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DELSOR Nicolas

Prêtre, journaliste et homme politique, (C) (★ Strasbourg 5.10.1847 † Strasbourg 20.12.1927).

Fils de Joseph Delsor, marchand de parapluies, et Madeleine Buchert. Études à l’école des Frères de Marie et au Petit Séminaire de Strasbourg de 1853 à 1865. Élève au Grand Séminaire de Strasbourg de 1865 à 1869. Ordination le 24.7.1870. Il enseigna au Petit Séminaire de Strasbourg de 1869 à sa fermeture par l’administration allemande en 1874. Le Kulturkampf le renforça dans son ultramontanisme et dans ses sentiments profondément français. En février-mars 1874, il fut l’un des instigateurs du mouvement de protestation du clergé alsacien contre la fameuse déclaration de l’évêque de Strasbourg, Mgr Raess ©, à la tribune du Reichstag. Il devint ensuite précepteur dans la famille de Saint-Chamant à Nantes. Il fut successivement vicaire à Colmar (1877-1879), curé à Wahlenheim (1879-1888), Nordheim (1888-1901) et Marlenheim (1901-1919). Chanoine honoraire de la cathédrale de Strasbourg en 1920 ; chanoine titulaire en 1927. Delsor s’illustra d’abord dans le journalisme où il se fit remarquer par sa verve et son esprit satirique. Il collabora, de 1880 à 1884, au quotidien catholique de Strasbourg, l’Union d’Alsace-Lorraine. Il y publia, en particulier, une chronique en dialecte strasbourgeois, la causerie du « Vieux Bontonnier », qu’il reprit plus tard dans l’Elsässische Volksbote sous le titre de « Causerie üs d’r Taverne ». Il y multipliait, sous une forme humoristique, les pointes contre l’administration allemande. Delsor s’imposa surtout, à partir de 1882, comme directeur de la nouvelle série de la Revue catholique d’Alsace, dont il fit la tribune du clergé alsacien, en particulier dans le débat sur la « démocratie chrétienne » et sur l’organisation politique des catholiques alsaciens. Excellent orateur, Delsor se fit remarquer lors des assemblées du Volksverein für das katholische Deutschland. Ses qualités l’imposèrent comme candidat aux élections au Reichstag, où il représenta la circonscription d’Erstein-Molsheim de 1898 à 1918. En 1899, il lança l’Elsässische Volksbote pour combattre l’influence de l’Elsässer, jugé trop favorable au ralliement des catholiques alsaciens au Zentrum allemand. En 1906, il fit échouer la tentative pour rattacher le Centre alsacien-lorrain au Zentrum allemand. Les luttes anticléricales en France, son expulsion de Lunéville le jour de Noël 1903 et la séparation de l’Église et de l’État de 1905 l’amenèrent cependant à s’accommoder avec le régime allemand. En mai 1911, Delsor vota contre le projet de loi constitutionnelle sur l’Alsace-Lorraine présenté au Reichstag. En octobre 1911, il fut élu député à la seconde Chambre du Landtag d’Alsace-Lorraine pour la circonscription de Molsheim-Wasselone. Il fut très réticent à l’égard du Nationalbund, lancé en juin 1911, par Wetterlé ©, Blumenthal © et Preiss ©, afin de promouvoir une politique plus vigoureuse en faveur de l’autonomie, car il estimait qu’il ne garantissait pas suffisamment les institutions religieuses et scolaires de l’Alsace. Au Landtag, il intervint surtout sur les questions touchant la liberté de l’Église, l’indépendance du clergé, l’enseignement confessionnel et la limitation des prérogatives de l’État. Membre de la fraction du Centre alsacien-lorrain au Landtag, il participa assez peu à la vie du parti. En 1914, il démissionna un moment de la fraction pour protester contre la participation d’Eugène Ricklin © à la Conférence interparlementaire de Bâle. Il quitta définitivement la fraction en juin 1917, à la suite d’un discours loyaliste du même Ricklin. En novembre 1918, Delsor participa aux séances du Conseil national d’Alsace-Lorraine, dont il devint président le 28.

Il s’opposa à une proposition de déclaration de Ricklin qui posait comme condition à un retour de l’Alsace-Lorraine à la France le respect des traditions et institutions religieuses, scolaires et administratives de l’Alsace-Lorraine. C’est lui qui lança, le 5 décembre à la tribune du Conseil national, les mots historiques ; « Le référendum n’a plus de raison d’être, il est fait ». Delsor joua un rôle important dans la fondation de l’Union Populaire Républicaine. Il en fut le premier vice-président et le président de la commission départementale du Bas-Rhin jusqu’en 1922. Il fit prévaloir une politique nationale. Élu sénateur du Bas-Rhin sur une liste d’Union Nationale en 1920, il s’inscrivit au groupe de la Gauche républicaine. En 1924-1925, il condamna avec vigueur la politique alsacienne-lorraine du gouvernement Édouard Herriot. En 1927, l’UPR l’écarta de la candidature aux élections sénatoriales, car on lui reprochait son indiscipline et son « chauvinisme ». Médaille de la Guerre 1870, chevalier de la Légion d’honneur.

État-civil de Strasbourg ; X. Haegy, « Chanoine Nicolas Delsor », Die Heimat, janvier 1928, p. 20-24, février 1928, p. 54-58 ; Une belle figure d’Alsace. L’abbé Nicolas Delsor (1847-1927). Esquisse biographique par un groupe d’amis ornée de plusieurs portraits, Strasbourg, 1928 ; Das Elsass, 4 vol., Colmar, 1936-1938, portrait vol. 1, p. 116 ; C. Baechler, Le parti catholique alsacien 1890-1939. Du Reichsland à la République jacobine, Strasbourg et Paris, 1982, portrait p. 178.

Christian Baechler (1986)