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LEVAILLANT Isaïe (Isayas)

Préfet, journaliste, (I) (★ Plégenheim 6.4.1845 d. Paris 24.10.1911).

Fils de Joseph L., marchand de chevaux, et de Régine Lévy. ∞ Pauline Ségal, d’origine suisse. Il fit des études secondaires au lycée de Colmar, puis, comme ses parents le destinaient au rabbinat, à l’école préparatoire du Séminaire rabbinique de Paris. A partir de 1866, il fut professeur, puis directeur de l’Ecole normale israélite de l’Alliance israélite universelle, qui formait à Paris des maîtres pour ses écoles du Proche-Orient. Il aida à cette époque Ernest Renan dans ses travaux sur le judaïsme et il collabora au périodique Archives Israélites. Militant républicain proche de Gambetta ©, il aurait abandonné l’enseignement pour devenir journaliste à la fin du Second Empire. Installé à Nevers, il y fonda le 26.10.1872 le trihebdomadaire La République, dont il fut le rédacteur-gérant jusqu’au 1.1.1878. En cette qualité, il fut condamné au cours de la campagne électorale de l’automne 1877 à 45 jours de prison pour outrage au président de la République Mac-Mahon ©. Il fut aussi de 1874 à 1878 conseiller municipal de Nevers. Après la victoire des républicains, il fut nommé en 1878 sous-préfet de Saint-Claude, Jura. Il fut ensuite successivement préfet de la Nièvre, de la Haute-Savoie, du Doubs, enfin préfet-secrétaire général du département du Rhône. En 1885, le premier gouvernement Brisson le nomma directeur de la Sûreté générale. En cette qualité, il fut chargé de l’expulsion des princes d’Orléans et de la surveillance du général Boulanger. Le 11.4.1888, il fut mis en disponibilité à la suite de la formation du gouvernement Floquet. Il cautionna le 15.5.1888, moyennant une part de 10 % dans les bénéfices, son beau-frère Juan Ségal, dit Séguin, associé à Buenos-Aires à deux frères, Abraham et Armand Schwob, « originaires d’Alsace ». Le 8.8.1888, il fut nommé trésorier-payeur général de la Loire. A la suite de la déconfiture des Schwob, il fut accusé en février 1895 d’avoir profité de sa fonction pour intervenir auprès des magistrats en faveur de ces personnages douteux. A la suite d’une campagne de presse, il fut révoqué par le gouvernement Ribot. Redevenu journaliste, il devint rédacteur en chef de L’Univers israélite, dont il signait les éditoriaux des initiales B. M. (1896- 1906). Il fut l’un des fondateurs et sans doute le secrétaire du Comité de défense contre l’antisémitisme créé à la suite de l’affaire Dreyfus ©. Membre du Consistoire central des Israélites de France (1905-1911) et du comité central de l’Alliance israélite universelle (1902-1911), il condamnait la tendance de la communauté juive à la passivité face à l’antisémitisme. En revanche, il s’opposa dès 1897 à l’« utopie » sioniste, car il estimait que la France reviendrait « aux principes sacrés de la Révolution » et qu’il n’y avait pas lieu d’envisager le départ en Palestine des juifs français. Il participa aux négociations entre le Consistoire et les pouvoirs publics pour l’application de la loi de séparation des Eglises et de l’Etat de 1905 au culte juif. Officier de la Légion d’honneur (1885). Sa fille, Berthe, épousa un sous-préfet, Fernand Torrès : ils eurent un fils Henry Torrès (? Les Andelys, Eure, 17.8.1891 d. Paris 1966) ; la mort précoce de Mme Torrès en 1892 amena de violentes disputes au sujet de l’éducation de cet enfant entre le beau-père et le gendre, qui entraînèrent de nombreux procès. Ce petit-fils allait devenir avocat, député, sénateur, auteur dramatique.

 

Traducteur de O. Labreich, L’hydrate de chloral, Paris, 1870 ; auteur de : Ma justification, Lettre aux journaux : notes complémentaires et pièces justificatives, Paris, 1895 ; La genèse de l’antisémitisme sous la Troisième République, Paris, 1907.

AN, F 1 B 1558, dossier Levaillant ; Archives de la Préfecture de police de Paris, dossier I. Levaillant, B 1155 ; Lettre des AHR du 15.9.1993 ; Almanach National, 1881-1885 ; E. Drumont, La France juive. Essai d’histoire contemporaine, 34e édition, Paris, s.d., I, p. 16, 73, 78, II, p. 419-421 ; L’Autorité du 8.2.1895 ; Le Matin du 10.2.1895 ; Journal officiel, Débats de la Chambre des députés, février 1895 ; La Libre Parole des 18.2.1895 et 26.11.1902 ; L’Action française du 24.10.1911 ; L’Univers israélite des 27.10. et 3.11.1911 ; Archives Israélites des 26.10. et 2.11.1911 ; Bulletin mensuel de l’Alliance israélite universelle, décembre 1911 ; H. Torrès, Souvenir, souvenir : Que me veux-tu ? , Paris, 1964 ; The Universal Jewish Encyclopedia VI, New York, 1969, p. 217 ; Encyclopaedia Judaica XI, Jérusalem, 1971, p. 66 ; M. Marrus, Les Juifs de France à l’époque de l’affaire Dreyfus, Paris, 1972 ; G. Thuilier, La situation religieuse en 1879-1881, Mémoires de la Société académique du Nivernais, 1979 ; H. Dutrait-Crozon, Précisée l’affaire Dreyfus, édition définitive, fac-similé de l’édition NLN 1924, Paris, 1987, p. 98 (qui prétend à tort que son vrai nom était Volgemuth Isaïas) ; P. Birnbaum, Les Fous de la République. Histoire politique des Juifs d’Etat de Gambetta à Vichy, Paris, 1992 (erreurs fréquentes pour la chronologie) ; Maitron XXXXII, 1992, p. 260 (notice Torrès Henry) ; P. Albert (présenté par), Documents pour l’histoire de la presse de province dans la seconde moitié du XIXe siècle, Paris, s.d., p. 98- 99.

Léon Strauss (1995)