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BOECLER Jean Henri

Historien et juriste (★ Cronheim, Franconie, 13.2.1611 † Strasbourg 10.9.1692).

Fils de Johann Boecler, pasteur et de Magdalena Summer, fille du recteur du Gymnase de Feuchtwangen ; ∞ 16.1.1638 à Strasbourg Suzanne Schallesius, fille du pasteur Samuel Schallesius (★ 1585 † 1638) et belle-sœur de Jean Christophe Artopaeus ©, recteur du Gymnase. Par ce mariage Boecler et ses descendants seront apparentés ou alliés à la majorité des familles de l’Université et du Magistrat de Strasbourg. Études secondaires au Gymnase de Heilbronn, puis, en 1631, à l’Université d’Altorf puis à celle de Strasbourg où l’attirait le célèbre Matthias Bernegger © et où il soutint en 1636 une thèse de doctorat en philosophie. La même année il fut nommé praeceptor au Gymnase. En 1637 débuta une brillante carrière universitaire. Chaire d’éloquence (avril 1637), d’histoire (1640) ; chanoine de Saint-Thomas. En 1649 la reine Christine de Suède l’appela en Suède où il fut d’abord professeur d’éloquence et chargé de cours de droit public et de science politique à l’Université d’Upsala, puis historiographe de la cour à Stockholm. Il s’y lia d’amitié au juriste Conring avec lequel il resta en correspondance de 1655 à 1670. Sur ordre de la reine il rédigea une œuvre originale sur la guerre entre la Suède et le Danemark (1643-1645). En 1654 il était de retour à Strasbourg où il occupa la chaire d’histoire, notamment en tant que professeur de Veit von Seckendorff qui a illustré le « caméralisme » germanique. Les rapports de Boecler avec la Suède se continueront : le roi Charles X Gustav enverra son fils (illégitime) Gustav Carlsson à Strasbourg pour y faire ses études et il sera en pension chez Boecler. Les souverains d’Europe rivalisèrent pour s’attacher les faveurs de Boecler. L’électeur de Mayence le nomma conseiller intime en 1662, l’année d’après l’empereur Léopold Ier en fit un conseiller impérial et le nomma comte palatin d’empire, titres dotés d’une rente de 500 reichsthaler à partir de 1665, augmentée à 750 en 1669. Quant à Louis XIV, il servit à Boecler de 1663 à 1672, grâce à l’intervention de l’académicien Jean Chapelain, une pension de 2 000 livres, et ceci bien que Boecler eût été l’auteur d’écrits anti-français, parus, il est vrai, sans nom d’auteur. En tant que juriste Boecler s’est acquis une certaine célébrité dans l’histoire des idées comme partisan décidé du droit naturel, et en particulier de celui de Hugues Grotius dont l’enseignement devait désormais concurrencer celui du droit romain. Une controverse, au retentissement européen, sur les mérites respectifs du droit naturel et du droit romain oppose Boecler à son collègue strasbourgeois Jean Rebhan ©. Le célèbre traducteur de Grotius, Jean Barbeyrac, de même que le grand juriste prussien Christian Thomasius s’en sont fait l’écho. Cette querelle illustra la faculté de Strasbourg, citadelle des « Modernes » qu’on dénomma les « Grotianii » jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, notamment au travers des membres de la famille de Boecler. Dans ce contexte il y a lieu de citer son gendre Ulric Obrecht ©, professeur de droit et prêteur royal dont on publia des notes sur Grotius, et son neveu, le ministre autrichien J. C. Bartenstein ©. Boecler a tenté de clarifier le droit public germanique en supprimant les ambiguïtés terminologiques et en proposant une définition précise du concept « Empire germanique ». En tant que représentant d’un absolutisme modéré il s’oppose aux doctrines de Hobbes et insiste, à, la suite de Grotius, sur l’instinct social des hommes. L’enseignement caméraliste de Boecler mériterait une étude particulière, tant par rapport à V. von Seckendorf qu’aux Obrecht. On a prétendu que Boecler a été plus historien que juriste. Il a beaucoup insisté sur l’utilité des études historiques, tout à fait dans la tradition strasbourgeoise de Bernegger et, plus tard des Obrecht, Bartenstein, Schoepflin, Arnold, Hermann ou Klimrath. Son Commentaire sur l’histoire allemande du Xe et XIe siècle (1656) est un travail original et son Histoire, école des Princes de 1658 est considéré comme étant « …ce qu’il y a eu de mieux et de plus profond qui ait été publié de son temps » (Wegele, Gesch. der deutschen Historiographie 1885, p. 478).

Œuvres : A publié aussi sous le pseudonyme (anagramme) Surlecobius. L’œuvre de J. H. Boecler est très volumineuse. Plusieurs de ses travaux ont été réunis et édités par J. A. Fabricius, Strasbourg, 1712, 4 vol. in 4° ; Ad Grotium, de jure belli ac pacis, dissertationes quinque, Strasb., 1663, in 8 ; Historia Scholae Principium, 1658 et institutiones Politicae, 1688 sont les trois ouvrages marquants. À noter, pour l’histoire du droit lorrain, De jure galliae in Lotharingiam, 1662, in 4° ; on en trouvera une liste, incomplète dans Joecher, Gelehrtenlexikon, I, p. 1165 et sv. ; à compléter par Scherer, o.c., p. 468 et sv., Braubach, o.c. ; p. 344 et Jirgal, art. cité, p. 383-384 ; Appréciations intéressantes par Ch. Thomasieus, Paulo plenior Historia Juris Naturalis, 1719 ; Buddeus, Hist. Jur. Nat., § 28 et par Jean Barbeyrac dans ses traductions du Droit de la Guerre et de la Paix de Grotius. (Nous avons utilisé l’édition d’Amsterdam, 1729, p. IX, X et XIII). Lettres inédites dans Zeitschrift fur die Geschichte des Oberrheins, 1943, p. 233 et sv. La correspondance avec Conring est publiée dans Conring, Opera VI, p. 508 et sv. Selon E. Wrangel, Svensk Historik Tidskrift, 1897, p. 336, plusieurs volumes de lettres (inédites ? la Allgemeine deutsche Biographie ne les cite pas) à Boecler se trouvent à la Bibliothèque municipale de Hambourg (RFA) ; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 1, 1909, p. 182 (plusieurs erreurs…) ; E. C. Scherer, Geschichte und Kirchengeschichte an den deutschen Universitäten, 1927, p. 180-182, 468 et sv. et Index ; Jirgal, « J.H. Böcler », Mitteilungen des öst. Institut für Geschichtsforschung, 45, 1931, p. 322-382 ; H. von Srbik, Geist und Geschichte, I, 1950, p. 87 et sv. ; notice biographique par P. Wentzcke, Neue Deutsche Biographie, t. Il, 1955 ; M. Braubach, Diplomatie und geistiges Leben im 17.-18.Jh., 1969, p. 350 ; – Portraits par J.A. Seupel, par J.C. Krügner (Leipzig) et un portrait non signé (cités par Berger-Levrault).

Marcel Thomann (1984)