Général de division, maréchal de France à titre posthume, député du Bas-Rhin, ministre de la Défense, (C) (★ Caen, Calvados, 10.10.1898 † Neuilly, Hauts-de-Seine, 2.9.1970).
Fils de Joseph Koenig, facteur d’orgues, et de Marie Muttin. ∞ 18.4.1931 Marie Jeanne Klein. La famille Koenig était originaire d’Altkirch où elle s’était fixée au milieu du XVIIIe siècle, venant de Porrentruy et de Soleure. Élevé dans un milieu familial assez strict, Koenig commença sa scolarité chez les Frères de Sainte-Marie de Caen et fit des études secondaires au lycée Malherbe de la même ville. Engagé volontaire le 17 avril 1917, Koenig termina la Grande Guerre comme sous-lieutenant avec la Médaille militaire, et embrassa alors la carrière militaire. Il servit en Silésie au 11e bataillon de Chasseurs alpins (1919-1922), puis au Maroc, d’abord au 4e régiment Étranger, ensuite à l’état-major du général Duché (1931-1940). À ce titre, il prit part aux dernières opérations de pacification. En 1940, il participa comme capitaine à l’expédition de Norvège ; rapatrié en Bretagne, à la suite de son chef le colonel Magrin-Vernerey (Monclar), il échappa de justesse à la capture et rejoignit la France libre le 19 juin 1940. Chef d’état-major de Monclar, Koenig participa aux opérations de la 13e brigade en Érythrée, en Syrie et au Liban. Général de brigade le 12 juillet 1941, il reçut le commandement des forces françaises à Alep. Le 14 février 1942, la première brigade commandée par Koenig vint relever les Anglais en Libye, sur la position de Bir Hakeim qui contrôlait, en plein désert, la piste principale menant du Caire à Tripoli. Cette unité comprenait quatre bataillons, légionnaires et contingents venus de Nouvelle Calédonie et d’Afrique équatoriale française. Koenig s’empressa de fortifier le site. Le 27 mai, il arrêta une division italienne puis, à partir du 2 juin, reçut de plein fouet l’attaque des blindés de Rommel qui, venant de Tunisie, faisaient route vers l’Égypte. La résistance de Bir Hakeim se prolongea contre toute attente jusqu’à la nuit du 10 au 11 juin au cours de laquelle Koenig réussit à faire évacuer toutes ses troupes valides. En retardant l’avance allemande, les défenseurs de Bir Hakeim avaient contribué à rendre possible le retournement progressif de la situation militaire en faveur des Alliés qui aboutit en octobre à la victoire de Montgomery à El Alamein, à laquelle l’unité commandée par Koenig prit part dans des conditions particulièrement éprouvantes. L’affaire de Bir Hakeim eut des conséquences psychologiques considérables dans la mesure où elle consacrait le retour actif des forces françaises sur le front et leur participation à l’effort de guerre allié. Pour le restant de sa vie, Koenig fut considéré comme « le héros de Bir Hakeim ». Promu général de division le 25 mai 1943, Koenig devint le 6 août suivant chef d’État-Major général adjoint de l’Armée ; sa première et délicate mission consista à faire fusionner sur le sol algérien les Forces françaises libres qui avaient suivi de Gaulle © et l’Armée française restée aux ordres de Vichy jusqu’au débarquement allié en Afrique française du Nord.
En outre, Koenig devait diriger et coordonner à distance l’action des maquis en France, y compris ceux d’obédience communiste. À partir du débarquement du 6 juin 1944, la tâche de l’État-Major français fut encore compliquée par les directives données directement aux maquis par le commandement suprême, directives qui, si elles avaient été suivies aveuglément, auraient entraîné des soulèvements locaux prématurés et coûteux. Le 10 juin, Koenig diffusa un ordre d’opération qui visait à freiner provisoirement la guérilla et surtout à éviter les concentrations de maquisards dans les zones éloignées du théâtre principal des opérations. Ces directives permirent de limiter les pertes, contrairement à ce qui se passa dans le Vercors où elles avaient été ignorées. Le 1er septembre 1944, Koenig, fait général de corps d’armée, fut à son grand dam nommé gouverneur de Paris et éloigné des opérations. Il lui incomba la mission ingrate d’arrêter le maréchal Pétain à la frontière suisse le 23 avril 1945. Commandant en chef des forces françaises en Allemagne, il affronta le problème du ravitaillement de la zone française. Le 10 août 1949, il passa les consignes à André François-Poncet. Il termina sa carrière militaire comme inspecteur des forces armées en Afrique du Nord. De Gaulle ayant fondé le Rassemblement du peuple français (RPF), Koenig adhéra aussitôt au mouvement (1947). C’est à la demande expresse du fondateur qu’il accepta de se présenter à la députation à Strasbourg en 1951. Avec André Malraux © et les gaullistes strasbourgeois, il organisa le 10 juin une grande réunion contradictoire et six jours plus tard il accueillait de Gaulle en personne venu clore à Strasbourg la campagne nationale menée par son mouvement. Le RPF n’obtint qu’un demi-succès. Koenig lui-même fut élu de justesse le 18 juin 1951. Il eut pour secrétaire André Bord ©. Koenig prit nettement position en faveur des Alsaciens incorporés de force lors du procès des militaires impliqués dans l’affaire d’Oradour. Il s’intéressait plus particulièrement aux affaires militaires et prit la présidence de la commission de la défense nationale. Il s’inquiétait de l’incapacité de la France à se protéger d’une attaque russe que beaucoup à l’époque estimaient prochaine. Il promit à ses électeurs que l’Alsace ne constituerait pas le glacis de la prochaine défense. Toutefois, conformément à la doctrine gaullienne orthodoxe, il était hostile à la Communauté européenne de défense dans laquelle les forces françaises eussent été fondues dans un ensemble international. Koenig accepta le portefeuille de la Défense dans les cabinets Mendès-France (19 juin au 14 août 1954) et Edgar Faure (25 février au 6 octobre 1955). Toutefois les deux expériences tournèrent court ; en désaccord avec les concessions faites aux nationalistes tunisiens et algériens, Koenig démissionna. Réélu député en 1956, il renonça à se présenter en 1958 alors que le parti qu’il avait soutenu jusqu’alors arrivait au pouvoir. On dit que de Gaulle lui fit grief de sa participation à des gouvernements de la IVe République. De l’avis des biographes les plus bienveillants, Koenig n’avait pas apporté en politique les qualités manoeuvrières qui avaient établi sa réputation de chef de guerre. Ses dernières années furent assombries par son désaccord croissant avec de Gaulle. Président de l’Association France-lsraël, Koenig fit preuve d’une fidélité sans faille à l’Etat hébreu au temps difficile de la guerre des Six Jours. Élu le 5 mars 1951 à l’Académie des Sciences morales et politiques. Son biographe Louis Gabriel-Robinet assure qu’il refusa le maréchalat qui lui fut cependant attribué à titre posthume le 6 juin 1984.
L’effort militaire de la France libre, Paris, 1945 ; Bir Hakeim, 10 juin 1942, Paris, 1971.
J. P. Zwicky, « Zur Abstammung von General König », Archiv für schweizerische Familienkunde, 1948, p. 74-80 ; R. Heitz, Souvenirs de jadis et de naguère, Strasbourg, 1963, p. 261- 268 ; Nouveau dictionnaire national des contemporains, 4e éd., Paris, 1966, p. 319 (portrait) ; Who’s who in France, 1969-1970, p. 847-848 ; J. Granier, De Gaulle et l’Alsace, Strasbourg, 1970 ; Le Monde du 4.9.1970 ; Dernières Nouvelles d’Alsace du 4.9.1970 ; P. Guillain de Bénouville, « Koenig, l’orgueil de la France », Revue des deux mondes, 1970, 10, p. 237-243 ; L. Gabriel-Robinet, Koenig, un chevalier, Paris, 1973 (liste complète des distinctions honorifiques surtout militaires) ; H. Amouroux, La grande histoire des Français sous l’occupation, VIII, Paris, 1988, p. 197 et s. ; J. Valynseele, Dictionnaire des maréchaux de France du Moyen Age à nos jours, Paris, 1988 ; A. Bord, « Un état d’esprit. » Propos recueillis par D. Wirtz-Habermeyer, Strasbourg, 1993, p. 48 et s. ; Dictionnaire de biographie française, XVIII, 1993, c. 1243-1244.
Jean-Yves Mariotte (1994)