Chirurgien-dentiste et acteur de théâtre, (C) (★ Lunéville, Meurthe-et-Moselle, 11.11.1763 † Strasbourg 28.3.1823).
Fils de Jean Claude Fidèle Laforgue chirurgien-dentiste du duc de Deux-Ponts, du roi de Pologne Stanislas Leszczinski © et enfin de la Ville de Strasbourg, numismate et collectionneur, et de Marie-Anne Hemy. ∞ I 18.11.1788 à Strasbourg. Saint-Pierre-le-Jeune, Marie Antoinette Monceret (★ Strasbourg, Saint-Pierre-le-Jeune, 5.5.1770 † Strasbourg 28.1.1793), fille de Jean-Pierre Monceret, négociant à Strasbourg, et de Marguerite Benoît. ∞ II 18 vendémiaire an III = 10.10.1794 à Strasbourg, Saint-Étienne, Marie-Anne Jünemann (★ Strasbourg, St-Etienne, 20.9.1775 † Strasbourg 11.1.1806), fille d’Ermilien Jünemann, cabaretier, et de Marie Anne Assmann. Déjà praticien depuis 1780 à l’hôpital de Strasbourg, il fut reçu expert-dentiste au Collège de Chirurgie de Nancy le 1er septembre 1782, puis à celui de Paris le 28 mai 1784. Revenu à Strasbourg, il entra au service de son père. Reçu officier de santé-dentiste par le Collège de Chirurgie de Paris le 18 juillet 1803, il fut attaché comme dentiste au lycée de Strasbourg. La Révolution le voit très actif et complètement gagné aux idées nouvelles. Engagé dans la garde nationale de Strasbourg, il y fut élu commandant en chef du 1er bataillon le 11 novembre 1792. Il composa également plusieurs chants patriotiques, comme Peuple, ton triomphe commence et surtout l’Hymne à l’Être suprême, imprimé chez Dannbach. Dès l’âge de 15 ans, Laforgue manifesta un talent certain pour l’art de la rhétorique et suivit à l’Université, à compter de 1778, les cours d’éloquence et d’histoire du professeur Lorentz. Dès le lendemain de la Terreur, en 1794, une troupe d’amateurs fonda le Théâtre de Bienfaisance qui exploita la salle des drapiers de la rue Sainte-Hélène. Laforgue y obtint un tel succès que sa vocation d’artiste l’emporta. En 1800, il entra au Théâtre français de Strasbourg, place Broglie. La destruction de celui-ci par incendie, le 30 mai de la même année, amena la troupe à s’installer au poêle des Drapiers, puis, en 1808, à l’église Saint-Étienne. Laforgue se révéla sans conteste comme le meilleur élément du groupe tant par sa verve que par sa physionomie expressive et ses dons comiques. « Aucun acteur n’occupait plus réellement la scène que lui et ne s’identifiait mieux avec les personnages qu’il avait à représenter. Aucun acteur n’était mieux, ni plus fidèlement costumé, dans tous les rôles de son emploi et aucun, surtout, n’avait plus de mobilité dans la physionomie et dans toute l’attitude du corps. » (Fargès-Mericourt). Sa réputation gagna la capitale, mais à l’exception d’un bref passage à Nancy, il refusa les plus flatteuses propositions pour ne pas quitter l’Alsace. Il lui arriva cependant de jouer devant l’impératrice et il fut le partenaire du grand Talma en septembre 1814. Après l’inauguration du nouveau théâtre de Strasbourg le 23 mai 1821, il en devint le 15 avril 1822 le directeur, secondé par son gendre Paisac, également issu du milieu médical puisque ancien chef des hôpitaux militaires. Membre de l’Académie royale de Chirurgie et musicien éclairé, Laforgue était également miniaturiste et aquarelliste de talent. Élève du miniaturiste Meulnier de Strasbourg, il fut en particulier possesseur d’une belle collection de peintures et de gravures. Auteur d’un autoportrait conservé au Musée des Beaux-Arts, il laissa également aux Musées de la Ville un dessus de table en trompe-l’œil.
Fargès-Mericourt, Notice biographique dans le Courrier du Bas-Rhin du 3.4.1823 ; A. Benoît, Collections et collectionneurs alsaciens, s.l., 1875 ; G. Bergner, « Charles Martin Laforgue, dentiste et comédien », L’Alsace Française du 17.11.1923 ; P. Deck, Le Théâtre français à Strasbourg (1681-1830), Strasbourg-Paris, 1948 ; R. Droz, Les dentistes strasbourgeois aux XVIIIe et XIXe siècles, thèse, Strasbourg, 1974.
Iconographie : Portrait par Beyer, lithographié par Engelmann, datant de 1810 au Cabinet des Estampes de Strasbourg.
Georges Foessel (1994)