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LEVRAULT

Famille d’imprimeurs, originaire de Naintré, dans le Poitou où elle est établie depuis le XIIe s. ; au XVIe s., la famille L. passa en partie à la Réforme, et, après la révocation de l’Edit de Nantes, Claude L. et sa femme s’établirent en Lorraine, où ils tinrent une école. Leur fils François Nicolas L. († 1724), père de 1, était établi comme tabellion à Ogéviller, Meurthe-et- Moselle. La bibliothèque et les archives de l’imprimerie-librairie sont déposés jusqu’à 1870 aux ABR.

(Ordre de classement) :

  1. François Georges (1722-1798), imprimeur, libraire
  2. François Laurent Xavier (1762-1821), docteur en droit, avocat, notable, imprimeur, libraire
  3. Louis Charles (★ 1764), avocat, imprimeur, libraire
  4. Nicolas Pierre (1767-1813), prêtre, imprimeur, libraire
  5. François Xavier (1773-1844), capitaine, imprimeur, libraire
  6. Louis François Constantin (1803-1876), percepteur, historien
  7. LEVRAULT (BERGER-LEVRAULT) Oscar (1826-1903), imprimeur-libraire, éditeur.

 

  1. François Georges,

imprimeur, (c) (★ Ogéviller, Meurthe-et-Moselle, 1722 † Strasbourg 3 floréal an VI = 22.4.1798). Fils de François Nicolas L. et de sa seconde épouse Anne Dupuy. ∞ 26.10.1761 à Strasbourg Marie Anne Eléonore Christmann, sœur du libraire imprimeur strasbourgeois François C. et petite-fille de Guillaume Schmuck, propriétaire de l’imprimerie-librairie dans laquelle F.G. L. entra comme prote. Le 28.9.1765, L. devint associé en titre à l’affaire de son beau-frère. Par la suite, le 6.8.1787, L. acheta à Jacques François Théodore Barbier de Tinan © un immeuble rue des Juifs à Strasbourg, où il installa son atelier : ce fut le siège de l’entreprise Levrault, puis Berger-Levrault, jusqu’à la guerre de 1870. Puis il reprit l’ancienne fonderie et l’imprimerie de Rolland et Jacob, d’abord sous la raison sociale de Société typographique, avant de l’absorber dans son entreprise. A la veille de la Révolution, la maison Levrault était la plus importante de tout l’Est de la France. En 1789, L. abandonna la gestion de son entreprise à son fils cadet Louis Charles © 3, et se retira de plus en plus fréquemment dans sa propriété d’Ittenwiller, commune de Saint-Pierre, où il décéda.

Frédéric Barbier (1995)

 

  1. François Laurent Xavier (LEVRAULT l’aîné),

homme politique, conseiller général, député, recteur d’université, avocat, (c) (★ Strasbourg 10.8.1762 † Strasbourg 17.5.1821). Fils de 1. ∞ à Strasbourg Caroline Schertz, (PI) (★ 1.3.1775), fille du négociant Jean-Georges S. et de Marie Madeleine Marguerite Wittmann (divorce le 14 ventôse an II = 3.3.1794 et remariage le 19 pluviôse an III = 7.2.1795) ; 2 filles : Caroline (★ 3.2.1798) ∞ 18.1.1822 Jean Charles Pitois, un Lorrain installé à Versailles ; Eléonore (★ 1801 † 1879) ? 25.6.1825 Pierre Frédéric Berger © 1, préparant ainsi le changement de dynastie (Berger-Levrault). Après des études au collège royal, puis à la Faculté de Droit de Strasbourg, F.L.X. L. fut reçu docteur en droit en 1782 avec une thèse sur la torture. Par la suite il fut fait docteur en philosophie (18.8.1790) et docteur ès lettres (1810). Avocat au Conseil sou- verain d’Alsace en 1785, il devint secrétaire de l’intendant, conseiller du roi au siège royal et prévôtal de Basse-Alsace, et enfin avocat général auprès du Magistrat de Strasbourg. Il a fait partie du cercle strasbourgeois imbriqué dans des affaires de librairie à la fois commerciales, bancaires, philosophiques et politiques autour de Cerf-Beer © dont ont émergé, outre Mirabeau, le professeur Christian von Dohm, l’Abbé Grégoire, Philippe-Frédéric de Dietrich © 7, Pierre Ochs ©, les de Turckheim ©, et le papetier Nicolas Pasquay ©. L. avait voulu publier les procès-verbaux de l’Assemblée provinciale : on le lui avait interdit. Mirabeau intervint en sa faveur. L. servit également d’intermédiaire aux notables « révolu- tionnaires réformistes » qui avaient engagé Mirabeau à se présenter à Strasbourg pour être élu aux Etats généraux (1788). Plusieurs lettres de Mirabeau à L. ont disparu ; la seule conservée est en fait le «programme» révolutionnaire de Mirabeau, tout à fait conforme à celui de la société secrète politique des « llluminaten » et de celle des Philanthropes. Il est symptomatique que L. fut membre fondateur de la Société de la Révolution (15.1.1790) puis président de la Société des amis de la Constitution (17.4.1790). Membre de la garde nationale de Strasbourg, il fut envoyé en mission à Paris et à Versailles en octobre 1789, où il négocia l’armement de la garde nationale de Strasbourg avant de traiter en Allemagne des achats de grains pour l’Alsace. Avocat général de la Ville de Strasbourg (15.1.1790). Le 21.2.1791, il fut élu membre du Directoire du département, et devint procureur général syndic du Bas-Rhin. En 1792, Euloge Schneider © écarta les notables modérés de la Société des amis de la Constitution : L. fut suspendu comme procureur général syndic, mais fut élu notable le 6.12.1792. En 1793, il quitta Strasbourg à deux reprises, et arriva le 1.12.1793 à Bâle, où il travailla comme correcteur et compositeur dans l’imprimerie Haas. Bénéficiant de la loi du 22 nivôse an III, il fut radié de la liste des émigrés et revint à Strasbourg début 1795. Retrouvant sa place dans la garde nationale, il devint successivement membre de la Commission des hospices, du jury d’instruction publique et président du Conseil général de 1800 à 1802. L’ancienne imprimerie librairie devint la société Levrault Frères à la mort de François Georges L. (1798). Les commandes des administrations civiles et militaires entraînèrent un développement notable de l’imprimerie ; un magasin de librairie fut ouvert à Paris, quai Malaquais. D’importantes publications furent entreprises (notamment un monumental Dictionnaire des sciences naturelles), mais la légèreté de la gestion de Nicolas L. © 4 à Paris conduisit la maison Levrault Frères pratiquement à la faillite durant l’hiver 1803 ; la situation ne put être définitivement apurée qu’en 1813. Dans le même temps, L., resté à Strasbourg, devint l’un des proches du préfet Lezay-Marnésia © et siégea au conseil de préfecture de 1810 à 1821. Il organisa, à la fin de l’Empire, la défense de Strasbourg contre les coalisés, mais semble s’être rallié assez facilement à la Restauration. Président du collège électoral en 1816, il assura un temps l’intérim du préfet, et fut nommé recteur de Strasbourg de 1818 à sa mort sur la recommandation de Cuvier ©, le 6.11.1818. En septembre 1819 il fut élu député. A sa mort, sa veuve et son frère Louis © 3 prirent la tête de l’affaire familiale. Chevalier de la Légion d’honneur (1814).

 

Mirabeau, Mémoires, IV, p. 422 ; L. de Loménie, Les Mirabeau, IV, Paris, 1891, p. 129-133, 14 ; Sitzmann II, 150 ; A. Salomon, François Laurent Xavier Levrault, RA, 1927, p. 425-447, 560- 591 ; Himly, p. 131, 132, 143, 152, 153, 180, 186, 198, 201, 221 ; EA VIII, 1984, p. 4720-4721.

Autre bibliographie dans M. Thomann, La genèse de la notion des Droits de l’Homme et l’Alsace, Actes du 1er Colloque international des bicentenaires de Mulhouse, Mulhouse, 1989, p. 11-16 et dans M. Thomann, Der Anteil des Elsass, Badens und der deutschsprachigen Schweiz an der doktrinellen Vorarbeit der Menschenrechtserklärung von 1789, Oberrheinische Aspekte des Zeitaiters der Französischen Revolution, hrsg. von M. Schaab, Stuttgart, 1990, p. 1-13.

Frédéric Barbier et Marcel Thomann (1995)

 

3. Louis Charles,

avocat, imprimeur-libraire (★ Strasbourg 9.5.1764). Frère de 2. ∞ 4.2.1793 à Strasbourg Marguerite Philippine Liechtlé (★ v. 1765), fille de Joseph Guillaume Constantin L., commissaire de la monnaie, et de Marie Crescence Reibell. Après des études au collège royal, L. devint avocat au Parlement (1785). En 1789, il assura la succession de son père lorsque celui-ci se retira des affaires. Participant à la société Levrault Frères après 1798, il fut, à compter de 1804, à la tête de la librairie et imprimerie strasbourgeoise établie rue des Juifs. Par la suite, ce fut lui qui assura pratiquement seul la charge de l’entreprise, lorsque son frère © 2 se consacra de plus en plus à ses activités publiques à partir de 1814.

4. Nicolas Pierre,

prêtre, imprimeur-libraire (★ Strasbourg, St-Etienne, 27.7.1767 † « à l’hôpital de Mtislaw » (Mstisslaw, Russie ? ) janvier 1813 ? ). Frère de 3. Après des études de théologie, L. entra dans la carrière ecclésiastique en 1786. Le cardinal de Rohan © lui accorda, en 1790, une dispense d’âge pour être ordonné prêtre. Cependant, L. semble s’être détourné de la prêtrise vers 1795. Il entra comme associé dans la maison paternelle en 1798, et prit, l’année suivante, la tête de la maison de Paris. Mauvais gestionnaire, il dut se retirer de l’affaire en 1804. Placé à la tête de l’imprimerie de la Grande Armée en frimaire an XIV, il suivit celle-ci dans toutes ses campagnes à travers l’Allemagne, ce qui lui permit d’établir un très vaste réseau de correspondants d’affaires travaillant avec la maison familiale de Strasbourg. L’imprimerie de la Grande Armée, créée en l’an XI en vue d’une attaque contre l’Angleterre, comprenait un directeur, un «traducteur-vérificateur», deux protes et quatre compositeurs et pressiers. Il participa à la campagne de 1809, puis repartit avec la Grande Armée pour la Russie. Les presses et le matériel de l’imprimerie tombèrent aux mains des Russes en novembre 1812 : on perd ensuite la trace de L.

Kammerer I, p. 195, n° 3030.

 

5. François Xavier,

capitaine, imprimeur-librairie (★ Strasbourg 1.1.1773 † 1844). Frère de 4. ∞ 20 nivôse an XI = 10.1.1803 à Strasbourg Antoinette Geneviève Liechtlé. A la Révolution, L. s’engagea comme volontaire dans le 8e régiment de chasseurs à cheval, devint sous-lieutenant et participa à la bataille de Valmy (20.9.1792). Nommé lieutenant lors de la première campagne du Rhin, il participa au siège de Mayence (1793) et fut promu capitaine (12.5.1793). Distingué par le général Desaix et devenu en 1795 aide de camp du général de Schauenbourg, il prit part à la prise de Kehl. Il passa ensuite dans l’armée de Suisse où il devint chef d’escadron au 6e dragons (1798), avec lequel il fit les campagnes de l’an VII. Puis, son unité ayant été incorporée à l’armée d’Italie, il rejoignit Bonaparte à Montebello, via le Saint-Gothard, et fut blessé à la bataille de Marengo (14.6.1800). L. abandonna alors la vie militaire, rentra à Strasbourg et prit part à la gestion des affaires familiales.

Michaud, Biographie universelle ancienne et moderne, LXXI, Paris, [1843-1865], p. 463 ; Meyer ; Sitzmann, I, 128 (Oscar Berger-Levrault), II, 149-152 ; EA VIII, 1984, p. 4720-4721.

Les titres cités ci-dessous sont de Frédéric Barbier : Nouvelles recherches sur l’imprimerie strasbourgeoise (1676-1831), Positions des thèses des élèves de l’Ecole des Chartes, Paris, 1976, p. 11-16 ; Le transfert des industries alsaciennes en Lorraine après la guerre de 1870 : l’exemple de Berger-Levrault, Actes du 105e Congrès national des sociétés savantes, Histoire moderne et contemporaine, II, Paris, 1979, p. 121-134 ; Le monde du livre à Strasbourg, de la fin de l’Ancien Régime à la chute de l’Alsace française, thèse 3e cycle, dactyl., Université Paris I, 1980, p. 282-283, 348-349, 518 ; Quelques documents inédits sur l’abbé Delille, Studies on Voltaire and the 18th century, vol. 189, Londres, 1980, p. 211- 228 ; Les ouvriers du livre et la révolution industrielle en France au XIXe siècle, Revue du Nord 63, 1981, n° 248, p. 189-206 ;

La formation d’un atelier de reliure industrielle en France au XIXe siècle : Berger-Levrault, 1870-1886, Revue française d’histoire du livre 37, 1982, p. 745-752 ; Autour de deux lettres inédites de Jean-François Née de La Rochelle, Histoire du livre et de la culture 2, décembre 1990, p. 15-27.

 

Frédéric Barbier (1995)

6. Louis François Constantin,

percepteur, historien, (c) (★ Strasbourg 3 nivôse an XII = 25.12.1803 † Obernai 4.5.1876). Fils de 5. ∞ Madeleine Hortense Graff. Prit en 1844 la succession de son père comme percepteur des contributions directes à Obernai, charge qu’il occupa jusqu’en 1870. Correspondant du Ministère de l’Instruction publique et membre de la Société pour la conservation des monuments historiques d’Alsace, il s’intéressa à l’histoire de l’Alsace et publia de nombreux articles et ouvrages. A rédigé les commentaires (autres auteurs : M.Th. de Morville, M.X. Mossmann ©) de l’album du lithographe J. Rothmuller ©, Musée pittoresque et historique de l’Alsace, Colmar, 1863 (rééd. en fac-similé, Obernai, 1981, avec préface de R. Lehni).

Essai sur l’ancienne monnaie de Strasbourg et sur ses rapports avec l’histoire de la ville et de l’évêché, Strasbourg-Paris, 1842 (2e éd. Paris, 1874). En outre, divers articles dans la RA (De la décentralisation de la presse, 1850 ; Notes sur quelques monnaies et ateliers monétaires d’Alsace, 1850 ; La vallée de la Bruche, Haslach, Girbaden, Nideck et le Donon, 1852 ; Guémar, Ober-Bergheim, Ribeauvillé et leurs châteaux, 1853 ;  Sainte-Odile et le Heidenmauer, 1853 ; Le Dr Sultzer, 1854 ; Le général Schaeffer, 1856 ; Correspondance au sujet du mur païen, 1857 ; Villes libres et impériales d’Alsace, 1858), et le BMHA (Le château de Guirbaden, 1857 ; Les châteaux de Lutzelbourg-Rathsamhausen, 1857 ; Le château de Hohenack, 1860).

RA, 1853, p. 486-488 ; 1854, p. 47-48 ; Sitzmann II, 152.

Odile Zeller (1995)

  1. LEVRAULT (BERGER-LEVRAULT)

François Georges Oscar, imprimeur-libraire, éditeur, (PI) (★ Strasbourg 9.5.1826 † Nancy 24.9.1903). Fils de Pierre Frédéric Berger © 1, imprimeur-libraire, et d’Eléonore Levrault. Petit-fils de 2. ∞ 10.5.1851 à Strasbourg sa cousine germaine Anna Caroline Eléonore Pitois (★ Paris 15.4.1826 † Nancy 30.5.1895), fille de Jean Charles P., libraire, et de Caroline Levrault ; 4 enfants. A 24 ans, il devint l’associé de sa mère et prit bientôt la direction des affaires, en s’adjoignant un de ses employés, Jules Norberg, pour relever l’imprimerie et étendre son activité. L’œuvre de régénération était achevée en 1870, quand survinrent la guerre et le bombardement de Strasbourg. O. B.-L. opta pour la nationalité française et transporta en 1871-1872 son entreprise à Nancy, après avoir cédé les installations strasbourgeoises. En 1876, un incendie l’obligea à réorganiser l’imprimerie : il en fit une des premières d’Europe sur les plans technique et économique. Il fonda pour son personnel des caisses de retraites, de maladie et de vieillesse et une société immobilière. Grand bibliophile et érudit, il a travaillé sur le fonds familial de bibliothèque et d’archives de l’entreprise, aujourd’hui déposé aux ABR pour la période strasbourgeoise.

Répertoire des imprimés de l’administration du Bas-Rhin 1790-1800, Nancy, 1866 ; Les costumes strasbourgeois… par F.G. Schmuck..., Paris-Nancy, 1889 ; Annales des professeurs des académies et universités alsaciennes 1523-1871, Nancy, 1892 ; Souvenirs strasbourgeois, Nancy, 1895.

Histoire d’un imprimeur. Berger-Levrault 1676-1976, s.l., 1976, p. 92-111.

Christian Wolff (1995)