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EHRMANN Jean Chrétien I

Médecin et botaniste (Pl) (★ Strasbourg 8.7.1710 † 29 thermidor An V 16.8.1797).

Fils de Jean Ehrmann et de Jacobée Zitterlin. ∞ I 16.11.1735 à Strasbourg Marguerite Madeleine Schwartz († Strasbourg 19.6.1741), fille de Jean Michel Schwartz, commerçant. 3 enfants. ∞ II 2.2.1746 à Strasbourg Anne Marguerite Engelhard, fille de Jean Daniel Engelhard, négociant ; 6 enfants. Il soumit le 13 juin 1732 à Strasbourg pour examen solennel devant Boeckler père ©, titulaire à la faculté de la chaire botanique à laquelle était associée la matière médicale, une dissertation préliminaire intitulée, De foeniculo. Cette publication sur le fenouil en latin comprend 40 pages, numérotées, plus 4 préliminaires, dans lesquelles il se réfère à Marc Mappus ©, son patron et protecteur, et ajoute 2 pages de congratulations. C’est une étude traitant successivement les diverses parties de la plante (racine, tige, feuilles, fruits) avec leurs propriétés thérapeutiques, sans oublier l’utilisation à des fins aphrodisiaques, ni son importance pour l’art culinaire. Il se réfère en particulier à Otto Brunfels ©, Bock-Tragus ©, auquel il reprend même une recette précise pour la préparation de la racine, Jean Bauhin, Paul Hermann. L’an d’après, le 21 avril, il soutint sous la présidence de Jean Jacques Sachs, docteur en médecine et professeur de physique, sa dissertation médicale inaugurale pro licentia, qui devait lui rapporter le bonnet doctoral. Cette thèse, en latin, De Cumino, est dédiée à Daniel et J. Frédéric Kormann, assesseur au collège des XV. Elle est introduite par 12 pages présentant en plus de la préface avec appréciation du président, une adresse de félicitations de la part du célèbre botaniste et médecin Lindern ©. Puis les 36 pages numérotées se terminent encore, selon une coutume locale, avec des poésies congratulatoires en latin et en allemand, entre autres de la part de son camarade Jean, dit Jean Philippe Boeckler ©, fils du professeur ci- dessus et futur professeur lui-même. Ce ne sont plus les différentes parties de la plante qui donnent la suite des chapitres (il s’agit essentiellement des fruits du cumin), mais après la présentation de la plante (nom, pays d’origine, description) c’est l’emploi culinaire (entre autres comme succédané au poivre), et l’utilisation dans les diverses affections (reins, poitrine, maux de tête, tumeurs, yeux, épilepsie etc.) qui donnent les chapitres successifs. Souvent l’adjonction de fenouil, d’anis, de carvi est conseillée. Des appréciations personnelles ne manquent pas : tantôt des réserves, tantôt la contestation d’une prétendue inefficacité, voire nocivité (cette dernière résultant d’une mauvaise préparation avec du mauvais vinaigre !). Avec la possibilité d’en faire des cataplasmes, le cumin devint presqu’une panacée et la thèse conclut en soulignant l’importance de la botanique non seulement pour la pharmacie mais aussi pour la médecine. Ehrmann devait s’assurer une place capitale dans la botanique par la publication en 1742 de l’Historia plantarum alsaticarum de Marc Mappus, fils ©, qui lui avait remis sa bibliothèque, son herbier et ses notes arrêtées à la lettre E, après laquelle tout est de la plume d’Ehrmann. Il précise dans la préface de 14 pages non numérotées, après la dédicace à Klinglin © préteur royal de triste mémoire, qu’il aurait pu publier l’ouvrage sous son propre nom, mais qu’il préférait le faire sous celui de son maître et protecteur. C’est un ouvrage de 336 pages des espèces régionales connues, dont 2 bonnes douzaines relevées pour la première fois, classées par ordre alphabétique, avec description, éventuels usages thérapeutiques et culinaires, en latin, donnant des localisations précises en allemand, ainsi que les dénominations populaires en allemand et en français. 7 planches, signées Danecker, Stridbeck et Weis y sont insérées. Un index latin, un autre teutsch et un index gallicus, c’est-à-dire français, faits par l’étudiant d’alors, mais futur professeur R. Spielmann ©, certes incomplets, terminent l’ouvrage. Ce fut le plus remarquable du XVIIIe siècle, même s’il suit encore le système de Tournefort ; il fut le seul à servir les étudiants et botanistes. Déjà E. racheta tous les exemplaires disponibles dans les ventes pour ses amis, et de ce fait le professeur Spielmann ainsi que le titulaire suivant de la chaire de botanique, Jean Hermann ©, l’utilisèrent en y apposant leurs annotations personnelles, dont devait encore profiter Kirschleger ©, pour la rédaction de sa Flore d’Alsace, première vraie flore régionale.

Inscrit à la corporation des drapiers, dont il fut l’échevin, Ehrmann fut nommé en 1756 doyen perpétuel du Collegium medicum. Il fut membre correspondant de la Société royale de médecine à Paris, et Oberammen und Apothekerherr c.a.d. président de la commission d’examen pour sages-femmes et pharmaciens, « maître » de l’école d’obstétrique et de pharmacie, d’où sans doute sa publication Pharmacopaea Argentoratensis. Tout naturellement il obtint le poste de physicien de la ville, c.a.d. médecin municipal, poste gardé à vie. Cette occupation lui valut la petite publication du 24.7.1778, 2e édition 1779 : Instruction concernant les personnes mordues par une bête enragée. Le 1.11.1787, jubilaire, il fut fêté lors du cinquantenaire de son activité comme médecin du Collegium Wilhelmitanum par une poésie adressée au « teurer Ehrmann », sur quoi il passa la fonction à son fils, Jean Frédéric (★ 1739).
Il y a souvent eu des confusions par les historiens entre le père et le fils. De fait le père Jean Chrétien n’a jamais eu de chaire d’enseignement. Son fils, médecin clinicien de l’hôpital par contre, a souvent ajouté à ses visites de clinique des conférences explicatives, mais a dû attendre comme « doctor legens », onze années avant d’obtenir effectivement une charge d’enseignant (tension entre faculté et hôpital). C’est probablement lui le « vénérable docteur » cité très avantageusement par Goethe (ami de Jean Chrétien Georges Ehrmann) dans Dichtung und Wahrheit IX, et non pas, comme le pense Sitzmann, le père. De toute manière c’est encore lui l’auteur de Dissertatio de hydrargyripraeparatorum internorum in sanguinem effectibus, 1761, et non pas le père, auquel Baquol d’abord, Sitzmann ensuite attribuent la thèse.

Baquol et Ristelhuber, Dictionnaire du Haut et du Bas-Rhin, Strasbourg, 1865, p. 537 ; F. Wieger, Geschichte der Medicin in Strassburg, p. 107 ss, Strasbourg, 1885 ; J. Krieger, Topographie der Stadt Strassburg, Strasbourg, 1885 (Contributions du Dr. Strohl, « Das Medizinalwesen », et du Dr Freund Herrmann, « Das Hebammenwesen » ; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 1, 1909, p. 424-425 ; J. Stein, « Aus der Geschichte der Strassburger Medizin », Festschrift aus Anlass der Wiederaufnahme der Reichsuniversität Strassburg, Strasbourg 1941, p. 186 ; Dictionnaire de biographie française, XII 1970, 1160.

Gonthier Ochsenbein (1986)