Inventeur ferroviaire, (Pr) (★ Guebwiller 21.5.1817 † Olten, Suisse, 25.7.1899).
Fils de Nicolas Riggenbach, fabricant, et de Gertrud Landerer. ∞ 16.11.1847 à Binzen, Allemagne, Emma Socin (★ Bâle 5.8.1824 † Olten 14.6.1899) ; 1 fils, Bernard, pasteur et universitaire (★ Karlsruhe 25.10.1848 † Bâle 2.3.1895). D’origine bâloise, le grand-père de Riggenbach, Jacques Christophe (1756-1822), son oncle Antoine (1780-1841), et son père, Nicolas (1784-1829), fondèrent en 1808 à Guebwiller une raffinerie de sucre qui connut une certaine prospérité pendant le Blocus continental et jusqu’en 1825, puis déclina jusqu’à sa fermeture en 1830. Le père de Riggenbach ne survécut pas à la faillite et toute la famille — la mère et 8 enfants — regagna Bâle, où, dès 1827, le jeune Riggenbach fit des études secondaires. Après un essai peu concluant dans le commerce textile, Riggenbach trouva sa voie en suivant de 1833 à 1836 un apprentissage de mécanicien, à l’issue duquel il entreprit un « Tour de France » qui le mena dans de grands ateliers mécaniques à Lyon en 1836 puis, en septembre 1837, à Paris. Dans cette ville, il se perfectionna en suivant des cours du soir au Conservatoire des arts et métiers et des leçons particulières d’un jeune centralien. Il y assista au lancement du premier train français de Paris à Saint-Germain : la vision de la locomotive détermina selon ses propres dires sa vocation ultérieure. En 1839, il fut recruté comme monteur par l’usine de machines Kessler de Karlsruhe où il arriva en juin 1840. Il y participa à la fabrication des premières locomotives allemandes sous la direction d’un ingénieur anglais. En 1842 et 1843, il tenta sans succès d’ouvrir à son compte un atelier de mécanique à Bâle. En 1844, il retourna à l’usine Kessler à Karlsruhe, cette fois comme chef d’atelier. Il y resta jusqu’en 1853, y assurant la construction de près de 150 locomotives, dont les quatre premières locomotives destinées à la Suisse, qu’il fut chargé personnellement de conduire et d’essayer dans sa patrie en 1847, sur la ligne Zurich-Baden. En 1848 et 1849, et bien que citoyen suisse, il prit une certaine part, du côté des autorités constituées, aux événements révolutionnaires dans la capitale badoise. En février 1853, il fut nommé chef des ateliers mécaniques de la Société du chemin de fer central de la Suisse, récemment créée à Bâle, puis, le 29 février 1855, se vit confier la direction des ateliers centraux de la société à Olten, où il s’installa désormais. Ces ateliers assurèrent notamment la construction de nombreux ponts métalliques, réalisés pour la première fois en Suisse à l’aide de caissons pneumatiques, et, dès 1859, celle des premières locomotives fabriquées en Suisse. En 1865 et 1866, un de ses frères s’étant établi au Costa-Rica, il entreprit un long voyage en Amérique centrale où il vit le canal de Panama encore inachevé, puis en Amérique du Nord. À son retour, il publia une brochure pour dissuader ses compatriotes d’émigrer au Costa-Rica et leur recommander au contraire les États-Unis. À plusieurs reprises déjà, notamment au tunnel du Hauenstein, Riggenbach avait été confronté au problème des pentes trop fortes pour les locomotives classiques. Dès 1863, c’est-à-dire six ans avant les premières réalisations selon le même principe de l’américain Marsh, il avait fait breveter en France son système de roue à crémaillère permettant de vaincre des pentes allant jusqu’à 25 %. Après avoir réuni, à partir de 1866, les appuis et les moyens financiers nécessaires, il put entreprendre en 1870 la construction du premier chemin de fer de montagne en Europe, partant de Vitznau et escaladant l’emblématique Rigi dominant le lac des Quatre-Cantons. Le premier tronçon fut inauguré le 21 mai 1871, la ligne arriva au sommet, Rigi-Kulm, en 1873. La ligne symétrique, partant d’Arth, fut ouverte en 1875. Nommé co-président de la Société internationale des chemins de fer de montagne, il quitta en 1873 la direction de l’usine d’Olten pour prendre celle de la nouvelle société à Aarau. Après avoir réalisé plusieurs lignes dans les pays germanophones d’Europe centrale, la société subit le marasme des affaires et, après l’échec d’un grand projet aux Indes britanniques, où Riggenbach s’était rendu personnellement, elle fut dissoute en 1880. Riggenbach s’installa comme ingénieur privé à son domicile d’Olten, élaborant ou supervisant de nombreux projets pour la Hongrie, l’Italie, l’Autriche, l’Espagne, le Portugal, le Brésil — dont il connut personnellement l’empereur Pedro II —, Marseille (N.-D. de la Garde), Lyon (Croix-Rousse). Cette intense activité l’amena à entreprendre de grands voyages, notamment en Italie, au Portugal, en Espagne, en Algérie (1885). En 1886, il publia des mémoires très moralisateurs, Erinnerungen eines alten Mekanikers, souvent réédités jusqu’à nos jours, notamment par la Société pour la diffusion des bons livres, de Bâle. Médaille d’or à l’exposition universelle de Paris en 1878, membre de l’Institut de France. Monuments à l’ancien cimetière d’Olten et à la gare de départ de la Rigibahn à Vitznau.
Journal d’Alsace du 1.8.1899 (article nécrologique) ; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 2, 1910, p. 577 ; Allgemeine deutsche Biographie, 53, p. 385-395 ; Historisch-biographisches Lexikon der Schweiz, 5, p. 632 ; Schweizer Lexikon, 5, p. 368; W. Dehaas, N. Riggenbach, der Vater der Zahnradbahnen..., Zurich, 1944 ; R. Muller, « Le rail à l’assaut du ciel », Réussir le Haut-Rhin, nov. 1966 ; L’Alsace du 31.7.1968 et du 29.5.1971; W. Hefti, Zahnradbahnen der Welt, Bâle, 1971 ; F. Stocker, Wanderbuch Rigigebiet, 4. Aufl., 1975 (Schweizer Wanderbuch 25) : portrait ; F. Fruhinsholz, « La journée des Alsaciens à Lucerne sous le signe du chemin de fer à crémaillère », Acta murbacensia, 1992, p. 15-20.
Francis Gueth (1998)