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VOLTAIRE François Marie AROUET dit

Homme de lettres (★ Paris 26.11.1694 † Pairs 30.4.1778). Le séjour de Voltaire en Alsace, et spécialement à Colmar (4 octobre 1753-11 novembre 1754), avec une interruption pour une cure à Plombières en juin-juillet 1754, est bien documenté, grâce à sa correspondance. Il arriva en Alsace venant de la cour de Prusse, où il se brouilla avec Frédéric II, et s’installa en Alsace pour préparer ses Annales de l’Empire. Il vécut tout d’abord à Strasbourg dès l’automne 1753 et habita une simple ferme aujourd’hui disparue sise au Wacken, à proximité de la tannerie Herrenschmidt. Mais, en réalité, il passait la majeure partie de son temps au petit château de l’Ile Jars appartenant à M. de Lutzelbourg et qu’habitaient les maréchaux de Coigny et de Contades. « Il passait là ses soirées en compagnie du maréchal de l’ex préteur Klinglin, de Schoepflin et de tout ce que Strasbourg possédait alors d’illustre dans les sciences, les arts et la noblesse » (Piton, Strasbourg illustré).
C’est de ce temps que l’Ile Jars prit le nom, sans doute erroné, de « Villa Voltaire ». En s’installant dans une maison reculée, le philosophe croyait y trouver le calme, mais fut totalement déçu dans ses espoirs. Dans sa 20e lettre à madame de Lutzelbourg (fille du préteur Klinglin), Voltaire s’en plaignait en ces termes: « J’entends beaucoup raisonner dans mon ermitage où il vient beaucoup de monde et où je ne voulais voir personne ». Il décida alors de quitter Strasbourg pour un lieu encore plus retiré. Il séjourna un temps à Luttenbach, dans la vallée de Munster où se trouvait la papeterie de son imprimeur Schoepflin, de Colmar. Les Annales furent publiées en 1754. À Colmar, « ville moitié allemande, moitié française et tout à fait iroquoise », « petite ville dévote remplie de tracasserie où tout le monde se confesse, où tout le monde se déteste », « ville de Hottentots gouvernée par des jésuites allemands », il résida dans la maison Goll (actuellement 10 rue Berthe-Molly) ; il se lia avec l’avocat Sébastien Dupont et avec Bruges ©, ne fut pas accueilli à bras
ouverts par les savants locaux, et s’opposa aux Jésuites. Les raisons de son départ pour Lyon sont peu claires : l’influence du confesseur de la Dauphine, frère du recteur du collège de Colmar (les Jésuites Kroust), y est-elle pour quelque chose ? Il essaya aussi de régler une affaire d’argent : il avait prêté dix mille livres (qui devaient
lui valoir une rente viagère et furent hypothéquées sur des vignes à Riquewihr) au duc de Wurtemberg et souhaitait rentrer dans ses fonds. Voltaire introduisit dans la langue française le mot welsch, « nom de mépris que les Allemands donnent aux Français » (Discours aux Velsches, 1749, voir Französisches Etymologisches Wörterbuch, XVII, p. 554-555).

X. Mossmann, « Une créance de Voltaire sur les vignes de Riquewihr », Revue d’Alsace, 1850, p. 119-126, avec complément dû à M. Staehlin, ibidem, p. 345-346 ; Voltaire, Lettres d’Alsace, éd. G. Jean Aubry, Paris, 1938 ; E. Kieffer, « De la Vie et de la « Mort » de Monsieur de Voltaire à Colmar », Annuaire de la Société historique et littéraire de Colmar, 1953, p. 85-115 ; A.-M. Tible, « Portrait de Voltaire par Dom Benoît Sinsart », Annuaire de la Société d’histoire du Val et de la Ville de Munster, XXXII, 1978, p. 88-91 ; L. Châtellier, « Voltaire, Colmar, les Jésuites et l’Histoire », Revue d’Alsace, 106, 1980, p. 69-82.

Jean-Luc Eichenlaub et † Georges Foessel (2002)