Skip to main content

QUILLET Aristide Ambroise

Editeur (★ Villiers-Adam, Val-d’Oise, 18.10.1880 † Paris, 15e, 30.4.1955).

Fils de Napoléon Ambroise Quillet, carrier, et de Victorine Pierrette Tuquet. ∞ 2.5.1905 à Dresde, Allemagne, Sidonie Valesca Marthe Neubert. Très tôt orphelin, il quitta l’école et son instituteur alsacien Hasenfratz après le certificat d’études. Il fut successivement apprenti menuisier, commis de librairie, garçon de courses, vendeur, aide-comptable. À 18 ans, il s’associa avec un ami pour créer une petite affaire d’édition de cartes postales illustrées. À 22 ans, il fonda avec un ami suisse la maison d’édition qui portait son nom à Paris, mais qui était à l’origine la filiale française d’une maison d’édition de Berlin. Autodidacte lui-même et franc-maçon (à la loge Temple de l’Honneur et de l’Union), il se spécialisa dans les ouvrages de vulgarisation et les encyclopédies vendues par courtage. Il fut membre du parti socialiste SFIO de 1906 à 1925 et adhéra au Rassemblement des gauches républicaines après 1945. Au début de l’année 1919, averti par son ami l’écrivain d’origine alsacienne Émile Hinzelin, il racheta à Léon Ungemach © la majorité des actions de la société d’impression et d’édition des Strassburger Neueste Nachrichten, que celui-ci venait d’acquérir. Les fonds nécessaires à la reprise lui furent avancés par la Banque d’Alsace et de Lorraine. De très nombreux ouvrages des éditions Quillet (Verdun, histoire des combats, Atlas universel Quillet, Encyclopédie coloniale, Encyclopédie illustrée des actualités scientifiques) furent désormais imprimés à Strasbourg. Le puissant groupe de presse régional s’étoffa avec l’édition française des Dernières nouvelles de Strasbourg (1921), les Dernières nouvelles de Colmar (1921) avec son imprimerie (1923), une imprimerie à Sélestat (1924), La vie en Alsace, la salle Cinébref Dernouvel (1936), etc… Par contre, l’éditeur, qui fut maire de sa commune natale de 1929 à 1940 et de 1945 à 1955, n’intervint guère dans les affaires de la rédaction strasbourgeoise. Son homme de confiance, Émile Henry Quillet n’a rédigé que deux éditoriaux dans le quotidien régional, l’un en 1925 pour rendre hommage à l’astronome Camille Flammarion, l’autre en 1935 pour protester contre le privilège fiscal accordé à son concurrent, l‘Encyclopédie française. Cependant, il ne fut certainement pas étranger à l’orientation « républicaine de gauche » des Dernières nouvelles, hostile à l’influence cléricale et à l’autonomisme maintenue par son rédacteur en chef, Jean Knittel, malgré la condamnation lancée le 8 septembre 1924 par Mgr. Ruch © sur le journal. La faillite de la Banque d’Alsace et de Lorraine (1932) mit le groupe Quillet en difficulté. Il fut même question d’une vente au magnat de presse Raymond Patenôtre. À la veille de la guerre, l’équilibre financier était retrouvé. Après l’évacuation de Strasbourg, en octobre 1939, les Dernières nouvelles de Strasbourg, dont la vente était interdite en Allemagne depuis le 26 février 1933, s’établirent à Bordeaux. Après l’armistice de 1940, alors que ses biens en Alsace annexée étaient confisqués et que certains de ses ouvrages étaient détruits par les Allemands, Quillet s’établit à Montpellier, où il avait aménagé une imprimerie depuis 1937. Il était vice-président du Groupement des réfugiés de l’Hérault et il obtint du gouvernement de Vichy l’autorisation de publier à partir du 2 mars 1941 : L’Écho des réfugiés, organe d’entraide des Alsaciens et des Lorrains, hebdomadaire, puis trimensuel. À Paris, il fut dénoncé le 10 février 1941 à la Propaganda-Staffel par un anonyme qui présenta son entreprise comme « la maison d’édition franc-maçonnique de France » et accusa Quillet de se livrer en zone non occupée « à une activité certainement anti-collaborationniste ». Le 15 octobre 1943, sa publication de Montpellier fut interdite par ordre de Pierre Laval, chef du gouvernement et ministre de l’Information à la demande des autorités allemandes. Son domicile et son bureau à Paris furent plusieurs fois fouillés par la police allemande. Lorsqu’un de ses proches collaborateurs fut arrêté à Clermont-Ferrand, il se réfugia dans l’Ariège et échappa ainsi à la Gestapo qui tenta de l’arrêter le 13 août 1944. Quillet reconstitua son empire de presse alsacien après la Libération. Un stock de papier acheté à bon compte aux Américains lui permit de relancer l’édition et de publier l’Histoire générale illustrée de la Seconde Guerre mondiale, et l’Histoire générale des religions.Après son décès, sa succession fut assurée par son gendre, Jean Rocaut jusqu’à son décès en 1975. Ses héritiers vendirent en avril 1980 leur participation dans la Librairie Aristide Quillet et ses filiales, dont la Société d’imprimerie et d’édition des Dernières nouvelles de Strasbourg (69,9 % du capital) à la société Haussmann Gestion du groupe Matra, qui devint bientôt le groupe Matra-Hachette-Europe 1 avant de passer en 1993 dans le groupe Hersant. Légion d’honneur (commandeur 1927, grand-officier) ; médaille de la Résistance.

Le Masque arraché ! La science au service des honnêtes gens. Moyens scientifiques permettant de découvrir les auteurs de lâchetés anonymes, Compiègne, 1920; (avec L. Groc), L’Ile de France par le texte et par l’image, Paris, 1935.

Aristide Quillet au service du progrès économique et social, notamment de la région de Villiers-Adam, son village, 1929 ; Voyage en Alsace des élus municipaux de Seine-et-Oise, 1931 ; L’Odyssée de M. Aristide Quillet, maire de Villiers-Adam au cours des années de guerre 1939-1944, Montpellier, 1945 ; Histoire du livre et d’un animateur de la pensée: Aristide Quillet, 1948 ; Dictionnaire biographique français contemporain, 2e éd., Paris, 1954-1955 ; Dictionnaire de la politique française, Paris, 1967, p. 896-897 ; F. Archambault, J.-F. Lemoine, Quatre milliards de journaux. La presse de province, Paris, 1977 ; D. Wirtz, De l’éphémère au centenaire ou l’histoire d’un quotidien de province : les Dernières nouvelles d’Alsace, thèse de 3e cycle, Strasbourg, II, 1980 ; Encyclopédie de l’Alsace, IV, 1983, p. 2316-2319 (G. Wackermann, Dernières nouvelles d’Alsace) ; D. Wirtz-Habermeyer, Histoire des DNA, Strasbourg, 1987 ; P. Fouché, L’édition française sous l’occupation 1940-1944, 1, Paris, 1987, p. 45, 204, 205, 283; D. Wirtz-Habermeyer, « Évolution de la presse régionale de 1945 à nos jours », Saisons d’Alsace,  100, 1988, p. 77-88 ; Maitron, dir., Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, XXXIX, 1990, p. 296-297 ; Cl. Lorentz, « La presse alsacienne de la Libération à 1949 », Revue d’Alsace, n° 118, 1992, p. 141-166; A. Irjud, « Nouvelles de la diaspora alsacienne », Saisons d’Alsace, 117, 1992, p. 183-197.

Léon Strauss (1997)