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REDSLOB Robert

Juriste, écrivain, (Pl) (★ Strasbourg 3.2.1882 † Strasbourg 6.6.1962).

Fils de Jules Redslob, pasteur de l’église Saint-Guillaume, et d’Émilie Dietz. ∞ 1911 Gabrielle Blanche Kiener, fille d’André Kiener ©, industriel, président de la Chambre de commerce de Colmar, vice-président de la Chambre haute du Landtag : 3 enfants. Études secondaires au Gymnase protestant. Études musicales avec Marie-Joseph Erb ©. Études supérieures de droit, de philosophie et d’économie politique à Strasbourg et à Berlin (1900-1906). Après son examen d’État et un stage au cabinet de Frédéric Eccard ©, il fut avocat au barreau de Strasbourg, tout en préparant sa thèse de droit pénal sur la prise en compte des facteurs personnels dans le quantum des peines. Docteur en droit en 1909 il devint la même année, premier Alsacien dans cette fonction, Privatdocent (= chargé de cours) de droit pénal et de philosophie du droit, puis de droit constitutionnel à la Faculté de Droit. Ami de Pierre Bucher ©, il participa à la « Société dramatique », troupe d’amateurs qui entretenait le goût du théâtre français, et à la « Veillée alsacienne de Strasbourg ». Il assista à la fondation du Verband für internationale Verständigung et à ses assises de Heidelberg (1912) auxquelles participa le pacifiste français d’Estournelles de Constant. Ne pouvant être nommé immédiatement dans une chaire de sa ville natale, n’ayant pas réussi à obtenir de poste en Suisse romande, à Bâle ou à Paris, Redslob fut obligé de commencer sa carrière outre-Rhin. De 1913 à 1918, il fut professeur ordinaire de droit public à l’Université de Rostock (alors en Mecklembourg-Schwerin) et en devint, lorsque son tour fut arrivé, le doyen de la faculté de Droit une année durant. cette période allemande fut consacrée à de nombreux travaux remarquables où Redslob réussit à poser clairement des questions gênantes comme celles du statut de l’Alsace-Lorraine ou du régime parlementaire, grâce aux libertés académiques et en prenant les voies de l’histoire des idées politiques ou celles du droit comparé. Ses réflexions de droit constitutionnel firent autorité en Allemagne. Pendant la guerre, il ne fut pas inquiété. Pendant l’été de 1915, il avait profité d’un séjour en Suisse pour rencontrer son ami Eccard réfugié en France. En 1916, I’Abwehr d’Altona lui interdit pourtant de passer les fêtes de Noël dans sa belle-famille à Colmar. Ses collègues de Strasbourg refusèrent de l’appeler à la succession de Laband ©. Il s’enfuit de Rostock, avec sa famille, pendant les événements révolutionnaires de novembre 1918, peu avant l’armistice. À Strasbourg, J. Pfleger ©, au nom du « gouvernement d’affaires » lui offrit d’occuper immédiatement la chaire de Laband ; il préféra attendre l’arrivée des Français. Au cours de l’année 1919, les autorités françaises le nommèrent d’abord chargé de cours en janvier, puis successivement agrégé, professeur adjoint, enfin professeur sans chaire à la faculté de Droit et de Sciences politiques. Après avoir enseigné l’histoire des traités, il devint titulaire de la chaire de droit international public et illustra cette discipline avec des ouvrages qui marqueront des générations de spécialistes. Il enseigna aussi un certain temps le droit local. Il organisa dans la région les conférences d’Extension universitaire destinées au grand public et accomplit aussi un nombre considérable de missions d’enseignement et de conférences à l’étranger, qui lui valurent de nombreuses distinctions académiques et civiles (docteur hc de l’Université de Bâle, membre de l’Académie diplomatique internationale, membre honoraire de l’Académie de législation et de jurisprudence de Madrid, jurisconsulte à la Cour internationale de La Haye, correspondant de l’Académie d’Espagne, attaché à la Société des nations, etc..). Dans plusieurs lettres au Temps en 1928, 1929 et 1933, Redslob s’efforça d’expliquer au public français les origines de l’autonomisme, en particulier les difficultés de la « génération sacrifiée », les maladresses des « revenants » et les injustices des commissions de triage. Il démentait la vulgate officielle selon laquelle l’Alsace était restée fondamentalement française pendant la période allemande. Elle était en train de le redevenir ; elle ne désirait pas le retour de l’Allemagne. Il fallait éviter de donner à ses habitants des leçons de patriotisme, ne pas déconsidérer la formation qu’ils avaient reçu à l’école ou à l’université allemandes. De même il était inutile de persécuter les autonomistes. Ils feraient leur temps jusqu’à ce que le robuste bon sens alsacien se soit convaincu de l’inanité de leur politique. Pourtant leurs excès risquaient de jeter le discrédit sur la face germanique de la culture des Alsaciens et empêcher ce dernier de jouer leur rôle naturel de trait d’union entre les deux civilisations. Il ne fallait « pas prendre les choses au tragique », car « la mélodie de l’Alsace » « était toujours française ». De 1939 à 1945, Redslob enseigna à l’université repliée à Clermont-Ferrand. De 1945 à 1952, il fut doyen de la faculté de Droit de Strasbourg (c’est le seul universitaire à avoir occupé cette fonction à la fois dans une université allemande et dans une université française). Après avoir préconisé un partage de l’Allemagne en plusieurs monarchies au profit des dynasties d’avant 1918 fédérées dans un empire confié aux Habsbourg, il donna en 1950 des cours à la Freie Universität de Berlin Ouest. Professeur émérite en 1953, il enseigna aussi dans d’autres universités allemandes et autrichiennes. Grand excursionniste, il fut président du Club Vosgien de 1935 à sa mort. Redslob a publié de nombreux ouvrages sur des sujets forts variés en allemand, en dialecte et en français, ainsi que d’innombrables articles dans les Dernières Nouvelles, L’Alsace française, Les Vosges, etc… Ses causeries hebdomadaires à Radio-Strasbourg mêlaient l’alsacien au français. Notable protestant, il fut membre du Chapitre de Saint-Thomas. Le 27 septembre 1970, une plaque à sa mémoire fut inaugurée au sommet du Grand Ballon. Légion d’honneur (officier).

Bueredrama, 1906; D’r Schlitterhannes, drame paysan, 1906; Gregor der VII, historisches Tragödie in drei Akten, Kehl, s. d.; Fantômes d’Alsace, poèmes, Paris, 1911 (préface d’E. Schuré); Die Staatstheorien der französischen Nationalversammlung von1789, 1912; Ribeaupierre, poèmes, Paris, 1913; Abhängige Länder, 1914; Das Problem des Vôlkerrechts, 1917; Die parlementarische Regierungslorm, 1918; Le régime politique de l’Alsace-Lorraine sous la domination allemande, Paris, 1921; Histoire des grands principes du droit des gens, Paris, 1923; Le régime parlementaire, Paris, 1924; De Cracovie à Budapest, par les montagnes de la Tatra, Paris, 1925; Le cuirassier de Reichshoffen, drame en quatre actes et en vers, Nancy, 1925; Théorie de la Société des Nations, Paris, 1927; Sur les confins de l’Europe et de l’Orient, Paris, 1927; Hammer noch e Vaterland?, Strasbourg, 1929; Le principe des nationalités, Paris, 1930; À travers la vieille Serbie, l’attique et l’Argolide, Paris, 1930; Entre la France et l’Allemagne, Souvenirs d’un Alsacien, Paris, 1932; « Où en est l’Alsace? », Le Temps du 30.11.1933; « La reconnaissance de l’État comme sujet de droit international », Revue de droit international, 1934; « M. Hitler et la psychologie allemande », Mercure de France, octobre 1934; « La sécurité internationale », Comptes rendus des séances de l’Académie diplomatique internationale, 1935; « La question de Memel », Revue politique et parlementaire, 1935; Les principes du droit des gens modernes, Paris, 1937; « Le président F. Roosevelt et le droit à la paix », Revue de droit international, 1939, 2; « Considérations sur la structure politique de l’Allemagne à venir », Revue politique et parlementaire, Paris, novembre 1946; De l’esprit politique des Allemands, Paris, 1947; La nouvelle Constitution française, 1950; Les Vosges pittoresques, Strasbourg, 1952; Le problème de la paix, Bâle, 1954; Sur les sentiers des Vosges, Woerth, 1954 (réédition, 1968); À travers les villages d’Alsace, Woerth, 1955; Sous le regard de la Cathédrale, Souvenirs du vieux Strasbourg, Woerth, 1957; Alma Mater, souvenirs des Universités allemande, Paris-Strasbourg, 1958; Bunte Bilder aus dem Elsass (ill. de R. Allenbach et E.-H. Cordier), Woerth, 1959; préface de Paysans d’Alsace, Strasbourg-Paris, 1959, Châteaux de Souabe, Woerth, 1961; Papeteries de la Robertsau (avec J. Schmidt), Strasbourg, 1961; Ce que raconte l’Alsace (ill. de R. Kuven), Woerth, 1962; coll. A Châteaux et sites pittoresques des Vosges, Strasbourg, 1963.

Haegy, Das Elsass von 1870-1932, I, p. 534; F. Eccard, Le livre de ma vie, Neuchâtel, Paris, Strasbourg, 1951 (index); Les Vosges, 1962, n° 4, p. 2-9; « Robert Redslob (1882-1962) par J. Denoyez, A. Weill, C. Reinbolt, J.-L. Huck; C. Hauter, le doyen Robert Redslob », L’ Écrivain d’Alsace et de Lorraine, 1962, n° 4; Encyclopédie de l’Alsace, X, 1985, p. 6283-6284; R. Heitz, Vues cavalières, Strasbourg, 1972, p. 193, 194, 209, 231; P.-J. Schaeffer, L’Alsace et l’Allemagne de 1945 à 1949, Metz, 1976 (index).

Norbert Olszak et Léon Strauss (1997)