Abbe? be?ne?dictin de Munster au Val Saint-Gre?goire, de la Congre?gation lorraine des Saints-Vanne et Hydulphe, (C) (★ Sedan 29.7.1695 † Colmar? Munster? 22.6.1776). Fils de Franc?ois de Sinsart, capitaine au re?giment de Picardie, directeur des fortifications de Sedan, et de Franc?oise Maillette. Au bapte?me en l’e?glise Saint-Charles de Sedan, le jour me?me de la naissance, Jean Louis de Rafin, chevalier et seigneur de Hauterive, gouverneur militaire a? Sedan et aux frontie?res de Champagne, fut le parrain, et Marie Cottart, e?pouse d’Andre? de Richardeaux de Pre?aux, major du re?giment de la Reine, fut la marraine. Sinsart embrassa lui-me?me le me?tier des armes et servit comme inge?nieur militaire en Hollande. Vers l’a?ge de 20 ans, il se de?cida pour la vie monastique. Le 7 septembre 1716, il fit profession religieuse en l’abbaye de Senones, dont de?pendait alors l’abbaye de Munster. Il enseigna d’abord la the?ologie dans ce monaste?re vosgien. Il approuva le traite? sur l’infaillibilite? pontificale de Mathieu Claude Petitdidier, abbe? de Senones (1724). Il signa e?galement la bulle Unigenitus, contre le janse?nisme. Envoye? comme prieur a? Munster, il fut sollicite? par Dom Gabriel de Rutant pour e?tre son coadjuteur. Le pape Benoi?t XIV le nomma a? cette fonction par bulle du 7 janvier 1743. Le 21 juillet suivant, le chapitre de Munster e?lut re?gulie?rement Dom B. Sinsart comme coadjuteur, avec droit de succession. Le 25 août 1744, le roi Louis XV approuva cette nomination et cette e?lection par lettres patentes, qui furent enregistre?es au Conseil souverain d’Alsace le 20 septembre suivant. Au de?ce?s de Dom Gabriel Rutant, Dom B. Sinsart lui succe?da de plein droit le 1er mars 1745. L’abbatiat de Dom B. Sinsart fut une pe?riode prospe?re pour l’abbaye de Munster. La communaute? e?tait forte d’environ 25 moines de chœur et d’une dizaine de fre?res convers. L’assiette e?conomique, solide, permettait de financer de grands projets. En 1770, la construction du monaste?re et du palais abbatial, commence?e en 1681 selon les plans de l’abbe? Dom Charles Marchand par son successeur Dom Louis de La Grange et l’architecte Le?opold Durand, e?tait acheve?e. Les relations longtemps conflictuelles entre l’abbaye catholique et, d’autre part, le magistrat et la ville de Munster, en fort pourcentage protestant, trouve?rent un apaisement par l’accord de 1774. L’abbe? Sinsart se distingua surtout dans la recherche et l’enseignement the?ologiques. Par sa doctrine, il extirpa le « virus du janse?nisme », dont la communaute? de Munster avait e?te? infecte?e sous ses pre?de?cesseurs. De formation carte?sienne, il de?fendit la doctrine catholique contre les adversaires de son temps. Aux janse?nistes, il exposa Les ve?ritables principes de saint Augustin sur la gra?ce et son accord avec la liberte? (Rouen, Ba?le, 1739). Aux protestants, il de?montra La ve?rite? de la religion catholique (Strasbourg, 1746). Contre les rationalistes, il prit la De?fense du dogme catholique sur l’e?ternite? des peines (Strasbourg, 1748) et montra l’Accord entre la foi et la raison touchant l’eucharistie (Cologne, 1748). À l’encontre des mate?rialistes, il proposa diverses pense?es Sur l‘immate?rialite? de l‘a?me, son immortalite?, sa liberte? et sa distinction d’avec le corps (Colmar, 1756). Historien, il re?digea un Abre?ge? des points les plus inte?ressants de l’histoire eccle?siastique (Londres, 1754). Religieux, il publia un opuscule Sur l’utilite? des moines. Liturgiste, il travailla a? un nouveau Rituel pour le dioce?se de Ba?le. Protecteur des arts et des lettres, Dom B. Sinsart se vit de?dier en 1745 le Recueil de diffe?rentes pie?ces de clavecin, compose?es par Dom Ce?lestin Harst ©, be?ne?dictin de l’abbaye d’Ebersmunster. Sa doctrine rigoriste n’empe?cha point le the?ologien de succomber un moment a? la se?duction d’un esprit fort de son temps, Voltaire lui-me?me. Entre le 2 octobre et le 11 novembre 1754, le philosophe se?journa a? Colmar et a? Lutterbach-pre?s-Munster pour l’e?dition de ses Annales de l’Empire. La rencontre entre le be?ne?dictin et le philosophe eut lieu, non pas a? Munster me?me, mais a? Colmar, dans la re?sidence de l’abbaye de Munster, rue des Marchands. Le savant be?ne?dictin tomba sous le charme de la me?moire prodigieuse et de l’e?le?vation de l’esprit de l’e?crivain. Voltaire lui rendit la politesse en louant son amabilite?, son esprit et sa richesse. Il fit accroire au brave abbe? qu’il s’e?tait confesse? chez les capucins de la ville. Il l’assurait que, s’il y avait moins de moinerie et plus de viandes grasses chez les be?ne?dictins, il serait entre? dans cet ordre, auquel il paraissait vouer une admiration non feinte. Au bout de quelques semaines, l’inge?nu religieux dut se rendre compte qu’il s’e?tait fait tromper par un habile roublard. Le 15 avril 1770, le pape Cle?ment XIV lui donna un coadjuteur en la personne de Dom Benoi?t Aubertin ©, dernier abbe? de Munster.
Correspondance ine?dite: avec Dom Le Sueur (deux lettres 1743 et 1745 : Bibliothèque nationale, Ms fr. 19 670), avec Dom Calmet (deux lettres 1748 et 1749: Grand Se?minaire de Nancy, Ms S), avec Dom Fange? (31 lettres 1745-1762: Grand Se?minaire de Nancy, Ms MB 68).
Bio- et bibliographie: Archives départementales du Haut-Rhin, 1 H (Munster) 39 (dossier Sinsart): sa naissance a? Sedan est atteste?e par l’extrait de l’acte de bapte?me de 1719 et le proce?s-verbal de l’e?lection comme coadjuteur de 1743, contre sa pre?tendue naissance a? Phalsbourg, affirme?e par Che?rest, Godefroy, Grente, Tible; Archives départementales du Haut-Rhin, 1 B (Conseil souverain), t. 957, p. 401-407 (copie de la bulle papale et des lettres patentes royales pour la nomination de coadjuteur) ; Bibliothèque nationale, Ms fr. 17 716 (demande de permission pour l’e?lection d’un coadjuteur) ; Archives départementales du Haut-Rhin, 1 H 127/12 (nomination de Benoi?t Aubertin comme coadjuteur); A. Calmet, Bibliothe?que lorraine (= Histoire de Lorraine, t. 4), Nancy, 1751, c. 900-901, repris par J. Franc?ois, Bibliothe?que ge?ne?rale des e?crivains de l’ordre de Saint-Benoi?t, t. 3, Bouillon, 1778, p. 65-66; Ph. A. Grandidier, Nouvelles œuvres ine?dites, Colmar, t. 2, 1898, p. 507; t. 3, 1899, p. 217; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 2, 1910, p. 789-790 ; G. Grente, Dictionnaire des Lettres franc?aises. Le dix-huitie?me sie?cle, t. 2, Paris, 1960, p. 555; G. Che?rest, Matricula religiosorum professorum clericorum et sacerdotum Congregationis Sanctorum Vitoni et Hydulphi (1604-1789), Paris, 1963, p. 35, matricule n° 1636; A.-M. Tible, « Portrait de Voltaire par Dom Benoi?t Sinsart », Annuaire de la Société d’histoire du Val et de la Ville de Munster, 32, 1978, p. 88-91.
Abbatiat: Archives départementales du Haut-Rhin, 1 H 22/99, 101, 103, 140, 143 (relations entre l’abbaye et la ville de Munster, 1765-1774); L. Ohl, Geschichte der Stadt Munster und ihrer Abtei im Gregorienthal, Schirmeck, 1897, p. 410-424; M. J. Bopp, « Die protestantischen Pfarrer und Theologen des Mu?nstertales in alter und neuer Zeit », Annuaire de la Société d’histoire du Val et de la Ville de Munster, 8, 1934, 52-112, p. 91-95, 101-112 (affaire du pasteur J. L. Heumann); Cl. Muller, « La splendeur de l’abbaye be?ne?dictine de Munster dans la seconde moitie? du XVIIIe sie?cle (1750-1790) », Annuaire de la Société d’histoire du Val et de la Ville de Munster, 40, 1986, p. 61-70; E. Kern, « Nouvelles observations arche?ologiques sur l’abbaye de Munster », Annuaire de la Société d’histoire du Val et de la Ville de Munster, 46, 1993, p. 69-77; J. Matter, « Communitas Vallis St. Gregorii. II – 1525-1789. Die Geschichte der Gemeinschaft Stadt und Tal Mu?nster vom Bauernkrieg bis zur Grossen Revolution », Annuaire de la Société d’histoire du Val et de la Ville de Munster, 50, 1996, 11-26, p. 23-25.
Rene? Bornert (2000)