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BONFILS-LAPOUZADE, Edmond

Magistrat, (C) (★ Sarre-Louis, 23.5.1866 † Nancy 16.12.1951. Une partie des études secondaires à Sarrelouis, dont sa famille était originaire, a permis à Bonfils-Lapouzade de s’assimiler parfaitement une double culture française et allemande. Après avoir été juge suppléant au tribunal de 1re instance de Nancy, puis, pendant 18 ans, procureur du tribunal de Charleville, il exerça des fonctions à la Direction civile du ministère de la Justice. Après la victoire de 1918, il fut nommé le 24 juin 1919, à sa demande, en Alsace, en tant que président de Chambre au tribunal supérieur d’Alsace et de Lorraine, juridiction qui devait devenir par la suite la Cour d’Appel de Colmar. De par ses origines et sa formation, il était particulièrement qualifié, non seulement pour collaborer à la solution des nombreuses difficultés d’ordre juridique que posait le retour à la France des trois départements de l’Est, mais aussi pour apprécier avec une intelligente sympathie les données psychologiques des problèmes alsaciens et lorrains. Parallèlement à ses fonctions judiciaires Bonfils-Lapouzade fut chargé de conférences destinées à faire connaître les lois françaises aux magistrats, aux avocats et aux greffiers, tout spécialement en droit pénal, le professeur Julliot de la Morandière ayant bien voulu prendre en charge les conférences de droit privé.

Ayant quitté Colmar pour la Cour d’Appel de Paris en 1928, Bonfils-Lapouzade fut la même année prié d’accepter le poste de procureur général à Colmar où il fut installé le 25 juillet 1928, suite au « procès de Colmar » et l’émotion suscitée dans la province. Il se mit immédiatement à l’ouvrage et traita les affaires d’Alsace et de Lorraine avec l’esprit d’un fin politique, le tact et le cœur dont il eut fallu que fussent pourvus tous ceux qui avaient à trancher ce délicat problème depuis 1918. Il y fut aidé par l’ardeur de son patriotisme, la sincérité de croyances religieuses qu’il n’a jamais dissimulées et qui allaient de pair avec une large tolérance. Et c’est dans une cour calmée, en pleine activité et dans une véritable apothéose qu’il quitta le parquet général avec le grade de premier président honoraire, non sans avoir reçu des mains du conseiller d’État Valot la cravate de commandeur de la Légion d’honneur. Il se retira à Nancy. Membre de l’Académie Stanislas, il continua à publier de nombreuses études historiques et littéraires. Parmi celles-ci, il convient de citer Quinze heureuses années en Alsace avec une préface de l’ambassadeur Léon Noël, membre de l’Institut et préfet honoraire du Haut-Rhin (Éditions Berger-Levrault 1948). Les pages que le premier président Bonfils-Lapouzade a consacrées à ses souvenirs d’Alsace méritent d’être lues par ceux qui assument la tâche d’administrer les trois départements de l’Est et d’y rendre la justice. Ils y trouveront, relatée avec une sincérité que la simplicité du récit contribue à rendre émouvante, l’œuvre accomplie dans les années qui ont suivi 1918 par les magistrats qui ont eu la charge de réincorporer l’Alsace dans l’organisation judiciaire nationale et le système juridique français.

Jean-Robert Mischlich (1984)