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KLEM

Famille (C) originaire du Brisgau près de Laufenburg-am-Rhein vers 1780 et dont l’activité dans la filière bois est connue de 1817 à 1923 en Alsace.

  1. Joseph,

charpentier, mécanicien-meunier (Mühlarzt) (★ Lüttingen-Laufenburg, Bade, v. 1780 † Kembs 15.1.1830. ∞ Marie Anne Weiss (★ Rheinsulz, Argovie, Suisse, v. 1774 † Kembs 22.8.1841) ; 7 enfants. Acquit en 1817 le moulin de la « Stichmühle » à Kembs-Loechlé.

  1. Jean Baptiste,

stucateur et sculpteur (★ Kembs 16.7.1816 † Colmar 1863). ∞ 3.5.1843 Marie Anne Reffé (★ Kientzheim 1821 † Colmar 1898). Connu comme stucateur-doreur à Kembs (travaux en l’église d’Ungersheim en 1845), il déplaça son atelier à Colmar en 1848 (avant peut-être à Kientzheim ?). On connaît de lui des travaux de restauration, mais aussi de création originale à Altkirch (1850 : autel), Carspach (1854), et surtout à Bâle (1863 : baldaquin de chaire et buffet d’orgue de la nouvelle église protestante, Elisabethenkirche). À sa mort, l’atelier de sculpture colmarien était géré par son gendre, Weiss, époux de sa fille aînée Eugénie, et par son fils Alphonse © 3 et fut repris ensuite par l’association Klem Frères, constituée d’Alphonse et de Théophile © 4.

  1. Alphonse,

sculpteur et constructeur (★ Kembs 1845 † Maxéville, Meurthe-et-Moselle, 1899). Fils de 2. ∞ 1872 à Romont, Suisse, Constantine Mercklen, d’origine belge ; 2 fils. Sculpteur, formé dans l’atelier de son père, constitua vers 1869, avec Théophile © 4, l’association Klem Frères, connue par plusieurs albums-catalogues, non datés, qui subsistent. Y figurent des reproductions photographiques non référencées de projets ou de travaux réalisés. En 1870, l’association Klem Frères exposa à Rome et publia une brochure : « Klem Frères, exposition romaine, Établissement pour la sculpture religieuse, Colmar Haut-Rhin. Ameublement d’églises sur bois, pierre et marbre. Statues. Ateliers à Munich et Colmar ». En 1872, Alphonse opta pour la France et s’établit à Maxéville, près de Nancy.

Archives départementales du Haut-Rhin, 13 J 8 ; A. Kannengieser, « Die Stichmühle bei Kembs », article non référencé conservé à la Bibliothèque municipale de Mulhouse (FBr I 2590) ; P. Stintzi, Ungersheim, le village et son église, Mulhouse, 1960 ; Inventaire suisse d’architecture, 1850-1920, publié par la Société d’histoire de l’art en Suisse, Berne, 1986.

† Louis Abel (1993)

  1. Joseph Théophile,

sculpteur (★ Colmar 14.8.1849 † Colmar 20.11.1923). Frère de 3. ∞ 21.11.1871 à Cernay Marie-Claire Bernhard (★ Cernay 12.8.1847 † Colmar 30.1.1925), fille de Joseph Bernhard, épicier, et de Marie-Anne Koenig. Études à Colmar, à l’école des Frères de Marie, puis au collège libre. Il fit ses premières armes dans l’atelier de son père. Klem se rendit en 1868 à Vienne, Autriche, pour y apprendre l’art gothique. Il y fut admis à l’École des Beaux-Arts. Assidu aux leçons, inscrit en outre à la section d’art plastique, il se vit honoré de la confiance et de l’amitié du professeur Friedrich von Schmidt, architecte, qui sut transformer l’élève en maître et qui le chargeait parfois de le suppléer dans ses cours. Sur le chemin du retour, Klem s’arrêta à Munich où l’art religieux était particulièrement en honneur, et où il trouva les germes d’inspiration qui écloront plus tard. Klem rentra à Colmar avec un talent singulièrement développé. Avec son frère Alphonse © 3, il dirigea l’atelier familial situé rue des Vosges (rue d’Ingersheim). Après trois années de travaux pratiques, Klem exécuta sa pièce de maîtrise, la maquette du maître-autel de la basilique Saint-Epvre de Nancy. Soldat courageux pendant le conflit franco-allemand, il termina la guerre avec le grade de capitaine. Obligé de rester en Alsace pour des raisons familiales, Théophile Klem reprit l’affaire de son frère Alphonse à son compte et, en 1881, il acheta à Colmar un ancien moulin (moulin Keller) pour y installer son atelier. C’est là que sous sa puissante direction devait se former l’atelier d’art religieux le plus important que l’Alsace eût possédé depuis les glorieuses années de Schongauer © et de « Hans » (Bongart) de Colmar. Son atelier acquit rapidement une renommée européenne. Plus de 1 600 autels, plus de 400 chaires, un nombre important d’ameublements d’églises, de boiseries, stalles, confessionnaux, buffets d’orgues, chemins de croix, etc., furent conçus et exécutés dans ses ateliers.

On en trouve dans presque toutes les églises de la région. Citons en particulier pour l’Alsace : à Colmar, la collégiale Saint-Martin, l’église Saint-Joseph (1900), l’église des Dominicains et la chapelle de l’Hôpital civil (1867) ; à Logelbach, en particulier la chapelle Herzog au Letzenberg ; à Strasbourg, les églises de Strasbourg-Neudorf (1887-1888), Sainte-Madeleine (1890), Saint-Pierre-le-Jeune (1893-1894), Saint-Louis, Saint-Étienne (1901) et de Strasbourg-Montagne Verte (1910), et l’autel du Sacré-Cœur de la cathédrale (1897) ; à Mulhouse, les églises Saint-Étienne (1898), Saint-Joseph et Saint-Fridolin à Thann, la collégiale ; à Bergheim, l’église (1876) ; à Dambach, l’autel Saint-Sébastien ; à Eguisheim, le monument Jeanne d’Arc (1921) ; à Guebwiller, l’église Notre-Dame (1903) ; à Mutzig, l’église ; à Obernai, l’église et le monument du cœur de Mgr Freppel ; à Rouffach, l’église ; à Sélestat, l’église Saint-Georges (1895 et 1899) ; à Soultz, l’église ; et à Thierenbach, l’église (1911). Klem ne limita pas son activité à l’art religieux. La Maison des Têtes à Colmar lui doit la restauration de sa façade réalisée en 1899 et après la Première Guerre mondiale de nombreux monuments aux morts furent conçus et exécutés dans ses ateliers. Klem sut faire face à toutes les exigences. Pendant la longue durée de son entreprise, il assuma un rôle multiple : maître-sculpteur pour fournir le mobilier des églises de style, restaurateur d’œuvres anciennes, conservateur d’œuvres d’art et enfin créateur et rénovateur pour meubler les églises nouvelles en s’inspirant de l’esprit et de l’œuvre du Moyen Âge. Klem eut le mérite de pénétrer l’âme des grands imagiers du Moyen Age et de s’initier à fond à la technique des maîtres anciens. Comme ceux-ci, il ne limita pas à sa province le champ de ses études et de ses recherches ; il fit de nombreux voyages au cours desquels il étudia les chefs-d’œuvre des maîtres qui l’avaient précédé. C’est grâce à une équipe de collaborateurs de valeur, parmi lesquels les sculpteurs Alfred Klem © et J.-B. Erny, les figuristes Gasser et Schupik et le brillant dessinateur C. Rudmann, formés à son école, que Klem put maîtriser des travaux importants. Une soixantaine d’artistes et d’artisans travaillèrent dans les ateliers. En janvier 1923, un incendie ravagea ses ateliers, ses archives personnelles et sa bibliothèque. Klem se consacra à la reconstruction de ses ateliers et au mois de septembre 1923 déjà le travail put reprendre dans de beaux et vastes locaux. Une société anonyme fut constituée avec la raison sociale établissements Th. Klem, ayant Théophile Klem comme administrateur et l’architecte Vonesch comme directeur. Les établissements Klem cessèrent leur activité en 1927. Élu au conseil municipal de Colmar en 1876, il fut réélu en 1881 et 1886 et chargé de l’administration de l’assistance publique. En 1881, Klem créa dans sa propriété rue des Moulins un bain public. Membre de la commission administrative de l’Hôpital civil de Colmar de 1880 à 1920, et vice-président en 1919. Avec son concours, et en grande partie sur sa propre initiative, l’extension et la modernisation des locaux furent exécutées. Son dévouement à l’hôpital pendant la guerre lui valut la médaille d’or de l’Assistance publique. L’amour qu’il portait à l’art poussa de bonne heure Klem à s’intéresser aux travaux de la Société Schongauer de Colmar et, dès sa jeunesse, il en devint un des membres les plus actifs. Aux côtés de ses aînés E. Fleischhauer ©, J.-B. Fleurent ©, V. Huen ©, avec son ami A. Waltz ©, il fut un des premiers à apprécier à leur valeur les merveilles du Musée d’Unterlinden. Par ses travaux dans les églises d’Alsace, Klem connaissait toutes les œuvres d’art qui s’y trouvaient.

Dès que l’une d’elles était susceptible d’être détruite ou vendue, il intervenait de toute son autorité pour la sauver, pour la conserver. Il fit don au musée des bas-reliefs en bois sculptés d’après les gravures de Dürer, provenant de Roderen. C’est par son intervention et grâce à ses nombreuses démarches que la Société Schongauer put acquérir le magnifique triptyque de Bergheim, provenant de l’église des Templiers, que l’ancien maître-autel et les panneaux provenant des boiseries de la collégiale Saint-Martin, ainsi que deux peintures sur bois et deux reliefs provenant de la chapelle de l’hôpital, furent déposés au musée. En 1908, Klem fut appelé à la présidence de la Société Schongauer. Son zèle et son activité continuèrent à rendre les plus grands services au Musée d’Unterlinden. En 1912, Klem entreprit des démarches auprès de J. Böhler, antiquaire à Munich, qui était en possession des deux statuettes appartenant à la partie sculptée du retable d’Issenheim (représentant un paysan offrant un coq ainsi qu’un gentilhomme offrant un porcelet à saint Antoine). Mais les négociations échouèrent par suite de l’intransigeance de Böhler. Pendant la guerre, Klem défendit âprement les intérêts du musée de Colmar contre les autorités allemandes et les spécialistes venus d’outre-Rhin pour spolier l’Alsace de ses trésors artistiques. Réélu président de la Société en 1919, Klem essaya aussitôt de réparer les dommages subis par les collections pendant la guerre. Il fut désigné par le gouvernement français pour se rendre à Munich et en ramener les œuvres de Schongauer et de Grunewald que les Allemands y avaient transportés sous prétexte de les soustraire aux dangers d’un bombardement. À son retour, il entreprit avec André Waltz la réorganisation complète du musée. Secrétaire de la Société pour la conservation des monuments historiques, Klem fut un conseiller écouté de cet organisme. Président de l’Association des anciens élèves du collège libre de Colmar jusqu’à son décès. Membre du conseil de fabrique de la paroisse Saint-Martin dès 1876, il fut appelé à la présidence du conseil de fabrique de la paroisse Saint-Joseph lors de sa création en 1900 et le resta jusqu’en 1923. Chevalier de l’ordre de Saint-Grégoire le Grand en 1921.

Ch. Sengel, « Homélie prononcée aux obsèques de Th. Klem », conservée aux Archives des hospices civils de Colmar ; Elsässer Kurier du 24.1.1899 ; H. Cetty, « Th. Klem, ein Elsässer Meister », Neuer Elsässer Kalender, 1918, p. 58-59 ; F. Schaedelin, Bulletin de la Société Schongauer de Colmar, 1911-1923, p. 12-16 (portrait) ; H. Vollmer, Allgemeines Lexikon der bildenden Künstler, XX, Leipzig, 1927, p. 465-466 ; J. Marchand, « Un artiste alsacien, Th. Klem », Revue catholique d’Alsace, 1933, p. 401-413, 465-478, 554-561 ; E. Herzog, « L’œuvre artistique de Klem », Revue catholique d’Alsace, 1933, p. 630-640, 1934, p. 78-79, 181-193, 245-256 ; Revue catholique d’Alsace, 1939, p. 211-215 (liste des œuvres de Th. Klem) ; Dernières Nouvelles du Haut-Rhin du 7.8.1949 ; Dernières Nouvelles d’Alsace des 28.11.1984 et 10.3.1988 ; M. Fuchs, La sculpture en Haute-Alsace à la fin du Moyen Âge, 1456-1521, Colmar, 1987, p. 325 (index).

Albert Erny et Henri Fleck (1993)