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CHEVALLIER Marjolaine, Emma, Rosette

Philosophe, historienne de l’Eglise (Pr) (* 29.10.1931, Tunis).

Fille de Jean-Charles Cuénod, agriculteur (1897, Tunis-1964), colon en Tunisie de 1925 à 1959  (son père suisse, le Dr Auguste Cuénod, oculiste, arrivé à Tunis en 1895, avait pu réintégrer la nationalité française, grâce à des ancêtres huguenots réfugiés en Suisse), et de Ida-Mary Bugnon (* 1899, Suisse, … 1979, Strasbourg ; ¥ 2.8.1930, Lausanne) ; 1 frère jumeau, (Daniel C.) ; ¥ Paris 29.7.1952/Bursins, Suisse, 2.8.1952, Max-Alain Chevallier©, pasteur (* 7.5.1922, Cercoux, Charente-Maritime, … 24 janv. 1990, Strasbourg) ; deux fils (Pierre 1953, Luc 1961) et deux filles (Maïa 1955, Claire 1958) naîtront de cette union.

Les jumeaux passent leur enfance et une scolarité à épisodes à Bir M’cherga, près de Zaghouan (au Sud de Tunis), où ils fréquentent un an l’école primaire et suivent des cours par correspondance jusqu’à la 4e, avec les parents et parfois une institutrice. Après une période de guerre en Tunisie en 1942-43, M.Ch. intègre à 13 ans le Lycée de filles de Tunis. Elle y est scolarisée en 4e et 3e, suit la 2de  par correspondance, puis de nouveau le lycée en 1ère et terminale. Elle passe son premier Bac en 1948, le second (philosophie), en 1949. En 1950, elle achève une classe de propédeutique à Tunis, rattachée à la Sorbonne. Elle commence une première année d’études supérieures de philosophie, seule dans la ferme familiale, en correspondance avec l’Université de Montpellier, où elle passe sa licence de philosophie en 1952. Cet été-là, elle se marie avec Max-Alain Chevallier, pasteur, secrétaire général de la Fédération Française des Associations Chrétiennes d’Etudiants (1949-1954), venu rendre visite en 1950 à la section « Fédé » de Tunis.

M.Ch. passe avec son mari deux ans à Paris (elle suit quelques cours de philosophie ; avec Jean Wahl (spécialiste de Kierkegaard), elle rédige un mémoire sur « Le temps chez Kierkegaard ») ; puis une année en 1954-55 à Cambridge où Max-Alain est boursier du Conseil Œcuménique des Eglises. De 1955 à 1961, il est pasteur à Hussein-Dey (près d’Alger), puis de 1961 à 1963, président de l’Eglise Réformée d’Algérie. En 1963, il entre à la faculté de théologie protestante de Strasbourg, comme enseignant au Centre d’Etudes et de Pratiques Pédagogiques (C.E.P.P.), créé par le professeur René Voeltzel©, tout en terminant sa thèse de doctorat en Nouveau Testament.

A Strasbourg M.Ch. suit quelque cours (dont le grec) à la faculté de théologie, et en faculté de lettres, ceux d’André Canivez© (philosophie morale) et de Georges Gusdorf© (philosophie générale et histoire des idées). Elle soutient un doctorat de 3e cycle en philosophie sur Pierre Poiret, 1646-1719, et sa première œuvre, les Cogitationes rationales de Deo, anima et malo, auquel elle a consacré les années 1967-1972. Etant donné que Poiret est un personnage inconnu en France, elle est encouragée à présenter un doctorat d’Etat sur ce même auteur (dont elle deviendra rapidement la spécialiste). Poiret a publié plusieurs traités philosophico-théologiques et s’est intéressé à la théologie mystique, en lien avec Jakob Böhme. Ainsi M.Ch. publie toute sa bibliographie : « Pierre Poiret », tome V du Répertoire des non-conformistes religieux du 16e et 17e s. », éd. Valentin Koerner, Baden-Baden, 1985. Elle soutient sa thèse de doctorat en Sorbonne en janvier 1988, intitulée : Pierre Poiret (1646-1719), cartésien et mystique (Tome I, 304 p. : Biographie ; T. II, p. 305-697 : La Pensée ; T. III, p. 698-1121 : travaux déjà publiés dont la bibliographie).  Il en a été tiré un volume pour grand public : Pierre Poiret, 1646-1719. Du protestantisme à la mystique, Genève, éd. Labor et Fides, Coll. Histoire et Société, 1994.

En 1988 (deux ans avant la mort de son mari, en janv. 1990), elle est nommée à la faculté de Théologie protestante, en tant que maître de conférences en histoire de l’Eglise moderne, prenant ainsi la succession de Bernard Roussel, passé à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (E.H.E.S.S.). Elle y enseigne jusqu’en 1998, date de sa retraite.

A l’étranger, M.Ch. assure pendant quelques semaines, d’août à octobre 2000, un enseignement de l’histoire de l’Eglise en Haïti ; puis en mars-avril 2002 et en mai-juin 2003 au Rwanda, à la faculté de théologie protestante de Butare. Parallèlement, elle rédige une dizaine d’articles sur Poiret (et autres sujets) dans différents dictionnaires, ou actes de colloques. Depuis 2003, elle s’occupe de la Société des Amis et Anciens de la Faculté de Théologie Protestante de Strasbourg. 

Autres activités : membre du Mouvement « Jeunes Femmes » déjà en Algérie, puis à Strasbourg, elle fait partie de son équipe centrale de 1968 à 78 ; puis du collectif du « Groupe Orsay », issu lui-même de « Jeunes Femmes ». Dès 1978, à Strasbourg, elle collabore à la création d’« Artisans du Monde » avec  Erwin Muller, aumônier à l’Aumônerie Universitaire Protestante (A.U.P).

A partir de 1979, M.Ch. fut membre du Comité exécutif de la « K.E.K. » (Konferenz Europäischer Kirchen) (Conférence des Eglises Européennes) (1979-1992),  et aussi de 1984 à 1988 du Forum Œcuménique des Femmes Chrétiennes d’Europe, créé avec d’autres par le pasteur Ruth Epting de Bâle ; elle contribua, en 1994, à la création du groupe strasbourgeois de ce même Forum. Pendant la même époque, elle fut aussi membre, puis secrétaire du Conseil Synodal de l’Eglise Réformée d’Alsace et de Lorraine, avec les présidents Christian Schmidt© et Thérèse Klipffel© (1982-1988). Localement, de 1991 à 1999, elle fut membre, puis présidente, du Conseil Presbytéral de la paroisse réformée Saint-Paul.

Par souci de vulgarisation de l’Histoire du Protestantisme en France, pour un plus large public, M.Ch. a entrepris à partir de 2009 des recherches en vue de la publication de deux romans historiques. Ils retracent l’histoire des Huguenots de Saintonge, avec des personnages de la famille Chevallier, celle de son mari (non sans quelques liens aussi avec la sienne). Le premier roman, Psaumes interdits, a paru en 2012, le second (la suite), Le ci-devant bâtard, en 2013 (même éditeur : Le Croît Vif). Marjolaine Chevallier s’était déjà fait connaître par la sagacité de ses recherches scientifiques, là elle surprend par ses qualités d’écrivain, par son style alerte, précis et sensible, nourri d’une grande érudition historique.

 

Théo Trautmann  (juillet 2014)