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ENGELHARDT

Famille strasbourgeoise (Pl). L’ancêtre Engelhardt fut le pasteur Heinrich Engelhardt (★ Lignitz, Silésie † Oberbronn, 1660), qui étudia la théologie à la Faculté de Strasbourg (immatriculé 18 mai 1630) et fit souche en Alsace. Sa descendance s’allia à des lignées notables de l’oligarchie strasbourgeoise, comme les Heuss ©, Mueg ©, Wencker © et Schütterlin ©.

1. Daniel Frédéric,
officier supérieur, sous-préfet, chef de Division, artiste-peintre, critique d’art, (Pl) (★ Strasbourg 18.12.1772 † Strasbourg 11.12.1826). Fils de Christian Frédéric Engelhardt, négociant (★ Strasbourg 19.7.1739 † Strasbourg 29.3.1814), et de Marie Salomé Sachs (★ Strasbourg 24.10.1754 † Strasbourg 16.5.1828). ∞ avant 1796 Jeanne Auguste Dorothée Bennecké († Mazenburg (?), Allemagne, 1772 † après 1833). Après des études secondaires au Gymnase protestant à compter du 30 août 1779, il fréquenta la faculté de Lettres de Strasbourg où il s’inscrivit le 10 avril 1787. Engagé en 1793 à l’Armée de Sambre et Meuse ; capitaine en 1796 ; il atteignit le grade d’adjudant général, c’est-à-dire de colonel d’état-major. Il quitta alors l’armée pour suivre la carrière administrative. Nommé sous-préfet de Siegen dans le Royaume de Westphalie, il devint par la suite administrateur du grand-duché de Berg. Lors de l’effondrement de l’Empire en 1814, il entra grâce à son frère Chrétien Maurice, dans l’administration de la ville de Strasbourg où il devint chef du bureau des Domaines et des Travaux Publics et le demeura jusqu’à sa mort. Ce militaire et administrateur était également un peintre de qualité qui fit son éducation de miniaturiste sous la direction de Choyer, puis de paysagiste avec Hofmann à Cologne et Mannskirch. De ses voyages à travers l’Europe, il rapporta nombre d’études et de paysages de Suisse et d’Italie, mais aussi des Vosges. Il se révéla également critique et historien d’art averti et collabora, en particulier en 1812, au Westfälisches Archiv.

G. K. Nagler, Künstlerlexicon, IV, München, 1837, p. 127-128 ; A. Hagen, Deutsche Kunst in unserem Jahrhundert, II, Berlin, 1857, 203 ; Thieme-Becker, Allgemeines Lexikon der bildenden Künstler von der Antike bis zur Gegenwart, X, 1914, 537.

Georges Foessel (1986)

  1. Christian Maurice (Christian Moritz),

archéologue, publiciste, chef du service de la police de Strasbourg, (Pl) (★ Strasbourg 25.4.1775 † 10.1.1858). Frère de 1. L’ascendance maternelle comprend Johann Jacob Sachs © (1686-1782), « l’Hippocrate de l’Alsace », l’ammeister Franziskus Reisseissen © (1631-1710), des familles notables de Colmar (Sandherr ©, Riegert, von Kirn) et l’ancêtre royal saint Louis par les comtes de Wurtemberg. ∞ 5 floréal an XII (25.4.1804) à Strasbourg Charlotte Schweighaeuser (★ Strasbourg 4.5.1781 † Strasbourg janvier 1864), fille du célèbre helléniste Jean Schweighaeuser ©. L’enfance de Christian Maurice Engelhardt fut influencée par un cousin de son père, « l’actuarius Saltzmann » ©, l’ami de Goethe à Strasbourg. Études au Gymnase protestant, puis à la fences naturelles, l’histoire et l’art. Incorporé en 1793 dans le 9e bataillon du Bas-Rhin, fait prisonnier au Fort-Vauban (Fort-Louis), il s’échappa en Suisse, revint à Strasbourg dès 1794. Devint secrétaire de l’état-major du Rhin, fit en 1801 sous Mac-Donald la campagne des Grisons. Premier contact enthousiaste avec les paysages alpestres. Deux voyages à Paris (1797/-178 et 1815) où il étudia les miniatures d’anciens documents, essentiellement le manuscrit « Manesse » et lia des contacts avec des savants français et des chercheurs romantiques allemands comme Jacob Grimm, Achim von Arnim, Sulpice Boisserée, plus tard avec Mone et Lassberg. Investigations aux archives de la ville de Strasbourg pour lui-même et ses amis romantiques. Correspondance avec S. Boisserée. Traduction du Code Civil (1807-1809) et pendant 38 ans environ travail ardu comme chef de bureau de police. Recherches actives les plus importantes sur l’art médiéval entre 1808 et 1828. Première publication d’une partie de l’Hortus Deliciarum d’Herrade de Landsberg en 1818 et en 1823 du poème, Der Ritter von Stauffenberg. De nombreuses études d’après d’anciennes miniatures non publiées sont conservées au département des manuscrits de la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg. Rédacteur depuis 1796 du Courrier de Strasbourg, collaboration par un grand nombre d’articles historiques, artistiques, littéraires à divers périodiques : par exemple aux Annales Européennes, au Morgenblatt de Cotta, à l’Alsa de son ami Ehrenfried Stoeber. Un autre trait le relie au romantisme de l’époque : son grand amour de la nature, des montagnes en particulier, les Vosges entre 1809 et 1820, les Alpes entre 1830 et 1851, d’où plusieurs publications importantes. A une exception près, ses œuvres sont écrites en allemand, parfois suivies d’un précis en français. Ses tendances érudites furent favorisées par son mariage qui lui ouvrit le foyer de l’helléniste Jean Schweighaeuser. Il décéda sans postérité.

Lucienne Lapointe (1986)

  1. Charlotte, née SCHWEIGHAEUSER,

épouse de 2 (★ Strasbourg 4.5.1781 † Strasbourg janvier 1864) fut élevée avec Jean Geoffroy Schweighaeuser, latiniste et archéologue (★ Strasbourg 2.1.1776 † Strasbourg 14.3.1844), ami de Golbéry, dans l’ambiance intellectuelle du foyer de leur père, l’helléniste Jean Schweighaeuser (★ Strasbourg 26.6.1742 † Strasbourg 19.1.1830) qui fut en contact avec des savants strasbourgeois, tels que Blessig ©, Brunck ©, Jac. Jérémie Oberlin ©, F. G. Koch ©, et des chercheurs étrangers comme Jacob Grimm. Elle dut à son père son amour des montagnes, son intrépidité, qui firent d’elle la compagne infatigable de son époux dans les Vosges et les Alpes. Connue pour ses dons poétiques elle écrivit en dialecte stras- bourgeois et en langue allemande ; elle découvrit dans la vallée de la Bruche la tradition orale de la légende : « Das Riesenfräulein du Nideck ». J. Grimm la publia dans Deutsche Sagen (1816-1818). Plusieurs poèmes célébrant la nature sont insérés dans les œuvres descriptives de Christian Moritz Engelhartdt. Elle géra avec rigueur semble-t-il, un patrimoine de terres acquis au Kochersberg.

Herrad von Landsperg, Aebtissin zu Hohenburg oder Skt Odilien im Elsass im zwölften Jahrhundert und ihr Werk Hortus Deliciarum. Ein Beitrag zur Geschichte der Wissenschaften, Literatur, Kunst, Kleidung, Waffen und Sitten des Mittelalters mit 12 Kupfern in Folio, Stuttgart et Tübingen, 1818 ; Der Ritter von Stauffenberg, ein altdeutsches Gedicht, édité à frais d’auteurs et déposé chez certains libraires, dont Berger-Levrault, 1823 ; Wanderungen durch die Vogesen, Strasbourg, 1821 ; Naturschilderungen aus den höchsten Schweizer Alpen, Bâle, 1840 ; Essai sur les plaines et les terrasses erratiques de la vallée du Rhône, 1841 ; Travaux inédits déposés à la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg : Karl der Grosse, 1823 ; Bilder von Kriegsszenen aus den Kreuzzügen, terminé le 28 avril 1826 ; copie d’un manuscrit des Archives départementales du Bas-Rhin du XIVe siècle, Das Buch von den 9 Felsen, de Rulmann Merswin. Nécrologie par Th. Klein, Elsässisches Samstagblatt des 27.3.1858 et 3.4.1858 ; par A. Stoeber, Alsatia, 1858 ; F. Kirschleger, Notice biographique, Strasbourg, 1858 ; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 1, 1909, p. 440-441 ; Goedeke, Grundriss zur Geschichte der deutschen Dichtung aus den Quellen, Dresden, t. XIII, 1934, p. 73-75 ; L. Lapointe, Christian Moritz Engelhardt, un romantique strasbourgeois et sa publication le Ritter von Stauffenberg, mémoire de diplôme d’études supérieures, 1931, manuscrit inédit ; J. Baumann, « Chr. M. Engelhardt, ein vergessener Alpenpionier aus dem Elsass », Die Alpen, 1937, n° 6 ; J. Walter, Hortus Deliciarum, Strasbourg, 1952 ; L. Lapointe, « Tentative pour reconstituer la liste des ancêtres de Chr. M. Engelhardt », Bulletin du Cercle généalogique d’Alsace, 1972, n° 20 et 1973, n° 21 ; L. Lapointe, « Un strasbourgeois de l’époque romantique, Chr. M. Engelhardt », ASAVS, 1977, p. 87-104 ; Dr E. Grünewald, Der Ritter von Stauffenberg, Tübingen, 1979 ; Le même : von Stauffenberg, Abbildungen zu Text und Illustrationsgeschichte, Göppingen, 1978 ; R. Green, M. Evans, Chr. Bischoff, M. Curschmann, J. Brown, K. Levy, Hortus Deliciarum, Herrad of Hohenburg, Londres et Leyde, 2 vol., 1979 (Studies of the Warburg Institute, 96) ; A. Christen, Hortus Deliciarum, le jardin des délices, planches mises en couleur par Mme C. Tisserand-Maurer, 1981 et 1984 ; R. Will, « La reconstitution des miniatures de l’Hortus Deliciarum, à la recherche des sources », Cahiers alsaciens d’archéologie, d’art et d’histoire, 1983, t. 26, p. 99-116.

Ch. Rabany, Les Schweighaeuser, Paris, 1884 ; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 1, 1909, p. 441 (Chr. M. Engelhardt et Charlotte Schweighaeuser) ; Une miniature représentant Charlotte Engelhardt, collection du Dr Denef à Dax, est reproduite dans Annuaire de la Société des Amis du Vieux-Strasbourg, 1977, p. 92.

Lucienne Lapointe (1986)

  1. Louis Henri,

professeur et historien, (Pl) (★ Strasbourg 4.4.1785 † Strasbourg 9.9.1852). Frère de 2. ∞ 18.8.1810 à Strasbourg Marguerite Salomé Boch (★ Bouxwiller 1785), fille d’un instituteur. Études au Gymnase de Strasbourg (8 germinal An V – 29.3.1797) et à l’école centrale. Droit à l’Académie protestante avec Spielmann. Licence en droit. À Göttingen, histoire avec Heeren. Enfin, Université de Strasbourg, licence ès lettres en 1817, doctorat ès lettres en 1829. Études interrompues deux fois par des campagnes militaires. De 1810 à 1820, Engelhardt a d’abord exercé le métier d’avocat, puis celui de greffier au tribunal civil de Strasbourg. De 1820 à 1849, il a été professeur au Gymnase de Strasbourg (latin, philosophie, littérature allemande, enfin histoire). A partir de 1830, il a donné des cours publics d’histoire littéraire et politique et enseigné dans des pensionnats de jeunes filles. Son œuvre la plus importante est l’histoire de l’Alsace pendant la Révolution et l’Empire (1789 à 1815) qui constitue les tomes V et VI de la Vaterländische Geschichte des Elsasses de A. W. Strobel. Engelhardt « a su bien marquer les transformations que subit l’Alsace de 1789 à 1815 ; il a indiqué le point de départ, les causes et les résultats de cette seconde conquête qui rattacha irrévocablement l’Alsace à la France » (Leser).

Considérations sur quelques historiens de l’Antiquité et des temps modernes, Strasbourg, 1829 ; De ethicis facultatibus, de honestonec non de lege ethica aphorismi, Strasbourg, 1829 ; Histoire abrégée du Moyen-Âge, suivie d’un tableau chronologique et ethnographique, Strasbourg, 1838 ; Chronologie de l’histoire de France (réédition des Tables synchronistiques de Lamp), Strasbourg, 1846 ; Vaterländische Geschichte des Elsasses, bearbeitet von Adam Walther Strobel, fortgesetzt von der Revolution 1789 bis 1815 von L. Heinrich E, Strasbourg, 1846-49 ; Geschichte des Elsasses während der Revolution bis 1815, Strasbourg, 1849.

A. Stoeber, Alsatia, 1849, p. 288 ; G. Leser, Notice nécrologique sur Henri Engelhardt, Strasbourg, 1852 ; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 1, 1909, p. 441 ; Bopp, Die evangelischen Geistlichen in Elsass-Lothringen, 1959, N° 1204 ; Dictionnaire de biographie française, XII, 1970, 124 ; Encyclopédie de l’Alsace, V, 1983, p. 2753.

Werner Westphal (1986)

  1. Frédéric Auguste,

directeur de forges, géologue, homme politique, représentant du peuple, (Pl) (★ Strasbourg 10 brumaire An V – 1.11.1796 † Niederbronn 14.3.1874). Fils de 1. ∞ 12.9.1822 à Strasbourg Anne Marie Madeleine Thérèse Niethammer (★ Strasbourg 7.5.1789), fille de Jean Daniel Niethammer, pharmacien, et de Marie Françoise Laschose. Après ses études supérieures aux facultés de Droit et des Sciences de Strasbourg, il devint préparateur de physique et de chimie à la faculté en 1818 et fut reçu docteur ès sciences en 1819. En 1820, il ouvrit un cours public de technologie destiné aux ouvriers des entreprises strasbourgeoises. En 1822, toujours préparateur à la faculté des Sciences, il fut également chargé des cours de physique au collège royal de Strasbourg. Mais ses opinions politiques avancées le firent bientôt se heurter à l’autorité ecclésiastique, alors sourcilleuse tutrice de l’Université et l’amène à quitter définitivement l’enseignement. C’est alors que le baron de Dietrich qui avait été son élève, lui offrit dès 1822, la place de directeur des forges de Zinswiller. Il accepta et ne quitta plus l’industrie métallurgique dans laquelle il déploya durant sa longue carrière, une activité et une intelligence peu communes. Appelé en 1838 à la direction de l’usine de Niederbronn, il allait demeurer à sa tête jusqu’en 1866 et s’y montra durant toute cette période administrateur de talent. Il consacrait tous ses loisirs à la recherche scientifique et à la réflexion, ce qui l’amena à réinventer, dès 1828, les méthodes de fabrication du verre rouge ancien et à découvrir une ammonite nouvelle qui porta depuis lors son nom. Dès 1828 la Société d’encouragement de Berlin lui décerna une médaille d’or pour ses travaux sur le verre. Il fut par la suite, également nommé membre de plusieurs sociétés savantes, ainsi que du Comité d’instruction primaire. Dès la Révolution de 1830, il se révéla démocrate affirmé et en 1848, lors des élections à l’Assemblée Constituante, fut élu avec près de 60.000 suffrages, représentant du peuple, par le département du Bas-Rhin. Bien qu’ayant presque toujours voté avec la gauche de l’Assemblée, la fraction extrémiste lui reprocha d’avoir voulu soutenir le général Cavaignac et il échoua aux élections de 1849 pour l’Assemblée législative. Il abandonna dès lors toute velléité d’action politique et se consacra entièrement à la métallurgie et à la géologie. Les récompenses flatteuses obtenues par les forges de Niederbronn, tant à l’Exposition Internationale de Londres en 1851, qu’à l’Exposition Universelle de Paris en 1855 attirèrent l’attention du jury national sur sa personne. Celui-ci, sans égard pour son peu d’attachement pour le régime impérial, le proposa instamment pour la Légion d’honneur. Il en devint membre après l’Exposition Universelle, par décret du 27 janvier 863 et la remise de cette distinction donna lieu aux usines de Niederbronn, à une grande fête, à laquelle participèrent tous les ouvriers.

Archives départementales du Bas-Rhin, 2M73 ; Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg, M40589/18 (circulaire électorale de 1848 (« … Ardemment voué aux sciences, une place de professeur lui fut offerte à Strasbourg… il lui aurait fallu renier des opinions… Il n’hésita pas, et, retiré dans un village, vivant avec les ouvriers dans une position modeste et isolée… il s’occupa du bien de ceux qui l’environnaient et prépara les succès qui devaient lui assurer un rang distingué dans les sciences… ») ; Journal d’Alsace du 20.3.1874 ; Revue alsacienne, décembre 1888 ; G. Vapereau, Dictionnaire des contemporains, 1893, p. 534 ; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 1, 1909, p. 441 et Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 2, 1910, p. 1085 ; P. Muller, p. 202, signale que des dictionnaires anciens (Vapereau, mais aussi Jolly, dir., Dictionnaire des Parlementaires français 1889-1940 de 1891 et Sitzmann) l’indiquent à tort comme le père de Maurice Engelhard, il était son oncle ; Dictionnaire de biographie française, XII, 1970, 1294.

Georges Foessel (1986)

  1. Maurice Louis, dit ENGELHARD,

avocat, homme politique strasbourgeois et parisien, (★ Strasbourg 21.3.1819 † Paris 14.5.1891). Fils de 4. ∞ Valentine Fleury (★ 1858 † 1931), fille de M. Fleury, représentant du peuple en 1848. Après des études de droit, il effectua son stage dans l’étude au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation Bonjean, à Paris. Revenu à Strasbourg, il s’y établit comme avocat et son cabinet fut rapidement florissant. Engelhardt fut élu bâtonnier en 1869. Il prit aussi une place en vue dans la vie politique strasbourgeoise. De la nébuleuse Union libérale, portée par le Courrier du Bas-Rhin de Silbermann et Boersch, faite d’orléanistes et de républicains, qui s’est formée pour les élections de 1863 et de 1866 à Strasbourg, Engelhardt voulait détacher un parti radical et populaire. Il se heurta ce faisant à un groupe composé de Kuss, Kablé, Auguste Schneegans, Jules Klein et Ernest Lauth, dont l’engagement et les motivations étaient diverses ; Kablé et Kuss furent plus volontiers conciliants avec les radicaux. La diversité du paysage de l’opposition politique strasbourgeoise répondait à celle de l’opposition politique haut-rhinoise. Quand E. se vit opposer pour les élections au Corps législatif de 1869, la candidature de Boersch et recourut, pour compter les voix radicales, à la candidature de son ami Arago, l’on sentit bien le souhait de renouveler à Strasbourg, et sans doute sous la même puissante direction, l’opération menée à Mulhouse par les Kestner et A. Koechlin de Thann et Mulhouse, qui aboutit à la victoire de Tachard contre Jean Dollfus. Se mêlaient à ces conflits de grands intérêts nationaux qui se plaçaient dans l’hypothèse d’une évolution rapide ou d’une chute de l’Empire et de sa succession politique, le souci de la direction politique de l’opinion strasbourgeoise, dont l’un des principaux organes, le Courrier du Bas-Rhin avait des dirigeants vieillis et qui songeaient à la retraite. La lutte entre le groupe Engelhardt et le groupe Kuss-Kablé eut lieu à nouveau dans l’épisode des deux comités anti-plébiscitaires de mai 1870 : la large victoire du « oui » et la guerre semblaient annuler les oppositions et les ambitions rivales. Engelhardt était absent de Strasbourg lorsque les Allemands y mirent le siège. L’élargissement du conseil devenu commission municipale ouvrait le gouvernement de Strasbourg à ses ennemis politiques : Schneegans, Kablé, Klein, Kuss élu président le 14 septembre. Coupé de toute information sur Strasbourg, c’est paradoxalement par le recours à une pratique césarienne que ce républicain radical se fit nommer par le nouveau gouvernement de la République maire de Strasbourg (décret du 5 septembre). La nouvelle Commission municipale, désormais majoritairement républicaine elle aussi, refusa de reconnaître cette nomination imposée d’en haut, le 22 septembre. Elle choqua le parti radical de Strasbourg lui-même, qui fit paraître deux numéros d’un journal le Républicain de l’Est au mois de septembre 1870. Engelhardt s’établit à Sélestat où il occupa pour quelques jours les fonctions de préfet du Bas-Rhin puis s’en retourna à Tours, où il fut nommé le 7 octobre préfet du Maine-et-Loire, fonction qu’il n’occupa que cinq mois. Avocat au barreau de Paris, il mena dans la capitale une carrière édilitaire bien remplie. Il fut élu conseiller municipal radical de Paris de 1875 à 1884, président du Conseil de Paris et fut plusieurs fois candidat radical aux assemblées françaises, Sénat et Chambre des Députés, mais échoua. En 1884 il se retira de la vie politique.

Archives municipales de Strasbourg, état-civil ; Archives d’Etat de la R. D. A, Potsdam, papiers August Schneegans ; Ch. Staehling, Histoire contemporaine de Strasbourg et de l’Alsace (1830- 1852), Nice, 1884, p. 356; L. Delabrousse, Maurice Engelhard, Paris, 1881 ; Vapereau, Dictionnaire universel des contemporains, 1893, p. 533 ; G. Fischbach, Le siège de Strasbourg, Strasbourg, 1897 ; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 1, 1909, p. 442 ; Dictionnaire de biographie française, XII, p. 1292 ; J.-P. Kintz, « Journalisme et journalistes strasbourgeois au début de la guerre de 1870 », Saisons d’Alsace, n° 37, 1970, p. 58 ; Encyclopédie de l’Alsace, V, 1983, p. 2753.

François Igersheim (1986)