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SCHONGAUER

Famille de peintres et d’orfèvres.

1. Caspar,
orfèvre de Colmar (★ vers 1420 (?) † avant 1487). Peut-être fils de Hans Schongauer, mentionné à Augsbourg en 1418 et Ratsherr en 1444. ∞ Gertrud, peut-être fille de Werlin von Limperg; 4 enfants: Jörg © 2, Ludwig © 3, Martin © 4 et
Paul © 5. Il s’installa, vers 1440, à Colmar où il acquit le droit de bourgeoisie en 1445, alors qu’il habitait chez l’armurier Fritsch Benfelt, dans la Schädelgasse. La même année, il fut membre du conseil de la ville. À partir de 1465 au moins, il fut propriétaire de la maison zur Geige dans la Schädelgasse. En 1468, il fonda une messe anniversaire pour lui-même et sa femme, à Saint-Martin. En 1481, il fut payé par la ville de Colmar pour un verre sans pied. Aucune œuvre de lui n’a pu être identifiée.

2. Jörg,
orfèvre travaillant à Bâle et à Strasbourg (★ entre 1450 et 1455 (?) † entre 1494 et 1514). Fils de 1. ∞ avant 1487 Apollonia, fille du sculpteur Nicolaus von Leiden ©. Il est mentionné, dès 1482, à Bâle où il acquit, avec sa femme, la maison zum Tanz le 16 janvier 1487. En 1494, il la revendit et acquit le droit de bourgeoisie à
Strasbourg, le 30 juillet 1494, où il semble avoir habité la maison de son beau-père. Une croix d’argent, livrée par lui le 30 juillet 1487, est conservée à l’église catholique de Porrentruy (canton Jura), ainsi que deux ostensoirs. Une troisième monstrance du trésor de la cathédrale de Bâle (Musée historique) lui est également attribuée avec vraisemblance.

3. Ludwig,
peintre et graveur d’Ulm et de Colmar (★ entre 1450 et 1455 (?) † avant le 28. 2. 1494). Frère de 2. ∞ Anna, veuve du peintre Stäbler d’Ulm; 2 enfants, Martin et Zusanna. Il acquit, en 1479, la bourgeoisie à Ulm où il semble avoir travaillé
jusqu’à la mort de Martin © 4, en 1491. En 1493, il est mentionné à Colmar, comme membre de la confrérie du Rosaire et acquit le droit de bourgeoisie en déclarant qu’il habitait la maison zum Schwann. On lui attribue quelques gravures (quatre répertoriées par Lehrs), quelques dessins (Bâle) et un petit groupe de tableaux dont quatre panneaux provenant d’un retable de la Vie de la Vierge (Ulm, Musée).

4. Martin,
peintre et graveur de Colmar (★ entre 1450 et 1453 † 2.2. (?) 1491). Frère de 2 et 3. En 1465 il était inscrit à l’Université de Leipzig pour le semestre d’hiver. Entre 1466 et 1469 il paya la moitié des droits sur deux maisons de la Schädelgasse faisant partie de l’héritage de Werlin von Limperg dont il fut, peut-être, héritier par sa mère. Un dessin, aujourd’hui perdu, portait une inscription de la main de Dürer qui attestait qu’il avait été fait, en 1470, par M. Schongauer, da ein jünger gesell war, quand il était un jeune compagnon. Schongauer a probablement accompli un voyage de formation aux Pays-Bas qui lui a permis de se familiariser avec les créations de peintres comme Roger van der Weyden et Dieric Bouts dont il s’inspira dans ses peintures et ses gravures. La date de 1473 figure au verso de la Vierge au buisson de roses. À partir de 1477 au moins, il possédait la maison zum Schwann, Augustinergasse. En 1482 les Clarisses de Söflingen lui commandèrent un retable peint. En 1486 ou 1487, il compléta la fondation d’anniversaires souscrite par son père à Saint-Martin. C’est immédiatement après qu’il dut partir à Alt-Breisach, Brisgau, où il est mentionné comme bourgeois en 1489. Son œuvre gravé comprend 116 planches qui sont presque toutes signées du monogramme MS, formé des deux lettres séparées par une croix dont le bras horizontal gauche se prolonge par une sorte d’arc qui évoque certainement le croissant de lune des armoiries de la famille Schongauer. Sur 11 d’entre elles, tenues pour ses réalisations les plus anciennes dans cette technique, le M présente des jambages droits. Elles comportent notamment quatre pièces consacrées à la vie de la Vierge (Nativité, Adoration des Mages, Fuite en Égypte, Mort) et une Agression de saint Antoine qui aurait été copiée par Michel-Ange dans sa jeunesse. Une grande feuille évoquant Saint Jacques le majeur à la bataille de Clavijo est tantôt tenue pour une fausse attribution, tantôt considérée comme la preuve d’un voyage de l’artiste en Espagne à Saint-Jacques-de-Compostelle (pourtant peu vraisemblable). Beaucoup de gravures postérieures semblent surtout conçues comme des modèles pour les sculpteurs et les orfèvres. Par contre, son grand Portement de croix et la série de la Passion en 12 pièces sont des œuvres aussi élaborées que des peintures qui ont connu un énorme retentissement dans toute l’Europe. À Colmar, au musée d’Unterlinden, sont conservés les volets du retable commandé par Jean d’Orlier pour le couvent des Antonites d’Issenheim et ceux du retable du couvent des Dominicains de Colmar, probablement réalisés avec au moins un collaborateur (son frère Ludwig ?) ainsi que, dans l’ancienne église des Dominicains, la Vierge au buisson de roses, peinte probablement pour une chapelle de Saint-Martin. On connaît encore quatre petits panneaux peints de sa main (Munich, Alte Pinacothek, Vienne, Kunsthistorisches Museum, Berlin, Staatliche Museen et Los Angeles, J. Paul Getty Museum). Sa dernière œuvre, une énorme peinture murale du Jugement dernier, dans l’église d’Alt-Breisach, a été retrouvée sous des badigeons en 1931, mais nous est parvenue fort ruinée. On connaît encore de lui une cinquantaine de dessins dont l’attribution n’est pas toujours certaine, répartis dans divers musées (notamment Bâle, Öffentliche Kunstsammlung ; Berlin, Staatliche Museen ; Londres, British Museum ; Paris, musée du Louvre ; Vienne, Albertina ; Washington, National Gallery). La célébrité de l’artiste était déjà si établie de son vivant que le jeune Albrecht Dürer, partant en voyage de formation, souhaitant le rencontrer, gagna d’abord, en 1491, Colmar où il parvint toutefois après sa mort. Schongauer est le premier artiste de l’Europe occidentale dont l’œuvre gravé a été aussi largement diffusée et a influencé plusieurs générations de créateurs. Son art se distingue par l’acuité d’un dessin nerveux et par l’équilibre de ses compositions.

5. Paul,
orfèvre de Colmar (★ entre 1450 et 1455 (?) † 29.4.1516). Frère de 4. En 1478, il acquit la bourgeoisie à Leipzig. En 1489 il était à Bâle, où il s’associa avec l’orfèvre Matheus Rudler contre lequel il fut par la suite en procès. En 1491 il intervint pour la liquidation de l’héritage de Martin © 4. Après la mort de Ludwig Schongauer © 3, il semble être retourné à Colmar où il acquit le droit de bourgeoisie dès le 16 février 1494 et hébergea Dürer. Son fils, Hans († 1441) a été également orfèvre. Aucun élément de son œuvre n’est identifié.

Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 2, 1910, p. 712-714; M. Lehrs, Geschichte und kritischer Katalog des deutschen, niederländischen und französischen Kupferstiches im XV. Jahrhundert, vol. IV, Vienne, 1927 (catalogue de l’œuvre gravé de M. Schongauer); Hans Rott, Quellen und Forschungen zur südwestdeutschen und schweizerischen Kunstgeschichte im 15. und 16. Jahrhundert, Stuttgart, I, 1936, p. 375 (passim); Thieme-Becker, Allgemeines Lexikon der bildenden Künstler von der Antike bis zur Gegenwart, Leipzig, t. 30, 1936, p. 249-254; Charles Wittmer et J. Charles Meyer, Le Livre de bourgeoisie de la ville de Strasbourg 1440-1530, Strasbourg, II, 1954, p. 474 n° 4510 ; J. M. Fritz, Goldschmiedekunst der Gothik im Mitteleuropa, Munich, 1982 ; Le Beau Martin. Gravures et dessins de Martin Schongauer (vers 1450-1491), catalogue de l’exposition du Musée d’Unterlinden, Colmar, 1991 (avec bibliographie antérieure et recueil des mentions d’archives) ; Le Beau Martin. Études et mises au point (Actes du colloque organisé par le musée d’Unterlinden à Colmar les 30 septembre, 1er et 2 octobre 1991), Colmar, 1994.

Albert Châtelet (1999)