Skip to main content

KOEBERLÉ Elsa

Poétesse, artiste peintre (★ Strasbourg 2.8.1891 † Villeneuve-lès-Avignon, Gard, 14.7.1950, inhumée à la chapelle Notre-Dame de Selvezet du Fort Saint-André).

Fille d’Eugène Koeberlé ©. Célibataire. Elsa fut adulée par son père avec lequel elle avait une ressemblance frappante. Selon Robert Heitz ©, « un nez en bec d’aigle émergeant d’une tête d’ange de Botticelli ou un être préraphaélique évoluant dans une aura de thé-petits fours servis aux fidèles du cercle des Annales ». Élevée en reine, elle devint une reine à la fois tyrannique et délicieuse, dont les caprices s’opposaient parfois à la volonté de sa mère avec laquelle l’accord était loin d’être parfait et aboutit à la rupture après la mort du père. « Douée d’une intelligence extraordinaire et d’une sensibilité ardente, elle avait un penchant secret à rêver à de passionnantes amours, penchant qui transparaît en ses fluides poèmes ». Cultivée et très artiste, E. Koeberlé grandit et s’épanouit « dans l’atmosphère strasbourgeoise où rien n’était perdu du mouvement littéraire et artistique de Paris, en ce climat stabilisé, mais vulnérable, d’une sensibilité à fleur de nerfs, à fleur de rêve marquant pour toujours ceux qui l’ont vécue ». De cette époque date sa production littéraire, influencée par le symbolisme alors en plein épanouissement. « Le symbolisme n’apparaît pourtant dans les poèmes d’Elsa que par la musicalité du langage et cette émouvante douceur où les paysages, qu’ils soient d’Alsace ou d’Orient, s’irradient, fugitifs, pour recueillir l’état d’âme du poète ». Ses poèmes ont paru entre 1902 et 1909 au Mercure de France, quelques-uns dans la Revue alsacienne illustrée, éditée par son ami le Dr P. Bûcher © chez lequel se réunissait l’élite intellectuelle de Strasbourg, où Anna de Noailles tenait une place de choix. Après l’Armistice, Koeberlé vint à Paris et fréquenta les milieux littéraires. Avec André Gide, Paul Claudel et Jean Schlumberger, elle contribua à la naissance de la Nouvelle Revue française. À son arrivée à Paris, « elle était accompagnée par une sorte de walkyrie, ancienne assistante de son père, Génia Lioubow qui joua dans sa vie un rôle tyrannique ». C’est là que se place le « mystère Koeberlé ». Elsa, jeune, brillante, choyée dans les réunions littéraires et artistiques de Paris, disparut brusquement de la scène. Après la Seconde Guerre mondiale, elle quitta Paris pour s’enfermer à l’abbaye du Fort Saint-André à Villeneuve-lès-Avignon avec son étrange compagne, « fille illégitime du tsar ou de quelque grand-duc russe, versée dans les sciences occultes ». Elles y aménagèrent d’admirables jardins avec des vasques, des colonnades et des terrasses. Elsa se mit également à peindre des aquarelles, des pastels, des portraits, des fleurs et des paysages dont une Vue d’un parc avec jet d’eau (1936). Elle aurait déjà participé en 1900 à une exposition au salon Bader-Notin à Strasbourg.

Œuvres poétiques : La guirlande des jours, Paris, 1902 ; Les accords, Paris, 1906 ; Décors et chants, Paris, 1909 ; « Poèmes… par Elsa Koeberlé et Jean Schlumberger », Revue Alsacienne, 10, 1909 ; Des jours, Paris, 1910.

Journal d’Alsace du 10.4.1900 ; J. de Gourmont, « Une poétesse alsacienne, Elsa Koeberlé », Le Messager d’Alsace-Lorraine, n° 298, du 9.7.1910, avec portrait ; M. Guizot, « Une étrange personne a vécu au Fort Saint-André, » Le Méridional du 9.2.1967 ; R.C. Hochstetter, Propos anthumes et souvenirs, s.l., [1987], dactyl. ; Lotz II, p. 187 ; H. Fuchs, L’étrange destin du poète Elsa Koeberlé, s.l.n.d. (conservé à la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg, Ms 71144).

Portrait par Eugène Carrière (1903) conservé au Musée d’Art moderne de Strasbourg.

Maurice Kubler (1993)