Professeur de droit, (PI) (★ Strasbourg, Saint-Nicolas, 11.9.1717 † Strasbourg, Saint-Thomas, 19.8.1792). Fils de Jean Chrétien Treitlinger († 1742), de Landau, Palatinat, diacre à Saint-Nicolas et petit-fils de Jean Martin Treitlinger, pasteur à Damheim, Palatinat, et de Suzanne Kob, fille de Louis Kob, assesseur du Grand Sénat, et veuve de Jean Gaspard Mühlberger. Élève au Gymnase à partir de 1724 ; suivit les cours de rhétorique (1731), de métaphysique, d’histoire, de philosophie, de grec et d’hébreu chez le professeur Lederlin, les mathématiques chez Hertenstein. Il rédigea, en 1735, un mémoire historico-dogmatique sur l’origine du monde (De ortu mundi) sous la direction du professeur Witter. Avec le consentement de son père, qui aurait préféré qu’il étudiât la théologie, il choisit le droit féodal et institutionnel, le droit canonique et le droit public du Saint Empire romain germanique. En 1737, il devint licencié et soutint une dissertation sur le sujet: Principem justum duorum Electoratuum saecularium possessorem. En 1739, il entreprit un voyage d’études à Paris en passant par Nancy où il fut accueilli par Antoine Lancelot, membre de l’Académie royale des Belles-Lettres. Grâce aux lettres de recommandation du professeur Schoepflin ©, à l’abbé Jordan, secrétaire de la Bibliothèque royale à Paris, et au bénédictin Montfaucon, les bibliothèques de Saint-Germain-des-Prés et d’autres lui furent largement ouvertes. Il s’initia, à Paris, à la pratique du droit qu’il ne connaissait jusque-là que par les livres. Malheureusement, il tomba malade et fut contraint d’interrompre le stage parisien. Après une brève convalescence à Strasbourg, il se rendit à Colmar auprès du Conseil souverain d’Alsace pour compléter son stage pratique. De retour à Strasbourg, il officia de 1742 à 1745 au service du Directoire de la Noblesse Immédiate de Basse-Alsace, s’adonna aux recherches littéraires et historiques et remplaça temporairement le professeur Schoepflin, tombé malade. En 1748, le Conseil des Treize nomma Treitlinger professeur extraordinaire de Droit. Il prononça, à cette occasion, la conférence inaugurale: Scholasticis diversisque eorum in Jure praeprimu Civili atque Canonico generibus. Par la suite, il enseigna le droit public impérial (1754), les pandectes et le droit canon (1755), les pandectes et le droit public (1760), enfin le Code et le droit public (1775). Partisan de la philosophie politique des « Droits de l’homme et du citoyen », une discipline très régulièrement enseignée à Strasbourg dès le premier tiers du XVIIIe siècle, d’après les écrits et traités de Grotius, Pufendorf et Leibniz, mais développée selon la méthode logique dite « démonstrative » de Christian Wolff (1679-1754) et aboutissant à la doctrine selon laquelle « la loi est l’expression de la raison» (que Treitlinger met en exergue de son ouvrage de 1787) et non pas « l’expression de la volonté d’un souverain » comme le voulaient les théoriciens de la monarchie française. Encouragé dans cette voie « moderniste » par Schoepflin, Treitlinger était en relation avec les principaux représentants européens du mouvement de l’Aufklärung et des llluminaten (Ickstatt, Rautenstrauch) et avait utilisé dans son enseignement les ouvrages des wolffiens Gottsched (droit naturel), J. J. Brucker (histoire de la philosophie) et Heineccius (droit romain des pandectes). Il était doyen en septembre 1770 et il lui échut, le 22 de ce mois, de recevoir le jeune Johann Wolfgang Goethe qui venait d’arriver à Strasbourg: il lui fit passer les examens préliminaires validant les acquis antérieurs et, au vu des résultats, l’a autorisé à passer une thèse « sans président ». Une activité de consultant allant normalement de pair avec l’enseignement, Treitlinger avait — notamment et par l’entremise de Schoepflin — assisté la ville de Bâle dans un important procès.
Représentant type des professeurs de droit strasbourgeois « progressistes », voire « prérévolutionnaires » du XVIIIe siècle, le rôle social et politique de Treitlinger reste à étudier, notamment au travers de l’analyse du grand nombre de dissertations (on en a retrouvé 66) soutenues « sous sa direction », mais dont on sait qu’il en a été l’auteur principal dans la majorité des cas. Outre le Programma ad orationem inauguralem de 1748 et une thèse de 1737, S.R.I. principem justum duorum electoratuum saecularium possessorem parue sous son nom, on connaît de lui une pièce de théâtre parue à Strasbourg en 1749, Die Friedensfeier, ein allegorisches Schauspiel mit Gesang und Balleten in drey Aufzügen. Für die Strassburger Bühne verfertigt von J. C. Treitlinger, beider Rechte. Lt. In Musik gesetzt von Herrn C. F. Schönfeld et une Geschichte der Verhandlungen der im Jahr 1787 in Versailles gehaltenen Versammlung der Vornehmsten des Reichs, mit authentischen Aktenstücken und historischen und statistischen Anmerckungen begleitet von Lt Treitlinger, Strasbourg, 1787.
Archives municipales de Strasbourg, AA 2438 et série III 77/17 (1748) et Archives du Chapitre de Saint-Thomas 445/61 et 1514 ; Archives municipales de Strasbourg, Fonds Saint-Thomas, n° 1514, se trouvent les comptes 1782-1800 du « Legs du prof. J. Chr. Treitlinger » ; Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg, Programma ad orationem inauguralem…, 1748 ; Pütter, Literatur des deutschen Staatsrechts, 1776, t. V, p. 121 ; Berger-Levrault, Annales des professeurs des académies et universités alsaciennes 1523-1871, Nancy, 1890, p. 243 ; Knod, Die alten Matrikeln der Universität Strassburg, 1621 bis 1793, I, 412, II, 575 ; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 2, 1910, p. 888 (erreur sur le titre de la thèse) ; Bopp, Die evangelischen Geistlichen in Elsass-Lothringen, 1959, n° 5269 ; J. Voss, Jean Daniel Schoepflin, 1999, p. 95, 136, 137, 140, 308.
† François-Joseph Fuchs et † Marcel Thomann (2001)
