Skip to main content

KEPPI Jean

Homme politique, (C) (★ Mulhouse 26.11.1888 † Dachstein 19.2.1967).

Fils de Jean Keppi, boulanger à Mulhouse, et de Philomène Jermann. ∞ 21.11.1914 à Dornach Rose Ettlin, fille d’Othon Ettlin, chiffonnier en gros, et d’Anne Marie Rey. Keppi fit des études primaires à Mulhouse-Dornach, entra pour six mois à l’École normale d’instituteurs de Colmar, puis poursuivit sa scolarité à l’Oberrealschule de Mulhouse. De 1908 à 1913, il étudia l’économie politique et le droit public aux universités de Zurich et de Strasbourg. À partir de 1909, Keppi entretint une correspondance avec Carl Sonnenschein, le fondateur du Secrétariat social étudiant de Mönchengladbach, dont le but était de rapprocher les étudiants des milieux populaires. Keppi s’enthousiasma pour l’action sociale et organisa, en mars 1910, un cours de vacances pour ouvriers et employés à Mulhouse. Les cours étaient faits par des étudiants et furent un succès. Cinq sessions de cours eurent lieu de 1910 à 1912. À l’automne 1910, il fit un stage de formation à Duisbourg et il semble qu’il passa dix semaines à Mönchengladbach en 1912, grâce à une bourse de la fondation Saint-Léon. De ces contacts étroits avec Mönchengladbach, il garda toujours le sens de l’action sociale concrète et le souci d’une liaison permanente avec les milieux populaires. Keppi fut membre de l’Erwinia, la plus puissante corporation étudiante catholique strasbourgeoise à la veille de la guerre. Il y rencontra Charles Moschenross, Joseph Brauner ©, les frères Kraehling ©, et bien d’autres qui se retrouvèrent avec lui à l’aile gauche de l’Union populaire républicaine (UPR). Ses qualités d’organisateur en firent une des chevilles ouvrières de la corporation. En 1912, il publia dans l’Elsässer une série d’articles pour défendre l’idée d’une participation plus active des étudiants à la vie politique. Dès 1911, Keppi participa à la vie du Centre alsacien-lorrain et à la campagne de Martin Spahn © à Mulhouse, lors des élections pour le Landtag. En 1913, il publia une brochure, Die Zeitungen Elsass- Lothringens. Eine statistische Studie, où il mettait en évidence l’infériorité numérique de la presse catholique face à la presse neutre ou adverse, et insistait sur la nécessité de la développer, afin de donner une solide assise au Centre alsacien-lorrain. Secrétaire permanent du Centre alsacien-lorrain à partir d’avril 1913, il se consacra totalement à l’organisation du parti, suscitant la création de sections, créant un organe de liaison, l’Elsass-Lothringische Centrumskorrespondenz, encourageant le développement du Windthorstbund et de groupes de jeunes. Keppi était partisan du ralliement des catholiques alsaciens au Zentrum allemand et d’une collaboration étroite avec le catholicisme social rhénan. Incorporé comme simple soldat en août 1914, il termina la guerre comme lieutenant sur le front ouest. Après le retour à la
France, il participa à la création de l’UPR. Secrétaire général du nouveau parti, dès février 1919, il déploya une activité intense pour relancer les sections et créa un organe de liaison, la Correspondance populaire. Il se situa d’emblée à l’aile gauche, populaire et très vigoureusement régionaliste, de l’UPR, et publia, dans la Correspondance populaire du 13 mai 1919, le fameux article « Weg mit dem Ballast », pour écarter la candidature de Wetterlé © et de Laugel © aux élections législatives. Le succès de l’aile droite, ou « nationale », à l’assemblée générale du 4 août 1919, lui fit perdre son siège au comité directeur de l’UPR et le contraignit à démissionner du secrétariat général. Élu conseiller municipal de Strasbourg sur une liste d’union des partis politiques, le 30 novembre 1919, il devint adjoint au maire chargé du ravitaillement et du logement ; il démissionna en octobre 1922.

Il fut le fondateur et l’animateur de la Revue communale d’Alsace et de Lorraine (1921-1924) qui se prononçait pour le maintien de la loi communale allemande. Keppi tenta de relancer le Volksverein en Alsace, mais échoua devant l’opposition de Mgr Ruch ©, l’évêque de Strasbourg. Il fut l’un des fondateurs du Cercle Ozanam qui devait pallier la disparition des corporations étudiantes. En 1926, il participa à la création d’une corporation étudiante, l’Alsatia. Fin 1922, Keppi fut nommé secrétaire général de la ville de Haguenau, fonctions qu’il exerça jusqu’en 1936. Avec l’abbé Gromer © et Charles Moschenross, il y constitua un des foyers les plus actifs de l’aile gauche de l’UPR, dont le but était d’imposer une politique de Volksfront, c’est-à-dire une alliance entre l’UPR et les partis autonomistes. Le manifeste du Heimatbund du 5 juin 1926 fut imprimé à Haguenau. Secrétaire général du Heimatbund, Keppi fut contraint de démissionner de l’UPR en février 1927. En mai de la même année, il démissionna du Heimatbund et réintégra les rangs de l’UPR. En avril 1928, lors des élections législatives à Haguenau, il lança, avec Gromer et Moschenross, la candidature de l’autonomiste René Hauss © contre le gérant de l’UPR, Michel Walter ©. Ils négocièrent le retrait de Hauss au second tour de scrutin contre le soutien de Walter à une politique de Volksfront. C’est ainsi qu’une coalition de l’UPR et des partis autonomistes s’empara de la mairie de Strasbourg en mai 1929. En février 1930, le comité directeur de l’UPR fit appel à Keppi pour remettre de l’ordre dans les finances du parti. En 1936, il dut quitter la mairie de Haguenau à la suite de la défaite de l’UPR aux élections municipales de 1935. On lui confia alors les fonctions de 3e vice-président de l’UPR, chargé de l’organisation. Il créa une Association de la presse d’Alsace et de Lorraine pour soutenir la presse catholique. Il fut un des maîtres d’œuvre de Das Elsass von 1870-1932, publié par les Éditions Alsatia de 1936 à 1938. Il composa, en particulier, le volume IV de documents et statistiques. En octobre 1939, Keppi fut arrêté à Périgueux, sous l’inculpation d’atteinte à la sûreté de l’État, et fut transféré, avec d’autres membres de l’aile autonomisante de l’UPR, à Nancy. Libéré le 14 juillet 1940 sur injonction des Allemands, il dut signer, le 18 juillet 1940, le Manifeste des Trois-Épis qui demandait l’intégration de l’Alsace au IIIe Reich. À partir de mars 1941, il exerça les fonctions de commissaire aux réfugiés près du chef de la Zivilverwaltung. En juillet, il y ajouta la direction de l’Ansiedlungsstelle für Volksdeutsche aus Frankreich. Fin 1943, Rossé © lui confia la direction de l’imprimerie de l’Elsässer, reprise par le groupe de l’Alsatia. Dès 1942, Keppi fut en contact avec la résistance allemande à Hitler, en particulier avec l’ancien dirigeant syndical catholique, Jakob Kaiser. En juin 1943, les conjurés du groupe Gördeler prirent contact avec Keppi, qui en informa les milieux UPR de Colmar. Ils élaborèrent un plan d’action pour assurer la transition en Alsace et en Moselle, dans l’hypothèse d’un succès du complot contre Hitler ; elles seraient gouvernées, en attendant le rétablissement de la légalité républicaine, par les conseils généraux. Keppi remit un catalogue de conditions à Gördeler, lors d’une entrevue à Stuttgart, en septembre 1943. On y exigeait, en particulier, la libération immédiate des Alsaciens enrôlés de force, celle des Alsaciens emprisonnés, et le retour des exilés. À la suite de l’échec de l’attentat contre Hitler du 20 juillet 1944, un mandat d’arrêt fut lancé contre Keppi, en novembre 1944. Après la Libération, Keppi comparut comme prévenu libre devant la Cour de justice de Strasbourg, en août 1947. Il fut condamné à 15 ans d’indignité nationale et à la restitution de l’indemnité versée par les Allemands aux « Nancéens », puis aussitôt réhabilité pour « services éminents rendus à la résistance à l’occupant ». À partir de 1946, il assura le service juridique de l’Ami du Peuple.

Die Zeitungen Elsass-Lothringens. Eine statistische Studie über ihre geographische und politische Verteilung und ihren Inhalt, Strasbourg, 1913 ; Wohnungsfrage und Wohnungspolitik, Strasbourg, 1921 ; Das Elsass von 1870-1932, Colmar, 1936-1938.

Papiers Keppi ; Papiers Gromer ; Correspondance populaire ; Haegy I, passim ; L. Kettenacker, Nationalsozialistische Volkstumspolitik im Elsass, Stuttgart, 1973 ; P.-J. Schaeffer, L’Alsace et l’Allemagne de 1945 à 1949, Metz, 1976 ; P. C. F. Bankwitz, Alsatian autonomist leaders 1919-1947, Regents Press of Kansas, 1978 ; M. Sturmel, « Das Elsass und die deutsche Widerstandsbewegung in der Sicht eines ehemaligen Abgeordneten der Elsässischen Volkspartei », Landesgeschichte und Zeitgeschichte, Karlsruhe, 1980 ; Chr. Baechler, Le parti catholique alsacien (1890-1939). Du Reichsland à la République jacobine, Strasbourg-Paris, 1982, portrait ; Encyclopédie de l’Alsace, VII, 1984, p. 4451 ; Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine, L’Alsace, sous la dir. de B. Vogler, Paris, 1987, p. 230-232.

Christian Baechler (1993)