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KAGENECK

Famille du patriciat noble de Strasbourg, issue d’artisans pelletiers (Kammerkürschner) au service de l’évêque de Strasbourg au XIIIe s. L’origine géographique et la date de son établissement à Strasbourg sont inconnues. La première mention authentique du nom remonte à 1258. La famille s’appelait alors inter mercatores. Très tôt elle occupa le devant de la scène politique, militaire et religieuse de la Ville. Elle développa son influence grâce à une politique matrimoniale adaptée aux circonstances : nombreuses unions avec des membres du patriciat urbain, par exemple les Landsperg ©, les Marx d’Eckwersheim © et les Vegersheim. Les alliances avec la noblesse rurale sont cependant rares. La politique matrimoniale semble suivre l’évolution constitutionnelle de Strasbourg, elle est même fonction de la conjoncture politique, économique et sociale. Quoique l’arbre généalogique des Kageneck soit moins ramifié que celui des Mullenheim © ou des Zorn ©, la filiation exacte reste difficile à établir, notamment à cause de l’homonymie des prénoms. On peut distinguer trois branches principales : les descendants de l’union de Claus Kageneck (1283-1314) avec Kunigunde Halpbeck ; ceux issus du mariage de Gösselin Kageneck (1289-1329) avec Guta Spender et ceux issus de Cuno Kageneck (1283-1324) et de Gertrud Hentwing. Les membres de la famille Kageneck sont régulièrement présents au Conseil de la Ville au moins à partir de 1258. Ils se trouvent du côté de la Ville lors de la guerre de celle-ci contre l’évêque Walter de Geroldseck © 2 en 1262-1263. Ils partagent le sort du reste du patriciat après 1332. Comme pour d’autres lignages nobles, les chroniqueurs ont retenu dans leurs récits agressions et brutalités commises par certains Kageneck. L’origine de la richesse des Kageneck réside dans les bénéfices réalisés d’abord comme pelletiers épiscopaux, puis comme Hausgenossen. Ils étaient propriétaires de nombreux immeubles fonciers dispersés sur l’ensemble du territoire urbain, à la périphérie de la Ville et à l’extérieur, par exemple à Furchhausen, Ingwiller, Dingsheim, Mommenheim, Schwindratzheim, Frankenheim. Ils en retiraient des revenus en nature et en argent. Ils détenaient également quelques fiefs des évêques de Strasbourg, des sires de Fleckenstein © et de Rathsamhausen entre autres. Plusieurs Kageneck remplissaient des fonctions au sein des établissements religieux séculiers et réguliers de Strasbourg, notamment comme dignitaires des chapitres de Saint-Thomas et de Saint-Pierre-le-Jeune qu’ils gratifiaient de dons et de legs pieux. Des filles Kageneck (Gisela, Dina, Junta, Catharina) étaient moniales au couvent de Saint-Jean-aux-Ondes, tandis que d’autres (Lucardis, Heilka, Greda et Gertrud) sont signalées dans celui de Saint-Nicolas-aux-Ondes. Plusieurs d’entre elles sont devenues prieures de leurs communautés. Cette même fonction est occupée par Cuno Kageneck chez les Dominicains (1332-1335), où l’on trouve encore Berthold (1336) et Erbo Kageneck (1364). Parmi les autres membres de la famille Kageneck qu’il y a lieu de retenir, signalons nominativement, par ordre chronologique à défaut d’indication de filiation sûre :

Johann ou Hans, membre du Conseil (1277, 1279, 1283, 1298), qui interdit aux ordres mendiants de faire tester un mourant en leur faveur sans le consentement préalable d’au moins quatre membres de sa famille ; arbitra un différend entre l’hôpital et Burcard Reinboldelin (1303).

Claus ∞ Kunigunde Halpbeck, administrateur de l’hôpital (1275), membre du Conseil (1273-1314), participa en 1300 à un arbitrage entre le chapitre de Saint-Thomas et Johann Blenkelin au sujet des limites des bans de Koenigshoffen et d’Illkirch.

Gösselin ∞ Guta Spender, peut-être frère de Claus (ci-dessus) et père de Claus, chanoine de Saint-Thomas, membre du Conseil entre 1289 et 1325, administrateur de l’hôpital.

Erbo, chanoine de Saint-Pierre-le-Jeune, cellerier (1316-1333) ; le même ou un homonyme, recteur de l’église Rouge en 1309.

Claus, chanoine de Saint-Thomas et de Saint- Pierre-le-Jeune († 1333) ; gradé de l’Université de Bologne, d’une grande valeur intellectuelle.

Johann († 1380), chanoine de Saint-Thomas, réformateur du chapitre.

Johann, membre du Conseil (1384, 1389, 1402), assura en 1388 avec Hans Lumbart une mission de paix auprès du duc de Bavière et des villes de Souabe en guerre, voyagea en Bohême avec Andreas Heilmann © (1393-1394), participa aux négociations de l’entrée de Strasbourg dans la ligue de Souabe (1389-1393), s’entremit dans la querelle de la Ville avec Bruno de Ribeaupierre © (1393), assista au concile de Constance (1415), participa à des missions diplomatiques pour le compte du margrave Bernard de Bade et prit part à la médiation de nombreux différends entre la Ville et l’évêque Guillaume de Diest ©.

Claus, prévôt du chapitre de Saint-Pierre-le-Jeune (1371), géra avec rigueur les biens du chapitre.

Ch. Schmidt, Histoire du chapitre de Saint-Thomas, Strasbourg, 1860 ; Lehr, L’Alsace noble, 1870 ; H. J. von Kageneck, Geschichte der gräflichen Familie von Kageneck, Freiburg-im-Breisgau, 1870 ; Urkundenbuch der Stadt Strassburg ; Kindler von Knobloch, Das goldene Buch von Strassburg, 1886 ; J. Kindler von Knobloch, Oberbadisches Geschlechterbuch, Heidelberg, 1899-1919, 3 vol. ; J. Hatt, Liste des membres du Grand Sénat de Strasbourg du XIIIe s. à 1789, Strasbourg, 1963 ; G. Weill, Le patriciat de Strasbourg à la fin du Moyen Age, 1963, dactyl. (aux Archives départementales du Bas-Rhin) ; idem, « Origines du patriciat strasbourgeois au XIIIe et XIVe s., le lignage des Zorn et des Mullenheim », Bulletin philologique et historique, 1969 ; H. Mosbacher, « Kammerhandwerk, Ministerialität und Bürgertum in Strassburg », Zeitschrift für die Geschichte des Oberrheins, 119, 1971, p. 33-173 ; Ph. Dollinger, « Patriciat noble et patriciat bourgeois à Strasbourg au XIVe s. », Pages d’histoire, Paris, 1977, p. 203-228 ; Chr. Feidt, Recherches sur le patriciat noble strasbourgeois à la fin du Moyen Age : le lignage des Kageneck, mémoire de maîtrise, Strasbourg, 1978, dactyl. ; M. Alioth, Gruppen an der Macht. Zünfte und Patriziat in Strassburg im 14. und 15. Jh., Bâle, 1988, 2 vol. Descendance récente : voir Lehr, L’Alsace noble, II, p. 261-266.

Bernhard Metz (1992)