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KREUTZBERGER Charles

Peintre, graveur et poète, (Pr) (★ Guebwiller 14.12.1829 † Paris XIVe 1.9.1904).

Frère cadet de Frédéric-Guillaume Kreutzberger ©. ∞ vers 1873 N. N. († 1886) ; 1 fille, Jeanne (1874-1893), et 1 fils adoptif, Victor (★ vers 1872). Kreutzberger reçut sa première formation artistique en suivant, avec son frère Frédéric-Guillaume, le cours de dessin des « Cours populaires » de Guebwiller, créés par l’industriel Jean-Jacques Bourcart © 2. De 1848 à 1855, il séjourna à Strasbourg, apprenant la lithographie dans l’atelier d’E. Simon ©, participant à l’illustration du Strasbourg illustré de F. Piton ©, paru en 1855, et suivant les cours du peintre et illustrateur alsacien Eugène Laville ©, dont il se considéra toute sa vie comme l’élève et dont il devint l’ami. En 1856, il séjourna en Italie, travaillant chez un imprimeur-lithographe à Turin et suivant l’enseignement artistique de l’Académie royale sarde. Dès 1855 peut-être, à son retour d’Italie au plus tard, Kreutzberger acheva sa formation artistique à l’École des Beaux-Arts de Paris. Installé définitivement dans la capitale, il y retrouva la famille de son frère Frédéric-Guillaume, auquel il était très lié. Il garda cependant toujours le contact avec sa province et sa ville natale. De caractère gai, jovial et très sociable, il fréquenta assidûment la colonie artistique et intellectuelle alsacienne, tout particulièrement ses compatriotes guebwillerois, les frères Richard et Théodore Deck © – il fut un habitué de leurs dîners hebdomadaires –, le publiciste Reiber, de Sélestat, ou encore le peintre strasbourgeois Gustave Jundt © dont il fut l’ami et le voisin d’atelier. Fervent patriote, il fut très affecté par la guerre de 1870 et l’annexion de l’Alsace-Lorraine. Engagé volontaire dans la Garde nationale, il participa à la défense de Paris, mais n’adhéra pas à la Commune malgré ses fortes convictions républicaines. Après l’armistice, il appartint, avec les frères Deck et le peintre Glück © entre autres, au Comité des Alsaciens-Lorrains qui, sous la présidence de Charles Lauth ©, rédigea une protestation contre le projet de cession des provinces de l’Est. Cette pétition, revêtue de plus de 7 000 signatures, fut déposée par Léon Gambetta © sur le bureau de l’Assemblée nationale à Bordeaux. La deuxième partie de sa vie, très positive sur le plan artistique, fut assombrie par une longue brouille avec son frère, qui désapprouvait formellement son mariage et ne se réconcilia avec lui qu’après la disparition de sa femme, et le décès de sa fille Jeanne. Kreutzberger aurait au début de sa carrière (à Guebwiller ? à Strasbourg ?) exercé pendant dix ans le métier d’écrivain lithographe ou de « peintre en lettres ». Cependant, dès 1856 et jusque vers 1900, il eut une activité de peintre-graveur et de lithographe, réalisant de nombreux portraits de membres de sa famille ou de proches – les meilleurs sont ceux de son père Jean Kreutzberger et de sa sœur aînée Rose –, publiant des eaux-fortes consacrées par exemple aux monuments de Paris, composant des paysages. Il exposa au Salon de 1861 à 1872, à la Société des amis des arts de Strasbourg en 1864, à la Société des arts de Mulhouse en 1876 et 1879, et prit part à l’exposition du centenaire de la lithographie à Paris en 1895. Il créa également quelques sujets reproduits en faïence par Théodore Deck, dont il avait publié le portrait dans la Gazette des Beaux-Arts en 1891 et gravé en 1887 le chiffre et la devise d’après un dessin du peintre strasbourgeois François Ehrmann ©. Mais Kreutzberger dut sa réputation avant tout à son talent de dessinateur et graveur d’illustration, activité qui devint prépondérante dans sa production à partir de 1875. Dès 1857, il collabora à un certain nombre de publications périodiques, comme Le Musée français-anglais et le Journal amusant, tous les deux dirigés par Charles Philippon, l’Art pour tous, fondé par Reiber, l’Art contemporain, l’Art. En 1872 et 1873, l’Illustration publia ses remarquables gravures d’après les dessins du suisse K. Bodmer, représentant des sous-bois de la forêt de Fontainebleau. Il fut également l’illustrateur d’un bon nombre d’ouvrages, tels que la Musikalische Geschichte der Stadt Gebweiler (Mulhouse, 1868), de Charles Kienzl ©, qu’il orna de cinq portraits à l’eau-forte, les Merveilles de l’art et de l’industrie (Paris, 1869), de Jules Mesnard, l’Ornement des tissus (Paris, 1877), de Dupont-Auberville pour lequel il créa cent planches en couleurs ou encore certains des ouvrages de vulgarisation scientifique de Louis Figuier. Plusieurs titres de la « Bibliothèque de l’enseignement des beaux-arts », publiée par Quantin, lui doivent leur illustration, comme par exemple La faïence, de Th. Deck, paru en 1887. Dans les années 1890, Champfleury lui confia celle de ses ouvrages sur l’imagerie populaire, sur la caricature à travers les âges et sur Henry Monnier. Vers 1897, Kreutzberger entra au service de la maison Larousse et grava, pour le Nouveau Larousse illustré, toutes les reproductions de tableaux de maître, jusqu’à La Source, d’Ingres, qui fut sa dernière œuvre. Kreutzberger fut aussi poète, composant en alsacien, en allemand et en français de nombreux poèmes, dont la famille conservait plusieurs volumes manuscrits, et dont une faible partie fut publiée dans l’Elsässisches Samstagsblatt de Mulhouse (en 1865 et 1866), le Journal de Guebwiller (de 1865 à 1868), La feuille du Samedi, de Strasbourg (en 1868), la Bibliothèque Alsacienne, de Strasbourg (en 1868), L’Alsacien, de Paris (en 1893).

Œuvres conservées à la Bibliothèque nationale, département des Estampes (Inventaire du fonds français après 1800, XII, Paris, 1963, p. 45) et au Musée du Florival à Guebwiller (Assiette Franklin, gravure par Deck).

Correspondance inédite de Kreutzberger avec Champfleury, conservée à la Bibliothèque d’art et d’archéologie, Paris ; G. K. Nagler, Die Monogrammisten, II, Munich, p. 187 ; A. Morpain, L’Alsace à l’exposition des beaux-arts de Paris (1864), Strasbourg-Paris, 1864, p. 12-13 ; idem, Exposition des beaux-arts de Paris de 1865. Les Alsaciens, Strasbourg, 1866, p. 9 ; E. Müntz, « Les artistes alsaciens contemporains et les arts en Alsace », Revue d’Alsace, 1869, p. 285; R. Ménard, L’Art en Alsace-Lorraine, Paris, 1876, p. 177 ; Compte rendu de l’exposition des beaux-arts ouverte à Mulhouse le 16 mai 1879, Mulhouse, 1879, p. 27 ; Catalogue de la collection d’alsatiques (estampes et livres) de Ferdinand Reiber, Strasbourg, 1896,passim ; Thieme-Becker, Allgemeines Lexikon der bildenden Künstler von der Antike bis zur Gegenwart, XXI, 1927, p. 518 ; Ch. Kreutzberger (neveu de l’artiste), Souvenirs sur le peintre-graveur Ch. Kreutzberger, Guebwiller, 1928 ; C. Wetterwald, Guebwiller à travers son passé, Guebwiller. 1971, p. 136 ; Visions romantiques de l’Alsace, catalogue d’exposition, Strasbourg, 1976, p. 22 et 50 ; Bénézit, Dictionnaire critique… des peintres, sculpteurs, dessinateurs…, VI, p. 314 ; Encyclopédie de l’Alsace, VIII, 1984, p. 4571- 4572 ; Bauer-Carpentier, Répertoire des artistes d’Alsace des dix-neuvième et vingtième siècles, Peintres-sculpteurs-graveurs-dessinateurs, Strasbourg, III, 1986, p. 201 ; F. Gueth, Le chiffre de Théodore Deck, Mémoires du Florival, 1989, n° 2, p. 8-11 ; François Lotz (en collabor. avec J. Fuchs), Artistes-peintres alsaciens d’un temps ancien (1800-1880), Kaysersberg, p. 195 ; Dictionnaire de biographie française, XVIII, 1993, c. 1274 (sous Frédéric-Guillaume Kreutzberger).

Iconographie : portrait lithographié de Kreutzberger par E. Simon, conservé au Cabinet des Estampes de Strasbourg et reproduit dans L’Alsace du 15.4.1965.

Francis Gueth (1994)