Artiste peintre, graveur, e?crivain et poe?te, (PI) (★ Strasbourg 3.1.1891 † Strasbourg 9.5.1956). Fils de Henri Jean The?odore Solveen, d’Illkirch-Graffenstaden, inspecteur aux chemins de fer d‘Alsace-Lorraine, et de Madeline Niesz, d’Oberbetschdorf. ∞ I 5.4.1919 a? Strasbourg Frieda Louise Kieffer. ∞ II 8.6.1940 a? Pe?rigueux Marthe Catherine Berdoll. Apre?s des e?tudes au Gymnase protestant, a? l’Oberrealschule et a? l’École des arts de?coratifs a? Strasbourg, Solveen entra a? l’Acade?mie royale des Beaux-Arts de Leipzig ou? il se spe?cialisa dans les arts graphiques. Mobilise? sur le front russe pendant la Premie?re Guerre mondiale, Solveen revint a? Strasbourg, s’occupa alternativement de journalisme — il fut temporairement re?dacteur a? la Strassburger Neue Zeitung et collaborateur a? divers journaux locaux et e?trangers —, travailla comme critique d’art, de the?a?tre et de litte?rature a? diverses revues et gazettes et se consacra a? l’illustration de nombreux ouvrages. Il e?tait ainsi l’un des principaux animateurs de la vie litte?raire et artistique re?gionale. À partir de 1932, Solveen enseigna a? l’École des Arts de?coratifs. Remobilise? en 1939, Solveen reprit son enseignement apre?s sa de?mobilisation en 1940 jusqu’a? son de?ce?s subit.
Fin esthe?te, Solveen e?tait naturellement porte? vers les arts et se passionnait pour la poe?sie, la litte?ra ture autant que pour la peinture, la lithographie, le portrait et les ex-libris. Promoteur d’une « alsacianite? de l’esprit », ouverte et e?mancipe?e, a? l’instar de Rene? Schickele ©, Solveen militait entre les deux guerres pour la double culture, le bilinguisme et la re?conciliation franco-allemande dans une perspective europe?enne. En 1921, il e?dita les Nouveaux cahiers alsaciens ainsi nomme?s pour les distinguer des Cahiers alsaciens fonde?s par le Dr Pierre Bucher © en 1912. Il s’agit d’une revue artistique et litte?raire bilingue a? laquelle collabore?rent entre autres Yvan Goll ©, Gustave Stoskopf © et Rene? Schickele. En fondant l‘Arc en 1924, Solveen voulut cre?er un « pont » entre les cultures franc?aise et allemande. Le premier et unique volume intitule? l’Arc Anthologie, paru en 1924, est une re?alisation bilingue litte?raire et artistique exceptionnelle. Yvan Goll la qualifia de superbe et ajouta : « Si l’Alsace re?ussit pareille chose, tous les espoirs sont permis ». Parmi les collaborateurs du volume, figuraient
Maurice Betz ©, Ferdinand Bastian ©, Rene? Schickele, Claus Reinbolt © et Gustave Stoskopf. Les meilleurs artistes de l’e?poque ont illustre? le volume : entre autres Henri Ebel ©, Lucien Haffen ©, Hans Haug ©, Jacques Gachot © et bien su?r Solveen. Le volume obtint la me?daille d’or a? l’exposition des arts de?coratifs a? Paris en 1925. Mais, l’Arc fut la cible d’attaques de natures diverses qui brise?rent ce mouvement litte?raire. Ce fut l’e?poque ou? Solveen « cherchait avec beaucoup d‘autres Alsaciens a? concilier une vie re?gionale surtout d’ordre culturel avec une vie nationale sans se soucier de l’incapacite? tatillonne de l’administration de la Troisie?me Re?publique qui pre?fe?rait juguler par des poursuites policie?res et judiciaires ceux qui se laissaient se?duire par ce qu’on a appele? l’autonomisme alsacien. Dans ce combat politique, Solveen avait opte? pour l’art et la poe?sie » (R. Heitz, Discours d’adieu au nom des Artistes inde?pendants d’Alsace et de la Socie?te? des e?crivains d’Alsace et de Lorraine dont Solveen avait e?te? membre). Deux autres volumes en pre?paration entre 1928 et 1932 ne virent jamais le jour. Malgre? cet e?chec, l’Arc marque une e?tape importante dans l’histoire litte?raire alsacienne. Victime des tabous culturels et des tensions politiques, Solveen fut accuse? de propager l’autonomisme sous couvert d’une « pseudo revue artistique litte?raire » et fut emprisonne? lors du proce?s des autonomistes a? Colmar en 1928, mais acquitte?. Solveen publia de 1926 a? 1933 l’Elsass-Lothringischer Kunst- und Heimat- kalender, un almanach richement illustre? et re?dige? d’une manie?re exemplaire. Solveen. expliqua dans deux articles parus dans I’Elsa?sser Kurier des 24 et 31 décembre 1928 ce que ce calendrier est et veut e?tre. Devenu membre, en 1925, de l’Elsass-Lothringische wissenschaftliche Gesellschaft, Solveen publia en 1929 une importante e?tude sur la litte?rature alsacienne : Gibt es eine elsa?ssische Literatur ? suivie par un article consacre? aux publications alsaciennes apre?s 1918 : Elsa?ssisches Schrifttum nach dem Krieg. Ein U?berblick, paru dans Volkswille des 25 et 28 septembre 1929. En 1937, Solveen fonda, de nouveau sous le signe du bilinguisme, la Revue du Rhin en re?plique, semble-t-il, aux Strassburger Monatshefte de Fritz Spieser ©. Il s’agit de nouveau d’une revue artistique et litte?raire bilingue ou? Solveen se chargea de la re?daction de la partie en allemand et en dialecte tandis que Paul Ahnne © s’occupait des textes en franc?ais. Solveen s’adressa a? des collaborateurs de qualite? tels que Maurice Betz ©, Maxime Alexandre © et Claude Vige?e ©. Malheureusement la parution de cette revue de haute tenue litte?raire s’arre?ta en septembre 1939 par suite de la guerre et de l’occupation allemande. Solveen eut encore le temps de publier un volume de poe?sies : Kleine Bildergalerie (1939), dans lesquelles l’auteur suscite une since?re e?vocation de l’amour du pays natal qui a fait dire a? Yvan Goll : « Nous retrouvons ici la purete? de la langue et de l’esprit d’un Hartmann von Aue… Cette poe?sie fait de cette e?troite contre?e de l’Alsace un symbole de toutes les beaute?s du monde europe?en ». Oppose? a? la Volkstumideologie nazie, Solveen eut vite des ennuis avec la police allemande pour avoir « trahi » la cause des autonomistes « ve?ritables ». Il se tint donc coi et a? l’e?cart pendant l’Occupation. C’est sans doute dans les deux volumes de poe?sies parues apre?s 1945 que Solveen mit le meilleur de lui-me?me. Ce n’est pas en vain qu’il a e?crit en te?te du recueil Die stille Stunde (1952), une phrase de Marceline Desbordes-Valmore : « Il n’y a rien de si since?re que mon cœur ». Quant aux Gedichte vom Dasein (1956) dont Solveen avait encore pu pre?parer la publication avant sa mort inattendue, il s’agit d’un choix de poe?mes dont beaucoup resteront acquis au patrimoine poe?tique de l’Alsace. Ils sont destine?s a? perpe?tuer la me?moire de Solveen aupre?s de ceux qui ne l’ont pas connu. Chez Solveen le poe?te et l’e?crivain se double?rent de l’artiste peintre, du lithographe, de l’aquarelliste et du graveur. On lui doit des paysages (cha?teaux d’Ottrott, Truttenhausen, Landsberg, vues de Solbach, Engwiller, Sondernach, La Robertsau), Six vues lithographiques de l’Orangerie (1952) et des aquarelles. Il composa de nombreux ex-libris et illustra de nombreux ouvrages soit seul, soit en collaboration. Signalons parmi les ex-libris ceux d’Adelgunde de Bavie?re, princesse de Hohenzollern, Rene? Paira ©, Marcel Edmond Naegelen ©, Fernand Heitz ©, F. X. Le Roux ©, Martin Allheilig. Parmi les ouvrages illustre?s par Solveen il y a lieu de citer de nombreux manuels scolaires des anne?es 1920- 1925, la Revue de The?a?tre (saisons 1932 a? 1934), le Heimatkalender, cite? plus haut, Blo?ui Wiss Rot de L. Ed. Schaeffer ©, Ukulele de R. Buchert ©, D’Ardwibele de Nathan Katz ©, Im Schatten des Mu?nsterturms et Punctus contra Punctum de Claus Reinbolt ©, Das Elsass 1870-1932 (en collaboration), Der Rebbau im Elsass de Me?dard Barth © (en collaboration avec Robert Kuven ©) et Ues’m Elsass, 1954. Il a aussi cre?e? des affiches publicitaires (par exemple pour l’entreprise Dolfi).
Enfin il est l’auteur de Noms et figures vu par Solveen, pre?face de Robert Heitz, Toulouse, 1947, de 38 personnalite?s ayant exerce? en Alsace une activite? litte?raire ou artistique entre 1920 et 1940, parmi lesquelles figurent Hans Haug, Robert Heitz, Rene? Schickele, Maxime Alexandre ©, L. Ed. Schaeffer, Marcel Edmond Naegelen et lui-me?me.
Solveen a expose? a? Strasbourg de 1908 a? 1917, avec le groupe de l’Arc a? Stuttgart et a? Kassel, au Salon d’automne des artistes alsaciens-lorrains en 1935. La plus importante exposition fut la re?trospective organise?e par sa veuve en 1957 a? la Maison d’art alsacienne. À l’instar de Rene? Schickele, avec lequel il entretenait une correspondance suivie, Solveen avait essaye? « de jeter entre deux pays voisins cette « arche » qui fut son ambition d’homme de cœur, attache? aux seules valeurs de l’esprit » (R. Kiehl).
Der Elsa?sser des 4.5.1912, 2.1.1928 ; La Re?publique du 2.4.1925 ; Elsass-Lothringische Mitteilungen, n° 11, 1926; Volksstimme du 9.7.1927 ; Elsa?sser Kurier des 24 et 31.12.1928, 3.1.1929 ; Annuaire des e?crivains et publicistes de la re?gion d’Alsace et de Lorraine, 1931, p. 84 ; Das Elsass von 1870-1932, Colmar, s. d., I, 721, 740 et s., III, 274, 276, 290, IV, 444 ; Thieme-Becker, Allgemeines Lexikon der bildenden Künstler von der Antike bis zur Gegenwart, Leipzig, t. 31, 1937, p. 260 ; Basler National Zeitung des 19/20.8.1939, 19.5.1956 ; Dernières Nouvelles d’Alsace des 25.5.1939, 11 et 12.5.1956, 15.10.1956, 23/24 et 30.12.1956, 12.3., 29 et 30.4, 12/13 et 29.5.1957 ; Journal d’Alsace-Lorraine du 2.2.1949 ; Saisons d’Alsace, n° 1, 1950, p. 115, n° 47, 1973, p. 18 ; M. Jacob, « Die stille Stunde », Le Nouveau Rhin franc?ais, 31.10.1952 ; Magazine Ringier des 16.6.1956, 19 et 26.1.1957, 20.4, 4.5, 25.5.1957; Honneur et Patrie du 18.5.1956; Le Nouvel Alsacien des 12.5.1956, 2.5.1957; A. Andres, « Zum Ableben des Ku?nstlers und Dichters H. Solveen », Le Nouveau Rhin Franc?ais des 12 et 17.5.1956 ; P. Casper, « Erinnerungen an H. Solveen », La Voix d’Alsace, Mulhouse, du 1.6.1956; Die Tat des 29.12.1956, 5 et 8.6.1957 ; Solothurner Zeitung du 17.2.1957 ; Freies Volk, Jg. 17, n° 17 du 26.4.1957 ; La Semaine a? Strasbourg, 4 au 11.5.1957 ; Le Nouveau Rhin Franc?ais des 30.12.1956.16.1.1957.10.5.1957 ; K. Scheid, « Maler und Dichter des Elsass ; H. Solveen. Vorkämpfer des Europa-Gedankens », Badische Neueste Nachrichten, Karlsruhe, du 10.5.1958 ; Bonjour du 11.11.1961; Chez Soi, n° 16, 1956, p. 11-18, 20.1.1957 ; C. Schneider, « L’Arc et la signification de l’œuvre de H. Solveen », Les Lettres en Alsace, Strasbourg, 1962, p. 453-457 ; C. Reinbolt, La litte?rature populaire en Alsace (1920-1921), Les Lettres en Alsace, 1962, p. 463 ; C. Hirtz, « À la me?moire de H. Solveen », L’Écrivain d’Alsace et de Lorraine, n° 27, juin 1977 ; B. Knaub, H. Solveen ein elsa?ssischer Dichter deutscher Sprache, Me?moire de mai?trise, juin 1979 ; François Lotz (en collabor. avec J. Fuchs, L. Kieffer, R. Metz), Artistes-peintres alsaciens de jadis et de naguère 1880-1982, Kaysersberg, Éditions Printek, 1987, p. 304-305 ; A. Finck, Die deutschsprachige Gegenwartsliteratur im Elsass, Hildesheim, 1987 ; Austa?ndische Literatur der Gegenwart, t. 19, p. 18 et 60; B. Vogler, Histoire culturelle de l’Alsace, 1993, p. 402-403 ; M. Staiber, A. Finck, « Yvan Goll et la litte?rature alsacienne », Yvan Goll (1891-1950), Situations de l’e?crivain, Études re?unies par M. Grunewald et J.-M. Vatentin, Bern, 1994, p. 9-19, 217 ; A. Finck, Rene? Schickele, Strasbourg, 1999, p. 135, 275, n. 20 ; A. Finck, M. Staiber, « Zu Rene? Schickeles Briefen an H. Solveen », Festschrift fu?r Joachim W. Storck aus Anlass seines 75. Geburtstages hrsg. v. R. Schweikert… mit S. Schmidt, St. Ingbert, 1999, p. 615-628.
† Franc?ois-Joseph Fuchs (2000)