Colonel (★ 1857 † 1926). Entré, en 1876 dans l’armée allemande, Kriegsakademie 1886-1889. Effectua une grande partie de sa carrière dans les bureaux du ministère de la Guerre. Commandait en 1913 le 98e d’infanterie en garnison à Saverne et à Phalsbourg. Auteur principal de l’affaire de Saverne: à partir de la mi-novembre 1913, pour réprimer l’émotion populaire qui s’indignait de l’insulte fait « aux voyous », qualificatif donné aux recrues alsaciennes en général par le petit lieutenant Forstner ©, Reuter suspendit, de son propre chef, mais sans aucun doute couvert par le haut-commandement de l’armée, en pleine paix, l’état de siège sur la ville alsacienne et fit arrêter des civils, dont le procureur et deux juges du tribunal de Saverne. Cette voie de fait fut couverte par l’empereur et par le chancelier Bethmann-Hollweg. Reuter n’en fut pas moins traduit devant un tribunal de guerre à Strasbourg et acquitté en janvier 1914 : le tribunal se fonde sur une ordonnance prussienne de 1821 qui autorisait le commandement militaire à se substituer à l’autorité civile défaillante. Devant cette affirmation de la primauté du militaire sur le politique, de la prééminence des droits de l’armée sur l’état de droit, qu’avait si nettement défendus le colonel de Reuter, le gouvernement Wedel-Bulach démissionna.
F. Igersheim, L’Alsace des notables, Strasbourg, 1981.
François Igersheim (1998)