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BOESÉ Charles Frédéric

Instituteur, militant politique, (P) (★ Strasbourg 24.5.1809 † Blida, Algérie, 5.11.1881).

Fils de Jean-Philippe Boese, perruquier, et de Marie Madeleine Eck. Boesé fréquenta le gymnase de sa ville natale et entreprit des études en théologie. Il participa à la réception des généraux polonais en 1831 comme porte-drapeau malgré l’interdiction faite par le recteur aux étudiants. Les responsables furent sanctionnés. Après sa relégation, Boesé devint instituteur à Mulhouse, Niederbronn, puis à Strasbourg. Il fut suspendu une première fois en 1834. Il composait des chansons en dialecte alsacien et s’inspirait de l’art poétique d’Ehrenfried Stoeber ©. Il s’occupa activement de politique en 1848 et représenta les instituteurs à l’assemblée chargée d’élaborer la liste commune des candidatures électorales de l’Union Républicaine, des démocrates socialistes et des instituteurs. Il entra au Démocrate du Rhin, journal républicain et socialiste lancé par Émile Kuss © et Gustave Klotz ©. Il devint rédacteur en chef de l’édition hebdomadaire, Der Rheinische Demokrat, en 1851. C’est Charles B. qui composa l’article en allemand sur les dix plaies de IEgypte du 10.10.1849 qui provoqua le premier grand procès de presse à Strasbourg sous le Seconde République. Le groupe des socialistes bas-rhinois se scinda en 1850. Charles B. suivit l’aile radicale et poursuivit son activité militante et journalistique avec Émile Flocon ©, ancien ministre du gouvernement provisoire. Boesé avait été révoqué le 17.3.1850 de sa fonction d’instituteur primaire après 18 ans d’enseignement. Au mois d’octobre 1851, les deux éditions du Démocrate furent poursuivies par la Justice. L’administration avait retenu quatre articles — deux de Charles Boesé — et lancé une sextuple accusation contre les rédacteurs et l’imprimeur Philippe Albert Dannbach ©. Après le coup d’État, les « montagnards » organisèrent le 6.12.1851 une manifestation de protestation appelée la « bataille d’Austerlitz ». L’état de siège fut proclamé jusqu’au 16.3.1852. Certains meneurs purent s’échapper. Le Courrier du Bas-Rhin du 19 décembre annonça l’arrestation de Charles Boesé, caché à Plobsheim. Il fut condamné par la commission mixte à la « transportation en Algérie, classé plus », c’est-à-dire avec internement. Cette décision fut exécutée au mois de mai 1852. Boesé avait d’abord été transféré dans les casemates du Fort Bicêtre. Après son élargissement de Douera, Charles Boesé fut chargé d’instruire les orphelins d’une institution à Dély-Ibrahim le 1.10.1852. Quatre ans plus tard l’administration, qui avait rejeté un recours en grâce en 1854, affranchit Boesé de la mesure d’exil en Algérie. Il ouvrit alors une école pour tous les enfants de Blida. Il obtint le droit de résider dans le pays en 1859. Il créa en 1865 une école primaire qui fut transformée en école communale. Selon le journal L’Alsacien, Boesé aurait alors été chargé par le recteur de l’Académie d’Alger des classes élémentaires de latin à l’école secondaire de Blida ainsi que des classes d’instruction primaire supérieure. Il mit ses talents de poète au service de la pédagogie comme il l’avait fait pour la politique et composa les Chants scolaires agricoles ou l’agriculture enseignée en chantant dont celui du pain, du vin, du tabac. Cette dernière chanson lui valut une rente viagère en tabac livré par la Régie. Il ne cessa de s’intéresser à l’Alsace et composa même des poèmes en souvenir de ses amis défunts, tels Philippe Albert Dannbach ou Frédéric Piton ©. Les Elsässische Neujahrsblätter et l’Elsässisches Samstagsblatt publièrent des œuvres de l’exilé. Charles Boesé cachetait ses lettres au moyen d’un sceau gravé de symboles républicains et maçonniques. Il préféra rester en Algérie après la chute de l’Empire plutôt que de revenir dans une Alsace transformée en Reichsland.

Ch. Boesé, Elsass und Algerien, Poésies alsaciennes, traduites en français par Ch. Berdellé, 1888-1890 ; Ch. Berdellé, « Charles Boesé », Revue d’Alsace, 1896 ; G. Teichmann, « Charles-Frédéric Boesé. Un partisan de la République », La Vie en Alsace, 1929, n° 3, p. 13-14 ; M.-J. Bopp, « La littérature alsacienne de 1800 à 1870 », Les Lettres en Alsace, Publ. de la Soc. Savante d’Alsace et des Régions de l’Est, 1962 ; R. Muller, Anthologie des compositeurs de musique d’Alsace, 1970, p. 20 ; J.-P. Kintz, Journaux politiques et journalistes strasbourgeois sous la Seconde République et à la fin du Second Empire, Thèse de doctorat en journalisme, Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Strasbourg, 1970, 4 vol., exemplaire multigraphié à la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg, aux Archives municipales de Strasbourg et à l’Institut français de Presse à Paris (Texte du poème en souvenir de Ph. Albert Dannbach et censuré par l’administration, reproduit avec les documents).

Jean-Pierre Kintz (1984)