Commandant de camp de concentration (★ Munich, Bavière, 10.11.1906 † Hameln, Basse-Saxe, 12.12.1945). Ouvrier d’usine licencié, il resta chômeur plusieurs années. Il s’inscrivit au parti nazi le 1er décembre 1931. Le 20 juin 1932, il entra dans les SS. Le parti lui procura un emploi de bureau aux services de l’état-civil à Augsbourg. Le 13 février 1934, il débuta dans l’administration concentrationnaire comme Wachtmeister au camp de Dachau. Il passa en 1935 au camp d’Esterwegen, puis revint à Dachau. En 1937, il fut désigné comme vaguemestre à Sachsenhausen. Il fut promu adjoint au commandant du camp de Mauthausen (août 1938-mai 1940), puis de mai à novembre 1940, il fut l’adjoint du commandant du camp, Rudolf Höss, à Auschwitz. Lagerführer stagiaire, il était adjoint au commandant du camp de concentration de Dachau quand il fut nommé en avril 1941 Lagerführer (chef de camp) du nouveau camp ouvert dans la vallée de la Bruche à Natzwiller au lieu-dit Struthof, c’est-à-dire qu’il avait la haute main sur la vie interne du camp. De février à mai 1942, il assura l’intérim du Lagerkommandant entre le départ du Hauptsturmführer (capitaine) Hans Hüttig et l’arrivée du Sturmbannführer (commandant) Zill. En juin 1942, il fut promu Obersturmbannfuhrer SS (lieutenant-colonel) et fut nommé commandant du camp le 25 octobre 1942. Il habitait un chalet près du camp et s’y était fait creuser une piscine, tout en conservant l’usage de la villa Marchal à Rothau-La Claquette. Il expérimenta dans la petite chambre à gaz qu’il aménagea en août 1943 le gaz « Zyklon B » sur des prisonniers soviétiques et, ensuite, y assassina des détenus du camp, ainsi que des femmes et des hommes juifs venus d’Auschwitz. Il fit aussi tuer des gitans par injection de créosote ou du sérum du typhus. Il fournissait ainsi des cadavres pour les « travaux » du professeur Hirt © à la faculté de Médecine allemande de Strasbourg. Il se distingua constamment par sa cruauté et son mépris de la vie humaine. Le 5 mai 1944, il fut nommé commandant du camp d’extermination de Birkenau (Auschwitz II). Cette époque fut marquée en particulier par l’extermination de plusieurs centaines de milliers de juifs hongrois. À partir du 1er décembre 1944, il commanda le camp de Bergen-Belsen où arrivaient de nombreux déportés évacués des autres camps. « La bête de Belsen » fut incapable de les nourrir : environ 50 000 hommes, femmes et enfants moururent alors de faim ou du typhus, dont la jeune Anne Frank. À leur arrivée, le 15 avril 1945, les soldats anglais découvrirent 13 000 cadavres jonchant le sol. Kramer, qui ne s’était pas enfui, fut jugé par un tribunal militaire britannique et condamné à mort. Il avait été interrogé les 26 juillet et 6 décembre 1945 par des juges d’instruction auprès du Tribunal militaire de Strasbourg sur ses activités au Struthof. Il fut exécuté par pendaison.
« Le camp de concentration du Struthof et l’activité de l’Institut d’anatomie de Strasbourg pendant l’occupation », Notes et études documentaires (Paris), n° 140, 1945 ; E. Kogon, L’enfer organisé. Le système des camps de concentration, Paris, 1947, p. 215 ; E. Kolb, Bergen-Belsen, Hanovre, 1962 ; Ouvrage collectif publié par la FNDIRP, La Déportation, Paris, 1967, p. 206 (photo) ; O. Wormser-Migot, Le système concentrationnaire nazi 1933-1945, Paris, 1968, p. 12, 161, 241, 242, 592 ; Ch. Béné, Du Struthof à la France libre, Raon-l’Étape, 1968; H. Allainmat, Auschwitz en France, Paris, 1974 ; F. Marcoux, « Un aspect des crimes contre l’humanité : l’extermination nazie au Struthof », Saisons d’Alsace, n° 23, 1977, p. 64-69; Ch. Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, V, Raon-l’Étape, 1980 ; Natzwiller-Struthof, Étude du comité national du Struthof et du comité d’histoire de la Seconde Guerre mondiale, Nancy, 1982 ; The Struthof Album, a photographie document, New York, 1985 (il existe une traduction française des textes multigraphiée) ; L’enfer d’Alsace, un guide-témoignage sur le Struthof-Natzwiller, s. l. n. d. [1986]; J. Ziegler, Mitten unter uns, Natzweiler Struthof : Spuren eines Konzentrationslagers, Hambourg, 1986 R. Hilberg, La destruction des juifs d’Europe, Paris, 1988, p. 781, 852, 931, 948 ; V. Cl. Fisera, Document : le témoignage du docteur Leo Fritz sur les crimes nazis commis dans le camp de concentration de Natzwiller-Struthof, Revue d’Alsace, 1988, p. 225-236.
Léon Strauss (1994)