Homme politique, (c) (★ Paris 28.4.1835 † Cannes 12.3.1906).
Fils de Timoléon de L. (★ 1804 † 1871) et de Pauline de Colbert-Maulévrier (★ 1811 † 1863). ∞ 8.3.1856 Marie- Madeleine Renouard de Bussierre (★ 1837 † Cannes mars 1916), fille de Théodore R. de B. © et d’Octavie Humann © ; 7 enfants dont Jeanne 1877 Georges Humann (★ 1833 † 1908), général. P. de L. passa son enfance au château de Montboissier, Eure-et-Loir. Son éducation fut fort négligée. Bachelier en 1855, il s’engagea tout de suite dans la marine, fit la guerre de Crimée, tant en mer que devant Sébastopol, et en revint médaillé militaire, chevalier de la Légion d’honneur et aspirant titulaire. Il quitta la marine, se maria, et vint s’installer à Reichshoffen, au château de son beau-père : il en fut l’associé et le successeur. C’est ainsi qu’il adhéra à l’Association de Saint-François de Sales, destinée à «s’opposer aux envahissements du protestantisme et de l’impiété», dont Mgr de Ségur refusa cependant de lui confier la présidence en notant : «l’excellent M. de Bussierre et son gendre, le jeune comte de L., ou bien ne font rien, ou bien manifestent une ardeur compromettante ». Formule qui peut bien résumer les doctrines et la carrière de L. En 1865, il fut nommé maire de Reichshoffen. Pierre-Rielle de Schauenbourg ©, autre dirigeant catholique, l’imposa pourtant au préfet Pron comme candidat à sa succession pour le siège cantonal de Brumath où il fut élu en 1866, et le préfet l’imposa comme candidat à la succession de Coëhorn © comme député de Wissembourg, malgré les vives réserves des grands notables protestants de l’arrondissement (les de Dietrich © et leur associé, Rodolphe de Turckheim en particulier). Le préfet lui demanda cependant dans sa profession de foi, un engagement sans détours en faveur des principes de 1789, et confia la direction de la campagne officielle à son chef de cabinet Edgar Hepp © 7. Car avec l’affrontement entre Rodolphe de Turckheim, protestant, et L., l’élection ne put manquer de se placer sur le terrain confessionnel. Ce que L. souligna avec sa fougue coutumière, dans une campagne couronnée, après son élection (mai 1869) par la célèbre circulaire aux curés catholiques de la circonscription (juin 1869) : « il y a chez nous un parti catholique », durement condamnée par Mgr Raess, qui venait d’avoir fortement engagé le clergé et la Société Saint-Vincent-de-Paul pour assurer à Strasbourg la réélection du protestant Alfred Renouard de Bussierre. Au Corps législatif, L. prit place sans trop de délais dans l’extrême droite bonapartiste, ou club de l’Arcade, puis se déclara dégoûté de la politique (juin 1870). Il participa à la séance du 15.7.1870, figura parmi les interrupteurs qui hachèrent le long discours de Thiers condamnant la politique d’Ollivier, et vota contre la communication des dépêches, c’est-à-dire pour la guerre. Puis il s’en retourna à Reichshoffen. Son château servit de quartier général au maréchal de Mac-Mahon au début d’août 1870, puis, après la défaite de Froeschwiller, d’hôpital. Après quelques mois, il rejoignit sa famille, réfugiée à Montboissier au début de la guerre, puis à Lucerne. Il opta pour la France en 1872. Sa vie se partagea dès lors entre Reichshoffen et la France, en particulier Cannes. Il publia plusieurs ouvrages : La paix par l’Union douanière franco-allemande de 1888, suivie de L’Union douanière agricole au centre de l’Europe de 1890, Reichshoffen, 1890, où il prônait à la fois le retour de la France à une monarchie conservatrice et l’alliance de monarchies conservatrices et chrétiennes dans une Union douanière, destinée à faire front contre la concurrence des produits agricoles américains et australiens. La tendance générale d’autres ouvrages qu’il publia n’est pas conforme à ces principes de 1789 qu’il avait fait profession d’être siens. Dans les Etudes d’histoire ethnique, fortement inspirées de Gobineau, il défendait «le principe arien», qui garantit à la fois le haut niveau d’une civilisation et l’éloignement de la démocratie qui en est une condition ; puis il en tira, afin que nul n’en ignore, une brochure : La démocratie, voilà l’ennemi ! On peut estimer que le commentaire tout à fait favorable qu’en donna le frère Edouard Sitzmann © démontre qu’avec ses idées, l’auteur n’était pas complètement isolé dans les milieux catholiques alsaciens.
La paix par l’Union douanière franco-allemande, 1888 ; L’Union douanière agricole au centre de l’Europe de 1890, Reichshoffen, 1890 ; Etudes d’histoire ethnique depuis les temps préhistoriques jusqu’au commencement de la Renaissance, 2 vol., 1895 ; La démocratie, voilà l’ennemi ! , s.d. (après 1895) ; Souvenirs, Sébastopol, Reichshoffen, présentés par Ernest d’Hauterive, annotés et publiés par son petit-fils, le comte Paul de Leusse, aux dépens d’un amateur, 1950.
Sitzmann II, 147-148 (inexactitudes) ; A. Humm, La famille Humann, BCGA, 1970, p. 135-140 (ne cite que quatre enfants de Paul de Leusse) ; J.-P. Kintz, Journaux politiques et journalistes strasbourgeois sous le Second Empire, Strasbourg, 1974 ; Igersheim, 1981, p. 271 ; Notice généalogique sur Paul de Leusse, fichier Hofmann ; Fr. Igersheim, Politique et administration dans le Bas-Rhin (1848-1870), Strasbourg, 1993.
François Igersheim (1995)