Journaliste, (C) (★ Sarralbe, Moselle, 2.7.1905 † Pérou).
Fils de Pierre Reifenrath et de Marie Geiler. Marié; 4 enfants. Il était en octobre 1931 lieutenant au 508e régiment de Chars de combat à Lunéville. Il quitta ensuite l’armée. Journaliste à Paris, il fut de 1932 à 1934, secrétaire général de la Solidarité française, mouvement d’extrême-droite fondé par Jean Renaud et le parfumeur François Coty, et il rédigea le journal du même nom. Il entra ensuite en contact avec Gustave Hervé, ancien socialiste pacifiste devenu ultra-nationaliste, directeur du journal La Victoire dont il devint correspondant pour l’Alsace et la Lorraine. Il essaya à diverses reprises de jouer un rôle actif dans la droite extrémiste alsacienne, notamment en collaborant à l’hebdomadaire strasbourgeois Die Staatsreform en 1934, puis au sein de l’Union paysanne de Joseph Bilger ©, mais il fut chaque fois écarté. Il succéda le 1er janvier 1937 à Oscar de Férenzy ©, à la tête de la Voix d’Alsace et de Lorraine et donna à cet hebdomadaire d’obédience catholique une orientation antisémite très violente à l’insu de la Société d’édition de la Basse Alsace (groupe de l’Elsässer), propriétaire du titre. Renvoyé de ce journal, il fonda un autre hebdomadaire La Nouvelle Voix d’Alsace et de Lorraine qui parut du 18 février 1937 à décembre 1938 et qui voulait lutter « contre le péril judéo-maçonnique et révolutionnaire ». Ses bureaux étaient installés 9, rue du Fossé des Treize à Strasbourg, où l’on trouvait aussi une librairie spécialisée dans la littérature antisémite et antimaçonnique. Reifenrath fut aussi rédacteur-gérant de Das Freie Wort d’avril à décembre 1938. Figure principale du mouvement antisémite à Strasbourg durant les années trente, il aurait été subventionné, selon un rapport de police, par un « comité de travail » composé d’industriels du Bas-Rhin. Reifenrath se disait partisan d’une République autoritaire et d’une autonomie « spéciale » pour l’Alsace. Il aurait été à cette époque en relation étroite avec un service de propagande antisémite installé à Erfurt, le Weltdienstverlag dirigé par un ancien diplomate allemand, von Potters. Après la guerre, le « Major » Reifenrath fut accusé par le Républicain du Haut-Rhin d’avoir été alors rémunéré par des services secrets allemands. Après 1940, en Lorraine annexée, les autorités nazies le nommèrent Bürgermeister et directeur de l’hospice de Gorze (Gorschen). Il réussit à éviter l’évacuation de ce village en 1944 et aurait même été maintenu un moment en fonction par les militaires américains après la Libération. Poursuivi par la justice française, il se réfugia à Montréal (Canada) en 1946 ou 1947 avec l’aide de la congrégation enseignante des frères de Saint-Gabriel sous l’identité de Paul Leysen. Sous le pseudonyme de Paul-Everard Richemont, il devint conseiller spécial de Maurice Duplessis, premier ministre conservateur du Québec de 1944 à 1959, pour la lutte contre les « forces subversives » (communistes, juifs, francs-maçons, chrétiens de gauche, grévistes des mines d’amiante). En 1950 et 1951, il aurait fait plusieurs séjours au Vatican comme « ambassadeur personnel et confidentiel » du premier ministre du Québec auprès du Saint-Siège. Brouillé avec Duplessis, il quitta le Canada en 1952 avec sa famille pour la Bolivie, puis le Brésil. Il serait mort au Pérou.
Reifenrath est l’auteur de Les juifs en France, surtout en Alsace, brochure, s. l., n. d.
Archives départementales du Bas-Rhin, AL 98 1091; Lothringer Volkszeitung, Metz, du 3.9.1931; Die Staatsreform du 2.6.1934; Elsässer du 7.1.1937; La République du 8.1.1937; Le Républicain du Haut-Rhin du 6.7.1947; B. Reimeringer, « Un mouvement paysan extrémiste des années trente: les Chemises vertes », Revue d’Alsace, t. 106, 1980, p. 113-133; B. et G. Le Marec, Les années noires. La Moselle annexée par Hitler, Metz, 1990, p. 86; L. Strauss, « L’antisémitisme en Alsace dans les années trente », XVIIIe colloque de la Société d’histoire des Israélites d’Alsace et de Lorraine, Strasbourg, 1996, p. 77-89; E. Delisle, ouvrage à paraître sur les « collaborateurs » français réfugiés au Québec après 1945, Montréal; Cl. Lorentz, La presse du XXe siècle. Répertoire des journaux parus depuis 1918, Strasbourg, 1997, p. 158, 297, 423, 477.
Claude Lorentz et Léon Strauss (1998)