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LICHTENBERG

Famille noble apparue en 1206 et devenue, aux XIVe et XVe s., la lignée la plus puissante de Basse Alsace. Son origine est encore débattue,mais il est probable qu’elle soit une branche de la famille des nobles de Hüneburg © 2, à laquelle elle succéda à la charge de l’avouerie de l’abbaye de Neuwiller. L’assise territoriale à partir de laquelle s’effectua son expansion est d’ailleurs représentée par des localités relevant de l’abbaye et par conséquent de l’Évêché de Metz, avec Bouxwiller et Ingwiller pour centres. Quant au château patronymique, il fut lui-même bâti dans un district forestier appartenant au monastère. Outre ces relations avec les évêques messins, les L. fondèrent leur grandeur sur des relations privilégiées avec l’Évêché de Strasbourg, ce qui les conduisit à obtenir, dès le milieu du XIIIes., l’avouerie de la ville de Strasbourg; trois d’entre eux devinrent d’ailleurs évêques de ce diocèse. L’expansion territoriale commença dès la seconde moitié du XIIIe s. par l’acquisition de domaines importants au Pays de Bade, centrés sur Lichtenau, et autour de leur château éponyme. Puis, par une habile politique de soutien aux empereurs, Rudolf et Albrecht © 1 von Habsburg d’abord, Ludwig von Bayern (Louis © de Bavière) par la suite, ils obtinrent de nombreux avantages et privilèges : droits de ville, droits d’escorte et de péage, fiefs divers. Le coup de maître fut, en 1332, l’achat d’une grande partie des droits et possessions (entre Brumath et Niederbronn) des derniers landgraves de Basse Alsace, les sires de Werd. Acquisition qui, renforcée par celle de localités alentour et des droits landgraviaux dans l’Uffried, leur permit de faire le lien entre les domaines originels et ceux d’Outre-Rhin ; à partir de là, leur hégémonie en Basse Alsace fut assurée. Bien qu’encore investis en 1358 du maréchalat de l’Évêché de Strasbourg, des temps plus difficiles allaient également s’annoncer à partir de cette seconde moitié du XIVes. Mais la précaution prise antérieurement qu’en cas d’extinction d’une des branches de la famille, ses biens passeraient aux survivantes, évita aux L. de voir, au contraire d’autres lignées, leur domaine se rétrécir telle une peau de chagrin. Et les cessions, parfois provisoires, de certaines possessions furent toujours compensées par de nouvelles acquisitions. Le XVesiècle est aussi marqué par la mise en place d’unités administratives, un effort de centralisation et de monopole des biens et des droits, premiers pas vers ce qui aurait pu faire de leur territoire le premier état privé alsacien. Les dernières décennies de l’histoire des L. furent marquées par des conflits toujours renaissants avec trois lignées : les sires de Hohen-Geroldseck ©, leurs parents, qui élevaient des prétentions sur l’héritage de Bouxwiller, les sires de Fleckenstein © (branche des Fleckenstein-Bickenbach), lesquels devinrent peu à peu leurs principaux concurrents en Basse Alsace, et surtout les comtes de Leiningen (Linange ©), auxquels ils étaient également apparentés. Dans ces querelles, les L.firent souvent preuve de mauvaise foi, opposant un refus constant à des revendications parfaitement fondées. Cette situation finit par embraser toute la région, secouée par un violent conflit armé qui se termina en 1451 par la victoire militaire des L. mais ne résolut rien. Après que le dernier des L., Jakob © 2, eut été élevé au titre de comte en 1458, la famille s’éteignit en 1480, laissant à ses héritiers, les comtes de Zweibrücken-Bitsch et les comtes de Hanau ©, un vaste domaine s’étendant de part et d’autre du Rhin, englobant plus de 200 localités et plus de 30 châteaux.

Ordre de classement

1. Rudolf († avant 1224)

2. Heinrich I († avant 1232)

3. Ludwig I († avant 1252)

4. Heinrich II († 1269)

5. Ludwig II († après 1282)

6. Conrad († 1299), évêque de Strasbourg

7. Friedrich († 1306), évêque de Strasbourg

8. Conrad I († 1294), souche de la branche aînée

9. Johann I († 1315), souche de la branche cadette

10. Hanemann II († 1366)

11. Johann III († 1324)

12. Ludemann III († 1369), souche de la branche dite de Lichtenau

13. Heinrich III († 1379)

14. Johann († 1365), évêque de Strasbourg

15. Simund († 1380)

16. Heinrich IV († 1393)

17. Conrad II († 1390)

18. Johann IV († 349-1405)

19. Ludwig IV († 1434)

20. Jacob (1416-1480)

21. Ludwig V (1417-1471).

1. Rudolf

(† avant 1224). Apparu en 1202 comme «Rudolfusmensunarius», chanoine de Strasbourg, il était à nouveau nommé en 1206 «Rudolfus de Lichtenberg», archidiacre de Strasbourg. Également prévôt de St-Thomas à partir de 1213, Rudolf est cité pour la dernière fois en 1222 comme chorévêque de Strasbourg. Mentionné comme décédé en 1224. Contrairement à ce qu’affirment certains auteurs, rien ne prouve qu’il fut le frère des deux suivants.

2. Heinrich I

(† avant 1232). Est probablement identique à «Hertrich de Lichtenberg», témoin en 1209 d’un acte épiscopal. En 1219, «Heinricus et L. nobilesviri de Lichtenberg» étaient témoins de l’évêque de Strasbourg, Heinrich II von Veringen. Il mourut sans avoir laissé d’héritier mâle. Sa fille Helia (? après 5.1.1247 Rudolf von Usenberg).

3. Ludwig I

(† avant le 9.1.1252). Frère de 2. ∞ avant 1243 Adelheit N.; au moins 6 enfants: Heinrich II ©4; Ludwig II © 5; Conrad © 6; Friedrich © 7; Simund († 1253, chanoine de Strasbourg); Johann (chanoine de Neuwiller en 1278); et, peut-être, Catharina (? Egon von Freiburg) et Heilika (? Hartmann von Thiersberg). Cité en 1219 avec son frère Heinrich © 2, c’est lui qui, en premier, est attesté comme étant avoué de l’abbaye de Neuwiller en 1237; il fut qualifié de fidèle du roi Conrad IV l’année suivante. En 1249, l’évêque de Strasbourg lui confia la charge d’avoué (= Vogt) de la ville de Strasbourg.

4. Heinrich II

(† 1269). Fils de 3. ∞ I Elisabeth N. ∞ II 1251 Adelheid von Eberstein; au moins 5 enfants (qui semblent tous issus du second mariage): Conrad I © 8, Ludwig († après 1274, ∞ Herzlauda von Klingen), Agnes (∞ Johann von Werd), Otto († 1283, enterré à l’abbaye de Neubourg, chantre à Strasbourg), Cunegunde († après 1301, ∞ Otto von Ochsenstein) et peut- être Sigismund. En conflit avec les bourgeois de Strasbourg en 1252 et 1259 à propos d’empiétements sur ses prérogatives d’avoué, il soutint en 1261-1262 l’évêque Walter von Hohen-Geroldseck © contre la ville. Avec son frère Ludwig II © 5, il tenta également de profiter de la vacance de l’Evêché de Metz, en 1260, pour mettre la main sur Neuwiller où ils commencèrent à faire démonter des maisons pour récupérer des matériaux afin de reconstruire le château de « Wadenberg » (Warthenberg). La réaction du nouvel évêque, Philippe de Florange, en mai 1261, les obligea à inter- rompre leur entreprise et à réparer les dommages.

5. Ludwig II

(† après 1282). Frère de 4. ∞ Elisabeth von Baden; au moins 4 enfants: Rudolf (mentionné de 1270 à 1274, ∞ Catharina von Klingen, pas de postérité), Johann I © 9, Heinrich (chantre de Strasbourg en 1287) et Elisabeth (∞ Walter von Hohen-Geroldseck). Cité avec son frère Heinrich II © 4 à partir de 1252, on affirme souvent que Ludwig II se serait vu remettre, en 1260, par le roi Conradin, le landgraviat de Basse Alsace à la condition qu’il s’en emparât avec ses propres moyens et ceci sans nuire aux intérêts du monarque (n’est attesté par aucune source). C’est à lui que la lignée doit ses premières acquisitions significatives. Ainsi, qualifié de «dominus» de Rheinbischoffsheim en 1274, il reçut probablement cette localité badoise en fief de son frère Conrad © 6 qui venait d’être élu évêque de Strasbourg. En 1280, avec son neveu Conrad © 8, il acheta à Eberhard von Ettendorf le village de Rothbach et les droits d’avouerie sur le Seelhof, domaines jouxtant Lichtenberg à l’est.

6. Conrad

Évêque de Strasbourg (* vers 1240 † Strasbourg 1.8.1299). Frère de 5. Chanoine de Metz, prévôt de l’abbaye de Surbourg, chantre du chapitre depuis 1263, il fut élu évêque de Strasbourg en février 1273 en succession de Heinrich von Geroldseck ©. Il assista au Concile de Lyon en 1274 (consécration). Personnalité très énergique, il fut certainement l’un des prélats les plus marquants par son activité politique et militaire et par le renforcement du pouvoir temporel de son Évêché; ceci même s’il favorisa aussi sa lignée à laquelle il inféoda divers biens et pour laquelle, peut-être avec les deniers de son Église, il fit transformer en 1286 le château de Lichtenberg. Évêque bâtisseur, on lui doit la construction de l’église de Niederhaslach et surtout l’achèvement de la nef de la cathédrale de Strasbourg et la mise en place de la prestigieuse façade d’après les plans de maître Erwin von Steinbach ©. Bâtisseur, il l’a aussi été par les châteaux et remparts urbains qu’il fit élever et surtout améliorer (Lichtenau, Schoeneck, Dachstein, Isenburg, Châtenois…). Le territoire épiscopal s’enrichit tour à tour, pour ne citer qu’eux, de la moitié du château de Hohenstein (1279), de celui de Meyenheim et de la ville de Seltz (1281), de droits importants à Niedernai (1284), puis à Ernolsheim (1286), du château de Soultz (1289), de la localité de Marckolsheim (1294-1297), de Hattstatt et des châteaux de Bollwiller et d’Osthoffen (1295) et enfin de celui de Dumenheim (1297). Déjà en guerre et fait prisonnier par le duc de Lorraine alors qu’il n’était que chantre du chapitre -il conclut la paix avec le duc le 7.6.1274 à Lyon-, Conrad se retrouva aux prises avec le duc Ferry en 1276-1278, conflit qui se termina encore par une défaite. Par contre, en 1284-1286, une nouvelle guerre opposant les deux rivaux (au cours de laquelle Conrad et ses alliés s’emparèrent des châteaux d’Ochsenstein et de Hoheckerich) lui assura un triomphe par lequel le duc dut lui céder la localité et le château de Reichshoffen. En 1279, sur ordre du roi Rudolf von Habsburg, Conrad prit et détruisit le château de Durlach lors d’une expédition punitive contre le margrave de Bade. La guerre les opposant dura jusqu’en 1281, année où le margrave dut céder au prélat et au chapitre le fief de Seltz. Après qu’en cette même année, il fut fait mention d’une attaque avortée de Conrad contre le sire de Rappoltstein, on retrouve le prélat dans une nouvelle campagne militaire en 1289 quand, aux côtés de l’empereur Rudolf, il prit part au siège du château de Girsberg-Staufen. Cette fidélité au monarque est marquée par le soutien inconditionnel que Conrad apporta à son fils Albrecht von Habsburg dans la lutte pour le trône à partir de 1291. Dès cette année, son armée s’empara de Colmar et détruisit à nouveau Girsberg. En 1293, allié aux Strasbourgeois, il assiégea et prit la ville de Haguenau mais dut toutefois, pour sauver Strasbourg, rendre hommage au roi Adolf von Nassau et solliciter grâce et pardon. En 1298, il participa très activement à la chute de ce dernier, détruisant notamment les châteaux de Kintzheim, Krax et Oberschaeffolsheim et s’emparant de Rosheim ; après la victoire définitive d’Albrecht, il reçut celui-ci à Strasbourg. Et c’est encore lors d’une expédition militaire, venant au secours du comte Egon von Freiburg contre les bourgeois de Fribourg-en-Brisgau, que Conrad trouva la mort. Lors du siège de cette ville, il fut mortellement blessé d’un coup de lance lors d’une sortie des défenseurs: ramené à Strasbourg, il y décéda quatre jours plus tard. Inhumé dans la chapelle St-Jean de la cathédrale.

Iconographie : pierre tombale dans la chapelle St-Jean de la cathédrale de Strasbourg (attribuée à Erwin © von Steinbach).

7. Friedrich

Évêque de Strasbourg († Strasbourg 20.12.1306). Frère de 6. Chantre (1274), puis prévôt (1275) du chapitre de Strasbourg, archi-diacre de Metz (dès 1273), il prit, en septembre-décembre 1293, une part active à la défense de Colmar contre l’armée du roi Adolf von Nassau. Lorsque les bourgeois se révoltèrent et investirent sa maison, il put se réfugier chez Anshelm von Rappoltstein (Ribeaupierre) avant de se cacher au couvent des Franciscains, puis de parvenir à quitter la ville. De 1296 à 1298, à la mort de l’évêque de Metz Bouchard, il se vit confier la garde des forteresses de Lützelburg, Turquestein, Blieskastel et Lievenberg. Le 15.9.1299, il fut élu évêque de Strasbourg, succédant ainsi à son frère Conrad © 6; la présence à Strasbourg de l’empereur Albrecht von Habsburg, auquel Friedrich avait apporté le même soutien inconditionnel que Conrad, n’est peut-être pas étranger à ce choix. Aucun fait guerrier notoire ne marque son épiscopat. La seule acquisition significative est, en 1303, celle de la ville d’Oberkirch et du château de Fürsteneck dans le Mortenau, achetés à la comtesse Adelheid von Fürstenberg. Par contre, le prélat afficha une volonté de conciliation non dénuée de fermeté, concluant divers traités de paix avec des vassaux récalcitrants (Hohenstein ©, Laubgassen ©, Berckheim ©). En 1301, il inféoda Schoeneck et ses dépendances à ses parents et, en 1303, il fit transférer le prieuré d’Obersteigen à Saverne. Il fut inhumé à côté de son frère dans la chapelle St-Jean de la cathédrale de Strasbourg.

Iconographie : pierre tombale dans la chapelle St-Jean de la cathédrale de Strasbourg.

8. Conrad I

(† 26.2.1294). Fils de 4. ∞ 1282 Agnes von Teck; 3 enfants: Hanemann II © 10; Heinrich ou Heinkelmann (†24.10.1316, inhumé à Neubourg) et Agnes (∞ 1310 Jofrid von Forbach; à la mort de son époux, elle entra au couvent de Lichtental dont elle devint abbesse, †après 1335). Fondateur de la branche aînée. Décédé assez jeune, il n’a pas laissé de trace importante. En 1289, Conrad obtint de l’empereur Rudolf qu’en cas de décès sans héritier mâle, ses fiefs impériaux puissent revenir à ses filles. Il fut inhumé dans la chapelle de l’abbaye de Neubourg.

9. Johann I

Landvogt d’Alsace († 22.8.1315). Fils de 5. ∞ Adelheid von Werdenberg-Montfort; 4 enfants: Johann III © 11; Ludemann III © 12; Susanna (? landgrave Ulrich von Werd) et Adelheid (nonne à Lichtental, † 25.10.1383). Souche de la branche cadette. Cité dès 1272 avec son cousin Conrad, il conclut en 1288 un accord avec le chevalier Walter von Hüneburg à propos de la défense du château de Hüneburg, tenu par les L. en fief impérial. En 1293, il fut l’un des garants de l’acte de restitution des châteaux d’Ortenberg et de Bilstein par le roi Adolf von Nassau aux Habsburg. En 1298, il participa activement aux derniers épisodes du conflit pour le trône ; ainsi, il entreprit divers coups de main contre l’armée royale qui assiégeait Rouffach, puis, le 2 juillet, prit part à la bataille décisive de Göllnheim. Il en fut récompensé la même année par la charge de landvogt impérial d’Alsace. En 1301, année où il obtint le fief épiscopal de Schoeneck, il faisait partie de l’armée de l’empereur Albrecht © 1 von Habsburg qui assiégeait Bingen; il reçut alors confirmation des libertés accordées par Rudolf von Habsburg aux bourgeois de Bouxwiller. En 1302, au siège de Cologne, l’empereur lui promit 1 000 marcs d’argent, somme pour laquelle il lui engagea Westhoffen et Balbronn. Sa fidélité au monarque fut encore récompensée en 1305 par l’obtention du droit de ville pour Lichtenberg. En 1307, l’évêque de Metz lui engagea Neuwiller ; puis, en 1308, Johann I acheta le château de Woerth avec ses dépendances au wildgrave Friedrich. Si le nouveau monarque, Heinrich VII von Luxemburg, ne lui renouvela pas la charge de landvogt en 1308, Johann soutint par contre militairement, en 1314, les prétentions au trône de son successeur, Ludwig von Bayern (Louis © de Bavière). Il fut inhumé dans la chapelle castrale de Bouxwiller (son gisant a été détruit à la Révolution).

Iconographie : dessin de la pierre tombale par Lehmann (ABR 36 J.)

10. Hanemann II

(† 16.2.1366). Fils de 8. ∞ 1318 Johanna von Leiningen; 2 enfants légitimes: Heinrich III © 13 et Agnes († après 1367, ∞ I 1344 Simund von Zweibrücken-Bitsch et ∞ II avant 1366 un Saarbrücken). Pratiquement dès son apparition dans les textes en 1310 et pendant près d’un demi-siècle, Hanemann II défraya la chronique par ses incessantes opérations militaires, soit au profit des intérêts de la lignée, soit au service d’autres dynasties ou institutions ; ainsi, on lui connaît une quinzaine de participations à des guerres féodales (parfois contre la branche cadette de la famille et même, à deux reprises, contre son fils Heinrich III). Mais Hanemann II est également célèbre par son idylle, achevée tragiquement, avec Usa, dite de Steinbach, servante auprès de laquelle il trouva, durant de longues années, l’amour que ne put lui inspirer son épouse. En conformité avec les liens qui furent à l’origine de la puissance de la lignée, Hanemann II apporta dès 1314 son soutien armé à l’évêque de Metz Renald. D’autres accords avec ce suzerain confirmèrent la possession du gage de Neuwiller, auquel s’ajouta, avant 1341, celui de la forteresse de Herrenstein dominant cette localité. Il semble que Hanemann II ait procédé, vers 1330, avec son cousin Lüdemann III © 12, à un premier partage du patrimoine. Ces deux seigneurs ayant acheté en 1332 une grande partie des possessions des landgraves de Werd en Basse Alsace, un nouveau partage entre branches aînée et cadette intervint alors, Hanemann II obtenant en particulier la moitié de Gross- Arnsberg et de Brumath. En cette même année, en tant que chef militaire du «Landfrieden», alliance pour la paix publique, il conduisit le siège du château d’Alt-Windstein. En 1336, il obtint du roi Ludwig le droit de ville pour Brumath, avec les mêmes privilèges et droits que Haguenau. A la suite d’un long conflit avec l’Electeur Palatin, en 1339-1341, Hanemann II se reconnut le vassal de ce dernier. En 1341 et surtout en 1359-1360, c’est avec la ville de Haguenau qu’il se trouva aux prises à propos du non respect de droits seigneuriaux à Gries. Après avoir accordé en 1345 un certain nombre de biens à ses trois filles naturelles, Hanemann il se heurta à son fils Heinrich III qui craignait pour l’intégrité du domaine familial. Dès 1346, Heinrich III s’empara de Lisa et de ses filles ; un arbitrage ramena provisoirement la paix, Hanemann II concédant à son fils la jouissance d’un certain nombre de domaines et reprenant la vie commune avec son épouse. Mais ayant à nouveau accueilli Lisa au château de Lichtenberg en 1352 et expulsé sa femme, il vit le château investi par Heinrich III et les comtes de Leiningen ; Lisa fut précipitée dans le vide et Hanemann II emprisonné près d’une année. Soutenant l’empereur Charles IV contre ses opposants, Hanemann II et son neveu Simund © 15 en furent récompensés, notamment en 1349, par l’obtention du droit de conduite de Strasbourg au Breitenstein et la libération de toute dette contractée envers des juifs! En 1354, Hanemann II maria une de ses filles illégitimes, Agnes, à l’écuyer Goetz von Grostein, et installa les deux autres, Cunegunde et Adelheid, comme nonnes à Stephansfeld. Encore en guerre en 1355 avec les Leiningen à propos des domaines sur lesquels était assise la dot de son épouse, il adhéra en 1362, avec son fils, à l’accord déjà conclu au sein de la lignée cadette et prévoyant qu’en cas d’extinction d’une branche, ses biens passeraient à la survivante. Hanemann II fut inhumé à l’abbaye de Neubourg.

11. Johann III

(† 1324). Fils de 9. ∞ 1315 Metza von Saarbrücken; 6 enfants mineurs au décès du père: Johann © 14; Simund © 15; Ludwig (chanoine de Strasbourg, 11346); Adelheid (fiancée d’abord au landgrave Johann von Werd, ∞ 1335 Nicolas de Salm-Puttelange); Metza (nonne à Lichtental) et Heilka († 1384, inhumée à Neubourg). Mort jeune, il n’a pas laissé de grande trace dans l’histoire familiale. En 1319-1323, il était en conflit avec ses neveux, les margraves Friedrich et Rudolf von Baden.

12. Ludemann III

(†1369). Frère de 11. ∞ 1340 Hildegarde von Finstingen (Fénétrange); 6 enfants : Heinrich IV © 16; Adelheid (abbesse de Lichtental, † 15.4.1413), Elisabeth et Walpurge (nonnes à Lichtental), Johann et Metza (restés célibataires). Devenu le tuteur de ses neveux en 1324, Ludemann III, alors chanoine, quitta les ordres en 1325 pour prendre en mains les destinées de la branche cadette. C’est ainsi que vers 1330, il semble avoir procédé avec Hanemann II © 10 au premier partage du patrimoine, puis en 1332, ils firent ensemble l’acquisition de l’important domaine des landgraves de Werd qu’ils se partagèrent également. En 1330, il obtint du roi Ludwig von Bayern (Louis © de Bavière) le droit de marché pour Woerth, ville pour laquelle il reçut les mêmes droits que Haguenau. En 1335, il procéda, avec ses neveux Johann © 14 et Simund © 15, devenus majeurs, à un partage du patrimoine de la branche cadette, par lequel il choisit, en tant qu’aîné, la part comprenant notamment le bailliage de Lichtenau, la moitié de Bouxwiller et de nombreux domaines autour de cette localité, les droits sur le Hattgau, la ville et le château de Woerth avec la moitié de Goersdorf, les fiefs impériaux autour de Niedermodern et Schwindratzheim, des droits nombreux dans le Kochersberg et les châteaux de Hüneburg, Wasenburg et Waldeck. Il fonda alors la branche dite de Lichtenau. Il augmenta le territoire familial par l’acquisition de localités proches de Woerth et d’autres situées au bord du Rhin. En 1361, sur l’entremise de son neveu l’évêque Johann, il convint avec son fils Heinrich IV et son neveu Simund que si l’une des branches de la lignée cadette devait s’éteindre, ses biens reviendraient à la survivante.

13. Heinrich III

(† 1379). Fils légitime de 10. ∞ 1337 Else von Geroldseck ; 2 enfants: Conrad II © 17 et Adelheid (∞ 1357 Heinrich von Hohengeroldseck). En 1347, avec onze chevaliers, il était au service du roi de France Philippe VI à Calais. En désaccord avec son père Hanemann II © 10, il ne semble toutefois pas en avoir tenu rancune à ses sœurs naturelles et donna, en 1354, son accord au don fait par son père à celles qui étaient entrées au couvent de Stephansfeld. En 1359, puis à nouveau en 1361-1362, il était par contre en conflit avec ses parents, les comtes de Leiningen. A partir de 1371, Heinrich III et son fils Conrad apparaissent fortement endettés; ainsi, dès 1372, ils engagèrent la moitié de Gross-Arnsberg. Il est probable que cette situation soit imputable aux nombreuses expéditions militaires auxquelles participa son père, car seule la branche aînée semble avoir eu de telles difficultés. D’ailleurs, c’est à leur cousin Heinrich IV © 16 qu’ils cédèrent en 1377 une part importante de leur patrimoine ; quelques jours après, Heinrich III abandonna tous ses droits à son fils contre une rente annuelle.

14. Johann

Évêque de Strasbourg († Strasbourg 13.9.1365). Fils de 11. En 1330, Hanemann II ©10 et Ludemann III © 12 le présentèrent à l’archidiacre de Strasbourg pour obtenir la cure de Zinswiller. Bien qu’étant l’aîné, il avait donc choisi d’entrer dans les ordres, ce qui semble dénoter une réelle vocation religieuse. En 1336, son frère Simund © 15 lui accorda la jouissance de Schoeneck. En 1337, l’échec de sa candidature à la charge de prévôt du chapitre de Strasbourg, malgré le soutien de l’archevêque de Mayence, fut à l’origine d’une coalition contre l’évêque Berthold von Bucheck ©, lequel fut enlevé et incarcéré durant 16 semaines par les partisans de Johann. En 1339, ce dernier était toutefois devenu prévôt et doyen du chapitre. Chapelain et secrétaire du roi Charles IV, la confiance dont11 semble avoir joui auprès du monarque se traduisit par sa nomination, en 1346, comme représentant de l’Empire en Alsace et dans le Speyergau ; cette considération est aussi affirmée par le choix fait en 1349, par l’archevêque de Trèves, de le nommer vicaire général de son diocèse. En 1350, il fut décidé qu’en cas de décès de l’évêque de Strasbourg Berthold von Bucheck ©, Johann administrerait l’Evêché jusqu’à l’élection d’un nouveau prélat. Et, le 2.12.1353, il fut élu à cette charge. Ce n’est toutefois que le 8.3.1354 qu’il reçut la consécration religieuse et, le lendemain, la consécration épiscopale. Réputé pour sa prudence, sa droiture et sa piété, Johann se montra aussi énergique à l’occasion : on en veut pour preuve l’aide apportée en 1357 au landvogt pour réduire le brigandage qui mettait dans l’insécurité la vallée du Rhin entre Seltz et Hagenbach et, en 1365, il s’engagea à équiper 3 000 hommes lors de l’invasion des Anglais d’Arnaud de Cervolles. En 1356, un conflit armé l’opposa toutefois à la ville de Strasbourg, laquelle assiégea la forteresse de Dachstein et chassa tous ses bourgeois servant dans les châteaux épiscopaux. En 1359- 1360 par contre, c’est aux côtés de la cité qu’il soutint militairement ses parents de Lichtenberg contre la ville de Haguenau. En 1358-1359, il acquit les droits des comtes d’Oettingen, héritiers des Werd, sur le landgraviat de Basse Alsace, essentiellement des droits de justice («Landgericht im Elsass»), mais également des possessions territoriales, dont les châteaux de Werde et de Hohkoenigsburg (ce qui fut à l’origine de querelles avec le duc de Lorraine). En 1354, lorsqu’il partit pour Rome chercher la consécration pontificale, c’est à Simund © 15 qu’il confia l’administration temporelle de l’Evêché. Plus que son parent Conrad © 6, il se préoccupa de la vie spirituelle de son diocèse. Déjà à l’époque où il était prévôt, il fit rédiger un ouvrage sur les fonctions liturgiques de la chorale ; en 1364, il chargea le prébendier de la chapelle Ste-Catherine, Fritsche Closener ©, de rédiger un coutumier liturgique, le Directioriumchori, valable pour la cathédrale et le diocèse tout entier. Entre temps, en 1354, il avait réuni un synode diocésain pour mettre en œuvre d’importantes réformes. Johann fut inhumé à côté de ses parents Conrad et Friedrich © 7 dans la chapelle St-Jean de la cathédrale.
Iconographie : pierre tombale dans la chapelle St-Jean de la cathédrale de Strasbourg.

15. Simund

(† 23.6.1380). Frère de 14. ∞ 1344 Adelheid von Helfenstein; 8 enfants: Johann IV © 18; Adelheid (* 1353, ∞ 1364 le margrave Rudolf von Hachberg); Ludwig (* 19.11.1356 † 6.12.1356); Ulrich (* 18.5.1358 † après 1405, chanoine de Strasbourg); Simund (* 8.2.1361 † après 1406, également chanoine de Strasbourg); Agnes (* 23.3.1363, nonne à Lichtental en 1382); Mathilde (nonne à Lichtental en 1382) et Loretta (citée en 1382). Au partage effectué en 1335 avec son oncle Ludemann III © 12 au sein de la lignée cadette, il obtint un lot comprenant notamment la moitié du château et de la ville de Lichtenberg, Ingwiller, des localités au nord et au nord-est de Lichtenberg ainsi qu’en Alsace Bossue, le château de Schoeneck, la moitié de celui de Gross-Arnsberg, des biens dans le Kochersberg, le gage de Neuwiller, ainsi que la moitié du château et de la ville de Brumath et des villages en dépendant. Ce partage ne semble toutefois pas avoir satisfait les co-signataires puisqu’à la suite de dissensions, Ludemann III s’engagea en 1341 à remettre aux frères Simund et Johann © 14 la part qui leur était due à Arnsberg, Niederbronn et Brumath. En 1337, Simund obtint le droit de ville pour Neuwiller, localité qui fut assiégée l’année suivante par l’évêque Berthold von Bucheck © en raison du soutien apporté par les L. au roi Ludwig von Bayern (Louis © de Bavière). Cette fidélité au monarque ne se démentit pas et, parmi les nombreuses faveurs et privilèges royaux, on peut noter en particulier l’obtention du droit de ville pour Ingwiller en 1345 et, en commun avec Hanemann II © 10, pour Brumath en 1347, ainsi que, la même année, le renouvellement du très lucratif droit de conduite sur la route de Strasbourg au Breitenstein (route de Lombardie vers Cologne). Le milieu du XIVe siècle fut pour les L., et notamment pour Simund, une période faste qui vit encore leur territoire croître notablement par de nouvelles acquisitions ou investitures. En 1349 tout d’abord, Simund reçut le fief castral de Haguenau tenu jusqu’alors par les Wasigenstein qui venaient de s’éteindre. En1350, il acheta le gage de la cour de Mertzwilleret des droits forestiers dans la forêt sainte de Haguenau. C’est ensuite aux Greifenstein © 2qu’il acheta, en 1352, le village d’Ingenheim, fief épiscopal, tandis qu’en 1354-1355, en plusieurs opérations, il entra en possession du village d’Engwiller relevant de l’abbaye de Murbach. En1356, Cunemann Vogt von Wasselnheim lui fit oblation de divers biens dans la vallée de la Sarre (notamment la moitié du château de Saareck). L’accession de son frère Johann au siège épiscopal lui fut particulièrement bénéfique car, après la réception de biens à Epfig et à Weyersheim en 1355, il se vit accorder en1356 le château et le village de Weisweil en Bade. En 1358 surtout, ce fut l’obtention de lacharge de maréchal de l’Evêché de Strasbourg à laquelle se rattachaient de très nombreuxdroits et cens; en la même année lui fut aussi accordé le fief de Huttenheim. En 1364 enfin, il fut associé aux Geroldseck © dans la possession du fief de Hoerdt et Bietlenheim. En 1359,en outre, les comtes d’Oettingen lui remirent les sujets, biens, droits et fiefs relevant du landgraviat de Basse Alsace et, surtout, lui cédèrent le fief de la « Grafschaft » de l’Uffried, ensemble de droits de haute-justice sur une dizaine de localités situées le long du Rhin, au sud de Seltz.Après avoir encore acheté en 1363 la moitié de Volksberg, Simund fut mis en possession l’an-née suivante des fiefs messins de Dettwiller. A partir de 1374, il profita également des difficultés financières de la branche aînée pour accroître son propre apanage. Naturellement,cette politique expansionniste n’alla pas sans quelques accrocs avec les seigneuries voisines.Ainsi, en 1365-1366, Simund fut attaqué par les comtes de Zweibrücken-Bitsch, alors qu’en1355-1356, c’est aux Fleckenstein © que l’op-posa un différend concernant leurs droits respectifs dans le Hattgau. Il s’agit de la première escarmouche avec cette lignée qui, peu à peu,essaya de contester leur suprématie dans cette région. Simund fut inhumé dans la chapelle St-Nicolas de l’abbaye de Neuwiller.

16. Heinrich IV

(† 18.11.1393). Fils de 12 ∞ 1364 Adelheid von Veldenz; 3 enfants: Ludwig IV © 19; Johann (fit des études à Paris, chanoine à Cologne, †après 1424) et Hildegarde (∞ avant 1397 lecomte Simund III von Zweibrücken-Bitsch). En 1370, il reçut le fief impérial du droit de conduite de chaque côté du Rhin, depuis Strasbourg jusqu’à Lichtenau sur la rive droite et jusqu’à Offendorf sur la rive gauche; il lui fut également renouvelé la possession des péages sur le fleuve à Lichtenau et Greffen. En 1374, il soutint son beau-père, le comte Heinrich von Veldenz, contre d’autres parents, les sires de Hohen-Geroldseck ©. En 1377, son cousin Conrad II ©17 lui engagea plusieurs localités proches d’Ingwiller. Pourtant, à partir de 1378, il apparaît lui aussi avoir été assailli par des soucis de trésorerie et engagea à Ulrich von Finstingen (Fénétrange © 5) son château et la moitié de la ville de Brumath, de l’avouerie de Stephansfeld et d’une dizaine de localités proches. En 1383,c’est le château et la ville de Neuburg qu’il dut engager à l’Electeur Palatin Ruprecht I (auquel il céda encore la moitié de Goersdorf). En 1393,il engagea à l’abbé de Seltz la moitié du château et de la ville de Woerth, avec les villages et justices en dépendant; ceci pour ne citer que les principales aliénations. Pourtant, en 1384, il acquit un quart d’Alt-Windstein et, en 1387, il devint, avec d’autres chevaliers, co-propriétaire d’un huitième du château de Lützelstein (La Petite-Pierre). En 1388, une guerre féodale contre le comte Henri de Blâmont et, la même année, une querelle avec la ville de Strasbourg, laquelle dévasta Pfaffenhoffen, n’arrangèrent pas une situation financière de plus en plus difficile. Mais vivant sur les revenus de l’importante fortune construite par ses ancêtres, il ne se modéra pas; ainsi, en 1390, il était en lutte avecles comtes de Leiningen et, en 1392, il prit encore part à la guerre menée contre la ville de Strasbourg et prescrite par le roi Wenceslas. Heinrich IV semble avoir été inhumé en l’église de Bouxwiller.

17. Conrad II

(† 30.4.1390). Fils de 13. ∞ 1371 Jeannette deBlâmont; 2 fils, morts en bas âge, et 1 fille, Elisabeth (∞ 1394 Walter IV von Hohen-Geroldseck). Il hérita de son père un patrimoine grevé de dettes, situation qui explique que celui-ci lui ait cédé ante mortem toutes ses possessions en 1377 contre une rente annuelle; pour pouvoir payer celle-ci, Conrad II dut engager diverses localités à son oncle Heinrich IV © 16,puis en faire de même avec d’autres droits et biens par la suite. La crainte que cette situation n’ait des conséquences graves incita peut-être Johann IV © 18 à signer avec Conrad, en 1380,un accord par lequel celui-ci promit de ne pas vendre ou céder sa part du château de Lichtenberg et de ne rien y changer. Par ailleurs, un conflit armé l’opposa en 1379 aux copropriétaires du château de Gross-Arnsberg, les Kützelsheim, dont il parvint à s’emparer. Il fut inhumé dans la chapelle St-Nicolas de l’église de Neuwiller. Avec Conrad II s’éteignit la branche aînée des L.

18. Johann IV

(* 20.12.1349 † 23.8.1405). Fils de 15. ∞ 1370 Loretta von Zweibrücken-Bitsch; 1 fils et 5 filles, dont Adelheit († après 1420, ∞ 1396 Johann vonFinstingen); les autres, Eisa († après 1435), Agnes, Loretta et Catharina (toutes décédées avant 1425) furent nonnes au couvent Ste-Claire de Strasbourg. Lorsque l’on étudie la viede Johann IV et son action politique, on est frappé par l’alternance de prêts et d’engagements, d’acquisitions et de cessions, qui donnent l’impression d’une grande instabilité dans la situation financière de la lignée. En 1380, il prêtadeux fois des sommes importantes à l’évêquede Metz, gagées sur Neuwiller et Herrenstein. En 1384, on apprend qu’il avait été au service du roi de France Charles VI. En 1383, bourgeois forain de Strasbourg, il avait signé une convention avec la ville par laquelle il mettait ses forteresses à sa disposition, ceci pour une durée de dix années. En vertu de cette alliance, une querelle qui l’opposait depuis longtemps à Hansvon Bitsch dit Albe et à Hennel Streif von Landenberg se termina en 1386 par une expédition militaire conduite par la ville de Strasbourg contre les châteaux de Loewenstein et Niedermotherburg. Est-ce en raison de cette guerre féodale, dont on sait qu’elle coûta fort cher, que Johann IV eut des problèmes de tré-sorerie? Toujours est-il qu’en 1388, avec son fils Simund, il engagea le château, la moitié de la ville de Brumath et les villages de la seigneurie aux bourgeois de Strasbourg Hans Bock etPeter Museler. Cette localité fut d’ailleurs dévastée en 1389 lors d’une guerre mettant auxprises l’Electeur Palatin Ruprecht et la ville deStrasbourg et dans laquelle Johann IV était impliqué. En 1390, à la mort sans héritier de son cousin Conrad II © 17, Johann IV hérita, envertu des accords familiaux passés, la moitié deses possessions. Mais aussitôt, il se trouva enconflit avec la veuve, Jeannette de Blâmont, laquelle n’entendait pas renoncer aux biens accordés en douaire et élevait même des prétentions sur l’héritage en faveur de sa fille Elisabeth, épouse de Walter von Hohen-Geroldseck. En 1391, J. dut engager à l’Electeur Ruprecht le quart de sa part de Goersdorf et le quart du château de Hatten etdes localités du Hattgau. Puis, en 1393, il engageait Zutzendorf aux Fleckenstein ©. Pourtant, cette même année, c’est l’évêque de Strasbourg qui se reconnut son débiteur et, ne pouvant payer ses dettes, engagea à Johann IVet à Heinrich IV © 16 sa part de la seigneurie de Geroldseck-Marmoutier. D’autres acquisitions par voie de gage et rachats indiquent alors une situation plus saine. Commandant des troupes de l’évêque de Strasbourg, en guerre contre le margrave Bernhard von Baden, Johann IV assiégea et enleva en 1401 la localité et le château de Guémar. Il fut inhumé dans la chapelle St-Nicolas de l’église de Neuwiller. Avec lui s’éteignit la branche cadette fixée à Lichtenberg.

19. Ludwig IV

(† sans doute à Bouxwiller 28.8.1434). Fils de 16. ∞ vers 1412 Anna von Baden; 2 fils légitimes, Jakob © 20 et Ludwig V © 21, et 2 filles illégitimes, Dyna (∞ 1417 Heinrich Mey von Lambsheim) et Margaretha (∞ 1425 Wilhelmvon Mittelhausen). Dès sa prise en mains de la destinée de la branche de Lichtenau, Ludwig IV fut confronté à des prétentions sur l’héritage familial de la part de Walter von Hohen-Geroldseck, époux de la fille unique de Conrad II © 17; ce conflit ne fut arbitré qu’en 1416, Ludwig IV étant obligé d’admettre Walter dans la communauté de Bouxwiller. En 1395, il engagea le quart du château et de la ville deLichtenau et le quart du château de Willstätt à l’Electeur Palatin Ruprecht II; mais dès 1399, c’est à la ville de Strasbourg qu’avec son frèreJohann, il engagea le château et la moitié de la ville de Lichtenau. Le rapprochement avec les comtes palatins, avec lesquels les relations n’avaient pas toujours été des meilleures, est confirmé en 1400 par l’engagement à l’Electeur Ruprecht III d’un quart de Woerth; et, en 1401, Ludwig IV figura dans la suite de celui-ci, devenu roi, à Augsbourg. En cette même année, ilparvint à racheter sept localités le long du Rhin engagées par son père. En 1405, au décès deson cousin Johann IV © 18, il réunit à nouveau l’ensemble du territoire familial. C’est alors qu’il reçut la première investiture connue pour les fiefs relevant de l’Evêché de Metz. L’apothéose de cette période faste aurait dû être, en 1409, son mariage avec Anna, fille du margrave Bernhard von Baden. Mais ayant participé à l’expédition de l’évêque de Strasbourg Wilhelmvon Diest © contre la ville de Trêves, il fut fait prisonnier et retenu trois années en captivité; il fut relâché contre une rançon de 30000 florins. Ceci allait porter un coup terrible à la politique territoriale que Ludwig semble avoir voulu relancer; dès 1412, il engagea à son beau-père la moitié de Lichtenau et les 18 villages de la seigneurie, ainsi que le bailliage de Willstàtt. En 1420, Ludwig IV acquit, tour à tour, la moitié des droits sur les châteaux de Kagenfels et de Klein-Arnsberg. En 1421 fut arbitrée une guerre qui l’avait opposé à Hartung von Wangen, à l’issue de laquelle ce dernier se reconnut son vassal et acceptait de le recevoir dans sa part du château de (Gross-) Geroldseck. On apprend également qu’en 1427, Ludwig IV était seigneur des châteaux d’Ehnwihr et Rathsamhausen et de Muttersholtz, Eschau, Diebolsheim, et possédait le patronage de Plobsheim, possessions dont on ne connaît pas l’origine. En 1428, Ludwig IV fut partie prenante dans une guerre entre la noblesse et la ville de Strasbourg. Ayant, en tant qu’avoué de la ville, le libre passage sur le pont du Rhin, il fut chargé de s’emparer de celui-ci pour faire diversion, permettant aux coalisés de prendre la ville à revers. Mais si la première partie du plan réussit, la prompte réplique des bourgeois repoussa Ludwig IV surla rive badoise alors que l’attaque contre les murs fut un échec. Les Strasbourgeois se vengèrent en 1429 en envahissant le bailliage de Lichtenau, incendiant sept villages. N’ayant reçu aucun soutien de ses alliés, Ludwig IV conclut la paix avec Strasbourg, ce dont lescoalisés lui tinrent rigueur, l’accusant d’avoir trahi les termes de leur alliance. Est-ce par dépit ou par honte (certains prétendent même qu’il devint fou), toujours est-il qu’il abandonna en cette année la régence de son domaine à ses fils, encore mineurs, lesquels furent placés sous la tutelle du comte Friedrich von Moers-Saarwerden. Ludwig IV se retira au château de Bouxwiller; il fut inhumé dans l’église d’Ingwiller où ses fils lui firent élever un magnifique tombeau.

20. Jacob

(* 25.5.1416 † Ingwiller 5.1.1480). Fils de 19. ∞ 1429 Walpurge von Moers-Saarwerden. Après avoir été placé sous la tutelle de Friedrich von Moers-Saarwerden, Jacob fut déclaré majeur en 1431. Les premières années furent consacrées à l’acquisition ou plutôt au rachat de biens engagés par ses ancêtres. Parallèlement, il semble avoir entrepris de dresser un inventaire de l’ensemble de ses fiefs; en 1434-1435 furent rédigés plusieurs dizaines de renouvellements de fiefs, lesquels nous donnent une liste très complète de ses nombreux vassaux. En 1440, Jacob et Ludwig V © 21 procédèrent à un partage de leur domaine, le château ancestral restant possession commune. Jacob obtint notamment les bailliages de Bouxwiller, Woerthet Willstätt et les châteaux de Hüneburg et Schoeneck; ce document est le premier nousapprenant que le domaine familial se trouvaitmaintenant divisé en bailliages («Vogteien»), cequi semble être un indice de plus de cette réorganisation administrative entreprise par Jacob. L’année précédente, ayant adhéré avec sonfrère à l’alliance devant s’opposer aux Armagnacs qui menaçaient d’envahir l’Alsace, Jacob fut le premier à essayer de leur résister; mais ses troupes furent massacrées dans les forêts autour de Saverne, et il dut venir se réfugier à Steinbourg. En 1450 éclata un violent conflit à l’origine duquel se trouvait une plainte du comte Schafried von Leiningen à propos d’exactions des L. envers ses sujets et fonctionnaires, les accusant de vouloir les expulser deBrumath. Ne recevant aucune réponse à ses lettres de protestation, Schafried ouvrit les hostilités en pillant des possessions de ses ennemis. Aussitôt, cette querelle embrasa toute larégion, depuis la Sarre jusqu’au Rhin; les L. reçurent alors l’appui du margrave Jacob vonBaden, des comtes de Lützelstein ©, des Finstingen (Fénétrange ©), du comte Ruprecht von Saarbrücken, de Wirich II Puller vonHohenburg ©, des sires de Dahn, etc. Le 5.6.1451, sur le champ de bataille deReichshoffen, les L. et leurs alliés remportèrent une victoire décisive, s’emparant des deux principaux opposants, Schafried et Georg von Ochsenstein, ainsi que de 71 nobles et 52 hommes d’armes. Pour payer ses alliés et vassaux, Jacob engagea alors le huitième de toute sa seigneurie au margrave de Bade. Mais il entendait bien se refaire financièrement grâce à la rançon que devaient payer ses deux principaux rivaux. S’il accepta de relâcher Georg von Ochsenstein contre la promesse de livrer 20000 florins ou de venir à nouveau se constituer prisonnier, il refusa de libérer Schafried von Leiningen pour lequel ses frères et parents avaient pourtant proposé de livrer une somme de 50000 florins. Tous les épisodes qui s’ensuivent montrent qu’en fait, les L. vouaient une haine féroce envers Schafried. Ainsi, si l’évêquede Strasbourg parvint en 1452 à un accord sur sa libération contre son renoncement à Brumath et à tous les anciens biens des L. acquis des Finstingen, il ne fut pas relâché pour autant, seuls 20 de ses vassaux l’étant contre 14000 florins. En cette même année, l’Electeur parvint bien à libérer Schafried lors d’un coup de main contre le château de La Petite Pierre où il setrouvait au cachot, mais coups de main et procédures se poursuivirent. Entre temps, en 1454,un accord intervenu avec Georg von Ochsenstein permit aux L. d’obtenir une part de la seigneurie de Geroldseck-Marmoutier. En 1457, Jacob réussit à s’emparer à nouveau de la personne de Schafried, bien que celui-ci eut voyagé sous droit de conduite impérial; puis il fit enlever Georg von Ochsenstein à Haguenau, lequel vint rejoindre le sire de Leiningen dans les geôles de Lichtenberg. Les missives adressées par l’empereur Friedrich III ne parvenant pas à faire libérer les prisonniers, les L. furent mis au ban de l’Empire le 14.2.1459. Or, le 3.12.1458, Jacob venait de recevoir de l’empereur, pour services déjà rendus et à venir, le titre de comte. Dans ces conditions, on peut comprendre que leur bannissement n’ait guère inquiété les L. Toutefois, Schafried et Georg furent finalement relâchés. En 1461, Jacob, qui se serait plus ou moins trouvé sous la coupe de sa maîtresse (il était veuf depuis 1450), une paysanne prénommée Barbara (Barbel ©), entra en conflit avec son frère. En 1462, une augmentation des redevances ayant été édictée sous la pression de Barbara, les sujets de Bouxwiller se soulevèrent et se tournèrent vers Ludwig V, lequel reçut l’appui des Strasbourgeois. Acculé, Jacob dut signer une convention par laquelle il gardait la seigneurie àtitre viager mais en promettant de ne rien céder sans l’accord de son frère: de plus, il dut accepter le départ de Barbara, exilée à Spire. Jacob s’était donc, pour la première fois, vu fortement contesté dans sa gestion des affaires familiales, non seulement par ses sujets, mais aussi parson frère et même ses pairs. Selon de nombreux auteurs, l’explication de ces carences viendrait (mais les preuves sont encore à fournir) du fait que dès son jeune âge, il préférait s’adonner davantage à l’alchimie, à l’astronomie et à la nécromancie. En tout cas, il semble avoirent revu le risque de se voir dessaisi de ses prérogatives car, en 1463, pour assurer sa sécurité, il plaça toutes ses possessions sous la protection spéciale du roi de France Louis XI. Néammoins, en 1464, jugeant sa régence préjudiciable à la seigneurie de Lichtenberg, l’Electeur Palatin occupa Woerth, Balbronn et les châteaux de Plüneburg et Schoeneck. En 1466, Jacob était toujours en conflit avec son frère, celui-ci ne lui ayant pas encore restitué Willstätt pris de force; en cette année, ils conclurent toutefois un accord de paix parlequel le bailliage de Willstätt lui fut rendu mais où il fut spécifié qu’en raison de sa mauvaise gestion, le reste du domaine familial serait administré par son frère. Finalement, ce n’est qu’en 1470, Ludwig V sentant sa mort prochaine, que les deux frères se réconcilièrent, les filles de Ludwig étant désignées comme les seules héritières du patrimoine. Ludwig V étant décédé en 1471, Jacob signa un accord avec les gendres de celui-ci. Simund Wecker IV von Zweibrücken-Bitsch et Philipp I von Hanau © 1, lesquels pouvaient, dès lors, jouir d’une partie des biens promis à leurs épouses. En 1472, Jacob fit restaurer le château d’Ingwiller où il s’installa; en 1473, bien que toujours au ban de l’Empire, il était présent à Strasbourg lors de l’accueil de l’empereur Friedrich III. Finalement, c’est en 1474 que Jacob, apportant au monarque son soutien contre Charles le Téméraire, fut libéré de son bannissement. Après avoir obtenu de l’évêque de Metz et de l’empereur que leurs fiefs fussent transmissibles à ses deux nièces et à leurs époux, Jacob mourut et fut inhumé à l’église de Reipertswiller, dont il venait de faire reconstruire la nef et le chœur; son monument funéraire fut détruit sous la Révolution.
Iconographie : Tête d’homme (vers 1465) attribuée à NicolasGerhaert © de Leyde et qui, selon certains, représenteraitJacob von L. (conservée au Musée de l’Œuvre Notre-Dame).

21. Ludwig V

(* 12.5.1417 † 25.2.1471). Frère de 20. ∞ 1441 Elisabeth von Hohenlohe; 2 filles: Anna (*25.10.1442 † 1474, ∞ 1458 Philipp I von Hanau© 1) et Elisabeth (* 9.4.1444 † 1495, ∞ 1464 SimundWecker IV von Zweibrücken-Bitsch). Devenu majeur en 1433, il affirma très précocement son goût pour l’action. En 1440, le partage effectué avec son frère Jacob © 20 luidonnait les bailliages d’Ingwiller, Goersdorf, Brumath, Westhoffen, Hatten, Lichtenau, la seigneurie d’Oberhoffen, les droits sur l’Uffried, etc. En 1442, puis à nouveau en 1449, des querelles l’opposèrent aux Fleckenstein © dans leurs biens communs de l’Uffried, puis duHattgau. C’est en revenant d’un pèlerinage à Rome, vers Pâques 1450, qu’il reçut les lettres de revendication de Schafried von Leiningen qui marquèrent le début de la lutte mettant aux prises les deux lignées et leurs alliés. Pour financer ces opérations militaires, il fut amené à engager alors tous ses serfs, revenus et droits dans l’Uffried à Friedrich von Fleckenstein. Par la suite, toutefois, il parvint à acquérir un certain nombre de domaines qui agrandirent encore l’immense territoire des L. En 1454, Ludwig V était en guerre avec la ville de Cologne et, en la même année, il s’opposa à l’évêque de Strasbourg Ruprecht qui le mit au ban et le déposa de ses fonctions de conseiller et serviteur (bannissement levé en 1455 par le pape Calixte III). Aux côtés de la ville de Strasbourg et de Wirich II Puller von Hohenburg ©, il enleva Mutzig au prélat. En 1460, Ludwig V était retenu prisonnier par son rival, le margrave Karl von Baden. En 1461, c’est avec le comte d’Eberstein que sont attestés des faits d’armes; en cette même année, Ludwig V détenait prisonnier à Lichtenberg le sire Richard Puller von Hohenburg © 4. En 1462, Ludwig V se plaça sous la protection de l’Electeur Palatin Friedrich I, auquel il promit son soutien et auquel il céda en 1463 sa moitié des châteaux de Gutenburg et Minfeld et les trois quarts des villages en dépendant, biens que Schafried von Leiningen venait tout juste de lui abandonner. La faveur dont Ludwig V jouissait auprès de l’Electeur fut confirmée par la remise, en 1466, du fief du château de Nieder-Wasigenstein (dont LudwigV fut d’ailleurs obligé d’entreprendre le siège en 1468, d’autres ganerbes y ayant enfermé l’un de ses sujets). À cette époque, Ludwig V soutint encore activement l’Electeur contre Ludwig vonVeldenz, mais il est possible qu’il ait été malade dès 1469, n’étant pratiquement plus cité dans les documents. De plus, dès 1468, en prévision de sa succession, il obtint le principe que les enfants d’une de ses filles éventuellement décédées aurait les mêmes droits que les enfants dela fille survivante. En 1470, il convint encore de sa succession avec son frère. Il fut inhumé dans la chapelle St-Nicolas de Neuwiller (son gisant a été transféré au Musée de l’Œuvre Notre-Dame). Ses deux filles représentent la dernière génération des L.
Iconographie : pierre tombale de Ludwig V (conservée auMusée de l’Œuvre Notre-Dame).

J.G. Lehmann, Urkundliche Geschichte der Grafschaft Hanau-Lichtenberg, I-II, Mannheim, 1862-1863; L.A. Kieffer, Pfarrbuch der Grafschaft Hanau-Lichtenberg, Strasbourg, 1890; Sitzmann II, 158-165 (erreurs); M. Krebs, Konrad vonLichtenberg, Bischof von Strassburg (1273-1299), Francfort/Main, 1926; F. Eyer, Das Territorium der Herren von Lichtenberg 1202-1480, Strasbourg, 1938; L. Clemm, Die Lichtenbergische Teilung von 1335, ELJb 20, 1942, p. 57-70; J. Walter, Zur Deutung der «Schönen Bärbel», ibidem, p. 388-393; F. Eyer, Regesten zur Territorialgeschichte der Herrenvon Lichtenberg, dactyl., 1943; EA VIII, 1984, p. 4740 et s.; P.K. Weber, Lichtenberg. Eine elsässische Herrschaft auf dem Weg zum Territorialstaat. Soziale Kostenpolitischer Innovationen, Schriften der Erwin-von-Steinbach-Stiftung Frankfurt am Main, 12, Heidelberg, 1993; F. Battenberg, Lichtenberger Urkunden. Regesten zu den Urkunden-beständen und Kopiaren des Archivs der Grafen von Hanau-Lichtenberg, à paraître en plusieurs vol. à partir de 1995.

Jean-Michel Rudrauf (1995)