(? en Thurgovie v. 1465 † château de Haut-Ribeaupierre, après 1507).
Fille de Rudolf Giel († 1499 pendant la Guerre souabe) ; six frères et sœurs dont Werner et Gothard, abbé de Saint-Gall († 1504). ? Guillaume de Hungerstein. Surnommée « la dame de Hungerstein » ou « die schöne Gielin », Cunégonde Giel fut au centre d’une des plus célèbres affaires criminelles de son temps. Sa famille s’était fixée en Alsace peu après 1480 ; son père avait été nommé bailli de Wattwiller, tandis que trois de ses frères étaient investis du château d’Illzach. Vers 1485, elle avait épousé le vieux chevalier guebwillerois Guillaume de Hungerstein, veuf de Suzanne d’Ostein, et s’était lancée dans de folles dépenses. Affaibli, mais conscient du danger, Guillaume avait tenté de réagir en dénonçant à Maximin de Ribeaupierre © les manœuvres de son beau-frère Werner Giel, qui voulait s’emparer de son argenterie et de ses bijoux pour faire bonne figure à la cour d’Innsbruck, ainsi que les menaces proférées par la belle Cunégonde à rencontre de l’intendant Diebold Lochmann. Cette tentative de reprise en main fut de courte durée : le 25 mai 1487, précédée par deux complices, Cunégonde contraignit son vieux mari à signer un papier annonçant son départ en pèlerinage, puis le fit étrangler. Un des complices fit disparaître le
corps dans la forêt de Gundolsheim. Alertées par les amis de la victime, qui s’inquiétaient de son absence, les autorités guebwilleroises démasquèrent les coupables et les condamnèrent à la peine capitale. Mais le bourreau chargé de noyer Cunégonde fut acheté par un jeune noble amoureux de la meurtrière et procéda à un simulacre d’exécution. Cunégonde et son amant se réfugièrent en Suisse où ils furent découverts trois ans plus tard. Ramenée en Alsace, elle fut incarcérée au château de Haut-Ribeaupierre dont elle tenta de s’évader en 1507, après avoir séduit son geôlier, Philippe de Bacharach. Cette affaire donna lieu à plusieurs versions contradictoires : elle a fait l’objet de notes de l’archiviste Luck, au début du XVIIe s., d’une nouvelle de Pfeffel, d’un récit de Rupert Sporer vers 1800 (Bibliothèque municipale de Colmar, ms 670) et d’une complainte citée par Richard Held (Vienne, 1832). Une tradition rapporte que Cunégonde aurait ensorcelé le jeune Bastian de Ribeaupierre qu’il avait fallu interner à Vergaville, en Lorraine.
Archives départementales du Haut-Rhin, E 1038 et 2 E 77 ; Rappoltsteinisches Urkundenbuch, t. V, Colmar, 1898. G. Frantz, « La dame de Hungerstein », Revue d’Alsace, 1861, p. 28-35 ; A. Dorny, La dame de Hungerstein, Paris, 1929 (récit romancé).
Georges Bischoff (1988)