l’exemple. En 1623, il parvint à y imposer la réforme. L’année suivante, il obtint le détachement des sept abbayes bénédictines (Gengenbach, Ettenheimmünster, Schuttern, Schwarzach pour la rive droite du Rhin, Marmoutier, Ebersmünster, Altorf pour la rive gauche) de la congrégation de Bursfeld et la constitution d’une province de Strasbourg avec ses statuts propres pour mieux les contrôler. A cette date, toutefois, le diocèse de Strasbourg n’était plus au centre de ses préoccupations. En 1609, déjà, il avait reçu mission de mettre le duché de Juliers sous séquestre au nom de l’empereur. Puis il avait tenu une grande place dans la fondation, aux côtés du duc de Bavière, de la Ligue catholique. En 1619, il prit la succession de son frère, devenu l’empereur Ferdinand II, comme gouverneur du Tyrol et de l’Autriche antérieure. En 1625, il remit entre les mains du pape ses évêchés afin de se marier. Pour ce prince de la contre-réforme, la défense de l’Eglise romaine ne pouvait être dissociée, dans son esprit, de l’Empire. Les Habsbourg étaient déjà solidement implantés en Haute Alsace et dans le Sundgau. L’épiscopat de L. contribua à étendre leur influence sur la Basse Alsace, grâce à une clientèle issue des Etats patrimoniaux qu’il introduisit dans les postes de son gouvernement temporel ou spirituel, et en consolidant, au Grand Chapitre, le groupe des chanoines-comtes favorables aux intérêts de sa famille. Cette situation n’eut pas que des avantages pour l’Alsace puisqu’elle l’exposa aux représailles dès 1610 – et encore plus après la bataille de la Montagne Blanche (8.11.1620) – de ceux qui étaient en conflit avec les Habsbourg.

ABR, G 1419 ; G 1741 ; P.A. Grandidier, Œuvres historiques inédites, IV, Colmar, 1866 ; A. Gatrio, Die Abtei Murbach in Elsass, Strasbourg, 1895; A. Steinhuber, Geschichte des Kollegium Germanikum Hungaricum in Rom. I, Fribourg Br., 1906, p. 374-375, 388-391 ; Sitzmann II, 141 ; P. Volk, Die Statuten der Strassburger Benediktiner-Kongregation vom Jahre 1624, AEKG, 1933, p. 317-370 ; J. Schmidlin, Die katholische Restauration im Elsass am Vorabend des Dreissigjäjrigen Krieges, Strasbourg, 1934 ; idem, Religiössittliche Verfassung und Reformbestrebungen im Weltklerus des Elsass am Vorabend des Dreissigjährigen Krieges, AEKG, 1943, p. 135-204 ; P. Delattre, Les établissements des Jésuites en France depuis quatre siècles, III, Enghien-Wetteren, 1949-1956, c. 385-429, en part. c. 392-398; H. Tüchle (hrsg.), Acta de Propaganda Fide Germaniam Spectantia. Die Protokolle der Propagandakongregation zu deutschen Angelegenheiten 1622-1649, Paderborn, 1962 ; Histoire de l’Alsace, s. d. Ph. Dollinger, Toulouse, 1970, p. 265-272 ; L. Châtellier, Tradition chrétienne et renouveau catholique dans l’ancien diocèse de Strasbourg (1650-1770), Paris, 1981, p. 78, 93-94, 149-150, 161 ; EA VIII, 1984, p. 4710 ; NDB XIV, 1985, p. 290-293 ; Répertoire des visites pastorales de la France. Première série. Anciens diocèses (jusqu’en 1790), IV, Paris, 1985, p. 390-391.

Louis Châtellier (1995)