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SCHNEEGANS Charles Auguste

Journaliste, homme politique, consul, (PI) (★ Strasbourg 8.2.1835 † Gênes 2.3.1898). Fils de Gustave Henri Schneegans, négociant, et de Pauline Kramp. ∞ 22.9.1862 à Strasbourg, Sophie Anne Bruch (★ Strasbourg 7.6.1839), fille de Jean Frédéric Bruch ©, doyen de la faculté de Théologie protestante, et d’Élise Fanny Redslob; 5 enfants dont Charles Alphonse, architecte de la ville de Berlin. Études au Gymnase protestant, où enseignait son oncle Charles Guillaume Schweighaeuser ©, et à la faculté des Lettres. Secrétaire pendant un an de la section française de la Commission du Danube à Galatz (1857-1858). Journaliste à Paris (1858-1862), rédacteur au Nord, au Courrier Français et à la Revue contemporaine. Après son mariage avec la fille du doyen Bruch, il s’établit à Strasbourg et fut rédacteur du Courrier du Bas-Rhin dirigé par Charles Boersch © (1862). Le Courrier du Bas-Rhin soutint pendant la décennie 1860 une ligne d’union libérale, influencée par Édouard Laboulaye et Nefftzer, du Temps. Le gouvernement s’opposa à la nomination de Schneegans comme rédacteur de l’Industriel alsacien de Mulhouse. Il resta à Strasbourg, mais noua des liens étroits avec les milieux industriels de Munster, Colmar et Mulhouse. Maçon (Frères Réunis de Strasbourg), il participa aux nombreuses campagnes progressistes lancées alors : Congrès de la paix (de Frédéric Passy), Ligue de l’Enseignement, Société des bibliothèques populaires (de Jean Macé ©). En 1868, Schneegans assura la correspondance allemande du Temps, ce qui le mit en relation avec le monde politique allemand, particulièrement les libéraux. Dès l’élection législative de 1869 intervint une rupture dans l’opposition politique strasbourgeoise: Schneegans fit partie du groupe des modérés (Kablé, Klein, Kuss, Lauth) de l’Elsässisches Volksblatt que combattait un comité républicain radical d’Engelhard © soutenu par le Souveräne Wählmann (Électeur souverain) d’Alfred Koechlin, de Mulhouse. Au plébiscite de mai 1870, il y eut de même deux comités anti-plébiscitaires à Strasbourg, l’un modéré, dont fit partie Schneegans, et l’autre radical. Schneegans fit partie de l’opposition républicaine introduite dans la Commission municipale strasbourgeoise à la fin août 1870. Après la capitulation, le 28 septembre, Silbermann © vendit le Courrier du Bas-Rhin a une entreprise allemande qui y plaça une rédaction allemande dépendant des autorités d’occupation. Schneegans fit des articles pour le Nord puis rejoignit Berne (novembre 1870), où il fit paraître à partir de janvier 1871, l’Helvétie, diffusé clandestinement en Alsace. Il fut placé sur les listes protestataires des candidats du Bas-Rhin à l’Assemblée nationale de Bordeaux; il fut élu et participa à la Protestation de Bordeaux. Après la démission des députés d’Alsace, il s’installa à Lyon pour y collaborer au Journal de Lyon (mai 1871) dont il fut rédacteur en chef à partir de 1872. Il opta pour la France en octobre 1872. Le Journal de Lyon soutint la politique opportuniste, et se trouva en porte-à-faux quand la chute de Thiers (24 mai 1873) opposa nettement l’Ordre moral et le radicalisme, devenu la force principale de l’opposition, qui s’exprimait à Lyon dans le Progrès aux tirages croissants, alors que le Journal de Lyon se portait plus mal. Schneegans n’avait d’avenir dans aucun des deux camps. Il rentra en Alsace (août 1873). À Strasbourg, le jeune Fischbach © dirigé par Jules Klein, et financé en sous-main par Schricker © et la présidence supérieure, montèrent une commandite qui fit paraître Le Journal d’Alsace, journal du parti « autonomiste » constitué des conseillers généraux et députés à la Délégation/Landesausschuss qui acceptaient le fait accompli de l’annexion à l’Empire allemand. Devant les attaques de l’Univers et les doutes qu’il eut sur le montage financier de l’entreprise, Schneegans renonça à prendre la direction du journal. Il assura d’abord la correspondance de la Frankfurter Zeitung progressiste de Sonnemann (jusqu’en 1876) et se consacra à la rédaction d’un bulletin de l’ « Agence de correspondance alsacienne » financé par les Bas-Rhinois du groupe Kablé (Schutzenberger, Rodolphe de Turckheim, Kablé, Schneegans) et les industriels haut-rhinois (A. Dollfus, Koechlin, Tachard, Chauffour, Fleischhauer) qui faisaient alors campagne pour le protectionnisme en Allemagne et participaient de leur côté à la fondation de la Fédération centrale des industriels allemands (ZVdDI). Schneegans publia ainsi en feuilleton dans la Gazette d’Augsbourg les « Lettres d’Alsace », repris en livre, qui firent sensation auprès de l’opinion publique libérale allemande. Schneegans entra en 1875 à l’Industriel alsacien, journal mulhousien qui défendait la ligne de l’Agence de correspondance alsacienne. Puis, en août 1875, Jules Klein accepta d’ouvrir le capital du Journal d’Alsace aux Haut-Rhinois (Jean Schlumberger, Koechlin…) et, à partir d’octobre 1875, en confia la direction à Schneegans. C’est en octobre 1876 qu’il accomplit pour le compte du groupe des actionnaires sa mission à Berlin auprès des milieux politiques du Reichstag, dont il publia le compte-rendu dans ses Lettres de Berlin (novembre 1876). Le Journal d’Alsace fut le principal support de la campagne électorale du parti autonomiste qui enregistra des résultats appréciables aux élections au Reichstag de 1877. Les députés élus de Haguenau-Wissembourg, Nessel, de Strasbourg-Campagne, North, de Strasbourg-Ville, Bergmann, de Molsheim-Erstein, Rack, de Saverne, Schneegans lui-même étaient autonomistes, battant les sortants cléricaux-catholiques et/ou protestataires. Les députés autonomistes s’apparentaient au groupe parlementaire national-libéral. Schneegans fut réélu en juillet 1878, mais sa rupture avec Kablé, élu sur un programme de Protestation et Action, qui l’emporta à Strasbourg-Ville contre le sortant Bergmann, marquait les limites de son influence politique. Dans sa brève carrière de député au Reichstag, Schneegans s’illustra au cours de deux grands débats: celui de l’élargissement des compétences législatives du Landesausschuss/Délégation d’Alsace-Lorraine (octobre 1877) et celui sur la loi constitutionnelle de juillet 1879 qui répondait à une motion du Reichstag dont Schneegans était l’auteur pour le compte du prince de Bismarck. S’étant servi de lui, Bismarck l’oublia. Il est vrai que Schneegans avait parfaitement rempli la mission que les notables du Landesausschuss/Délégation lui avaient confié : le gouvernement du pays avait son siège en Alsace et non à Berlin, et c’est à une assemblée alsacienne que fut confiée la législation locale et le budget régional. Mais le Parti national-libéral auquel Schneegans avait rattaché l’autonomisme alsacien passa pour l’essentiel dans l’opposition. Le cours nouveau de la politique de Bismarck se fondait sur le rapprochement avec les conservateurs et le Zentrum catholique. À Strasbourg, le régime autonomiste ne pouvait plus être « libéral », c’est-à-dire laïc et anticlérical. Le premier Statthalter d’Alsace-Lorraine, le très conservateur maréchal de Manteuffel © ne pouvait ni ne voulait envisager la collaboration politique avec Schneegans, ancien député protestataire devenu national-libéral allemand, et ce dont avait rêvé Schneegans: un gouvernement alsacien-lorrain avec des ministres alsaciens se révéla impossible à traduire dans les faits. Schneegans négocia alors sa retraite politique: conseiller ministériel (Ministerialrath) au ministère d’Alsace-Lorraine, puis au ministère des Affaires étrangères d’Allemagne (1880), il fut nommé consul d’Allemagne à Messine, puis à Gênes. Il tenta également de poursuivre une carrière d’homme de lettres allemand et ne revint plus en Alsace. Il se préparait à écrire ses mémoires, quand une grippe intestinale l’emporta brutalement.
Henri Schneegans ©, son fils se chargea de la publication en 1904, des extraits de ses papiers annotés sous le titre Memoiren, aus dem Nachlasse herausgegeben. Ein Beitrag zur Geschichte der Ubergangszeit, d’une façon qui respecte le texte établi par son père, seul responsable du commentaire.
Il n’est pas possible de mentionner toutes les publications faites par A. Schneegans. Des articles de journaux ou d’autres contributions ont souvent été réunis sous forme de brochures et des discours ont été imprimés. La Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg conserve de nombreux écrits, y compris Helvetia, journal politique et littéraire, édité à Berne en 1871.

Description des pays: A. S. Bruière [Aug. Schneegans], Une saison en Allemagne. Souvenirs des bords du Rhin [extraits du Temps], Paris; Sicilien. Bilderaus Natur, Geschichte und Leben, Leipzig, 1887; Kallia Kypris. Aus Alt Syrakus, 1887-1893, Berlin, 1893.
Histoire et guerre; Pendant l’armistice. Dernière protestation d’un Strasbourgeois, Genève-Paris, 1891; Strasbourg! Quarante jours de bombardement par un réfugié strasbourgeois, Neuchâtel, 1871; Causeries sur l’histoire alsatique, extraits des Affiches de Strasbourg, 1875-1877; Das Elsass vor der Revolution 1789, Berlin, 1880; Strassburg nach der Ubergabe an Frankreich, 1681-1698, Breslay, 1883; Guerre en Alsace. 1ère partie, Strasbourg, Neuchâtel, 1870.

Enseignement: Le 10 août 1865. Souvenir de l’inauguration du nouveau gymnase protestant de Strasbourg, Strasbourg, 1865; Das höhere Schulwesen in Elsass-Lothringen. L’instruction secondaire en Alsace-Lorraine, Strasbourg, 1878.

Politique: « Aus dem Elsass », Zustände, Stimmungen und Erwartungen im neuen Reichsland, Leipzig, 1875, Separatdruck der « Briefe aus dem Elsass » aus der Allgemeinen Zeitung; Die Elsässer Liga diesseits und jenseits der Vogesen, von Alsaticus [Aug. Schneegans], Berlin, 1878.

Littérature et mémoires: Contes, Paris-Strasbourg, 1868; La fille de Romeo, 1890.

Archives départementales du Bas-Rhin, AL 87 1771,; Bundesarchiv Berlin-Dahlem, Nachlass A. Schneegans; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 2, 1910, p. 699-700; Fr. Bronner, Die Verfassungsbestrebungen des Landesausschusses für Elsass-Lothringen, Heidelberg, 1926; J. Schneider, Die elsässiche Autonomistenpartei 1871-1881, Francfort, 1933; Robert, dir., Dictionnaire des Parlementaires français comprenant tous les membres des Assemblées françaises et tous les ministres français 1789-1889, t. V, 1891, p. 284; Haegy, Das Elsass von 1870-1932, Colmar, Alsatia, 1936-1938, 4 vol (index); J.-P. Kintz, Journaux politiques et journalistes strasbourgeois sous la Seconde République et à la fin du Second Empire, thèse de spécialité en histoire, Strasbourg, 1970, multigr., index; idem, Journaux politiques et journalistes strasbourgeois sous le Second Empire (1852-1870), Strasbourg, 1974, p. 36-40 (portraits); François Igersheim, L’Alsace des notables, 1870-1914, Strasbourg, 1981, p. 289, 290 et 313; F. L’Huillier (dir. ), L’Alsace en 1870-1871, Strasbourg, 1971, p. 370-374; F. Igersheim, Politique et administration dans le Bas-Rhin (1848-1870), Strasbourg, 1993, voir index.

François Igersheim et † Jean-Pierre Kintz (1999)