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REGUISHEIM de

Etablie à Mulhouse et dans la plaine de l’Ill, la famille noble de Reguisheim semble s’être ramifiée en trois branches dont les armoiries sont distinctes ainsi qu’en plusieurs rameaux désignés par des surnoms (Stüsse, Roeching). Le rameau le plus ancien apparaît vraisemblablement dès 1236, son appartenance à la noblesse étant accréditée dès 1239, en la personne du chevalier Siegfried, membre du conseil urbain en 1265-1266. Plusieurs de ses membres exercent des fonctions de direction, tel Pierre/Peter, Schultheiss impérial en 1323, Rodolphe Roeching et son fils Thomas, respectivement Burgermeister en 1353 et 1369 et 1375, de même que leur parent Ottmar (1367, 1372). Vassaux de l’Autriche (Heinrich, chevalier, fait partie des tués de Sempach en 1386), du Wurtemberg, de Murbach et de l’évêque de Strasbourg notamment, les sires de Reguisheim s’éteignirent entre 1526 et 1528 dans la personne d’Albrecht (cité depuis 1478, membre du Conseil de guerre des Pays antérieurs autrichiens en 1525).

 

J. Kindler von Knobloch, Oberbadisches Geschlechterbuch, t. III, Heidelberg, 1919, E. Meininger, « L’ancienne noblesse de Mulhouse », Bulletin du Musée historique de Mulhouse, 1924, p. 65-169.

 

1. Pierre/Peter,

cité dès 1442 († Bâle 7.4.1474). Fils de Rudolf (cité 1420-1442), frère de Jacob (cité 1465- 1478). Traité d’« écuyer sans le sou » (armiger et pauper) par le chanoine bâlois Johannes Knebel, qui voit en lui le premier responsable de l’enchaînement qui conduit de la Guerre des Six deniers (Sechsblappertkrieg) aux guerres de Bourgogne, (tocius huius mali instigator), P. de Reguisheim peut être considéré comme le prototype du pauvre gentilhomme livré aux désordres du brigandage et du mercenariat. Investi des fiefs mouvant de l’évêque de Strasbourg en 1442, il n’apparaît au grand jour qu’à l’été 1462 : on l’accuse de s’être emparé de troupeaux appartenant aux habitants d’Ohnenheim, sujets des ,sire de Rathsamhausen © eux-mêmes vassaux des Ribeaupierre ©. Il est vraisemblable que l’épisode (qui a lieu près de Châtenois) soit lié aux différentes guerres menées par Anton von Hohenstein et par les détenteurs du Haut-Koenigsbourg et soit dirigé contre l’électeur palatin Frédéric le Victorieux (qui venait de remporter la victoire de Seckenheim). En 1464, P. de Reguisheim fit la paix avec les bourgeois de Sélestat avec lesquels il était en guerre ouverte. Au début de l’année suivante, il s’engagea à servir ces derniers avec deux hommes d’armes et un page moyennant une solde de 250 florins, mais il n’est pas sûr que ce contrat ait eu des suites tangibles. En effet, peu après, il prit part à des raids de pillages menés par Wersich Bock de Stauffenberg en Lorraine ainsi qu’à des actions dirigées contre Munster et dirigea le coup de main du comte Jean de Lupfen contre les bourgeois de Turckheim (fin juin 1465). L’absence de réaction de l’Empire et les atermoiements de la Décapole l’incitèrent à poursuivre ses provocations en prêtant main-forte au garçon-meunier Hermann Klee, en conflit contre Mulhouse à propos d’un salaire impayés. Le défi adressé par ce dernier le 9 avril 1466 le vit aussitôt entrer en campagne avec huit autres gentilshommes des environs, notamment son frère Jacob, au total une vingtaine de soldats. La capture de quelques bourgeois, enfermés au château de Haut-Hattstatt (dont P. de Reguisheim avait la possession) fut suivie d’une trêve (13 mai-10 juin), obtenue par l’entremise de Sigismond d’Autriche, mais les opérations de harcèlement menés par Lupfen sur Ammerschwihr et Kaysersberg ne cessèrent pas pour autant. Encouragés par le comte palatin Frédéric le Victorieux, les contingents de la Décapole se concentrèrent à Turckheim et attaquèrent la seigneurie de Haut-Landsbourg, s’emparant sur leur passage du château du Haut-Eguisheim (où Klee avait trouvé refuge). Dans le même temps (17 juin 1466), Mulhouse concluait un traité d’alliance avec Berne (et donc les Confédérés suisses) et Soleure. Au cours d’une seconde phase de la guerre menée par les villes impériales contre le comte Jean de Lupfen, P. de Reguisheim reprit l’initiative en attaquant à nouveau Munster et Kaysersberg. Renforcées par des troupes envoyées par le comte palatin, les forces de la Décapole mirent le siège à Kientzheim (4/7 août, incendie et prise de Sigolsheim), mais ne parvinrent à s’emparer du bourg. P. de Reguisheim y fut l’un des témoins du « miracle » suivant lequel les statues de la Vierge et de saint Jean sauvées des flammes versèrent des larmes. L’arbitrage de Bâle et de Sigismond d’Autriche permit de rétablir la paix et se solda par un traité, le 5 novembre 1466. Le même jour, les habitants de Munster et leurs alliés s’emparèrent du Haut-Hattstatt. La carrière ultérieure de P. de Reguisheim est plus discrète. Il est possible que les fonctions de bailli de Sainte-Croix-en- Plaine qu’il exerça alors pour le compte de Frédéric le Victorieux aient correspondu à une sorte d’engagement au service de ce prince (auquel Jean de Lupfen avait promis d’apporter son aide pendant 10 ans). Le 9 mai 1469, il accompagna le duc Sigismond d’Autriche lors de ses négociations avec Charles le Téméraire. En 1472, il captura le juif Heym d’Ensisheim, pourtant porteur d’un sauf-conduit du duc de Bourgogne. Chargé par Pierre de Hagenbach © de ramener à l’ordre les bourgeois de Rheinfelden qui refusaient de payer l’impôt (début avril 1474), il ne put accomplir cette mission. Il mourut subitement à son retour à Bâle, où vivait son frère Anton († 1503), chanoine du chapitre et archiprêtre de la cathédrale. Il fut inhumé dans ce monument, où il avait fondé un anniversaire.

 

P. Mieg, « Les difficultés de Mulhouse à l’époque de son alliance avec Berne et Soleure », Bulletin du Musée historique de Mulhouse, t. 73, 1965, p. 31-84, t. 74, 1966, p. 5-109, t. 75, 1967, p. 39-118, t. 76, 1968, p. 47-154, t. 77, 1969, p. 39-148 ; X. Mossmann, La Guerre des six-deniers à Mulhouse, Bulletin du Musée historique de Mulhouse, IIe série, t. 5, 1863, p. 95-118.

Georges Bischoff (1997)