Militant libertaire, pacifiste et poète (★ Mulhouse 30.4.1843 † Nancy 19.7.1913).
Fils de Charles Keller, graveur sur rouleaux, et de Catherine Élise Baumgartner. ∞ 1876 Mathilde Roederer, de Guebwiller, adhérente de la Fédération jurassienne. Son père, qui possédait un atelier de gravure sur rouleaux, présidait le conseil des prud’hommes. Après avoir fréquenté l’école professionnelle de Mulhouse, puis travaillé dans une filature de laine, il aurait fait des études à Strasbourg. Il porta désormais le titre d’ingénieur civil. Il fut engagé comme directeur technique à Willer-lès-Thann chez Isaac Koechlin ©, mais dénoncé pour avoir colporté le journal Les États-Unis d’Europe, publié à Genève, il fut contraint à démissionner en février 1868. Il s’établit à Paris et y noua des relations avec les anarchistes, notamment les frères Élie et Élisée Reclus. Il vécut de traductions et entreprit même de traduire Le Capital de Marx. Il fut délégué en septembre 1868 au Congrès pacifiste de Berne, mais avec Bakounine, il quitta la Ligue de la Paix et de la Liberté pour fonder l’Alliance internationale de la démocratie socialiste, affiliée à la Première Internationale. Il participa aux activités de la section parisienne de l’Association internationale des travailleurs. Pendant la guerre de 1870-1871, il s’engagea dans une compagnie de francs-tireurs et à la Légion d’Alsace-Lorraine. Le 10 mai 1871, il revint à Paris ; il participa aux derniers combats de la Commune et fut blessé, le 25 mai 1871, à la barricade du Château-d’Eau. Il échappa à la répression et se réfugia en Alsace, puis à Bâle. En 1875, il revint à Mulhouse comme correspondant de journaux socialistes. Le 20 novembre 1879, il fut expulsé d’Alsace-Lorraine. Il s’établit à Genève, puis à Belfort et enfin à Nancy au cours des années 1880. Il y fut candidat socialiste aux élections municipales. Il y prit part à la création de l’Université populaire (1899). En 1901, il fut le fondateur de la Maison du Peuple. Apparenté au céramiste Émile Gallé. Conformément à ses dernières volontés, il fut inhumé en Alsace.
Il fut aussi, sous le pseudonyme de Jacques Turbin, l’auteur de chansons ouvrières, dont la plus célèbre était La Jurassienne (1873), et de deux recueils de poésie : Du fer ! (1897) ; A l’oreille (1899). Il a publié également La grève générale, 1906 ; L’Action directe, 1907 ; Ouvriers et paysans, paroles et musique, 1907 ; Marchons à la bataille, 1908.
J. Guillaume, L’Internationale. Documents et souvenirs, 1864-1878, Paris, 1905, I, p. 71-79, II, p. 170, 353, III, p. 168 ; H.-E. Droz, Quelques poètes alsaciens, Mulhouse, 1910 ; Journal d’Alsace-Lorraine du 24.7.1913 ; Freie Presse du 25.7.1913 ; Mülhauser Volkszeitung du 26.7.1913 ; L’Alsacien-Lorrain de Paris du 3.8.1913 ; La vie ouvrière (Paris) du 20.8.1913 ; Cahiers alsaciens, septembre 1913, p. 302 ; H.-D. Soell, Die sozialdemokratische Arbeiterbewegung im Reichsland Elsass-Lothringen, thèse, Heidelberg, 1963, p. 45, 254-255 ; Maitron, dir., Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, VI, 1969, p. 417-418 ; J. Freymond dir., Études et documents sur la Première Internationale en Suisse, Genève, 1964 ; Encyclopédie de l’Alsace, VII, 1984, p. 4444 ; A. Boosz, « Charles Keller, communard alsacien », Bulletin du centre régional Alsace de l’Institut CGT d’histoire sociale, 1989, n° 4, p. 10-11.
Léon Strauss (1993)