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FRIBURGER Michael

Imprimeur à Paris (★ Colmar vers 1443). En 1461, immatriculé à l’Université de Bâle il obtint en 1463 le baccalauréat et la licence ès-arts. L’année suivante, il est vraisemblable qu’il ait travaillé dans la première imprimerie de Bâle, chez Berthold Ruppel de Hanau. Deux professeurs en Sorbonne, le Badois Jean Heynlin et le Savoyard Guillaume Fichet conçurent en 1470 le projet d’y établir une imprimerie sous leur seule responsabilité. Entre octobre et février (1469-1470) Heynlin se rendit en Suisse. Le résultat de ce voyage fut la venue à Paris, dans les derniers mois de 1470 de Friburger et de deux imprimeurs de Beromünster, Ulrich Gering et Martin Crantz avec le matériel qu’ils ne pourraient pas se procurer à Paris : les moules nécessaires à la fonte des caractères et leurs boîtes à poinçons. Dans le fonctionnement de l’imprimerie, on distingue nettement le rôle des deux professeurs, qui ensemble choisissaient les textes à imprimer. Heynlin, directeur littéraire et technique, recherchait la correction des textes, s’intéressait à leur présentation, établissait des tables des chapitres et éventuellement des glossaires alphabétiques, suivait le travail des imprimeurs ; Fichet surveillait aussi l’impression dans certains cas, mais il se chargeait surtout de trouver les ressources nécessaires au financement de l’entreprise ainsi que les moyens de faire connaître et vendre les éditions de la Sorbonne. En revanche, de la première à la dernière impression qu’ils ont signée, les trois imprimeurs forment un groupe indivisible de « maîtres de l’art de l’imprimerie », égaux entre eux, qui parlent d’une seule voix. Une tradition encore vivante à la fin du XVIIe s., rapporte que c’est dans une maison du cloître Saint-Benoît, rue de la Sorbonne, où le public n’avait pas alors libre accès, que Fichet et Heynlin avaient installé leur atelier d’imprimerie. Entre la fin de l’année 1470 et le mois de mai 1473, ils publièrent vingt-deux livres uniquement en latin, choisis pour la plupart à l’intention des étudiants mais utiles également à un public cultivé plus étendu. La première œuvre imprimée correspond à ces intentions : les Epistulae de Gasparino Barzizza de Bergame. Elle fut suivie d’une série d’éditions de la littérature antique, de cours et d’écrits de Fichet. Celui-ci quitta la France pour l’Italie en 1472 et lorsque le mandat de bibliothécaire de Heynlin (où il avait succédé à Fichet) arriva à son terme, le 25 mars 1473, les imprimeurs ne purent continuer à travailler dans l’atelier de la Sorbonne. Avant le 21 mai, semble-t-il, ils s’installèrent rue Saint-Jacques. Les trois associés tirèrent les leçons de l’expérience acquise dans leur première installation et les conséquences de la situation nouvelle. Par souci d’humanisme les deux fondateurs avaient choisi des œuvres auxquelles, faute de public suffisant, les copistes parisiens s’intéressaient peu. Friburger et ses amis se tournèrent donc vers d’autres objectifs : les livres de la tradition universitaire : droit, théologie, philosophie, ainsi que les livres de piété, de morale pratique, les sermons, les manuels pour les confesseurs, etc., sans oublier « La légende dorée ». Pour améliorer la présentation, ils travaillaient encore avec des calligraphies. Le changement se traduisit techniquement par l’acquisition de matériel nouveau comme une fonte de capitales en romain et des caractères gothiques conformes à ceux dont les Français avaient l’habitude. Une trentaine de livres, semble-t-il, sortirent de leurs presses entre 1473 (mai) et le 31 octobre 1477 où parut la dernière impression signée par les trois imprimeurs éditeurs. Ils avaient naturellement continué à rechercher la bienveillance des personnes importantes notamment la protection du roi, par des préfaces, des dédicaces, mais ils avaient besoin d’une situation plus sûre, ils demandèrent donc des lettres de naturalisation, que Louis XI leur accorda à titre gracieux en février 1475. Friburger y est nommé le premier, comme presque toujours, peut-on en tirer argument d’une prééminence sur ses associés ? Le 1ermars suivant le dernier vers de l’éloge de l’édition de la Somme de Barthélémy de Pise précise : « La Germanie leur (aux imprimeurs) a donné le jour, maintenant Lutèce est leur mère nourricière ». Une petite pièce de vers, dédiée à Paris « mère des Muses » avait mis en valeur la toute première édition de 1470 et donné les noms des imprimeurs « …grâce à l’art presque divin qu’inventa la Germanie, voici le premier livre imprimé dans le royaume de France … les maîtres Michael, Ulrich et Martin l’ont imprimé » alors qu’il n’existait pas plus de trente presses dans l’Europe entière, pourrait-on ajouter. Du petit nombre d’exemplaires du Commentaire de Dun Scot sur le IVe livre des sentences de P. Lombard (1473) qui subsistent, la Bibliothèque municipale de Colmar en possède un sous la cote X 10667. C’est le seul souvenir tangible que Colmar garde de Friburger. Après son départ de Paris, au début, semble-t-il, de 1478, on ne sait plus rien de sa vie, non plus que de celle de M. Crantz, qui l’accompagna. Sans aucune signature parut encore un livre de Nic. de Hanapis, à la fin de janvier et c’est seulement à la fin avril qu’Ulrich Gering signa seul sa première impression à l’enseigne du « Soleil d’or ». Il continua sa carrière à Paris et prit finalement comme associé l’Alsacien Berthold Renbolt, d’Obernai, en 1494.

Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. I, 1909, p. 527 ; L. Fèbvre et J. Martin, L’apparition du livre (L’évolution de l’humanité), Paris, 1958 ; Neue Deutsche Biographie, V, 1961, p. 430 ; Ph. Renouard, Répertoire des imprimeurs parisiens, Paris, 1965 ; F. Geldner, Die deutschen Inkunabeldrucker, I. Das deutsche Sprachgebiet, Stuttgart, 1969 ; J. Veyrin Forrer, « Hommage aux premiers imprimeurs de France », Bulletin des bibliothèques de France, n° 2, février 1971, p. 66-76 ; Encyclopédie de l’Alsace, VI, 1984, p. 3214.

Lina Baillet (1988)