Ingénieur, (PI) (★ Karlsruhe 20.3.1770 † Paris 27.3.1828). Fils de Johann Gottfried Tulla, pasteur, et de Christine Pfeiffer. Par tradition, en tant que premier né, Tulla était destiné à devenir pasteur. Ses dons naturels pour les mathématiques et la technique incitèrent ses parents à lui donner une formation d’ingénieur à Karlsruhe. Après avoir été recommandé au margrave Karl Friedrich pour ses capacités remarquables et sa prédilection pour les questions hydrauliques, il fut envoyé en voyage d’études en Saxe et dans différents pays d’Europe (1794-1796). Dès son retour il fut nommé, en 1797, ingénieur au corpsdes Ponts et Chaussées du margraviat de Bade, chargé notamment des digues du Rhin. De 1801 à 1803, Tulla se rendit à Paris et à Blois pour se perfectionner dans la langue française, mais aussi pour parfaire ses connaissances en hydraulique. Tulla y fit la connaissance d’ingénieurs français qu’il retrouva lors des travaux sur la frontière du Rhin. Le 20 juin 1804, il fut nommé ingénieur principal. L’année suivante, il fut nommé professeur de mathématiques à l’Université de Heidelberg. Il refusa le poste mais proposa, en 1807, la création, à Karlsruhe, d’une école d’ingénieurs fondée sur le modèle français de l’École polytechnique. Elle ouvrit ses portes en 1825. De 1807 à 1812, il travailla en Suisse à la correction de la Linth. En 1817, Tulla fut nommé directeur général des Ponts et Chaussées du grand-duché de Bade, poste qu’il occupa jusqu’à sa mort et qui lui permit de se consacrer pleinement à son projet de correction du Rhin. Très sensible aux misères et aux maladies engendrées par les crues dévastatrices du Rhin, Tulla commença probablement les premières études dès 1800 par la recherche systématique de cartes topographiques du fleuve. En l’absence de documents suffisamment précis, il tira parti des relevés géométriques en cours destinés à la fixation de la frontière entre la France et le grand-duché de Bade. Il participa à ces travaux en tant que géomètre, mais aussi, à partir de 1817, en tant que membre de la Commission de reconnaissance de la frontière du Rhin (Rheingrenzberichtigungskommission). Dès la première réunion de cette commission, en juin 1817 à Bâle, Tulla imposa ses vues sur la méthode de détermination et de fixation de la frontière. Son action fut également déterminante pour la levée d’une carte précise du cours du Rhin entre Bâle et Lauterbourg. Le 30 janvier 1827, une convention fut signée entre la France et le grand-duché de Bade instituant une double frontière : celle dite des souverainetés matérialisée par le talweg du Rhin et celle dite des propriétés, conçue et abornée par Tulla d’où son appellation de « Ligne Tulla ». La commission « Inventaire et sauvegarde » de la Fédération des Sociétés d’histoire et d’archéologie d’Alsace a fait l’inventaire de ces bornes, en partie en collaboration avec le Historischer Verein für Mittelbaden E.V. Encore en 1828, Tulla se préoccupa de la publication de la première carte topographique fiable du Rhin. Elle servit de base aux travaux de correction et de rectification du cours du fleuve dont les travaux s’étendirent de 1828 à 1876. Mais Tulla ne vit rien de ces travaux, parmi les plus gigantesques du XIXe siècle et auxquels son nom reste étroitement lié. En octobre 1827, souffrant de calculs rénaux, il se rendit à Paris pour se faire soigner. Il y décéda et fut enterré au cimetière parisien de Montmartre où sa tombe est encore entretenue (Div. 26, ligne 1, n° 48). Chevalier de l’ordre grand-ducal du Lon de Zähringen ; chevalier de la Légion d’honneur ; chevalier de l’ordre royal de la Couronne de Bavière ; chevalier de l’ordre de Saint-Vladimir de Russie. Ce dernier ordre lui fut décerné par les Russes pour la construction d’un pont sur le Rhin en décembre 1814 en amont de Strasbourg ; le souvenir de cette traversée du Rhin est conservé dans le nom « Chemin des Russes » à Eschau.
Über die Rektification des Rheins von seinem Austritt aus der Schweiz bis zu seinem Eintritt in das Grossherzogthum Hessen, Karlsruhe, 1825 (trad. française dans Journal de la Société des sciences, agriculture et arts du département du Bas-Rhin, t. IV, Strasbourg, 1827, p. 5-69).
Spiess, Joh. Gottfr. Tulla – Sein Leben und Wirken, 1928 ; A. Waldenaire, « Das Leben und Wirken des Johann Gottfried Tulla », Zeitschrift für die Geschichte des Oberrheins, NF, 42, 1929, p. 337 ; E. Sutter, Der Bändiger des wilden Rheins, Johann Gottfried Tulla und sein Lebenswerk, Colmar, 1942 ; K. Knäble, « « Tätigkeit und Werk Tullas, Badische Heimat, 4, 1970, p. 450-465 ; H. G. Zier, « Johann Gottfried Tulla, ein Lebensbild », ibidem, 4, 1970, p. 379-419 ; A. Klein, Die geodätische Festlegung der Grenzen am Oberrhein (1750-1850), thèse Univ. Karlsruhe (T.H.), 1976 ; R. Descombes, « L’aménagement du cours du Rhin », P. Ayçoberry, M. Ferro, Une histoire du Rhin, Paris, 1981, p. 351-374 ; G. Ochsenbein, « Correction du Rhin, changements écologiques et souveraineté territoriale Alsace-Bade, cas de Rhinau-Taubergiessen », Annuaire de l’Association philomatique d’Alsace-Lorraine, t. 21, 1985, p. 239-249 ; Encyclopédie de l’Alsace, XII, 1986 ; H. Ihme, Südwestdeutsche Persönlichkeiten, vol. 2, Stuttgart, 1988 ; E. Kurtz, « Les bornes Noblat (1714-1792) et Tulla (1770-1828) dans notre secteur [d’Erstein-Benfeld] », Annuaire de la Société d’histoire et d’archéologie des Quatre Cantons, t. VI, 1988, p. 119-137 ; G. Robineau, « Organisation de la défense contre les crues du Rhin en rive française (1ère partie) », Bulletin de la Société des amis du Musée régional du Rhin et de la navigation, 1991-3, p. 60-80. Inventaire des bornes Tulla de la rive gauche du Rhin, de Bâle à Lauterbourg. Dossiers déposés à la commission « Inventaire et sauvegarde des petits monuments ruraux d’Alsace », Fédération des Sociétés d’histoire et d’archéologie d’Alsace, 1985-1989. Les bornes de la rive droite du Rhin, entre Rust et Rheinmünster-Greffern ont été recensées par l’association Historischer Verein für Mittelbaden.
Jean-Marie Holderbach (2001)