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DASYPODIUS (DASIPODIUS) Conrad

Professeur de mathématiques à l’Académie de Strasbourg, auteur de la 2e horloge astronomique de la cathédrale (P) (★ Frauenfeld, Suisse 1531 † Strasbourg 21.5.1601.

Fils de Peter Dasypodius ©. ∞ I 22.10.1559 à Strasbourg Susanna, fille de feu Jacob Kugler ; ∞ II 22.5.1576 Dorothea Hammerer, fille de Heinrich Hammerer, sénateur de la tribu des cordonniers (1574-1575) ; ∞ III. 5.12.1591 Esther Jung, veuve de Henning Oldendorp ©, professeur d’hébreu à Strasbourg ; ∞ IV. 15.10.1592 Elisabeth N., veuve de Mathias Holtzwart ©, poète et secrétaire de la ville de Ribeauvillé († 1579 au plus tard), puis de Martin Malleolus ©, professeur au Gymnase de Strasbourg. Après ses classes au Gymnase il suivit les cours de la Haute École de Strasbourg, en particulier ceux du mathématicien Christian Herlin ©, et continua ses études de mathématiques à Paris (où Jean Sturm © le recommanda à Pierre Ramus, 1554) et à Louvain. Le 26.10.1562 il succéda à Herlin comme professeur de mathématiques, puis enseigna cette matière à l’Académie de Strasbourg jusqu’à sa mort. Le 24.7.1563 il devint chanoine de Saint-Thomas et le 17.3.1581 doyen de ce chapitre. Jusqu’en 1568 il fut l’un des visiteurs des écoles, ainsi qu’en 1578 et en 1588 doyen de l’Académie. Dans les affaires du Gymnase et de l’Académie, en particulier dans les démêlés avec Jean Marbach © et avec Jean Pappus ©, il soutint fidèlement le recteur Jean Sturm et protesta vivement contre la destitution de ce dernier en 1581. Il s’occupa aussi des boursiers suisses à Strasbourg, en particulier de ceux de Schaffhouse.

Sa grande préoccupation fut de publier les œuvres des mathématiciens et autres savants de l’Antiquité : pour la géométrie Euclide (plusieurs éditions à partir de 1557), pour l’astronomie Ptolémée, etc., pour l’optique Damianos, pour la mécanique Héron, etc. D’après son Oratio de disciplinis mathematicis de 1579 il projetait de les publier tous en 4 volumes, texte grec avec traduction latine ; pour cela il avait réuni un certain nombre de manuscrits qui furent acquis plus tard par Bernegger © et brûlèrent le 24.8.1870 avec la Bibliothèque de Strasbourg. Pour ses cours, qui englobaient outre l’arithmétique et la géométrie, l’astronomie, la géographie, l’optique, la mécanique et la musique, il publia un premier Volumen mathematicum (1567), puis un second (1570), et en 1573 un Lexikon seu dictionarium mathematicum, le premier en son genre, où il traitait aussi de la géodésie et de l’harmonique. Dans sa Protheoria mathematica de 1593 il annonça un Corpus mathematicum devant exposer dans deux volumes d’institutions les notions de base, et dans un volume de Pandectes les cas plus compliqués : il n’en publia que le premier volume des Institutiones mathematicae (1593-1596). Dans son enseignement il ne se montra pas très novateur, se contentant de s’appuyer sur les auteurs antiques et poussant, à la suite de son maître Herlin, l’application de la dialectique humaniste jusqu’à présenter les courtes démonstrations géométriques sous la forme de longues séries de syllogismes. De même en géographie il négligea la Cosmographie de Sebastian Münster et ne s’étendit pas sur le Nouveau Monde. En astronomie il ne suivit Copernic qu’en partie et partagea avec beaucoup de ses contemporains astrologues la conviction que les comètes et autres phénomènes célestes extraordinaires annonçaient toujours des catastrophes.

Ce qui fit sa renommée, ce fut la seconde horloge astronomique de la cathédrale de Strasbourg. En 1547 le Magistrat avait décidé de refaire à neuf celle de 1352/54 arrêtée depuis plusieurs décennies, et avait confié la direction de cette entreprise aux savants Christian Herlin, Michel Herr © et Nicolas Prugner ©. La construction de la nouvelle cage était déjà fort avancée, quand les frais énormes de la guerre de Smalcalde et l’Interim de 1548 vinrent arrêter les travaux. Le projet ne fut repris, selon un plan plus ambitieux, qu’en juin 1571, quand Dasypodius se fut assuré l’aide des horlogers Habrecht © de Schaffhouse et se fut porté garant pour eux. Peu de temps après il s’adjoignit le mathématicien David Wolkenstein de Breslau © qui le seconda pour les calculs astronomiques et les instructions mécaniques détaillées à donner aux maîtres horlogers. Aux travaux collaborèrent aussi l’architecte Thomas Uhlberger © et surtout les peintres Stimmer ©, également originaires de Schaffhouse. L’ensemble, complété par la copie d’un portrait de Copernic et par une horloge extérieure sur le fronton sud du transept, fut inauguré le 24.6.1 574. Dasypodius en donna une description détaillée, avec gravure à l’appui, dans sa brochure Warhafftige Auszlegung des Astronomischen Uhrwercks zu Straβburg beschrieben durch M. Cunradum Dasypodium, der solches… anfenglichs erfunden, imprimée à Strasbourg en 1578 et dédiée aux scolarques de Schaffhouse. Il profita de l’occasion pour faire ressortir ses mérites et ceux de Wolkenstein aux yeux du public ignorant, qui croyait que les horlogers avaient tout fait ou des badauds qui s’intéressaient plus au coq et aux autres automates qu’au carillon de Wolkenstein et au globe céleste dont Dasypodius avait fait don à cette œuvre. Ce plaidoyer pro domo, encore accentué dans les additions de la 2e édition allemande de1580, s’exprime aussi dans l’édition latine Heron mechanicus… Horologii astronomici Argentorati in summo templo erecti descriptio parue à Strasbourg également en 1580. Une grande partie des décors et figures de cette merveille, qui s’arrêta définitivement en 1789, a été reprise dans la nouvelle horloge astronomique réalisée par Jean-Baptiste Schwilgué © de 1838 à 1842.

Actes concernant Dasypodius aux Archives municipales de Strasbourg (entre autres N 245-247) et aux Archives du Chapitre de Saint-Thomas, déposées aux Archives municipales de Strasbourg (publ. en partie par M. Fournier et Ch. Engel, Les statuts et privilèges des Universités françaises, t. IV, 1 : Gymnase, Académie et Université de Strasbourg, Paris, 1894). M. Sebitz, Strassburgischen Gymnasii Jubelfest. Appendix chronologica, Strassburg, 1641, p. 280 ; Joh. Gg. Ludolph Blumhof, Vom alten Mathematiker Conrad Dasypodius, Göttingen, 1796 (avec, p. 17-32, bibliographie de ses publications ; pour des compléments voir : British Museum Library, General catalogue of printed books ; Paris, B.N., Catalogue général des livres imprimés ; et Ritter, Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg, Bibliothèque municipale de Strasbourg et IV) ; W. Schmidt, « Heron von Alexandria, Konrad Dasypodius und die Straβburger astronomische Münsteruhr », Abhandlungen zur Geschichte der Mathematik, 8 (1898), p. 1 7 5-1 94 (cite un manuscrit à Wolfenbüttel) ; sur les manuscrits grecs de D. brûlés en 1870 : cf. A. J. H. Vincent, « Extraits des manuscrits relatifs à la géométrie pratique des Grecs », Notices et extraits des mss., 19, 2 (1858), p. 170-172 & 431 ; C. Wescher, Poliorcétique des Grecs, Paris, 1868, p. XXXV-XXXVI, et du même, « Note relative aux manuscrits grecs de la Bibliothèque de Strasbourg », Académie des Inscriptions et Belles-Lettres. Comptes rendus, 1871, p. 182-183 ; sur deux manuscrits d’Upsal : cf. L. Thorndike, A history of magic and experimental science, t. 6, New York, 1941, p. 88-90, et aussi p. 194-196 ; R. Lang, « Die Beaufsichtigung der Schaffhauser Stipendiaten in der Ferne », Mitteilungen der Gesellschaft für deutsche Erziehungs- und Schulgeschichte, 13 (1903), p. 146-155 ; voir aussi du même : Geschichte des Stipendiatenwesens in Schaffhausen, Schaffhausen, 1932 ; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. I, 1909, p. 350 ; Bopp, Die evang. Geistlichen in Elsass-Lothringen, 1959, n° 922 ; A. Schindling, Humanistische Hochschule und freie Reichsstadt. Gymnasium und Akademie in Strassburg 1538-1621, Wiesbaden, 1977, passim, spéc. p. 253-272 et 403 ; M.U. Chrisman, Lay culture, learned culture. Books and social change in Strasbourg 1480-1599, New Haven, London, 1982, p. 256-258 et 276-278 ; Encyclopédie de l’Alsace, t. 4, 1983, p. 2274-2275.

De l’abondante bibliographie sur l’horloge astronomique citons Ch. Schmidt, Notice historique sur l’horloge astronomique, Strasbourg, 1842, et en dernier lieu : H. Bach, « Cathédrale (de Strasbourg). Les trois horloges astronomiques », Encyclopédie de l’Alsace, t. 3, 1983, p. 1295-1308 (avec bibliographie p. 1346), et du même, « Die zwei ersten Münsteruhren », Schriften der « Freunde alter Uhren », 17 (1978), ainsi que : « Der Globus des Dasypodius », ibid., 18 (1979), p. 19-36 (complément de V. Beyer, H. Bach et E. Müller, « Le globe céleste de Dasypodius », Bulletin de la Société des Amis de la cathédrale de Strasbourg, n. s. 7 (1960), p. 103-139) ; cf. aussi E. Poulie, Les instruments de la théorie des planètes selon Ptolémée : équatoires et horlogerie planétaire du XIIIe au XVIe siècle, Genève, Paris, 1980, p. 693-698 et 763-766.

Jean Rott (1986)