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TRÜBNER Karl Ignaz

Imprimeur-éditeur, (PI) (★ Heidelberg 6.7.1846 † Strasbourg 2.6.1907, inhumé à la Robertsau). Fils de Georg Trübner, joaillier, et d’Anna Maria Koerper, fille d’Ignaz Koerper, relieur, natif de Frankenthal, Palatinat. ∞ 26.1.1878 à Mannheim Clara Engelhorn (t Strasbourg 1.11.1908), fille de Johann Karl Konrad Engelhorn, avocat, et d’Antonia Luise Margarete Schaeffer ; sans enfant. Destiné à devenir joaillier comme son père, son oncle Claus Trübner, célèbre libraire à Londres, le fit changer d’avis en l’incitant à devenir libraire. Trübner commença par apprendre l’anglais et le français à l’institut Dietrich à Genève et entra, par la suite, en apprentissage chez J.C.B. Mohr, éditeur-libraire à Heidelberg (1862-1864). Parallèlement, il prit des leçons de latin et de grec. De 1864 à 1866, il perfectionna ses connaissances professionnelles dans la maison Brockhaus à Leipzig. Puis il se rendit chez son oncle à Londres, dont il s’inspira pour les grands principes de la librairie et de l’édition qui devaient le guider au succès à Strasbourg, et chez lequel il se spécialisa en linguistique, philologie orientale et en archéologie. Son oncle ayant renoncé à créer une succursale à Strasbourg après 1871, comme l’aurait souhaité le Freiherr von Roggenbach ©, organisateur de la nouvelle université allemande, Trübner décida de s’installer à son propre compte dans le nouveau chef-lieu de l’Alsace-Lorraine où il profita de la haute protection de Roggenbach et, plus tard, de I’Oberpräsident von Moeller ©. Arrivé à Strasbourg en mai 1872, Trübner estima qu’il lui appartenait désormais de contribuer de toutes ses forces à la germanisation de l’Alsace en aidant cette province à revenir dans son milieu linguistique et culturel naturel, entravé, selon lui, depuis le début du XIXe s. par l’Université française, mais aussi par des « mauvais » Allemands venus dans le pays après 1871. Es war mit der Annexion, écrivit-il, ein Abschaum von Abenteuerern und Schwindlern in das Reichsland gekommen, die den deutschen Namen schändeten und es dem ehrlichen Ansiedler erschwerten Fuss zu fassen. Trübner s’établit dans un premier temps comme libraire à la place Gutenberg, puis créa, peu après, 9 place de la Cathédrale, une maison d’édition. Cette dernière occupation l’intéressa tellement qu’en 1890, il partagea le travail avec E. d’Oleire pour ce qui est de la librairie, et, à partir de 1906, avec le célèbre éditeur Walter de Gruyter, pour ce qui est de l’édition. Deux soucis majeurs le hantaient : collaborer activement à la reconstitution de la bibliothèque et du musée de peinture, incendiés pendant le siège de 1870, et publier un maximum de sources d’archives pour parer, à l’avenir, à une catastrophe semblable à celle qui venait d’arriver. Il fit venir entre autres de Londres une importante collection de manuscrits, réunis par son oncle, pour en faire don à la nouvelle bibliothèque.

Quant aux publications de sources, le catalogue d’édition de 113 pages de titres, publié en 1897, donne un aperçu éloquent. Nous relevons entre autres l’Urkundenbuch der Stadt Strassburg en 7 volumes, Die politische Correspondenz der Stadt Strassburg im Zeitalter der Reformation (1515-1555) en 5 vol., Die alten Matrikel der Universitat Strassburg (1621-1793) de G. C. Knod en 3 volumes, Strassburger Zunft- und Polizeiordnungen des 14. Und 15. Jh. de J. Brucker (1889), Münz- und Geldgeschichte der Stadt Strassburg im Mittelalter de J. Cahn (1895), Matthias Bernegger, ein Bild aus dem geistigen Leben Strassburgs zur Zeit des dreissigjährigen Krieges de C. Bünger (1893), Strassburg im Schmalkaldischen Krieg d’A. Holländer (1881), Strassburger Studien d’E. Martin (1883-1888), 3 vol., etc. Il devint aussi l’éditeur attitré de la Société Gobineau et du guide des Vosges de son associé Mündel ©. À partir de 1891, Trübner édita le célèbre annuaire du monde savant : Minerva. Jahrbuch der gelehrten Welt qui connut immédiatement un grand succès grâce aux renseignements biographiques et professionnels qu’on y trouvait. Trübner avait choisi comme marque typographique, à partir de 1902, le tireur d’arc du temple d’Athénée, dans le golfe d’Égine, avec la devise : Wie du kannst, so wolle. Les mérites acquis par Trübner, dans les domaines scientifique, linguistique et archéologique, furent honorés par l’Université, qui le nomma professeur honoris causa en 1898. Trübner fut appelé aux postes les plus importants de l’industrie du livre en Allemagne: président du Börsenverein et du Verlegerverein (1901-1904), président de l’Association des libraires d’Alsace-Lorraine, président de la Société pour le développement de l’art dramatique moderne, premier président de la Société de la bibliothèque populaire dont il fut, avec Salomon Aron Jacobi ©, un des fondateurs et à laquelle il avait légué 30 000 marcs. Il fut d’autre part membre de la commission des musées, du conseil de surveillance de la Caisse d’épargne de Strasbourg, du comité de l’Union protestante libérale d’Alsace-Lorraine. Trübner fit don par testament du 18 mai 1906 au Musée d’art (Kunstmuseum) de la Ville d’une somme de 250 000 marcs pour l’achat de tableaux de vieux maîtres à choisir par les directeurs en fonction du musée sans immixtion, ni de l’administration municipale, ni de la commission du Musée. Il légua également une quinzaine de tableaux d’anciens maîtres parmi lesquels une Madone avec l’Enfant et deux anges de Boticelli, le portrait du père de Rembrandt et deux tableaux de J. S. van Ruisdael (Clairière dans la forêt avec abreuvoir), et de Jacques van Ruisdael (La mer agitée). La valeur de l’ensemble des 14 tableaux a été estimée à 55 000 marcs. Aux précédentes sommes s’ajoutent les revenus nets de la maison 9 place de la Cathédrale et 14 rue Mercière. C’est aussi grâce à l’entremise de Trübner que la Bibliothèque nationale de Paris rendit, en 1888, à la bibliothèque de Heidelberg la célèbre Manessische Liederhandschrift qui y avait échoué pendant la guerre de Trente ans. La Ville de Strasbourg commémora le souvenir du célèbre éditeur-libraire en donnant son nom à une rue du quartier des Quinze en 1919. Trübner mourut après son retour d’un voyage en Italie, dans la maison qu’il avait fait construire, 41 rue Schweighaeuser.

Archives municipales de Strasbourg, Arch. administratifs, 75/2097 ; Verwaltungsbericht der Archives municipales de Strasbourg,  Strassburg für die Zeit vom 1. April 1900 bis 31 März 1910, p. 562-564 ; Karl Trübner, Samstag den 20. Juni 1896, Tafellied bei der Eröffnung der Sommerfrische « Zur Schnakenlust », Ruprechtsau, lll-Rhein-Canalstrasse 4, slnd ; Verlagskatalog von K. J. Trübner, Buchhändler zu Strassburg, 1872-1897, Strasbourg, 1897 ; Börsenblatt für den deutschen Buchhandel, 6.6.1907, n° 129, p. 5759-5760; Journal d’Alsace-Lorraine du 7.6.1907 ; Strassburger Akademische Mitteilungen, 15.6.1907 Karl Trübner; [Kurze biographische Notiz], Leipzig, 1907 ; Jahrbuch des Vogesenclubs, t. 24, 1908, p. 336 ; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 2, 1910, p. 892.

† François-Joseph Fuchs (2001)