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WICKY Auguste

Maire de Mulhouse, conseiller général, (C) (★ Bourbach-le-Haut 4.3.1873 † Mulhouse 12.1.1947). Fils d’Apollinaire Wicky, ouvrier paysan, et de Julie lltis. ∞ 12.3.1904 à Mulhouse Louis Hahn divorcée Damm (★ Mulhouse 28.7.1875); 1 fils adoptif. L’enfance de Wicky fut assombrie par la perte de sa mère à quatre ans et de son père à six ans. La scolarité obligatoire terminée, sa famille voulut en faire un missionnaire, mais le curé, brouillé avec son père pour une question électorale, s’y opposa. Il entra alors comme manœuvre dans un tissage, puis fit son apprentissage chez un tailleur. Devenu compagnon, il travailla quelques temps à Belfort, où il apprit le français. En 1898, il se fixa définitivement à Mulhouse, où il adhéra au Parti social-démocrate et au syndicat. Dès 1900, il fut élu à la présidence du Cartel des syndicats libres (Union locale des syndicats proches du SPD) de Mulhouse. Il abandonna le travail manuel pour devenir, en 1904, rédacteur du quotidien SPD Mülhauser Volkszeitung, puis à partir du 14 avril 1908 Arbeitersekretär, c’est-à-dire en même temps conseiller juridique des familles ouvrières et secrétaire permanent du Cartel (1908-1914). En novembre 1906, le parti l’avait envoyé à son école de cadres durant un semestre à Berlin. Après l’occupation temporaire de Mulhouse par les troupes françaises en août 1914, mis en cause par son camarade, le député Emmel ©, Wicky, qui avait dénoncé publiquement le meurtre de son ami Charles Fritsch par des soldats allemands, à Bourtzwiller le 15 août 1914, fut arrêté en février 1915 en même temps que Jean Martin ©. Inculpé d’abord de trahison, il fut condamné le 28 juillet 1915 à trois mois de prison pour Deutschfeindlichkeit (hostilité à l’Allemagne) par le tribunal militaire allemand de Mulhouse. Il fut ensuite interdit de séjour en Alsace et mis en résidence forcée en Westphalie. Cette affaire donna lieu à une vive discussion à Berlin lors d’une réunion du groupe social-démocrate du Reichstag le 24 novembre 1915, qui refusa cependant d’infliger un blâme à Emmel. Après avoir présidé le conseil ouvrier de Mulhouse constitué le 13 novembre 1918, Wicky prit la direction de l’Union locale des syndicats CGT (1919-1922). Au cours de la vague de grèves de 1919-1920, il joua presque constamment un rôle modérateur, fort apprécié par les autorités administratives. Devenu en même temps l’un des leaders de la fédération du Haut-Rhin du Parti socialiste SFIO, adversaire déclaré du bolchevisme, il contribua de manière décisive en 1920-1921 à empêcher la majorité de ses membres de rallier le nouveau Parti communiste. Après la mort de Jean Martin, il prit la direction politique du Republikaner/Républicain du Haut-Rhin (1922-1928).

Élu en 1904, puis en 1906 au conseil municipal de Mulhouse, il fut battu, avec l’ensemble de la liste SPD aux élections municipales de 1908. Il retrouva son siège de conseiller municipal en 1911 et fut réélu en 1914. Candidat la même année à la seconde chambre du Landtag, il fut battu au second tour par Théodore Schlumberger ©. En 1912, il fut candidat au Reichstag à Guebwiller, mais fut vaincu par le centriste Albert Thumann ©. Le 30 novembre 1913, lors d’un meeting à Mulhouse, il attaqua vigoureusement le militarisme prussien. Après le retour à la France, Wicky fut membre de la commission municipale, puis adjoint du maire Wolff © chargé de l’assistance publique de 1919 à 1923, puis premier adjoint du nouveau maire Rémy © à partir du 16 juillet 1923. Il devint maire de la ville le 15 mai 1925 à la tête d’une liste de cartel des gauches (socialistes et radicaux), fut réélu le 17 mai 1929 et le 16 mai 1935 (cette fois à la tête d’une liste de Front populaire avec les socialistes, les radicaux et les communistes). Membre du Bezirksrat de Haute-Alsace de 1909 à 1918, il fut conseiller général de Mulhouse-Sud de 1919 à 1937 et de 1945 à 1947. Candidat à de nombreuses reprises aux élections législatives et sénatoriales, il n’a jamais détenu de mandats nationaux. Il fit partie du Conseil supérieur d’Alsace et de Lorraine (1919-1920), puis du Conseil consultatif d’Alsace et de Lorraine (1920-1925). Wicky, ceint de son écharpe tricolore, reçut à la mairie le premier détachement de la Wehrmacht le 18 juin 1940 et lui aurait déclaré: « Vous n’attendrez pas du maire français et socialiste qu’il vous souhaite la bienvenue ». Les nazis le révoquèrent et le remplacèrent par le Stadtkommissar Herbold. On lui promit une pension et son maintien à Mulhouse. Cependant, il fut expulsé avec sa famille le 13 décembre 1940. Il se réfugia à Agen (Lot-et-Garonne) : une photo prise pendant son exil le représente en berger d’un troupeau de moutons. Il revint dans sa mairie  dès le 28 novembre 1944 ramené par le capitaine Favereau (Maxime Felsenstein ©) avec ses adjoints Jean Wagner ©, P. Voegtlin et J. Walliser ©. Il reprit immédiatement ses fonctions et fut réélu le 9 octobre 1945. Empêché depuis plusieurs mois de remplir ses fonctions de maire pour raisons de santé, il démissionna en décembre 1946 et fut remplacé le 3 janvier 1947 par son premier adjoint, Jean Wagner. Wicky fut, avec Jacques Peirotes © et Édouard Richard ©, un des principaux pionniers du « socialisme municipal » en Alsace. Les municipalités qu’il dirigea mirent en œuvre d’importantes réalisations sociales, dont certaines avaient déjà été esquissées par les municipalités précédentes sous l’influence de la fraction socialiste. Dans le domaine de l’urbanisme et du logement, il fit décider la construction des cités d’Habitations à Bon Marché du Brustlein, du Wolf, du Haut-Poirier et du Drouot. C’est également à son initiative que furent construites la piscine municipale et la maternité du Hasenrain. À la suite de la crise économique, sa municipalité dut consacrer des sommes considérables à l’aide aux chômeurs (10 000 en 1930, 37 000 en 1934). Il présida l’Association des maires du Haut-Rhin. Chevalier (1937), puis officier (1946) de la Légion d’honneur ; médaille de la Fidélité française (1937).

« Die Lage der Arbeiterklasse in Elsass-Lothringen », Neue Zeit, Stuttgart, 1909, p. 732 ; Mülhauser Volkszeitung, 1904-1918; Der Republikaner, 1918-1940 ; Le Républicain du Haut-Rhin, 1944-1947 ; Der Waisenknabe. Jugenderinnerungen, Mulhouse, 1922 ; Warum gibt es Arme und Reiche, Mulhouse, 1922 ; Alt und Jung, Erzähiung, Mulhouse, 1922 ; L’orphelin : souvenirs de jeunesse écrits en prison en 1915, Mulhouse, 1998.

Archives nationales, AJ 30 170, AB XIX 1965 ; Archives municipales de Mulhouse, 40 TT (Fonds Jean Martin) ; Sitzungsberichte des Gemeinderats der Stadt Mülhausen, 1904-1908, 1911-1918 ; Der Republikaner des 6., 9. et 28.12.1918 et du 8.4.1935; 10 années d’activité municipale 1925-1935, Mulhouse, 1935 ; Haegy (index) ; L’Alsace du 29.11.1944 ; Républicain du Haut-Rhin du 30.12.1944; Als. des 4., 14. Et 17.1.1947 ; Voix d’Alsace, n° 5, février 1947 (E. Erhard) ; Une génération d’activité municipale 1925-1947, Mulhouse, 1947 ; R. Hovald, « Auguste Wicky », Almanach de l’Alsace et des Marches de l’Est, 1948 ; M. E. Naegelen, « Auguste Wicky », L’Alsace française du 3.3.1949 ; E. Muller, « A. Wicky », Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse, 1962, p. 23-24 ; H. D. Soell, Die sozialistische Arbeiterbewegung im Reichsland Elsass-Lothringen 1871-1918, Diss. Heidelberg, 1963; E. Matthias, E. Pikart (Bearb.), Die Reichstagsfraktion der deutschen Sozialdemokratie, 2, Dusseldorf, 1966, p. 80-81 ; R. Oberlé, Maires, adjoints et conseillers de la ville de Mulhouse, Mulhouse, 1971 ; E. Riedweg, « Auguste Wicky », Dernières Nouvelles du Haut-Rhin des 13, 14 et 15.1.1973; J. Wagner, « Auguste Wicky », L’Alsace du 1.3.1973; R. Wagner, La vie politique à Mulhouse de 1870 à nos jours, Mulhouse, 1976 ; Livet-Oberlé, 1977 (index) ; B. Fischbach, Ces maires qui ont fait Mulhouse, Besançon, 1983; Dernières Nouvelles d’Alsace du 15.11.1083 ; Ch. Hoermann, « Témoignage pour l’Alsace », Bulletin du Musée historique de Mulhouse, 1984, p. 79-89 ; Encyclopédie de l’Alsace, XII, 1986, p. 7736-7737 ; J.-C. Richez, etc…, Jacques Peirotes et le socialisme en Alsace, Strasbourg, 1989 ; Maitron, dir., Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, 43, 1993, p. 372-373 (et Cd-Rom).

† Raymond Oberlé et Léon Strauss (2002)