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LAVELLE Louis

Philosophe, universitaire, (C) (★ Saint-Martin-de-Villeréal, Tarn-et-Garonne, 15.7.1883 † Parranquet, Lot-et-Garonne, 1.9.1951).

Fils de François L. (1857-1919), instituteur, et de Marie Jeanne Elisabeth Sylvain (1859-1932). ∞ 31.7.1913 à Le Pontet, Vaucluse, Julie Bernard (★ Montpellier 16.6.1885 † 18.4.1976) ; 4 enfants. Agrégé de philosophie en 1909, docteur ès lettres (philosophie) en 1922, L. eut une carrière extrêmement variée. Professeur de lycée, il enseigna dans divers lycées et fut nommé, après la Première Guerre mondiale, professeur au lycée Fustel de Coulanges à Strasbourg, où il exerça de 1921 à 1924 une profonde influence. Cette nomination est en elle-même significative : tant au niveau de l’Université que des grands lycées, le Gouvernement s’efforçait de nommer des hommes d’élite, capables de susciter l’amour de la culture française. C’est pendant sa période strasbourgeoise que L. soutint à la Sorbonne ses deux thèses de doctorat d’Etat : La dialectique du monde sensible et La perception visuelle de la profondeur, publiées à Strasbourg en 1922. La réputation de L. lui ouvrit directement les portes de la Sorbonne en 1932. Il ne devait y rester que deux ans. Conscient de l’importance de l’enseignement de la philosophie, il accepta un poste d’inspecteur général de l’Instruction publique, poste qu’il quitta après son élection au Collège de France en 1937. Signalons qu’après la défaite, L. occupa très brièvement des fonctions de directeur au Secrétariat d’Etat à l’Education nationale à Vichy. L’entrée de L. à la Sorbonne marqua un tournant important dans l’histoire de la philosophie universitaire, la fin du règne de philosophes tels que Léon Brunschvicg pour qui la philosophie était essentiellement tributaire du progrès de la conscience éclairée par la science. L’idéalisme de Brunschvicg (cf. son Introduction à la vie de l’Esprit) était essentiellement une ascèse de l’esprit par la critique scientifique, un accès de l’esprit à l’universel, tout le contraire d’un personnalisme. L. eut le courage de restaurer dans toute sa vigueur une anthologie métaphysique qui s’exprime de façon éminente dans les deux volumes de la Dialectique de l’éternel présent : De l’Etre, 1928, De l’Acte, 1937, à quoi il convient de joindre : Du Temps et de l’Eternité, 1945, et Introduction à l’ontologie, 1947. Il y a pour L. identité de l’être et de l’acte. La seconde dimension de sa réflexion philosophique est l’approfondissement et l’épuration spirituelles de la conscience de soi par un consentement à l’Etre (La conscience de soi, 1933 ; La présence totale, 1934 ; Le moi et son destin, 1936; L’erreur de Narcisse, 1939; Le mal et la souffrance, 1940 ; Les puissances du moi, 1948 ; Quatre saints, 1951 ; De l’intimité spirituelle, 1955 ; Conduite à l’égard d’autrui, 1957, etc.). Enfin, face à une éthique qui tendait à se restreindre à «une science de moeurs» (L. Levy-Bruhl), L. restaura une éthique fondée sur des valeurs spécifiques : Traité des valeurs, Paris, 1950-1955, 2 vol. L’orientation nouvelle que L., soutenu par René Le Senne, voulait insuffler dans la pensée philosophique, devait trouver un moyen d’expression approprié. Ce fut la création de la collection «Philosophie de l’Esprit» (Aubier), collection annoncée par un véritable manifeste. Cette collection s’ouvrit à des hommes comme Aimé Forest, Henri Gouhier, Gabriel Marcel, Maurice Nédoncelle, Maurice Pradines, Paul Ricœur. Elle eut également le souci de faire connaître par des traductions des philosophes étrangers, trop peu connus en France, tels Kierkegaard, Max Scheler, Solovief, Berdiaeff, etc. Face aux publications d’Alcan, maison alors très marquée par le positivisme et l’idéalisme scientifique, la collection «Philosophie de l’Esprit» a non seulement préparé, mais inauguré la phénoménologie et l’explosion existentialiste. L. fut élu à l’Académie des Sciences morales et politiques en 1947.

Pour une bibliographie complète, voir J. Ecole, La métaphysique de l’être dans la philosophie de Louis Lavelle, Louvain-Paris, 1957.
J. Paliard, Du Temps et de l’Eternité (de Louis Lavelle), Les Etudes philosophiques, janv.-mars 1946, p. 34-39 ; G. Davy, Louis Lavelle, ibidem, oct.-déc. 1957, p. 319-326, portrait ; J. Ecole, Cheminements et perspectives de la métaphysique Lavellienne de l’être, ibidem, oct.-déc. 1957, p. 327-334 ; J. Lacroix, Consentement et création, ibidem, oct.-déc. 1957, p. 335-339 ; J. Pucelle, L’agir et le pâtir, ibidem, oct.-déc. 1957, p. 340-352 ; L. Lavelle, Sur la notion d’existence (inédit), ibidem, janv.-mars 1958, p. 3-14 ; G. Davy, Louis Lavelle (suite), ibidem, janv.-mars 1958, p. 15-31 ; A. Forest, Lavelle et Malebranche, ibidem, janv.-mars 1958, p. 32-46 ; P. Levert, Le problème de l’objet dans la philosophie de Louis Lavelle, ibidem, janv.-mars 1958, p. 47-52 ; M. F. Sciacca, Souvenir de Louis Lavelle, ibidem, janv.-mars 1958, p. 53-59 ; J. Lacroix, Un philosophe de consentement : Louis Lavelle, Panorama de la philosophie française contemporaine, Paris, 1966, p. 48-55 ; P. Levert, L’Etre et le Réel selon Louis Lavelle, Paris, 1960 ; Catholicisme VII, 1975, c. 89-92 ; Dictionnaire de spiritualité IX, 1975, p. 859 ; Dictionnaire des philosophes II, Paris, 1984, p. 1530-1531.

Roger Mehl (1994)