Brasseur à Strasbourg, (Pl) (* Phalsbourg25.10.1825 † Strasbourg-Koenigshoffen 31.10.1880). Fils de David Gruber, tailleur à Phalsbourg, originaire de La Petite-Pierre, et de Catherine Jung, de Petersbach, Bas-Rhin. ∞ 1866 sa cousine germaine Sophie Stephan; 5 enfants. Il fut l’un des principaux initiateurs du passage de la brasserie strasbourgeoise au stade industriel et contribua largement à son développement. Après des études de théologie protestante, il changea de voie pour aborder la chimie, dans le cadre de la préparation à la pharmacie au laboratoire de l’Hôpital civil de Strasbourg, sous la direction d’Eugène Hepp ©. À partir des travaux de Liebig, l’un des précurseurs de la connaissance de la chimie organique, il fut un des premiers à comprendre les processus de la fabrication de la bière. Il compléta sa formation par des stages pratiques comme apprenti aux «Trois Rois», puis comme ouvrier à «La Lanterne», deux brasseries de Strasbourg, tout en menant à bonne fin sa préparation au diplôme de pharmacien. Vers1855, il loua à Koenigshoffen la petite brasserie Clausing, qu’il exploita et développa en collaboration d’abord avec son frère puis avec son collègue pharmacien Reeb. Après des débuts difficiles et un accueil un peu ironique de la part des brasseurs de la place, il mit au point sa «bockale», une bière blonde et pâle qui eut un grand succès et que la concurrence ne sut pas imiter. Une innovation d’avenir fut l’utilisation de vastes caves à Koenigshoffen, réfrigérées par la glace récoltée en hiver sur des prés voisins volontairement inondés. Ce progrès est à l’origine du transfert progressif de toute la production des brasseries de Strasbourg à Koenigshoffen, Cronenbourg et Schiltigheim. Une autre innovation, le raccordement au chemin de fer, contribua au succès de la bière Gruber. S’y ajoutaient un effort très neuf d’asepsie, ainsi qu’un souci constant de la qualité des matières premières et l’emploi de la vapeur pour le chauffage. David Gruber s’intéressa enfin à la culture des produits qu’il utilisait et encouragea les producteurs agricoles en vue de la sélection des meilleures variétés d’orge et de houblon.L’ensemble de ces atouts a fait, à la suite de celle de l’entreprise Gruber, la force de toute la brasserie strasbourgeoise. Après la guerre de 1870, une brasserie succursale fut fondée à Melun, Seine-et-Marne. Cet établissement a plus tard été cédé à la Brasserie de la Meuse, elle-même entrée dans la Société européenne de brasserie qui fait maintenant partie du groupe BSN. La brasserie de Koenigshoffen, reprise par le groupe Pêcheur-Adelshoffen, n’est plus exploitée, mais subsiste sous la forme d’une société immobilière dont le siège est à Schiltigheim. Les bâtiments ont fait place à la Cité industrielle Gruber. Les archives ont été versées aux Archives départementales du Bas-Rhin.
F. A. Musculus, Notice nécrologique sur D. Gruber lue à la Société des Sciences, Agriculture et Arts de la Basse-Alsace, Strasbourg, 1880; F. Reiber, Études gambrinales, Paris, 1882 ; Ch. Grad, Gruber David, Biographies alsaciennes, 5e série, Colmar, 1889-1890; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 1, 1909, p. 653; Bopp, Die evangelischen Geistlichen in Elsass-Lothringen, 1959, n° 1831; P. Romane-Musculus, Généalogies des Gruber et des Stephan, 1973 (consultable aux Archives départementales du Bas-Rhin); Encyclopédie de l’Alsace,VI, 1984, p. 3533; Dictionnaire de biographie française, XVI, 1985, 1372.
Robert Lutz (1989)